LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Orléans, 15 mars 2018), qu'à la faveur d'un démarchage à domicile, M. et Mme F... (les emprunteurs) ont, suivant bon de commande du 10 septembre 2012, acquis de la société Rev'solaire (le vendeur) des panneaux photovoltaïques, un kit éolien et l'isolation des combles de leur habitation, pour le prix de 56 400 euros financé par un contrat de crédit affecté souscrit, le même jour, auprès de la société Financo (le prêteur) ; que, soutenant que l'attestation de fin de travaux comportait des réserves et que les fonds avaient été débloqués en vertu d'une attestation dont ils n'étaient pas signataires, les emprunteurs ont assigné le prêteur en résolution du contrat de prêt ; que celui-ci les a assignés en remboursement de sa créance, tout en limitant, en cause d'appel, sa demande au remboursement du seul capital, dans l'hypothèse où une faute serait retenue à sa charge lors de sa remise des fonds au vendeur ;
Attendu que les emprunteurs font grief à l'arrêt de les condamner solidairement à payer au prêteur la somme de 56 400 euros, augmentée des intérêts au taux légal, sous déduction des échéances déjà versées, alors, selon le moyen :
1°/ que le prêteur qui commet une faute lors de la libération des fonds ne peut prétendre au remboursement du capital emprunté, peu important que l'emprunteur n'ait subi aucun préjudice ; qu'il résulte des constatations auxquelles la juridiction du second degré a procédé que le prêteur s'est libérée des fonds à tort, en exécution d'une attestation de livraison constitutive d'un faux grossier ; qu'en décidant que le contrat principal avait été correctement exécuté par la livraison de l'installation photovoltaïque dont les emprunteurs demeuraient propriétaires et que les combles de leur maison avaient été aménagés, sous réserve de désordres mineurs, après avoir affirmé que les articles L. 312-48 et L. 312-49 du code de la consommation n'édictaient pas une sanction de déchéance du droit à réclamer paiement des sommes dues lorsque la livraison du bien ou la fourniture de la prestation est réellement intervenue, qu'une faute, quelle qu'elle soit, n'entraînait une sanction que lorsqu'elle a causé un préjudice né et actuel, et que l'établissement de crédit n'était privé de sa créance de restitution du capital emprunté que dans la seule hypothèse où le bien n'avait pas été livré, ce qui n'était pas le cas des emprunteurs, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations d'où il résultait que le prêteur était privé de sa créance de restitution du capital emprunté du seul fait qu'il avait commis une faute en libérant à tort les fonds versés, peu important que les emprunteurs ne justifient pas du préjudice qu'il leur avait causé par sa faute ; qu'ainsi, elle a violé les articles L. 312-48 et L. 312-49 du code de la consommation ;
2°/ que le prêteur qui commet une faute lors de la libération des fonds ne peut prétendre au remboursement du capital emprunté, peu important que l'emprunteur n'ait pas obtenu l'annulation du contrat principal ; qu'en affirmant que la faute de la banque n'était pas sanctionnée par la perte de créance de restitution du capital emprunté dans l'hypothèse où le contrat principal avait été correctement exécuté par la livraison de l'installation photovoltaïque dont les emprunteurs demeuraient propriétaires, à défaut d'en avoir obtenu l'annulation, la cour d'appel a déduit un motif inopérant, en violation des articles L. 312-48 et L. 312-49 du code de la consommation ;
Mais attendu qu'après avoir relevé que le contrat de vente a été correctement exécuté et n'est pas annulé, l'arrêt constate que les emprunteurs ne contestent pas bénéficier des travaux d'isolation des combles et d'une installation en parfait état de marche, pour laquelle ils ont obtenu une attestation de conformité du consuel ; qu'ayant souverainement déduit de ces constatations que les emprunteurs ne subissaient aucun préjudice consécutif au versement des fonds par le prêteur sur la foi d'une attestation portant une signature litigieuse et, statuant dans la limite de la demande de celui-ci, à l'encontre duquel elle retenait une faute d'imprudence, la cour d'appel n'a pu que condamner les emprunteurs à rembourser le capital emprunté, assorti des intérêts au taux légal à compter du prononcé de l'arrêt ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. et Mme F... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette leur demande et les condamne in solidum à payer à la société Financo la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux mai deux mille dix-neuf.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Boullez, avocat aux Conseils, pour M. et Mme F...
Le pourvoi fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR condamné solidairement M. et Mme F... à payer à la société FINANCO la somme de 56.400 €, augmentée des intérêts au taux légal, sous déduction des échéances qu'ils auraient éventuellement versées ;
AUX MOTIFS QU'aux termes de l'article L. 311-31 du code de la consommation, les obligations de l'emprunteur ne prennent effet qu'à compter de la livraison du bien ou de la fourniture de la prestation ; qu'il est démontré, par la communication opérée par FINANCO elle-même que le prêteur a remis les fonds à la prestataire sur la foi de deux documents agrafés ensemble ; que le premier de ces documents est un procès-verbal de réception qui indique, contrairement à ce qu'écrit l'appelante, que la réception a été réalisée avec réserves ; que la case pré-imprimée destinée à mentionner ces réserves n'a cependant pas été remplie, ce qui s'explique par la production d'un procès-verbal plus complet que Monsieur et Madame F... ont approuvé et qui mentionne tous les désordres à reprendre ; que le second document reçu par FINANCO est une attestation de fin de travaux sollicitant le paiement de REV'SOLAIRE mais que, sans qu'il soit nécessaire d'en analyser ici en détail les termes, au demeurant imprécis, il ne peut qu'être observé que la signature qui y a été portée est radicalement différente de celle figurant sur le premier document ; que la vérification d'écritures à laquelle la cour a procédé à la demande de Monsieur et Madame F... ne laisse aucun doute sur le fait qu'aucun d'eux n'a porté la signature sur la demande de libération des fonds sur laquelle figure une signature sans aucun rapport avec celle de l'un des emprunteurs ; que si cette cour a eu l'occasion de juger que l'établissement prêteur n'a pas à procéder à une vérification d'écritures, c'est uniquement dans des espèces dans lesquelles les pièces qui lui étaient transmises ne lui permettaient pas de soupçonner l'existence d'un faux ; que, dans le cas présent, le simple vue des deux signatures figurant sur des documents adressés ensemble à FINANCO et agrafés l'un à l'autre ne pouvait que conduire une personne, même peu attentive, à constater la totale dissemblance entre elles et ce d'autant plus que le prêteur ne pouvait que s'étonner de recevoir un procès-verbal de réception avec réserves sans indication de ce qu'étaient ces réserves ainsi qu'une demande simultanée de paiement alors que les réserves n'étaient pas levées ; que FINANCO aurait donc pu et dû constater que cette demande était un faux grossier ; que, s'il ne pouvait être retenu que l'absence de raccordement au réseau ERDF rendait la livraison imparfaite puisque ce raccordement n'était aucunement compris dans la prestation de travaux incombant à REV'SOLAIRE, il résulte de ces anomalies manifestes que FINANCO devait s'assurer que le vendeur avait exécuté la totalité des prestations convenues dans le bon de commande et qu'aucun désordre ne subsistait ; qu'en libérant imprudemment les fonds, sans solliciter d'explications complémentaires, FINANCO a donc commis une faute ; que les époux F... prétendent sans pertinence qu'ils n'ont pas à démontrer l'existence d'un préjudice au motif que les dispositions de l'article L. 311-31 du code de la consommation du code de la consommation prévoient que le prêteur est privé de son droit à restitution lorsqu'il s'est fautivement libéré des fonds ; que cependant ces dispositions, devenues dans des termes inchangés les articles L. 312-48 et L. 312-49 du code de la consommation, prévoient en effet uniquement que "Les obligations de l'emprunteur ne prennent effet qu'à compter de la livraison du bien ou de la fourniture de la prestation ; en cas de contrat de vente ou de prestation de services à exécution successive, elles prennent effet à compter du début de la livraison ou de la fourniture et cessent en cas d'interruption de celle-ci. Le vendeur ou le prestataire de services doit conserver une copie du contrat de crédit et le présenter sur leur demande aux agents chargés du contrôle" ; qu'elles n'édictent donc pas une sanction de déchéance du droit à réclamer paiement des sommes dues lorsque la livraison du bien ou la fourniture de la prestation est réellement intervenue ; que par ailleurs, aux termes de la jurisprudence, une faute, quelle qu'elle soit, n'entraîne une sanction que lorsqu'elle a causé un préjudice né et actuel que, non seulement les juges doivent apprécier mais qu'ils doivent également caractériser ; que, si la privation de la créance de restitution invoquée par les appelants sanctionne habituellement la faute commise par le prêteur, c'est parce que la livraison du bien n'est pas effectivement intervenue et que cette sanction répare le préjudice tenant à ce que les emprunteurs se retrouvent en situation de devoir payer le prix d'une installation qui n'a jamais été en mesure d'assurer correctement sa fonction et sans perspective de se retourner utilement contre leur fournisseur en déconfiture ; que tel n'est pas le cas de Monsieur et Madame F... dont le préjudice ne peut résulter du seul versement à la société REV SOLAIRE du capital emprunté alors qu'ils ne contestent pas bénéficier des travaux d'isolation de leurs combles et ne démentent pas l'affirmation de l'appelante de ce qu'ils bénéficient également d'une installation désormais en parfait état de marche qu'ils n'ont payée que grâce aux fonds remis par le prêteur ; qu'il résulte en effet du procès-verbal de réception (pièce n° 32 de l'appelante) que les désordres signalés étaient mineurs s'agissant de quelques tuiles tombées et d'une absence de test possible puisque l'installation était en triphasé mais que les époux F... ont obtenu une attestation de conformité du consuel (pièce n° 33), ce qui établit la livraison des prestations devant être réalisées ; que le contrat principal n'est pas annulé et que les époux F... demeurent propriétaires des matériels et travaux qu'ils ont commandés et qu'ils ne démontrent aucun préjudice ; qu'ils ne peuvent donc réclamer qu'il soit jugé que le prêteur est privé du droit de solliciter paiement de sa créance de restitution et que le jugement déféré sera infirmé en ce qu'il a ainsi jugé ; que FINANCO, qui a formé pour la première fois sa demande en paiement moins de deux années après la première échéance impayée et le prononcé de la déchéance du terme, demande expressément à la cour, pour le cas où une faute serait retenue de ne condamner les emprunteurs qu'au paiement du capital restant dû assorti des intérêts au taux légal à compter du présent arrêt ; qu'une faute étant retenue, il convient de faire droit à cette demande en condamnant solidairement Monsieur et Madame F... à lui rembourser la somme de 56.400 euros correspondant au capital emprunté ; que, bien que le décompte produit par l'appelante n'en fasse pas état, devront être déduites de cette somme les éventuelles échéances de remboursement qui auraient déjà été versées par les emprunteurs ;
1. ALORS QUE le prêteur qui commet une faute lors de la libération des fonds ne peut prétendre au remboursement du capital emprunté, peu important que l'emprunteur n'ait subi aucun préjudice ; qu'il résulte des constatations auxquelles la juridiction du second degré a procédé que la société FINANCO s'est libérée des fonds à tort, en exécution d'une attestation de livraison constitutive d'un faux grossier ; qu'en décidant que le contrat principal avait été correctement exécuté par la livraison de l'installation photovoltaïque dont les époux F... demeuraient propriétaires et que les combles de leur maison avaient été aménagés, sous réserve de désordres mineurs, après avoir affirmé que les articles L. 312-48 et L. 312-49 du code de la consommation n'édictaient pas une sanction de déchéance du droit à réclamer paiement des sommes dues lorsque la livraison du bien ou la fourniture de la prestation est réellement intervenue, qu'une faute, quelle qu'elle soit, n'entraînait une sanction que lorsqu'elle a causé un préjudice né et actuel, et que l'établissement de crédit n'était privé de sa créance de restitution du capital emprunté que dans la seule hypothèse où le bien n'avait pas été livré, ce qui n'était pas le cas de M. et Mme F..., la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations d'où il résultait que la société FINANCO était privée de sa créance de restitution du capital emprunté du seul fait qu'elle avait commis une faute en libérant à tort les fonds versés, peu important que M. et Mme F... ne justifient pas du préjudice qu'elle leur avait causé par sa faute ; qu'ainsi, elle a violé les articles L. 312-48 et L. 312-49 du code de la consommation ;
2. ALORS QUE le prêteur qui commet une faute lors de la libération des fonds ne peut prétendre au remboursement du capital emprunté, peu important que l'emprunteur n'ait pas obtenu l'annulation du contrat principal ; qu'en affirmant que la faute de la banque n'était pas sanctionnée par la perte de créance de restitution du capital emprunté dans l'hypothèse où le contrat principal avait été correctement exécuté par la livraison de l'installation photovoltaïque dont les époux F... demeuraient propriétaires, à défaut d'en avoir obtenu l'annulation, la cour d'appel a déduit un motif inopérant, en violation des articles L. 312-48 et L. 312-49 du code de la consommation.