LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué et les productions, que, courant 1999, M. I... a assigné devant un tribunal de commerce la société Banque de la Réunion, aux droits de laquelle se trouve la société Caisse d'épargne et de prévoyance Provence Alpes Corse (la banque), pour la voir condamner au paiement de différentes sommes au titre de trop perçus ; que par un arrêt du 4 décembre 2009, la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion est entrée en voie de condamnation à l'encontre de la banque mais a aussi condamné M. I... au paiement de différentes sommes et a ordonné une compensation pour partie de ces condamnations ; que M. I... a formé un pourvoi en cassation contre cet arrêt et a saisi la cour d'appel d'une requête en omission de statuer sur une demande d'intérêts au taux légal ; que l'arrêt du 4 décembre 2009 a été cassé du seul chef portant condamnation de la banque (Com. 11 octobre 2011, n° 10-14359), tandis qu'il a été dit n'y avoir lieu à statuer sur le pourvoi formé par M. I... contre l'arrêt du 24 septembre 2010, ayant rejeté sa requête en omission de statuer au motif que cet arrêt était annulé par voie de conséquence de la cassation de l'arrêt du 4 décembre 2009 (Com. 11 octobre 2011, n° 10-25696) ; que, statuant sur renvoi après cassation, la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion a, par un arrêt du 11 avril 2014, fixé à un certain montant la somme trop-perçue devant être restituée par la banque à M. I... ; que M. I... a saisi la cour d'appel d'une requête en omission de statuer sur une demande tendant à voir fixer au jour de l'assignation le point de départ des intérêts et à voir ordonner leur capitalisation ;
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur la deuxième branche du moyen unique annexé qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Mais sur le moyen unique, pris en ses première et troisième branches :
Vu les articles 463, 624, 625 et 631 du code de procédure civile ;
Attendu que, pour dire n'y avoir lieu à la rectification de l'arrêt du 11 avril 2014, l'arrêt retient que la cassation de l'arrêt du 4 décembre 2009 ne portait que sur le seul chef du dispositif fixant à la somme de 184 315 euros le montant des trop perçus, toutes les autres dispositions de cet arrêt, y compris celles de l'arrêt du 24 septembre 2010 sur requête en omission de statuer, étant définitives, de sorte que ces dispositions ne pouvant plus être remises en cause, il ne peut être fait grief à l'arrêt du 11 avril 2014 d'avoir omis de statuer sur le point de départ de l'intérêt légal et sa capitalisation ;
Qu'en statuant ainsi, en se référant au dispositif d'un arrêt annulé et alors que la circonstance que certains des chefs de dispositif de l'arrêt du 4 décembre 2009 soient devenus irrévocables ne faisait pas obstacle à ce qu'il soit statué par la cour d'appel ayant, sur renvoi après cassation, condamné la banque au profit de M. I..., sur une requête en omission de statuer, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 24 août 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion, autrement composée ;
Condamne la société Caisse d'épargne et de prévoyance Provence Alpes Corse aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande ; la condamne à payer à M. I... la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du cinq décembre deux mille dix-neuf.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Spinosi et Sureau, avocat aux Conseils, pour M. I...
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir dit n'y avoir lieu à la rectification de son arrêt du 11 avril 2014 ;
Aux motifs que, « aux termes des dispositions de l'article 463 du code de procédure civile, la juridiction qui a omis de statuer sur un chef de demande peut compléter son jugement à condition que la demande soit présentée un an au plus tard après que la décision est passée en force de chose jugée ou, en cas de pourvoi en cassation de ce chef, à compter de l'arrêt d'irrecevabilité.
En l'espèce, la décision de la Cour d'appel de Saint-Denis en date du 11 avril 2014 est intervenue à la suite d'un renvoi de la chambre commerciale, financière et économique de la cour de cassation, après cassation partielle, le 11 octobre 2011, d'un précédent arrêt d'appel, en date du 04 décembre 2009.
Il est constant que cette cassation ne portait que sur le seul chef du dispositif fixant à la somme de 184 315 euros le montant des trop perçus, Toutes les autres dispositions de l'arrêt de la Cour d'appel de Saint-Denis en date du 04 décembre 2009, y compris celles de l'arrêt intervenu le 24 septembre 2010 sur requête en omission de statuer, sont ainsi définitives.
Ces dispositions ne peuvent plus être remises en cause.
Dès lors, il ne peut être fait grief à l'arrêt du 11 avril 2014 d'avoir omis de statuer sur le point de départ de l'intérêt légal et sa capitalisation » ;
Alors, d'une part, que le juge est tenu de répondre aux demandes dont il est saisi ; que la juridiction qui a omis de statuer sur un chef de demande peut également compléter son jugement sans porter atteinte à la chose jugée quant aux autres chefs ; qu'en disant n'y avoir lieu à la rectification de son arrêt du 11 avril 2014, quand elle n'avait pas statué, ainsi que cela lui était pourtant demandé, sur les intérêts et leur capitalisation, la cour d'appel a violé les articles 5 et 463 du code de procédure civile.
Alors, d'autre part, que l'effet nécessaire de la cassation et du renvoi est de dessaisir de plein droit de toute connaissance ultérieure de l'affaire le juge dont la décision est cassée pour en investir exclusivement le juge du renvoi ; que cette règle, qui touche à l'ordre des juridictions, est d'ordre public ; que la juridiction qui a omis de statuer sur un chef de demande peut également compléter son jugement sans porter atteinte à la chose jugée quant aux autres chefs ; que l'arrêt du 11 avril 2014, intervenu sur renvoi après cassation, n'a pas statué sur les intérêts et leur capitalisation ainsi que cela lui était demandé par Monsieur I... ; qu'en énonçant que la cassation de l'arrêt du 4 décembre 2009 n'était intervenue que sur la condamnation principale de la BANQUE DE LA REUNION à l'égard de Monsieur I..., et que toutes les autres dispositions de cet arrêt, ainsi que celles de l'arrêt intervenu le 24 septembre 2010 étaient définitives, pour dire n'y avoir lieu à rectification de son arrêt du 11 avril 2014, la cour d'appel, qui a méconnu l'étendue de ses pouvoirs, a violé les articles 463 et 631 du code de procédure civile.
Alors, enfin, que comme le rappelait Monsieur I..., l'arrêt de la cour d'appel de Saint-Denis du 4 décembre 2009 avait fait l'objet d'une requête en omission de statuer, laquelle avait été rejetée par un arrêt du 24 septembre 2010 au motif erroné que l'infra petita n'était pas caractérisé ; que cet arrêt a été annulé par voie de conséquence de l'arrêt de cassation partielle du 4 décembre 2009, comme cela a été constaté par un arrêt de non-lieu à statuer de la chambre commerciale de la Cour de cassation également prononcé le 11 octobre 2011 ; qu'en énonçant pourtant que les dispositions de l'arrêt intervenu le 24 septembre 2010 sur requête en omission de statuer étaient définitives, de sorte qu'il n'y avait prétendument pas lieu de rectifier son arrêt du 11 avril 2014, la cour d'appel a violé les articles 624, 625, 631 et 463 du code de procédure civile.