LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 1
FB
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 20 mai 2020
Rejet
Mme BATUT, président
Arrêt n° 319 F-D
Pourvoi n° E 19-10.982
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 20 MAI 2020
La commune de Romainville, représentée par son maire en exercice, domicilié en cette qualité [...], a formé le pourvoi n° E 19-10.982 contre l'arrêt rendu le 8 novembre 2018 par la cour d'appel de Versailles (16e chambre), dans le litige l'opposant :
1°/ à la société Dexia crédit local, société anonyme, dont le siège est [...] ,
2°/ à la Caisse française de financement local, société anonyme, dont le siège est [...] ,
défenderesses à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Duval-Arnould, conseiller, les observations de la SARL Cabinet Munier-Apaire, avocat de la commune de Romainville, de la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat de la société Dexia crédit local, de la SCP Lesourd, avocat de la Caisse française de financement local, et l'avis de M. Chaumont, avocat général, après débats en l'audience publique du 10 mars 2020 où étaient présents Mme Batut, président, Mme Duval-Arnould, conseiller rapporteur, Mme Kamara, conseiller doyen, M. Chaumont, avocat général, et Mme Randouin, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 8 novembre 2018), entre le 14 avril et le 2 septembre 2011, la commune de Romainville (la commune) a, en vue de refinancer des prêts antérieurs, souscrit auprès de la société Dexia crédit local (la société Dexia) quatre prêts structurés stipulant des taux d'intérêt déterminés et variables, indexés, selon les cas, sur le Franc suisse ou sur l'Euribor.
2. Par acte du 7 décembre 2012, la commune a assigné la société Dexia en annulation des stipulations d'intérêts, en indemnisation des préjudices consécutifs à des manquements de la banque à ses devoirs d'information, de conseil et de mise en garde et en réduction de clauses pénales. La société Caisse française de financement local (la société Caffil), filiale de la société Dexia, est intervenue volontairement à l'instance. Ces sociétés ont sollicité, reconventionnellement, la condamnation de la commune au paiement d'échéances impayées et à échoir, outre des intérêts.
Examen des moyens
Sur le premier moyen
Enoncé du moyen
3. La commune fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes, notamment celle tendant à voir prononcer l'annulation des stipulations d'intérêts conventionnels des quatre prêts litigieux, et d'accueillir celles des sociétés Caffil et Dexia, alors :
« 1°/ que les articles 1 et 2 de la loi n° 2014-844 du 29 juillet 2014, qui ne neutralisent que les moyens tirés du défaut de mention ou de la mention erronée du taux effectif global, du taux de période ou de la durée de période dans tout écrit constatant un contrat de prêt ou un avenant, ne font pas obstacle au moyen tiré de la violation par l'établissement de crédit de son obligation d'informer la personne morale de droit public, pendant l'exécution du prêt, de la modification du taux effectif global (TEG) résultant de la révision du taux d'intérêt originel selon l'évolution d'un indice qui n'est pas objectif ; qu'en rejetant la demande de la commune en annulation des stipulations d'intérêts contractuels, en se bornant à faire application de l'article 1er de la loi du 29 juillet 2014 sans rechercher, comme elle y était invitée si la société Dexia n'était pas tenue d'informer la commune des modifications du TEG pendant l'exécution des prêts, si la banque n'avait pas manqué à cette obligation et si ce manquement ne justifiait pas l'annulation des stipulations d'intérêts contractuels, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 313-2 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, et de l'article 1907 du code civil ;
2°/ qu'en cas de stipulation de révision du taux d'intérêt originel selon l'évolution d'un indice qui n'est pas directement accessible à l'emprunteur mais nécessite de procéder à un calcul complexe, le prêteur est tenu d'informer l'emprunteur de la modification du TEG résultant d'une telle révision ; qu'en l'espèce, les indices de variation des taux d'intérêts des prêts n'étaient pas directement accessibles à la commune et nécessitaient de procéder à des calculs complexes (pour le prêt n° [...], de la différence entre le cours de change de l'euro en dollars et le cours de change de l'euro en francs suisses, pour le prêt n° [...], de la différence entre l'Euribor douze mois constaté huit jours ouvrés avant chaque date d'échéance d'intérêts et 5,50 % et pour le prêt [...], de 50 % du taux de variation du cours de change de l'euro en francs suisses), de sorte que la banque aurait dû communiquer le nouveau TEG à la commune à chaque modification ; qu'à supposer que la cour d'appel ait adopté les motifs du jugement ayant retenu le contraire, elle a violé l'article L. 313-2 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, ensemble l'article 1907 du code civil ;
3°/ que, si les communes sont irrecevables à saisir la Cour européenne des droits de l'homme pour faire constater une violation de leurs droits, elles sont recevables à invoquer devant les juridictions nationales le bénéfice des stipulations de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales garantissant des droits au profit des personnes morales, notamment de ses articles 6, §§ 1 et 14, et de l'article 1er de son premier protocole additionnel, lorsque le litige relève du droit privé, notamment lorsqu'il porte sur un contrat de droit privé auquel elles sont parties ; qu'en jugeant au contraire que- pour s'opposer à l'application rétroactive par le juge d'une loi d'exception intervenue en cours de procédure- la commune ne pouvait invoquer utilement devant les juridictions nationales les stipulations de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ou de son premier protocole additionnel quelle que soit la nature du litige, la cour d'appel a violé les textes précités, par refus d'application, et l'article 34 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et de libertés fondamentales, par fausse application et l'article 55 de la Constitution du 4 octobre 1958 ;
4°/ que les principes de sécurité juridique, de non-rétroactivité de la loi et de la séparation des pouvoirs interdisent au juge d'appliquer rétroactivement aux actes légalement formés les dispositions d'une loi entrée en vigueur après leur conclusion, qui, a posteriori, valide rétroactivement l'absence de mention du TEG spécifiquement dans les contrats de crédit conclus entre un établissement de crédit et une collectivité locale d'une part, et d'en étendre les termes spécifiques à des cas qu'elle n'a pas précisément prévus, d'autre part ; qu'en l'espèce, la commune faisait valoir que l'article 1er de la loi d'exception n° 2014-844 validait rétroactivement, uniquement l'absence de mention du TEG dans les contrats de crédits conclus avant son entrée en vigueur, à l'exclusion de tout autre cas de nullité et notamment celui tiré de l'absence des mentions légales prescrites par la loi alors applicable, de sorte qu'en validant néanmoins le contrat de prêt par application rétroactive et extensive de la loi du 29 juillet 2014, la cour d'appel a violé les principes sus- énoncés, l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 et les articles 1103 et 1193 du code civil. »
Réponse de la Cour
4. D'abord, l'arrêt énonce, par motifs adoptés, qu'en cas de stipulation de révision du taux d'intérêt originel selon l'évolution d'un indice objectif, le prêteur n'a pas d'obligation d'informer l'emprunteur de la modification du taux effectif global (TEG) résultant d'une telle révision et relève, après avoir examiné les taux d'intérêts prévus aux contrats de prêts litigieux, que ces taux, variant en fonction d'index et de cours de change, constituent des indices objectifs. Ayant ainsi procédé à la recherche prétendument omise, la cour d'appel, a, à bon droit, écarté l'existence d'un manquement de la société Dexia lié à l'absence d'une telle information sur les modifications du TEG.
5. Ensuite, il retient exactement qu'une commune, qui n'est pas assimilée à une organisation non gouvernementale, au sens de l'article 34 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, dans la mesure où, s'agissant d'une personne morale de droit public, elle exerce une partie de la puissance publique, ne peut ni saisir la Cour européenne des droits de l'homme ni invoquer utilement devant les juridictions nationales les stipulations de la Convention ou de son premier Protocole additionnel et ce, quelle que soit la nature du litige.
6. Enfin, sans faire une application extensive de l'article 1er de la loi n° 2014-844 du 29 juillet 2014, d'interprétation stricte en raison de son caractère rétroactif, la cour d'appel s'est bornée à retenir, au vu des écrits établis entre les parties, que l'absence des mentions invoquées n'était pas une cause de nullité des clauses de stipulation d'intérêts.
7. Il s'ensuit que le moyen n'est pas fondé.
Sur les deuxième et troisième moyens, ci-après annexés
8. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la commune de Romainville aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt mai deux mille vingt.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SARL Cabinet Munier-Apaire, avocat aux Conseils, pour la commune de Romainville.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué D'AVOIR débouté l'exposante de toutes ses demandes, notamment de celles tendant à voir prononcer la nullité des stipulations d'intérêts contractuels des quatre prêts litigieux, à voir substituer à ces stipulations le taux d'intérêt légal et à voir condamner in solidum la société DEXIA CREDIT LOCAL et la CAFFIL à lui restituer les intérêts trop versés, D'AVOIR condamné l'exposante à payer à la CAFFIL la somme de 1.925.060,33 euros au titre des échéances impayées, majorée des intérêts à un taux égal au dernier taux de facilité de prêt marginal connu à la date d'exigibilité de chaque échéance, majoré d'une marge de 3% et au paiement de 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, D'AVOIR dit que les intérêts échus pour une année entière à compter du 14 mars 2017 produiraient eux-mêmes intérêts un an après cette date et D'AVOIR enjoint à l'exposante de reprendre le paiement des échéances conformément aux termes des contrats de prêt ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE « Sur la nullité du taux d'intérêt conventionnel : A titre principal, la Ville invoque le défaut de mention du taux effectif global ("TEG"), du taux et de la durée de période dans les fax de confirmation signés préalablement aux Contrats de Prêt et à titre subsidiaire, invoque des erreurs sur les actes de prêt des 14 et 15 avril et 18 août 2011. Les intimées, comme l'a fait le tribunal, opposent à cette demande la loi n° 2014-844, promulguée le 29 juillet 2014 relative à la sécurisation des contrats de prêts structurés souscrits par les personnes morales de droit public, déclarée conforme à la Constitution par la décision du Conseil constitutionnel n° 2014-695 DC du 24 juillet 2014. La commune répond que la cour doit écarter l'application de cette loi dont les articles 1 à 3 sont selon elle contraires aux articles 6-1 et 14 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales et à l'article 1er du premier Protocole additionnel de la convention. Mais une personne morale de droit public exerçant une partie de la puissance publique telle qu'une commune, ne pouvant être considérée comme une organisation non gouvernementale au sens de l'article 34 de la CEDH, ne peut saisir cette instance, [ni] invoquer utilement devant les juridictions nationales les stipulations de la Convention ou du Protocole additionnel et ce, quelle que soit la nature du litige, cette dernière ne modifiant en rien sa qualité. Il s'ensuit que le moyen tiré de l'incompatibilité avec les articles 6-1 et 14 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 1er du premier protocole additionnel de la convention est écarté. En conséquence et du fait de son intervention rétroactive il convient de faire application à l'espèce des dispositions de la loi n°2014-844 du 29 juillet 2014. Il n'est pas contesté ni contestable, qu'en application de l'article 1er de cette loi, l'absence de mention du TEG n'est pas une cause de nullité de la clause de stipulation d'intérêts figurant dans un contrat de prêt souscrit par une commune. C'est donc par une juste application des articles 1,2 et 3 de la Loi de sécurisation que le tribunal a estimé en l'espèce que les conditions d'application de l'article 1 étaient réunies dès lors qu'aucune décision de justice passée en force de chose jugée n'a été rendue concernant les contrats de prêt signés avant l'entrée en vigueur de la Loi par la Ville, personne morale de droit public et que tant les documents préparatoires aux prêts litigieux (fax de confirmation) et que les contrats de prêt contiennent toutes les mentions requises par le texte. Par suite il n'y a pas lieu de rechercher la portée des fax date du 8 avril 2011 et du 2 août 2011 pour savoir s'ils peuvent être considérés comme matérialisant le consentement réciproque des parties. Les demandes de la Ville seront en effet nécessairement rejetées puisque si ce sont les contrats de prêt qui formalisent l'accord des parties, le TEG ainsi que la durée et le taux de période sont expressément mentionnés, et si, comme le soutient la Ville, les fax de confirmation des 8 avril et 2 août 2011 constituent un écrit constatant les contrats de prêt, ils contiennent les mentions prescrites par la Loi. En conséquence le jugement sera confirmé en ce qu'il a rejeté la demande d'annulation de la stipulation conventionnelle d'intérêts » ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE « Sur la demande de nullité des stipulations d'intérêts : A l'appui de sa demande de nullité des stipulations d'intérêts des contrats de prêt litigieux, la commune soutient successivement que les télécopies de confirmation relatives auxdits prêts ne comprennent aucune indication du taux effectif global, que les TEG mentionnés dans les contrats sont erronés dès lors que ne sont pas fournis d'exemples chiffrés et que ne sont pas mentionnés le taux et la durée de la période. Elle ajoute que Dexia ne lui a pas communiqué le nouveau taux effectif global à chaque modification, c'est-à-dire annuellement. Elle affirme que la banque ne peut lui opposer la loi n°2014-844 du 29 juillet 2014 relative à la sécurisation des contrats de prêts structurés souscrits par les personnes morales de droit public dès lors que cette loi est contraire à la Convention européenne des droits de l'homme et notamment à son article 6 qui prévoit le droit de toute personne d'avoir un procès équitable. Elle ajoute que le droit européen peut être invoqué directement devant les juridictions nationales et qu'il revient aux tribunaux d'appliquer et d'interpréter les actes de l'Union européenne. Dexia et la CAFFIL font valoir quant à elles que la commune est irrecevable à saisir la Cour européenne des droits de l'homme en application de l'article 34 de la Convention de sorte qu'elle ne peut invoquer les dispositions de la Convention devant le juge national. Elles soutiennent que la loi n°2014-844 du 29 juillet 2014 relative à la sécurisation des contrats de prêts structurés souscrits par les personnes morales de droit public est conforme aux principes établis par la Convention dès lors qu'elle est justifiée par d'impérieux motifs d'intérêt général. Elles en déduisent que cette loi doit s'appliquer de sorte que la demande de la commune tendant à voir prononcer la nullité des stipulations d'intérêts des contrats de prêt litigieux doit être rejetée. L'article 34 de la Convention européenne des droits de l'homme prévoit que « la Cour peut être saisie d'une requête par toute personne physique, toute organisation non gouvernementale ou tout groupe de particuliers qui se prétend victime d'une violation par l'une des Hautes Parties contractantes des droits reconnus dans la Convention ou ses protocoles. Les Hautes Parties contractantes s'engagent à n'entraver par aucune mesure l'exercice efficace de ce droit ». Une commune n'est pas assimilée à une organisation non gouvernementale au sens de cet article dans la mesure où, s'agissant d'une personne morale de droit public, elle exerce une partie de la puissance publique. Dès lors, une commune ne peut, ni saisir la Cour Européenne des Droits de l'Homme, ni invoquer utilement devant les juridictions nationales les stipulations de la Convention. En conséquence, il convient de faire application à l'espèce des dispositions de la loi n°2014-844 du 29 juillet 2014. Les articles 1, 2 et 3 de cette loi disposent : « Article 1 : Sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée, est validée la stipulation d'intérêts prévue par tout écrit constatant un contrat de prêt ou un avenant conclu antérieurement à l'entrée en vigueur de la présente loi entre un établissement de crédit et une personne morale de droit public, en tant que la validité de cette stipulation serait contestée par le moyen tiré du défaut de mention, prescrite en application de l'article L313-2 du code de la consommation, du taux effectif global, du taux de période ou de la durée de période, dès lors que cet écrit constatant un contrat de prêt ou un avenant indique de façon conjointe : 1° Le montant ou le mode de détermination des échéances de remboursement du prêt en principal et intérêts ; 2° La périodicité de ces échéances ; 3° Le nombre de ces échéances ou la durée du prêt. Article 2 : Sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée, est validée la stipulation d'intérêts prévue par tout écrit constatant un contrat de prêt ou un avenant conclu antérieurement à l'entrée en vigueur de la présente loi entre un établissement de crédit et une personne morale de droit public, en tant que la validité de cette stipulation serait contestée par le moyen tiré de la mention d'un taux effectif global, d'un taux de période ou d'une durée de période qui ne sont pas déterminés conformément à l'article L.313-1 du code de la consommation, dès lors que cet écrit constatant un contrat de prêt ou un avenant indique de façon conjointe : 1° Le montant ou le mode de détermination des échéances de remboursement du prêt en principal et intérêts ; 2° La périodicité de ces échéances ; 3° Le nombre de ces échéances ou la durée du prêt. Lorsqu'un écrit tel que celui mentionné au premier alinéa mentionne un taux effectif global inférieur au taux effectif global déterminé conformément au même article L 313-1, l'emprunteur a droit au versement par le prêteur de la différence entre ces deux taux appliquée au capital restant dû à chaque échéance. Article 3 : Sont exclus du champ de la présente loi les écrits constatant un contrat de prêt ou un avenant comportant un taux d'intérêt fixe ou un taux d'intérêt variable défini comme l'addition d'un indice et d'une marge fixe exprimée en points de pourcentage ». I1 n'est pas contesté par la commune que les contrats litigieux entrent dans le champ d'application de cette loi et que les conditions d'application de l'article 1 sont remplies. Il y a donc lieu de rejeter la demande de nullité des stipulations d'intérêts des contrats de prêt litigieux fondée sur l'absence de mention du TEG dans les télécopies de confirmation, sans qu'il soit nécessaire de se prononcer sur la question de savoir si ces télécopies constituent des contrats de prêt. La demande de nullité des stipulations d'intérêts fondée sur l'absence de mention de la durée et du taux de période dans les contrats de prêt sera elle aussi rejetée dès lors que la commune procède par simple affirmation en soutenant que cette absence de mention fausse le calcul du TEG, sans caractériser une quelconque erreur. Au surplus, à supposer une telle erreur établie, l'article 2 de la loi du 29 juillet 2014 aurait vocation à s'appliquer. Le moyen de nullité selon lequel les TEG mentionnés dans les contrats de prêt ne correspondraient pas à des exemples chiffrés doit être traité comme le moyen de nullité tiré du défaut de mention du TEG visé par l'article 1 de la loi du 29 juillet 2014. Il ne sera donc pas retenu. Le dernier moyen de nullité soulevé par la commune tiré de l'absence de communication du nouveau taux effectif global à chaque modification ne sera pas davantage retenu. En effet, si l'article L. 313-2 du code de la consommation, dans sa version antérieure à l'ordonnance n°2016-351 du 25 mars 2016, impose la mention du TEG dans tout écrit constatant un prêt, il ne fait pas obligation au préteur, en cas de stipulation de révision du taux d'intérêt originel selon L'évolution d'un indice objectif, d'informer l'emprunteur de la modification du TEG résultant d'une telle révision. Or, en l'espèce, les taux d'intérêts prévus aux contrats de prêt litigieux varient en fonction d'index et de cours de change qui constituent des indices objectifs. Il y a donc lieu, au regard de l'ensemble des éléments qui précèdent, de rejeter la demande de nullité des stipulations d'intérêts des contrats de prêt litigieux présentée par la commune et les demandes subséquentes » ;
1°/ ALORS QUE les articles 1 et 2 de la loi n° 2014-844 du 29 juillet 2014, qui ne neutralisent que les moyens tirés du défaut de mention ou de la mention erronée du taux effectif global, du taux de période ou de la durée de période dans tout écrit constatant un contrat de prêt ou un avenant, ne font pas obstacle au moyen tiré de la violation par l'établissement de crédit de son obligation d'informer la personne morale de droit public, pendant l'exécution du prêt, de la modification du taux effectif global résultant de la révision du taux d'intérêt originel selon l'évolution d'un indice qui n'est pas objectif ; qu'en rejetant la demande de l'exposante en annulation des stipulations d'intérêts contractuels, en se bornant à faire application de l'article 1er de la loi du 29 juillet 2014 (arrêt p. 9), sans rechercher, comme elle y était invitée (conclusions p. 8, 12, 13, 16 et 18), si la banque n'était pas tenue d'informer l'exposante des modifications du TEG pendant l'exécution des prêts, si la banque n'avait pas manqué à cette obligation et si ce manquement ne justifiait pas l'annulation des stipulations d'intérêts contractuels, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 313-2 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, et de l'article 1907 du code civil ;
2°/ ALORS, SUBSIDIAIREMENT, QU'en cas de stipulation de révision du taux d'intérêt originel selon l'évolution d'un indice qui n'est pas directement accessible à l'emprunteur mais nécessite de procéder à un calcul complexe, le prêteur est tenu d'informer l'emprunteur de la modification du taux effectif global résultant d'une telle révision ; qu'en l'espèce, les indices de variation des taux d'intérêts des prêts n'étaient pas directement accessibles à l'exposante et nécessitaient de procéder à des calculs complexes (pour le prêt n° [...], de la différence entre le cours de change de l'euro en dollars et le cours de change de l'euro en francs suisses, pour le prêt n° [...], de la différence entre l'Euribor 12 mois constaté 8 jours ouvrés avant chaque date d'échéance d'intérêts et 5,50 % et pour le prêt [...], de 50 % du taux de variation du cours de change de l'euro en francs suisses), de sorte que la banque aurait dû communiquer le nouveau TEG à l'exposante à chaque modification ; qu'à supposer que la cour d'appel ait adopté les motifs du jugement (p. 10 § 1) ayant retenu le contraire, elle a violé l'article L. 313-2 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, ensemble l'article 1907 du code civil ;
3°/ ALORS, EN TOUT ETAT DE CAUSE, QUE si les communes sont irrecevables à saisir la Cour européenne des droits de l'homme pour faire constater une violation de leurs droits, elles sont recevables à invoquer devant les juridictions nationales le bénéfice des stipulations de la Convention européenne des droits de l'homme garantissant des droits au profit des personnes morales, notamment de ses articles 6§1 et 14 et de l'article 1er de son premier protocole additionnel, lorsque le litige relève du droit privé, notamment lorsqu'il porte sur un contrat de droit privé auquel elles sont parties ; qu'en jugeant au contraire que– pour s'opposer à l'application rétroactive par le juge d'une loi d'exception intervenue en cours de procédure- la commune exposante ne pouvait invoquer utilement devant les juridictions nationales les stipulations de la Convention européenne des droits de l'homme ou de son premier protocole additionnel quelle que soit la nature du litige (arrêt p. 8), la cour d'appel a violé les textes précités, par refus d'application, et l'article 34 de la Convention européenne des droits de l'homme, par fausse application et l'article 55 de la Constitution du 4 octobre 1958
4°/ ALORS, ENFIN, QUE les principes de sécurité juridique, de non rétroactivité de la loi et de la séparation des pouvoirs interdisent au juge d'appliquer rétroactivement aux actes légalement formés les dispositions d'une loi entrée en vigueur après leur conclusion, qui, a posteriori, valide rétroactivement l'absence de mention du TEG spécifiquement dans les contrats de crédit conclus entre un établissement de crédit et une collectivité locale d'une part, et d'en étendre les termes spécifiques à des cas qu'elle n'a pas précisément prévus, d'autre part ; qu'en l'espèce, l'exposante faisait valoir que l'article 1er de la loi d'exception n°2014-844 validait rétroactivement, uniquement l'absence de mention du TEG dans les contrats de crédits conclus avant son entrée en vigueur, à l'exclusion de tout autre cas de nullité et notamment celui tiré de l'absence des mentions légales prescrites par la loi alors applicable, de sorte qu'en validant néanmoins le contrat de prêt par application rétroactive et extensive de la loi du 29 juillet 2014, la cour d'appel a violé les principes sus énoncés, l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 et les articles 1103 et 1193 du code civil.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué D'AVOIR débouté l'exposante de toutes ses demandes, notamment de celle tendant à voir condamner la société DEXIA CREDIT LOCAL à lui payer des dommages et intérêts pour manquement à son devoir de mise en garde ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE « Sur la faute reprochée de la SA Dexia Crédit Local : La commune reproche à la SA Dexia Crédit Local d'avoir manqué à son obligation d'information et à son devoir de mise en garde et soutient que s'agissant en l'espèce de produits structurés, la banque avait le devoir de l'éclairer sur les avantages et les inconvénients du prêt offert, et donc une obligation d'information renforcée. [
] Le banquier dispensateur de crédit n'a aucun devoir de conseil, mais il a une obligation de mise en garde qui ne s'impose à lui que si l'emprunteur n'a pas la qualité de consommateur averti et si le risque d'endettement est excessif au regard des capacités financières de l'emprunteur au moment de la souscription de l'emprunt. Le caractère averti d'une commune ne se présume pas ; il convient, en conséquence, de procéder à une analyse in concreto au jour de la conclusion des contrats litigieux. En l'espèce, la commune, qui avait souscrit depuis de nombreuses années de multiples emprunts, y compris des emprunts dits structurés et avait signé près d'une quarantaine de contrats de prêt avec le groupe Dexia tout en ayant également recours à la Caisse d'Epargne, au Crédit Agricole et la Société Générale, menait, comme l'a souligné le tribunal, une politique de gestion active de sa dette ainsi que cela résulte de la délibération du conseil municipal du 31 mars 2010 donnant délégation à son maire aux fins de «modifier l'encours de la dette existante en fonction des possibilités offertes par les établissements financiers telles que passer du taux variable au taux ,fixe ou du taux fixe au taux variable, modifier une ou plusieurs fois l'index relatif au calcul des taux d'intérêts, emprunter en devises, avec ou sans protection de change, en fonction des opportunités de marchés, réaliser des droits de tirages échelonnés, dans le temps avec faculté de remboursement et/ou de consolidation, de réduire ou rallonger la durée du prêt, de modifier la périodicité du prêt et le profil de remboursement ». Le Maire, également vice-président du Conseil Général de la Seine-Saint-Denis, était titulaire d'une maîtrise de Sciences économiques et la Ville avait pris le soin de se faire assister d'un directeur financier et de conseils financiers du cabinet Finance Active qui "associe des services technologiques et un accompagnement d'experts qui contribuent à la performance de la gestion de la dette et de la prospective financière". L'encours de la Ville a été orienté dès 2006 principalement sur des prêts structurés et les prêts litigieux de 2011 avaient précisément pour but de refinancer les prêts antérieurs de 2006 et 2007, reposant sur des formules d'intérêt similaires. La dette de la commune s'élevait à plus de 50 millions d'euros. Enfin la commune n'a pas jugé utile de recourir aux services déconcentrés de l'Etat pour la conseiller dans le cadre de la passation d'un contrat de prêt, notamment sur les risques susceptibles d'être pris, ainsi que le lui permet l'arrêté du 16 décembre 1983. Le recours au receveur-percepteur de la commune est encouragé par la Circulaire de 2010 qui précise que le comptable public peut apporter son analyse juridique sur les contrats financiers que la collectivité souhaite souscrire, notamment sur les particularités, les risques ou sur la nature de certaines clauses du contrat d'emprunt et qui insiste également sur la mission de conseil des services préfectoraux en dehors du contrôle de légalité et budgétaire. La Ville s'est donc estimée elle-même informée et compétente. Compte tenu de la situation de la Ville, de son expérience, de l'ampleur et du nombre de contrats d'emprunt souscrits, il se conclut que la Ville maîtrisait parfaitement les éléments financiers qui lui étaient soumis et le jugement sera confirmé en ce que la considérant comme un emprunteur averti, il a rejeté sa demande de dommages et intérêts. En tout état de cause, la charge de la preuve du risque de disproportion de l'engagement par rapport aux capacités financières ou du risque de surendettement excessif, né de l'octroi du prêt, appartient à l'emprunteur et cette condition s'apprécie au moment de l'octroi du prêt. Or la commune ne soutient, ni a fortiori ne prouve, qu'au moment de la souscription des prêts litigieux, ses capacités financières étaient insuffisantes pour faire face aux remboursements » ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « Sur la demande de dommages et intérêts : La commune reproche en premier lieu à Dexia un manquement à son obligation de conseil. Elle fait également valoir que Dexia n'a pas respecté l'obligation de mise en garde qui pesait sur elle compte tenu de son caractère d'emprunteur non averti. Elle affirme enfin que Dexia ne l'a pas informée des risques liés à la variabilité du taux d'intérêt ni des modalités de remboursement anticipé des prêts. Elle en conclut que ces manquements ont entraîné un préjudice constitué d'une perte de chance de ne pas contracter. Dexia et la CAFFIL soutiennent quant à elles qu'aucune obligation de conseil ne pèse sur le banquier dispensateur de crédit. Elles font en outre valoir qu'aucune obligation de mise en garde ne pesait sur la société Dexia dès lors que les contrats de prêt litigieux ne présentaient pas de risque manifeste d'endettement et que la commune est un emprunteur averti. Elles exposent également qu'elle a délivré à la commune toutes les informations relatives aux contrats de prêt litigieux. Elles affirment enfin que la commune ne justifie d'aucun préjudice indemnisable ni d'un lien de causalité entre les fautes qu'elle reproche à la société Dexia et le préjudice qu'elle allègue. [
] En second lieu, en application des articles 1134 et suivants du code civil, dans leur version antérieure à l'ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016, le banquier dispensateur de crédit est tenu à l'égard de l'emprunteur d'une obligation d'information sur les caractéristiques du prêt, lui permettant de prendre la mesure exacte de la portée de son engagement, de ses avantages comme de ses inconvénients. A l'égard de ses clients non avertis, le banquier est tenu d'une obligation cl' information renforcée tendant à les mettre en garde lorsque le prêt comporte pour l'emprunteur un risque manifeste d'endettement excessif ou de difficultés pour faire face à son obligation de remboursement. L'appréciation du caractère averti ou non averti de l'emprunteur s'effectue in concreto. En l'espèce, il est établi que la commune menait une politique de gestion active de sa dette ainsi que cela résulte de la délibération du conseil municipal du 31 mars 2010 donnant délégation à son maire aux fins de « modifier l'encours de la dette existante en fonction des possibilités offertes par les établissements financiers telles que passer du taux variable au taux fixe ou du taux fixe au taux variable, modifier une ou plusieurs fois l'index relatif au calcul des taux d'intérêts, emprunter en devises, avec ou sans protection de change, en fonction des opportunités de marchés, réaliser des droits de tirages échelonnés, dans le temps avec faculté de remboursement et/ou de consolidation, de réduire ou rallonger la durée du prêt, de modifier la périodicité du prêt et le profil de remboursement ». Dexia fait valoir dans ses conclusions, sans être contestée sur ce point par la commune, que cette dernière a signé près d'une quarantaine de prêts avec elle, que d'autres emprunts ont été souscrits auprès d'établissements bancaires concurrents, tels que la Caisse d'Epargne ou le Crédit Agricole et qu'au 31 décembre 2011, la dette de la commune s'élevait à plus de 50 millions d'euros. Il n'est pas davantage contesté que les prêts litigieux avaient pour but de refinancer des prêts antérieurs reposant sur des formules d'intérêt similaires. Au surplus, la commune reconnaît que lorsqu'elle a conclu les contrats de prêt litigieux, elle était assistée d'un directeur financier ainsi que du cabinet Finance Active spécialisé dans la gestion de la dette des collectivités locales. La commune ne rapporte pas la preuve que ce cabinet ne serait intervenu que « dans la comptabilisation des emprunts en permettant de réaliser une interface avec le logiciel de comptabilité. » Enfin, l'arrêté du 16 décembre 1983 relatif aux conditions d'attribution de l'indemnité de conseil allouée aux comptables non centralisateurs des services déconcentrés du Trésor chargés des fonctions de receveur des communes et établissements publics locaux, stipule que « outre les prestations de caractère obligatoire qui résultent de leur fonction de comptable principal des communes et de leurs établissements publics prévu aux articles 14 et 16 de la loi 82-213 du 2 mars 1982, les comptables non centralisateurs du Trésor, exerçant les fonctions de receveur municipal ou de receveur d'un établissement public local sont autorisés à fournir aux collectivités territoriales et aux établissements publics concernés des prestations de conseil et d'assistance en matière budgétaire, économique, financière et comptable, notamment dans les domaines relatifs à (...) la gestion financière, l'analyse budgétaire, financière et de la trésorerie. ». La commune n'a pas jugé nécessaire de mettre en oeuvre la possibilité offerte par cet arrêté de solliciter des conseils dans le cadre de la passation des contrats de prêt litigieux alors même qu'elle soutient dans ses conclusions qu'elle ne disposait pas de compétences en matière financière. Il résulte de l'ensemble des éléments qui précèdent que la commune présentait, lors de la conclusion des contrats de prêt litigieux, les qualités ou les compétences lui permettant d'appréhender la portée exacte de ses engagements. Le caractère averti de la commune lors de la conclusion des contrats de prêt litigieux est ainsi établi. Au surplus, la commune ne rapporte pas la preuve que les prêts litigieux comportaient, lors de leur conclusion, un risque manifeste d'endettement excessif ou de difficulté à faire face à ses obligations de remboursement. Il en résulte que Dexia n'avait pas d'obligation de mise en garde à l'égard de la commune. [
] Il y a donc lieu, au regard de l'ensemble des éléments qui précèdent, de rejeter la demande de dommages et intérêts présentée par la commune » ;
1°/ ALORS, D'UNE PART, QUE le fait que les prêts litigieux aient permis de refinancer des prêts similaires ne suffit pas à qualifier la commune d'emprunteur averti si la banque n'a pas rempli son devoir de mise en garde de la commune lors de la conclusion des prêts initiaux ; qu'en se bornant à relever, pour qualifier la commune exposante d'emprunteur averti, que son encours avait été orienté dès 2006 principalement sur des prêts structurés et que les prêts litigieux de 2011 avaient pour but de refinancer les prêts antérieurs de 2006 et 2007, reposant sur des formules d'intérêt similaires (arrêt p. 10 § 6), sans rechercher, comme elle y était invitée (conclusions p. 23), si la banque n'avait pas omis, lors de la conclusion des prêts structurés initiaux de 2006, de mettre en garde la commune exposante sur les risques liés à la souscription de ce type de prêts, de sorte que cette dernière n'était pas un emprunteur averti lorsqu'elle a conclu les prêts structurés litigieux en 2011, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;
2°/ ALORS, D'AUTRE PART, QUE la considération que l'emprunteur puisse s'entourer de conseils n'a pas d'incidence sur son caractère averti ou non ; qu'en retenant néanmoins, pour qualifier la commune exposante d'emprunteur averti, qu'elle s'était fait assister d'un directeur financier et de conseils financiers du cabinet Finance Active et qu'elle s'était estimée elle-même informée et compétente dès lors qu'elle n'avait pas jugé utile de recourir aux services déconcentrés de l'Etat pour la conseiller dans le cadre de la passation des contrats de prêts (arrêt p. 10 § 5 et p. 11 § 1), la cour d'appel, qui a statué par des motifs inopérants, a derechef privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil dans sa rédaction applicable au litige ;
3°/ ALORS, AUSSI, QUE les juges du fond doivent répondre à l'ensemble des moyens opérants des parties ; que l'exposante faisait valoir, sans être contredite, que la société DEXIA CREDIT LOCAL était signataire de la Charte de bonne conduite entre les établissements bancaires et les collectivités locales du 3 novembre 2008 aux termes de laquelle les établissements bancaires reconnaissaient le caractère de non professionnel financier des collectivités locales (conclusions p. 25) ; qu'en qualifiant la commune exposante d'emprunteur averti dans ses rapports avec la société DEXIA CREDIT LOCAL, sans répondre à ce moyen manifestement opérant, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
4°/ ALORS, ENFIN, QUE la banque qui consent un prêt à un emprunteur non averti est tenue à son égard d'un devoir de mise en garde en considération de ses capacités financières et des risques de l'endettement né de l'octroi du prêt ; que la cour d'appel ne pouvait se borner à énoncer qu'en tout état de cause, la commune exposante ne soutenait, ni a fortiori ne prouvait, qu'au moment de la souscription des prêts litigieux, ses capacités financières étaient insuffisantes pour faire face aux remboursements (arrêt p. 11 § 3), sans rechercher, comme elle y était invitée (conclusions p. 22 et 27), si le risque d'endettement excessif n'était pas avéré dès lors que, d'une part, l'exposante avait été contrainte de renégocier les prêts litigieux auprès de la banque sans pouvoir envisager un remboursement anticipé du fait du montant totalement dissuasif des indemnités de remboursement anticipé et, d'autre part, les prêts structurés litigieux, dont les taux d'intérêts étaient indexés sur le franc suisse, l'exposaient au risque d'augmentation extrêmement significative des taux d'intérêts, la différence des cours entre les devises retenues (francs suisses et dollars) étant au surplus affectée d'un coefficient multiplicateur ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a encore privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil dans sa rédaction applicable au litige.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué D'AVOIR débouté l'exposante de toutes ses demandes, notamment de celles tendant à voir juger que les stipulations des articles 13 et 14 des contrats de prêts constituaient des clauses pénales manifestement excessives au regard du préjudice réellement subi par la CAFFIL et à voir condamner en conséquence cette dernière à lui restituer le montant des intérêts de retard perçus en application de ces clauses pénales, et D'AVOIR condamné l'exposante à payer à la CAFFIL la somme de 1.925.060,33 euros au titre des échéances impayées, majorée des intérêts à un taux égal au dernier taux de facilité de prêt marginal connu à la date d'exigibilité de chaque échéance, majoré d'une marge de 3% et aux frais irrépétibles;
AUX MOTIFS PROPRES QUE « Sur les clauses pénales : A titre infiniment subsidiaire, la Ville demande à la cour de réduire à un euro symbolique le montant des intérêts de retard réclamés par CAFFIL en application de l'article 13 du contrat de prêt n°1 et l'article 14 du contrat de prêt n°4, sur le fondement de l'article 1152 alinéa 2 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 (devenu l'article 1231-5 dudit code). Ces articles prévoient un intérêt de retard de plein droit, exigible sur toute somme due et non payée à sa date d'exigibilité, égal au dernier taux de Facilité de Prêt Marginal connu à la date d'exigibilité majoré d'une marge de 3% puisqu'ils stipulent ; "Toute somme due et non payée à sa date d'exigibilité porte intérêts de plein droit depuis cette date jusqu'à son remboursement intégral à un taux égal au dernier taux de facilité de Prêt Marginal connu à la date d'exigibilité, majoré d'une marge de 3%. Le Taux de Facilité de Prêt Marginal connu à la date d'exigibilité est le taux plafond de la Banque Centrale Européenne tel que publié sur l'écran Reuters page ECB01 (ou toute autre source ou référence qui s'y substituerait). En cas d'indisponibilité ou de disparition du Taux de Facilité de Prêt Marginal, les parties utiliseront l'index ou le taux de substitution retenu par les autorités compétentes". L'article 1152 du code civil, dans sa version antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, prévoit que « lorsque la convention porte que celui qui manquera de l'exécuter payera une certaine somme à titre de dommages-intérêts, il ne peut être alloué à l'autre partie une somme plus forte, ni moindre. Néanmoins, le juge peut, même d'office, modérer ou augmenter la peine qui avait été convenue, si elle est manifestement excessive ou dérisoire. Toute stipulation contraire sera réputée non écrite ». Constitue une clause pénale la stipulation selon laquelle le taux sera majoré en cas de défaillance de l'emprunteur et il en est de même en l'espèce s'agissant d'une clause fixant contractuellement la sanction applicable en cas de défaillance de l'emprunteur. Il n'est pas contesté que la commune est à jour du paiement des échéances des quatre prêts en principal, qu'elle a réglé le montant intégral des intérêts dus pour deux des quatre prêts et que s'agissant des deux autres (prêts n° [...] et n° [...]), elle a réglé les intérêts calculés au taux fixe pendant la période dite bonifiée. Toutefois le caractère excessif de la clause pénale réside dans la disproportion manifeste entre l'importance du préjudice effectivement subi par le prêteur et le montant conventionnellement fixé, or ce n'est qu'avec retard que la Ville a payé les échéances dont s'agit et elle ne démontre pas la disproportion entre le préjudice subi par CAFFIL du fait du non-paiement des échéances à leur date d'exigibilité et le montant la peine conventionnellement fixée. La demande sera donc rejetée » ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « Sur la demande reconventionnelle : Dexia et la CAFFIL demandent au tribunal d'enjoindre à la commune de reprendre les paiements au titre des contrats de prêt n° [...] et n° [...], de condamner la commune à payer à la CAFFIL la somme de 1.925.060,33 euros au titre des échéances impayées du contrat de prêt n° [...] pour les années 2013 à 2016 et des échéances impayées du contrat de prêt [...] pour les années 2012 à 2016, majorée des intérêts de retard tels que prévus aux articles 13 du contrat de prêt n° [...] et 14 du contrat de prêt n° [...], et d'ordonner la capitalisation des intérêts. La commune s'oppose à la demande en paiement au motif que la CAFFIL ne justifierait pas du détail et du calcul de la somme qu'elle sollicite. A titre subsidiaire, elle demande au tribunal de réduire le montant de la clause pénale prévue par les articles 13 du contrat de prêt n°[...] et 14 du contrat de prêt n°[...] à un euro symbolique. Dexia et la CAFFIL n'ont pas conclu sur ce point. [
] S'agissant des intérêts de retard, les articles 13 du contrat de prêt n° [...] et 14 du contrat de prêt n° [...] disposent que « toute somme due et non payée à sa date d'exigibilité porte intérêts de plein droit depuis cette date jusqu'à son remboursement intégral à un taux égal au dernier taux de Facilité de Prêt Marginal connu à la date d'exigibilité, majoré d'une marge de 3% ». L'article 1152 du code civil, dans sa version antérieure à l'ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016, prévoit que « lorsque la convention porte que celui qui manquera de l'exécuter payera une certaine somme à titre de dommages-intérêts, il ne peut être alloué à l'autre partie une somme plus forte, ni moindre. Néanmoins, le juge peut, même d'office, modérer ou augmenter la peine qui avait été convenue, si elle est manifestement excessive ou dérisoire. Toute stipulation contraire sera réputée non écrite ». La commune fait valoir, sans être contestée sur ce point par la CAFFIL, qu'elle est à jour du paiement des échéances des quatre prêts en principal, qu'elle a réglé le montant intégral des intérêts dus pour deux des quatre prêts et que s'agissant des deux autres (prêts n° [...] et [...]), elle a réglé les intérêts calculés au taux fixe pendant la période dite bonifiée. En l'absence de chiffrage, par la commune, du montant des intérêts de retard dus par elle en application de la clause pénale, les éléments précédemment évoqués sont insuffisants pour établir le caractère excessif de ladite clause au regard du préjudice subi par la CAFFIL. Il y a donc lieu de rejeter la demande de la commune tendant à voir réduire le montant de la clause pénale prévue aux contrats de prêt à un euro symbolique et d'assortir la condamnation de la commune à payer la somme de 1.925,060,33 euros des intérêts à un taux égal au dernier taux de facilité de prêt marginal connu à la date d'exigibilité de chaque échéance, majoré d'une marge de 3%, conformément aux dispositions des articles 13 du contrat de prêt n° [...] et 14 du contrat de prêt n° [...] » ;
ALORS QUE le juge peut réduire les clauses pénales manifestement excessives ; que, pour rejeter la demande de l'exposante tendant à voir réduire le montant des intérêts de retard réclamés par la CAFFIL en application des articles 13 et 14 des contrats de prêts, la cour d'appel ne pouvait se borner à énoncer que l'exposante ne démontrait pas la disproportion entre le préjudice subi par CAFFIL du fait du non-paiement des échéances à leur date d'exigibilité et le montant de la peine conventionnellement fixée (arrêt p. 12 § 4), sans rechercher, comme elle y était invitée (conclusions p. 30), si cette disproportion ne résultait pas du fait que le montant des intérêts de retard dûs en application des clauses pénales litigieuses s'élevait à la somme de 190.364,31 euros tandis que la CAFFIL n'avait subi aucun préjudice lié au non-paiement des échéances à leur date d'exigibilité puisqu'elle avait déjà perçu de l'exposante des intérêts (calculés au taux fixe utilisé pendant la période dite bonifiée de chacun des contrats de prêts concernés) sur le montant des échéances en principal réglées par cette dernière ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1152 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016.