COMM.
FB
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 4 novembre 2020
Rejet non spécialement motivé
Mme MOUILLARD, président
Décision n° 10325 F
Pourvoi n° F 18-19.075
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 4 NOVEMBRE 2020
1°/ Mme E... W... C..., veuve K... F..., domiciliée [...],
2°/ Mme U... F..., épouse Q..., domiciliée [...],
3°/ M. X... S... F..., domicilié [...] ,
ont formé le pourvoi n° F 18-19.075 contre l'arrêt rendu le 3 avril 2018 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 10), dans le litige les opposant au responsable du service des impôts des particuliers de Paris 16e La Muette, agissant sous l'autorité du directeur général des finances publiques, domicilié [...] , défendeur à la cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Lion, conseiller référendaire, les observations écrites de la SCP Sevaux et Mathonnet, avocat de Mme E... W... C..., veuve F..., et Mme U... F..., épouse Q..., et de M. X... S... F..., de la SCP Foussard et Froger, avocat du responsable du service des impôts des particuliers de Paris 16e La Muette, agissant sous l'autorité du directeur général des finances publiques, et l'avis de M. Debacq, avocat général, après débats en l'audience publique du 15 septembre 2020 où étaient présents Mme Mouillard, président, Mme Lion, conseiller référendaire rapporteur, M. Guérin, conseiller doyen, et Mme Labat, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.
1. Les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
2. En application de l'article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi.
EN CONSÉQUENCE, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme E... W... C..., veuve F..., et Mme U... F..., épouse Q..., et M. X... S... F... aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par Mme E... W... C..., veuve F..., et Mme U... F..., épouse Q..., et M. X... S... F... ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quatre novembre deux mille vingt. Moyens produits par la SCP Sevaux et Mathonnet, avocat aux Conseils, pour Mme E... W... C..., veuve F..., et Mme U... F..., épouse Q..., et M. X... S... F....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir dit l'acte introductif d'instance du trésorier principal du 16ème arrondissement de Paris, 3ème division, des 12 et 19 octobre 2010 valable, d'avoir déclaré l'action du trésorier du 16ème arrondissement de Paris, 3ème division, recevable, d'avoir dit que l'acte de donation dressé le 4 août 2005 par maître B... G..., notaire à Paris, entre madame E... W... C... épouse F... d'une part et madame U... F... et monsieur X... F... d'autre part, contenant donation de la nue-propriété des lots numéros 8 et 53, dépendant de l'immeuble sis à [...], cadastré section [...] , [...] et [...], est inopposable au trésorier du 16ème arrondissement de Paris, 3ème division, d'avoir ordonné la publication du jugement au bureau territorialement compétent de la conservation des hypothèques de Paris, d'avoir condamné les consorts F... à payer au trésorier principal du 16ème arrondissement de Paris, 3ème division, les sommes de 4.000 euros en première instance et 2.000 euros en appel, en application de l'article 700 du Code de procédure civile, et d'avoir débouté les consorts F... de toute autre demande ;
Aux motifs propres que l'assignation a été régulièrement délivrée à l'adresse connue par l'administration fiscale de Mme F... ; que la réalité du domicile parisien de Mme F... a en outre été confirmée par le gardien de l'immeuble ; qu'il appartenait à cette dernière d'avertir l'administration fiscale d'un éventuel changement d'adresse ; que les dispositions du décret du 8 juillet 1983 portant publication de la convention signée entre la République française et la République d'Egypte sur la coopération judiciaire civile en matière civile du 15 mars 1982 entrée en vigueur le 7 août 1983 sont donc inapplicables en l'espèce ; que l'assignation a été signifiée à la personne de M. X... F... en l'étude de l'huissier le 25 octobre 2010, après justification par ce dernier de son identité ; que l'assignation a été délivré à Mme U... F... dans les conditions prévues à l'article 5 de la convention de la Haye du 15 novembre 1965 relatif à la notification à l'étranger d'un acte judiciaire ou extrajudiciaire, soit par lettre recommandée avec avis de réception adressé au procureur du Roi près le tribunal de première instance de Casablanca, place des Nations Unies, Maroc ; qu'elle a été touchée par l'assignation ; qu'en tout état de cause, en application de l'article 114, alinéa 2 du code de procédure civile, la nullité de l'acte introductif d'instance ne peut être prononcée que si celui qui l'invoque prouve le grief que lui a causé la nullité ; qu'en l'espèce, Mme F..., Mme F..., épouse Q... et M. F... qui ont constitué avocat en première instance et fait valoir leurs arguments ne justifient d'aucun grief ; que le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de nullité ;
Et aux motifs adoptés des premiers juges que, sur la nullité de l'assignation des 12 et 19 octobre 2010, les consorts F... soulèvent la nullité de l'acte introductif d'instance au motif que celui-ci ne ferait pas état des domiciles réels des défendeurs ; que, si l'article 648 du code de procédure civile impose que les actes d'huissiers comprennent un certain nombre de mentions obligatoires, cela n'a qu'une vertu de sécurité juridique afin de s'assurer que toutes les diligences ont été effectuées afin que la personne visée ait été effectivement touchée par l'acte ; que l'assignation de E... W... F... lui a été signifiée à [...], alors qu'elle serait domiciliée en Egypte ; qu'en l'espèce, il ressort des termes mêmes de l'acte, qui font foi jusqu'à inscription de faux, que « la signification à personne à domicile ou à résidence, s'étant avérée impossible en raison des circonstances suivantes : - le destinataire est absent lors de notre passage, - aucune personne n'est présente au domicile au moment de notre passage ; le domicile nous a été confirmé par le gardien ; un avis de passage daté a été laissé ce jour au domicile ou à la résidence du destinataire, l'avertissant de la remise de la copie et mentionnant la nature de l'acte, le nom du requérant ainsi que les indications relatives à la mention du dépôt de l'acte en notre étude ; (
) l'intéressé a été avisé de la signification au plus tard le premier jour ouvrable suivant la date du présent, par lettre simple comportant les mêmes mentions que l'avis de passage, le tout conformément aux articles 656 et 568 du code de procédure civile » ; que le domicile de l'intéressée ayant été confirmé par le gardien de l'immeuble, et celle-ci n'ayant informé l'administration fiscale d'aucun changement d'adresse, le trésorier principal du 16ème arrondissement de Paris n'avait pas à rechercher une autre adresse, y compris à l'étranger, à laquelle signifier la présente assignation ; qu'en conséquence, les dispositions du décret n° 83-654 du 8 juillet 1983 portant publication de la convention entre la République française et la République arabe d'Egypte sur la coopération judiciaire en matière civile du 15 mars 1982, entrée en vigueur le 7 août 1983, sont inapplicables en l'espèce ; que l'assignation de X... F... lui a été signifiée en personne en l'étude d'huissier le 25 octobre 2010, après justification par ce dernier de son identité à l'officier ministériel ; que l'assignation délivrée à U... F... lui a été signifiée dans les conditions prévues à l'article 5 de la convention de La Haye du 15 novembre 1965 relatif à la notification à l'étranger d'une acte judiciaire ou extrajudiciaire, soit par lettre recommandée avec avis de réception adressée au procureur du roi près le tribunal de première instance de Casablanca, place des Nations Unies, Casablanca, Maroc ; que, si la mention du domicile constitue l'une des mentions obligatoires des actes d'huissier devant être signifiés, encore faut-il que le requérant ait été régulièrement informé des changements d'adresse des destinataires de ces actes ; qu'à défaut, l'assignation n'encourt pas la nullité dès lors que le destinataire a effectivement été touché par ledit acte ; qu'il n'est pas contesté, en l'espèce, que U... F... a bien été touchée par la présente assignation ; qu'en tout état de cause, l'article 114 alinéa 2 du code de procédure civile dispose que la nullité ne peut être prononcée qu'à la charge pour l'adversaire qui l'invoque de prouver le grief que lui cause l'irrégularité ; que le tribunal relève que les défendeurs ont tous constitué avocat dès la date de constitution ; qu'en conséquence, les consorts F... ne rapportant pas la preuve d'un quelconque grief qui leur aurait été causé par ces irrégularités procédurales, la demande de nullité de l'acte introductif d'instance des 12 et 19 octobre 2010 sera donc rejetée ;
Alors, de première part, qu'en se bornant à relever que la réalité du domicile parisien de madame E... W... F... avait été confirmée par le gardien de l'immeuble, sans préciser sur quel type d'occupation des lieux portait cette confirmation, là où madame E... W... F... indiquait que l'immeuble accueillait une résidence secondaire occupée par elle lors de ses passages à Paris uniquement, son domicile réel et connu de l'administration fiscale étant situé en Egypte (conclusions des consorts F..., p. 6), la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 102 du code civil ;
Alors, de seconde part, qu'en ne répondant pas à ce moyen, tiré de ce que les vices entachant les assignations délivrées par l'administration fiscale en violation des conventions internationales de coopération judiciaire constituaient des vices de fond entraînant la nullité desdits actes sans qu'il soit nécessaire d'établir l'existence d'un grief (conclusions des consorts F..., p. 7 § 7) , la cour d'appel a entaché son arrêt d'une méconnaissance de l'article 455 du code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt confirmation attaqué d'avoir dit que l'acte de donation dressé le 4 août 2005 par maître B... G..., notaire à Paris, entre madame E... W... C... épouse F... d'une part et madame U... F... et monsieur X... F... d'autre part, contenant donation de la nue-propriété des lots numéros 8 et 53, dépendant de l'immeuble sis à [...], cadastré section [...] , [...] et [...], est inopposable au trésorier du 16ème arrondissement de Paris, 3ème division, d'avoir ordonné la publication du jugement au bureau territorialement compétent de la conservation des hypothèques de Paris, d'avoir condamné les consorts F... à payer au trésorier principal du 16ème arrondissement de Paris, 3ème division, les sommes de 4.000 euros en première instance et 2.000 euros en appel, en application de l'article 700 du Code de procédure civile, et d'avoir débouté les consorts F... de toute autre demande ;
Aux motifs propres que le principe de créance fiscale existe dès le fait générateur de l'impôt ; qu'en l'espèce, l'administration fiscale disposait antérieurement à la donation avec réserve d'usufruit du 4 août 2005 d'un principe certain de créance envers les époux F... né dès la perception par les époux F... de revenus au titre des années imposables, soit les années 1999 à 2002 ; qu'il est souligné qu'au surplus, les propositions de rectification des 22 décembre 2004 et 3 mai 2005 sont antérieures à l'acte en cause et qu'en contestant le principe de créance, les consorts F... contestent en réalité les propositions de rectification qui n'ont fait l'objet d'aucun recours par les époux F... (
) ; que l'administration fiscale justifie du fait qu'avant l'acte de donation litigieux, Mme F... avait fait donation à son fils le 10 février 2005 de la moitié de la propriété d'un bien immobilier situé à [...] d'une valeur de 95 000 euros, M. F... ne contestant pas avoir revendu ses droits dans ce bien ; qu'il n'est pas contesté que les époux F... ont cédé à des tiers le 18 janvier 2006 un parking à Paris au prix de 43.500 euros et le 23 mars 2006 un studio à Paris au prix de 163.600 euros ; qu'après ces actes de disposition, intervenus après le contrôle fiscal et avant les mises en recouvrement des impositions en résultant, le patrimoine des époux F... était constitué de l'usufruit du bien immobilier de Nice appartenant à Mme F... dont la nue-propriété a fait l'objet de la donation litigieuse ; qu'il est souligné que les avis à tiers détenteurs se sont révélés infructueux à l'exception des sommes de 2.300 euros et 1.444 euros ; que ces éléments établissent que les débiteurs ont organisé leur insolvabilité en diminuant le gage de leur créancier en France et il ne saurait être reproché à l'administration fiscale de ne pas avoir tenté ou épuisé au plan international les possibilités de recouvrement de sa créance avant de constater leur insolvabilité apparente ; qu'en effectuant la donation litigieuse le 4 août 2005 en cours de contrôle fiscal et après les propositions de rectification des 22 décembre 2004 et du 3 mai 2005, Mme F... ne pouvait ignorer le contrôle en cours, l'existence de la dette fiscale et le fait qu'elle s'appauvrissait et diminuait le gage du créancier ; que c'est donc à juste titre que les premiers juges ont estimé que l'administration fiscale démontrait la fraude paulienne reprochée à Mme F... :
Et aux motifs adoptés qu'en application de l'article 1167 du code civil, les créanciers peuvent attaquer les actes faits par leur débiteur en fraude de leurs droits ; qu'il résulte suffisamment des pièces versées aux débats que le trésor public disposait bien antérieurement au jour des actes litigieux (donations des 10 février et 4 août 2005) d'un principe certain de créance, l'antériorité de la créance fiscale s'appréciant non à la date de la notification de redressement, à la date de la constatation de la liquidation ou de la mise en recouvrement, mais par rapport au fait générateur de l'impôt ; qu'en effet, le principe de créance qui découlait de la dette fiscale résultant des revenus des époux F... au cours des années 1999 à 2002 constitue le fait générateur de l'imposition et est né antérieurement aux donations litigieuses ; que l'intégralité de la créance du trésor, soit la somme de 1.796.987,55 euros, doit donc être prise en compte ; que cette créance, qui fonde l'action paulienne, est immédiatement exigible en raison de l'absence de réclamation contentieuse ; qu'il est rappelé qu'il n'est pas nécessaire que la preuve d'une insolvabilité totale soit rapportée mais qu'il suffit que l'acte litigieux ait créé ou augmenté l'insolvabilité ; qu'en l'espèce, les donations faites par E... W... F... à ses enfants, avec réserve d'usufruit (le 4 août 2005) et sans réserve d'usufruit (le 10 février 2005) ont manifestement pour seul objectif de mettre les biens donnés à l'abri des poursuites ; que ces biens, situés à [...] , et à Nice, [...] , constituent le seul patrimoine important des époux F... en France, lesquels en se dépouillant ont bien préjudicié gravement aux droits de leur créancier, l'insolvabilité avérée des époux F... rendant impossible le recouvrement de la créance du Trésor ; que l'action paulienne étant une action civile qui tend à reconstituer le patrimoine du débiteur par la seule déclaration d'inopposabilité d'un acte sans se confondre avec une mesure d'exécution, l'exigibilité de la créance n'étant pas une condition nécessaire ; que cet acte s'inscrivant dans le cadre d'une opération familiale ayant pour finalité de soustraire le bien aux poursuites du créancier et aggravant l'insolvabilité du débiteur, doit donc être déclaré inopposable au trésorier et le bien litigieux doit rentrer dans le patrimoine des époux F... où le créancier demandeur pourra seul éventuellement le saisir ;
Alors, de première part, qu'il ne peut résulter aucune créance certaine en son principe d'une proposition de rectification notifiée par l'administration fiscale marquant le terme du contrôle fiscal sous réserve de la réalisation d'une condition, peu important que cette proposition, conditionnelle, n'ait fait l'objet d'aucune contestation ; qu'en se prononçant au motif, inopérant, que les propositions de rectification n'avaient pas été contestées et en s'abstenant de rechercher, ainsi qu'elle y était invitée (conclusions des consorts F..., p. 11), si la circonstance que la proposition de rectification du 22 décembre 2004 avait été faite sous réserve d'une réponse des autorités égyptiennes à une demande d'assistance administrative n'excluait pas toute créance certaine en son principe, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1167 ancien du code civil ;
Alors, de deuxième part, que l'insolvabilité même apparente du débiteur, condition du bien fondé de l'action paulienne, n'est pas démontrée lorsque le débiteur avait la possibilité d'agir en recouvrement de sa créance, y compris à l'étranger, et n'apporte pas la preuve d'avoir tenté de le faire ; qu'en se bornant à constater que le seul patrimoine connu des époux F... était constitué de l'usufruit du bien dont la nue-propriété avait fait l'objet de la donation litigieuse, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée (conclusions des consorts F..., p. 12), si l'administration fiscale avait ne serait-ce que tenté de recouvrer sa créance au plan international, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1167 ancien du code civil ;
Alors, de troisième part, que la fraude paulienne suppose que le débiteur ait connaissance du préjudice causé au créancier par l'acte litigieux ; qu'en se bornant à constater que madame F... avait conscience de l'existence de la dette fiscale, de s'appauvrir et de diminuer le gage du créancier sans constater que l'intéressée savait qu'un préjudice en résultait pour ce créancier, ni même que cette diminution du gage était d'une ampleur telle qu'elle priverait le créancier de toute possibilité de recouvrer sa créance, la cour d'appel a privé sa décision au regard de l'article 1167 ancien du code civil.