COMM.
CM
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 14 avril 2021
Rejet non spécialement motivé
Mme MOUILLARD, président
Décision n° 10200 F
Pourvoi n° N 18-19.932
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 14 AVRIL 2021
1°/ M. [L] [Z],
2°/ Mme [V] [R], épouse [Z],
tous deux domiciliés [Adresse 1]),
ont formé le pourvoi n° N 18-19.932 contre l'arrêt rendu le 27 mars 2018 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (1re chambre A), dans le litige les opposant au directeur général des finances publiques, agissant poursuites et diligences du directeur départemental des finances publiques des Alpes-maritimes, domicilié [Adresse 2], défenderesse à la cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Lion, conseiller référendaire, les observations écrites de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de M. et Mme [Z], de la SCP Foussard et Froger, avocat du directeur général des finances publiques, agissant poursuites et diligences du directeur départemental des finances publiques des Alpes-maritimes, et l'avis de Mme Beaudonnet, avocat général, après débats en l'audience publique du 2 mars 2021 où étaient présentes Mme Mouillard, président, Mme Lion, conseiller référendaire rapporteur, Mme Darbois, conseiller, et Mme Labat, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.
1. Les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
2. En application de l'article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi.
EN CONSÉQUENCE, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. et Mme [Z] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. et Mme [Z] et les condamne à payer au directeur général des finances publiques, agissant poursuites et diligences du directeur départemental des finances publiques des Alpes-maritimes, la somme globale de 3 000 euros ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze avril deux mille vingt et un. MOYENS ANNEXES à la présente décision
Moyens produits par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils, pour M. et Mme [Z]
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. et Mme [Z] de leur demande tendant à la décharge des impositions supplémentaires d'impôt de solidarité sur la fortune auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2009, 2010 et 2011, tant en droits simples qu'en pénalités ;
AUX MOTIFS QU' il est constant qu'en application de l'article 17 alinéa 1 du livre des procédures fiscales, l'administration des impôts peut rectifier le prix ou l'évaluation d'un bien ayant servi de base à la perception de droits d'enregistrement lorsque ce prix ou cette évaluation paraît inférieur à la valeur vénale réelle des biens transmis ou désignés dans les actes ou déclarations à taxer ; que la rectification correspondante est alors effectuée selon la procédure de rectification contradictoire prévues aux articles L.55 et suivants du livre des procédures fiscales ; qu'en vertu de l'article L.57 du même code, l'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation ; qu'en l'espèce, l'administration fiscale a régulièrement adressé le 6 août 2012 aux époux [Z] une proposition de rectification en opérant un redressement de la valeur vénale de la [Adresse 3] au titre des trois exercices concernés, que cette proposition indique de façon claire la nature et les motifs des rehaussements envisagés ainsi que les éléments chiffrés et les termes de comparaison justifiant les redressements et qu'elle était donc suffisamment motivée pour permettre au contribuable d'en comprendre la signification et d'y répliquer en conséquence ; qu'il n'est pas contesté qu'en réponse aux observations formulées dans le délai légal par lettre du conseil des époux [Z] en date du 17 octobre 2012 et suite à la transmission par eux, le 30 janvier 2013, du rapport établi par un géomètre expert sur la superficie de la villa litigieuse, l'administration a répondu favorablement de manière partielle à leurs observations, puisqu'elle a maintenu pour partie les rectifications notifiées, en prenant en compte précisément les éléments qui lui avaient été transmis par les appelants, par lettre du 8 février 2013 ; qu'à la lecture de cette lettre, il apparaît que l'administration fiscale a répondu point par point à l'ensemble des observations formulées par les époux [Z], même si elle n'a pas fait droit à l'ensemble de leurs prétentions, ce qui ne saurait s'analyser en un défaut de réponse ; que de même, le désaccord persistant après réception de la réponse aux observations du contribuable, la commission départementale de conciliation a été saisie conformément aux dispositions des articles L59 et L59 B du livre des procédures fiscales, étant observé que le service des impôts a pris en compte l'avis formulé par cette commission en adressant à M. et Mme [Z] le 8 novembre 2013 une décision modificative de rectification ;
que le caractère contradictoire de la procédure de rectification a été respecté par l'administration, qui n'avait pas à leur accorder un nouveau rendez-vous ni à soumettre leur litige à l'interlocuteur départemental, de telles modalités ne s'appliquant pas au contrôle dont ils faisaient l'objet et qui était soumis aux dispositions des articles L17, L57 et R57-1 du livre des procédures fiscales, selon une procédure contradictoire mais écrite ; que les différences de superficies constatées, l'administration ayant opéré son rehaussement à partir d'une surface retenue de 555 m², contre 384,40m² au final, ne sont pas de nature à vicier la procédure suivie, dès lors que le service vérificateur prend en considération les superficies figurant dans la documentation cadastrale mise à jour à partir des modèles H& souscrites par les propriétaires eux-mêmes, d'autant qu'en l'espèce, le service des impôts a corrigé, dans le cadre de la procédure contradictoire, la superficie de la [Adresse 3], en tenant compte précisément des observations formulées par le contribuable ;
ALORS QU' il incombe à l'administration, redressant une valeur d'assiette d'un bien, d'établir dès la notification de redressement, le bien-fondé de son évaluation au moyen de la comparaison avec la cession de biens intrinsèquement comparables ; qu'il résulte des motifs du jugement attaqué adoptés par l'arrêt de la cour d'appel et de l'avis de la commission de conciliation que les sept cessions de biens immobiliers citées par l'administration des impôts à titre de point de comparaison, dans sa proposition de rectification du 6 août 2012, et sur lesquelles elle s'est fondée pour justifier son évaluation de la villa des exposants, ont toutes été écartées, soit par le tribunal de grande instance, soit par la commission de conciliation, comme ne portant pas sur des biens intrinsèquement comparables ; qu'en définitive, la villa litigieuse a été évaluée à partir des seules cessions proposées par les contribuables eux-mêmes, à l'exclusion de celles retenues par l'administration des impôts ; qu'en jugeant néanmoins que la proposition de rectification du 6 août 2012 répondait aux exigences des articles L.57 et L17 du livre des procédures fiscales, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et violé les textes susvisés.
DEUXIÈ
ME MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. et Mme [Z] de leur demande tendant à la décharge des impositions supplémentaires d'impôt de solidarité sur la fortune auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2009, 2010 et 2011, tant en droits simples qu'en pénalités.
AUX MOTIFS QUE le désaccord persistant après réception de la réponse aux observations du contribuable, la commission départementale de conciliation a été saisie conformément aux dispositions des articles L 59 18 et L 59 B du livre des procédures fiscales .l'avis de la commission départementale de conciliation doit être, conformément à l'article R 60-3 du livre des procédures fiscales, motivé de manière à permettre aux parties, à défaut d'accord, de poursuivre utilement leur discussion devant le juge au vu des éléments qu'elle a pris en considération ; que l'obligation de motiver cet avis prévue à l'article susvisé est une formalité substantielle dont la violation entraîne la nullité de l'imposition ; qu'en l'occurrence, dans sa séance du 10 octobre 2013, la commission a procédé à l'audition des parties : l'administration, le conseil des époux [Z] et un expert immobilier mandaté par eux ; qu'aux termes de l'avis qu'elle a rendu le 11 octobre 2013, la commission a décrit précisément le bien et ses caractéristiques, établi sa valorisation, après avoir écarté quatre termes de comparaison proposés par l'administration estimés par elle comme non pertinents, pour retenir trois termes proposés par celle-ci et deux, par les contribuables, en motivant chaque fois ses choix ; qu'elle a appliqué un coefficient d'abattement pour tenir compte d'un certain nombre de particularités de la [Adresse 3], comme se trouvant adossée à une paroi rocheuse et à proximité de parcelles de terrain en friche ; que la commission a calculé la valeur vénale du bien au titre des années litigieuses sur la base d'un prix au mètre carré pour retenir une valeur et a annexé les termes de comparaison retenus dans sa décision ; qu'en considération de ces éléments, l'avis de la commission départementale de conciliation en date du 11 octobre 2013 est suffisamment motivé et répond aux exigences de l'article R 60-3 du livre des procédures fiscales ; que c'est donc à juste titre que le premier juge a déclaré régulière la procédure de rectification diligentée par l'administration fiscale au titre de l'ISF dû au titre des exercices 2009-2010-2011 par M. et Mme [Z] ;
1°) ALORS QUE l'avis de la commission de conciliation fondé sur une méthode radicalement viciée en son principe équivaut à une absence d'avis ; qu'il résulte de l'avis de la commission de conciliation du 11 octobre 2013 et des mentions de l'arrêt attaqué que ladite commission a évalué la villa de M. et Mme [Z] à partir de trois cessions proposées par l'administration des impôts portant sur des villas de haut prestige et deux cessions proposées par M. et Mme [Z] portant sur des villas de moins grand standing ; que l'écart de prix au m² entre les deux types de villas était de l'ordre de 16 000 euros au m² ; qu'une telle méthode d'évaluation fondée sur des biens non intrinsèquement similaires est viciée dans son principe ; qu'en refusant d'annuler la procédure d'imposition au seul motif que la commission avait été saisie sans rechercher si, comme le soutenaient M. et Mme [Z], la méthode d'évaluation adoptée par la commission départementale de conciliation n'était pas viciée en son principe, ce qui rendait nul son avis, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L 59 et L 59 B du livre des procédures fiscales ;
2°) ALORS QUE l'avis de la commission départementale de conciliation doit être motivé à peine de nullité de la procédure d'imposition; que M. et Mme [Z] ont fait valoir dans leurs conclusions régulièrement déposées que la commission départementale de conciliation avait retenu à côté de deux cessions proposées par les époux [Z], trois autres cessions proposées par l'administration portant sur deux villas de haut prestige, non comparables à la leur ; qu'il s'ensuivait une valeur au m² variant de 39 007 euros à 23 333 euros, sans que cet écart ne soit justifié ; qu'une telle estimation était en outre contradictoire ; qu'en jugeant néanmoins l'avis de la commission de conciliation suffisamment motivé sans répondre à un tel moyen, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile.
TROISIÈ
ME MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. et Mme [Z] de leur demande tendant à la décharge des impositions supplémentaires d'impôt de solidarité sur la fortune auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2009, 2010 et 2011, tant en droits simples qu'en pénalités ;
AUX MOTIFS QUE M. et Mme [Z] contestent l'application par l'administration fiscale de la majoration de 40 % en cas de manquement délibéré prévue par l'article 1729 a) du code général des impôts ; qu'il n'est pas contesté que cette majoration ne peut être appliquée que si l'administration établit le caractère délibéré de l'omission ou de l'inexactitude ; qu'en l'espèce, les époux [Z] ont déclaré, au titre des années litigieuses, leur propriété pour une valeur de 1 019 173 euros ; que la seule disproportion entre la valeur déclarée à cette époque des déclarations avec la valeur vénale de la [Adresse 3], qu'ils ont au demeurant spontanément reconnue eux-mêmes au travers de la cession de cette propriété qu'ils ont effectuée en faveur de leurs enfants en 2012, témoigne d'une volonté délibérée de leur part de sous-évaluer leur bien sept fois sa valeur réelle ; qu'ils ne justifient d'ailleurs pas des éléments qui les ont conduits à estimer la villa litigieuse à 1 019 173€ , l'application par eux d'un pourcentage de réévaluation de 5,5 % en moyenne par an étant manifestement insuffisante au regard de l'évolution du marché immobilier de la [Localité 1] particulièrement de la commune de [Localité 2] et n'est que la traduction d'une intention délibérée de leur part de minorer la valeur de cette propriété, située dans le quartier prestigieux de la presqu'île et qui est édifiée sur un terrain de 5800 m² comprenant deux unités d'habitations, 10 pièces principales pour une superficie de 384 m² et une piscine de 60m² ; que dans ces conditions, l'administration fiscale est fondée à appliquer une pénalité de 40 % calculée sur les impositions dont il s'agit.
1°) ALORS QUE le caractère délibéré d'un manquement au regard des obligations fiscales ne peut s'apprécier qu'au jour où la déclaration d'impôt doit être souscrite, c'est-à-dire pour l'ISF de l'année n, au mois de juin de l'année n ; qu'en jugeant que M. et Mme [Z] avaient connaissance de la valeur vénale de leur villa en 2009, 2010 et 2011, au cours des années litigieuses, dès lors qu'ils l'ont vendue à leurs enfants en 2012, à une valeur proche de celle retenue par le tribunal, sans rechercher s'ils avaient connaissance de cette valeur au moment où ils ont souscrit les déclarations litigieuses, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1729 du code général des impôts ;
2°) ALORS QUE la seule disproportion, même marquée, entre la valeur déclarée d'un bien et sa valeur vénale ne peut à elle seule caractériser la connaissance par les contribuables de sa valeur vénale et par voie de conséquence le caractère délibéré du manquement au moment de sa déclaration ; qu'en jugeant que M. et Mme [Z] avaient eu la volonté délibérée de sous évaluer leur bien de sept fois sa valeur réelle du fait de cette seule disproportion sans relever un autre élément de nature à justifier cette connaissance, la cour d'appel a derechef privé sa décision de base légale au regard de l'article 1729 du code général des impôts.