LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 3
JL
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 6 mai 2021
Rejet
M. CHAUVIN, président
Arrêt n° 383 F-D
Pourvois n°
Z 19-24.846
R 19-25.298 JONCTION
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 6 MAI 2021
M. [B] [H], domicilié [Adresse 1], a formé les pourvois n° Z 19-24.846 et R 19-25.298 contre un arrêt rendu le 10 septembre 2019 par la cour d'appel de Grenoble (1re chambre civile), dans le litige l'opposant :
1°/ à Mme [O] [Y], épouse [X],
2°/ à M. [U] [V],
3°/ à Mme [G] [T], épouse [G],
tous trois domiciliés [Adresse 2],
4°/ à la société des docteurs [Personne physico-morale 1], société civile de moyens,
5°/ à la société La Perrière, société civile immobilière,
ayant toutes deux leur siège [Adresse 2],
défendeurs à la cassation.
Le demandeur aux pourvois n° Z 19-24.846 et R 19-25.298 invoque, à l'appui de ses recours, les deux moyens identiques de cassation annexés au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Parneix, conseiller, les observations de la SCP Richard, avocat de M. [H], de la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, avocat de la société des docteurs [Personne physico-morale 1], de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de la société La Perrière, après débats en l'audience publique du 23 mars 2021 où étaient présents M. Chauvin, président, M. Parneix, conseiller rapporteur, M. Echappé, conseiller doyen, et Mme Berdeaux, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Jonction
1. En raison de leur connexité, les pourvois n° Z 19-24.846 et R 19-25.298 sont joints.
Faits et procédure
2. Selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 10 septembre 2019), le 17 janvier 2000, la société civile immobilière La Perrière a donné à bail des locaux à la société civile professionnelle Cabinet médical des docteurs [Personne physico-morale 2].
3. Le bail comportait une clause stipulant qu'en cas de résiliation, à l'initiative du preneur, le bailleur ne pourrait relouer les lieux à un cabinet de médecins, de même spécialité, pendant une durée de deux ans.
4. En cours de bail, Mme [G] a remplacé le docteur [L] en qualité d'associé et a fait intervenir Mme [Y] en qualité de remplaçante.
5. En vue d'une transformation en société civile de moyens, à laquelle s'opposait M. [H], une assemblée générale extraordinaire a décidé, le 17 décembre 2010, de dissoudre la société civile professionnelle au 31 mars 2011, M. [Q] étant désigné en qualité de liquidateur.
6. Le 25 janvier 2011, M. [H], en qualité de co-gérant de la société civile professionnelle, a, sans l'accord de ses associés, donné congé à la SCI La Perrière, puis, le 1er avril 2011, s'est installé dans un nouveau cabinet médical situé dans la même commune.
7. Le 12 décembre 2011, la société civile de moyens (la SCM) des docteurs [Personne physico-morale 3], créée le 16 avril 2011, a signé avec la SCI La Perrière un protocole réglant les conséquences financières de la résiliation du bail et l'autorisant à poursuivre son activité dans les mêmes locaux à compter du 1er avril 2011.
8. Soutenant que le maintien de ses anciens associés dans les lieux était contraire à la clause de non-rétablissement stipulée dans le bail initial et constitutive d'une concurrence déloyale, M. [H] a assigné la SCI La Perrière, la SCM, ainsi que M. [Q], M. [V], Mme [G] et Mme [Y] en réparation de son préjudice.
Examen des moyens
Sur le premier moyen, pris en ses première et deuxième branches, ci-après annexé
9. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le premier moyen, pris en ses troisième et quatrième branches, et le second moyen, réunis
Enoncé du moyen
10. Par son premier moyen, pris en ses troisième et quatrième branches, M. [H] fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande, alors :
« 3°/ que le tiers à un contrat est recevable à invoquer, sur le fondement de la responsabilité délictuelle, un manquement contractuel dès lors que ce manquement lui a causé un dommage ; qu'en décidant néanmoins que le docteur [H] était irrecevable, pour défaut de qualité, à agir à l'encontre de la société La Perrière sur le fondement d'une violation par cette dernière de la clause de non-réinstallation stipulée dans le contrat de bail du 17 janvier 2000, conclu entre la société La Perrière et la société Cabinet médical des docteurs [Personne physico-morale 4], motif pris que cette clause était seulement destinée à protéger cette dernière et non chacun des associés pris individuellement, bien que le docteur [H] ait été recevable, en sa qualité de tiers au contrat de bail du 17 janvier 2000, à agir à l'encontre de la société La Perrière, bailleur, sur le fondement de la responsabilité délictuelle, la cour d'appel a violé les articles 31 et 32 du code de procédure civile, ensemble les articles 1165 et 1382 du code civil, dans leurs rédactions antérieures à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ;
4°/ que, subsidiairement, le tiers à un contrat est fondé à obtenir réparation, sur le fondement de la responsabilité délictuelle, du préjudice que lui cause la méconnaissance de ses obligations par l'une des parties à ce contrat ; qu'en décidant néanmoins que le docteur [H] ne pouvait rechercher la responsabilité de la société La Perrière, pour avoir méconnu la clause de non-réinstallation stipulée au contrat de bail du 17 janvier 2000 conclu entre la société La Perrière et la société Cabinet médical des docteurs [Personne physico-morale 4], motif pris que cette disposition était seulement destinée à protéger cette dernière et non chacun des associés pris individuellement, bien que le docteur [H] ait été fondé, en sa qualité de tiers au contrat de bail du 17 janvier 2000, à obtenir réparation du préjudice que la société La Perrière lui avait causé en méconnaissance de ses obligations contractuelles, la cour d'appel a violé les articles 1165 et 1382 du code civil, dans leurs rédactions antérieures à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016. »
11. Par son second moyen, M. [H] fait le même grief à l'arrêt, alors :
1°/ que toute personne qui, avec connaissance, aide autrui à enfreindre les obligations contractuelles pesant sur elle, commet une faute délictuelle à l'égard de la victime de l'infraction ; qu'en se bornant à affirmer, pour débouter le docteur [H] de ses demandes de dommages et intérêts, que la difficulté existante, faisant suite à la dissolution de la société Cabinet médical des docteurs [Personne physico-morale 4], relative à la mise en place d'un message sur le répondeur de la société indiquant les coordonnées du docteur [H], avait été rapidement résolue, sans rechercher, comme elle y était invitée, si la seule circonstance que les médecins aient continué d'exercer au sein d'une nouvelle société, dans les mêmes locaux, en méconnaissance de la clause de non-réinstallation prévue au bail du 17 janvier 2000, était constitutive d'une faute, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1165 et 1382 du code civil, dans leurs rédactions antérieures à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ;
2°/ que toute personne qui, avec connaissance, aide autrui à enfreindre les obligations contractuelles pesant sur elle, commet une faute délictuelle à l'égard de la victime de l'infraction ; que la méconnaissance d'une clause de non-réinstallation crée nécessairement un préjudice, fût-il seulement moral ; qu'en décidant néanmoins que le docteur [H] ne démontrait pas l'existence d'un préjudice résultant de la réinstallation par les docteurs [Q]-[V]-[G]-[Y], dans les mêmes locaux que ceux pris à bail par la société Cabinet médical des docteurs [Personne physico-morale 4], en méconnaissance de la clause de non-réinstallation stipulée au bail du 17 janvier 2000, bien que la violation de la clause de non-réinstallation ai nécessairement causé un préjudice au docteur [H], fût-il seulement moral, la cour d'appel a violé les articles 1165 et 1382 du code civil, dans leurs rédactions antérieures à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ;
3°/ que, subsidiairement, toute personne qui, avec connaissance, aide autrui à enfreindre les obligations contractuelles pesant sur elle, commet une faute délictuelle à l'égard de la victime de l'infraction ; qu'en se bornant à affirmer, pour décider que le docteur [H] ne démontrait pas l'existence d'un préjudice résultant de la réinstallation par les docteurs [Q]-[V]-[G]-[Y] dans les mêmes locaux que ceux pris à bail par la société Cabinet médical des docteurs [Personne physico-morale 4], en méconnaissance de la clause de non-réinstallation stipulée au bail du 17 janvier 2000, que les documents comptables produits par le docteur [H] ne permettaient pas de retenir l'existence d'une perte de patientèle, ni d'un préjudice moral, sans rechercher, comme elle y était invitée, si ce préjudice résultait du seul fait que la société civile de moyens des docteurs [Personne physico-morale 3], ainsi que ses associés, exerçaient une activité concurrente à proximité du cabinet du docteur [H], le privant ainsi d'une partie de la clientèle potentielle présente dans le secteur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1165 et 1382 du code civil, dans leurs rédactions antérieures à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016. »
Réponse de la Cour
12. La cour d'appel a retenu, par motifs propres, que les difficultés liées à la mise en place d'un message téléphonique à la suite du départ de M. [H] n'avaient pas empêché ses patients de le joindre et que les seuls documents comptables produits pour les années 2010 à 2012 ne permettaient pas de caractériser une perte de patientèle.
13. Elle a encore retenu, par motifs adoptés, que M. [H], qui avait refusé d'intégrer la nouvelle société, ne pouvait invoquer une éviction unilatérale et forcée, qu'il avait pu se réinstaller à quelques centaines de mètres de son ancien cabinet et que la relation de confiance développée avec le patient prévalait sur l'emplacement du cabinet lorsque le praticien restait dans le même périmètre géographique, de sorte que la preuve d'un détournement de clientèle et d'une distorsion de concurrence n'était pas rapportée.
14. Elle en a souverainement déduit que l'existence du préjudice financier et moral invoqué par M. [H], en raison du maintien de ses anciens associés dans les mêmes locaux, n'était pas démontrée.
15. Elle a ainsi, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE les pourvois ;
Condamne M. [H] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. [H] et le condamne à payer à la SCI La Perrière la somme de 3 000 euros et à la société des docteurs [Personne physico-morale 5] la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la cour de cassation, troisième chambre civile, signé par M. Echappé, conseiller doyen, conformément aux dispositions des articles 456 et 1021 du code de procédure civile, en remplacement du conseiller empêché, et signé et prononcé par le président en son audience publique du six mai deux mille vingt et un.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens identiques produits aux pourvois n° Z 19-24.846 et R 19-25.298 par la SCP Richard, avocat aux Conseils, pour M. [H]
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Monsieur [B] [H] de sa demande tendant à voir condamner la Société civile immobilière LA PERRIERE, solidairement avec la Société civile de moyens des Docteurs [Personne physico-morale 6], ainsi que Monsieur [U] [V], Monsieur [V] [Q], Madame [O] [X] et Madame [G] [G], à lui payer les sommes de 200.000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice financier et 12.000 euros en réparation de son préjudice moral ;
AUX MOTIFS QUE, sur la violation du contrat de bail, le Docteur [H] expose qu'en signant un bail avec la SCM des Docteurs [Personne physico-morale 7] à effet au 1er avril 2011, la SCI LA PERRIERE a violé la clause de non-réinstallation insérée au contrat de bail du 17 janvier 2000 qui la liait à la SCP Cabinet médical des Docteurs [Personne physico-morale 8] et qui lui interdisait de relouer les locaux à un cabinet de médecins de même spécialité, pendant les deux années suivant la résiliation du bail ; qu'il soutient que la SCM des Docteurs [Personne physico-morale 9] s'est rendue complice de l'inexécution du contrat de bail du 17 janvier 2000 et que les agissements fautifs lui ont causé un préjudice financier qu'il chiffre à 200.000 euros ainsi qu'un préjudice moral ; qu'il est constant que le 17 janvier 2000, la SCP Cabinet médical des Docteurs [Personne physico-morale 8], dont le Docteur [B] [H] faisait partie, a pris à bail des locaux appartenant à la SCI la Perrière et que le contrat de bail prévoyait que : « en cas de résiliation à l'initiative du preneur, le bailleur ne pourra relouer l'objet des présentes à un cabinet de médecins de même spécialité, et ce, pendant une durée de deux années à compter de la prise d'effet de la résiliation » ; que cette clause, qui ne peut se confondre avec celle des statuts de la SCP selon laquelle « tout associé qui cesse de faire partie de la société ne peut se rétablir pendant un délai de six ans dans toutes les communes dans un rayon de 20 kilomètres à peine de dommages et intérêts envers la société », est destinée à protéger la SCP Cabinet médical des Docteurs [Personne physico-morale 8] des agissements du bailleur et non les associés pris individuellement ; que le Docteur [B] [H] n'a donc pas qualité à agir à l'encontre de la SCI LA PERRIERE pour défendre ses intérêts personnels ;
1°) ALORS QUE tout jugement doit être motivé à peine de nullité ; que la contradiction entre les motifs et le dispositif équivaut à une absence de motifs ; qu'en confirmant le chef de dispositif du jugement de première instance, ayant déclaré l'action du Docteur [H] recevable, après avoir pourtant affirmé, dans les motifs de sa décision, que les demandes formées par le Docteur [H] à l'encontre de la Société LA PERRIERE étaient irrecevables pour défaut de qualité à agir, la Cour d'appel, qui a entaché sa décision d'une contradiction entre les motifs et le dispositif, a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;
2°) ALORS QUE le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'il ne peut, à ce titre, fonder sa décision sur un moyen qu'il a relevé d'office, sans avoir préalablement invité les parties à présenter leurs observations ; qu'en relevant néanmoins d'office la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité à agir du Docteur [H] à l'encontre de la Société LA PERRIERE, sans avoir préalablement invité les parties à présenter leurs observations sur ce moyen, la Cour d'appel a violé l'article 16 du Code de procédure civile ;
3°) ALORS QUE le tiers à un contrat est recevable à invoquer, sur le fondement de la responsabilité délictuelle, un manquement contractuel dès lors que ce manquement lui a causé un dommage ; qu'en décidant néanmoins que le Docteur [H] était irrecevable, pour défaut de qualité, à agir à l'encontre de la Société LA PERRIERE sur le fondement d'une violation par cette dernière de la clause de non-réinstallation stipulée dans le contrat de bail du 17 janvier 2000, conclu entre la Société LA PERRIERE et la Société CABINET MEDICAL des Docteurs [Personne physico-morale 10], motif pris que cette clause était seulement destinée à protéger cette dernière et non chacun des associés pris individuellement, bien que le Docteur [H] ait été recevable, en sa qualité de tiers au contrat de bail du 17 janvier 2000, à agir à l'encontre de la Société LA PERRIERE, bailleur, sur le fondement de la responsabilité délictuelle, la Cour d'appel a violé les articles 31 et 32 du Code de procédure civile, ensemble les articles 1165 et 1382 du Code civil, dans leurs rédactions antérieures à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ;
4°) ALORS QUE, subsidiairement, le tiers à un contrat est fondé à obtenir réparation, sur le fondement de la responsabilité délictuelle, du préjudice que lui cause la méconnaissance de ses obligations par l'une des parties à ce contrat ; qu'en décidant néanmoins que le Docteur [H] ne pouvait rechercher la responsabilité de la Société LA PERRIERE, pour avoir méconnu la clause de nonréinstallation stipulée au contrat de bail du 17 janvier 2000 conclu entre la Société LA PERRIERE et la Société CABINET MEDICAL des Docteurs [Personne physico-morale 10] motif pris que cette disposition était seulement destinée à protéger cette dernière et non chacun des associés pris individuellement, bien que le Docteur [H] ait été fondé, en sa qualité de tiers au contrat de bail du 17 janvier 2000, à obtenir réparation du préjudice que la Société LA PERRIERE lui avait causé en méconnaissance de ses obligations contractuelles, la Cour d'appel a violé les articles 1165 et 1382 du Code civil, dans leurs rédactions antérieures à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Monsieur [B] [H] de sa demande tendant à voir condamner la Société civile de moyens des Docteurs [Personne physico-morale 6], ainsi que Monsieur [U] [V], Monsieur [V] [Q], Madame [O] [X] et Madame [G] [G], solidairement avec la Société civile immobilière LA PERRIERE, à lui payer, à titre de dommages-intérêts, les sommes de 200.000 euros en réparation de son préjudice financier et 12.000 euros en réparation de son préjudice moral ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE, sur le détournement de patientèle, le Docteur [H] soutient qu'en continuant d'exercer la médecine dans les anciens locaux de la SCP dissoute, les médecins ont détourné la clientèle et profité, sans effort, des commodités des lieux, alors que lui-même s'est efforcé de trouver rapidement un nouveau local pour exercer son activité ; que les demandes qu'il forme à l'encontre de la SCM des Docteurs [Personne physico-morale 9] sont mal dirigées en ce que la société n'exerce pas la médecine, mais a pour objet, selon l'extrait du registre du commerce et des sociétés, et les statuts versés aux débats, de « faciliter l'activité professionnelle de ses membres, par la mise en commun des moyens utiles à l'exercice de leur profession, sans que la société puisse elle-même exercer celle-ci » ; que le Docteur [B] [H] agit également à l'encontre des quatre médecins associés au sein de la SCM des Docteurs [Personne physico-morale 9] ; qu'il n'a toutefois intimé devant la Cour que trois d'entre eux et n'est pas recevable en ses demandes dirigées contre le Docteur [Q] qui n'est pas intervenu à l'instance ; qu'il appartient au Docteur [H] de rapporter la preuve du détournement de patientèle qu'il allègue et du préjudice direct et certain qui en découle ; qu'il n'est pas contesté qu'entre le 1er avril 2011, date de l'installation du Docteur [H] dans ses nouveaux locaux, et le 11 mai 2011, date du procès-verbal de conciliation prévoyant notamment « la mise en place d'un message sur le répondeur téléphonique de la SCP avec les coordonnées du Dr [H] et des autres confrères de l'ancienne SCP », les patients du Docteur [H] ont pu avoir des difficultés à le joindre ; qu'il a toutefois été mis fin rapidement à cette difficulté dont il n'est, en tout état de cause, pas démontré qu'elle a eu des conséquences sur la patientèle ; qu'en effet, la notoriété et la commodité des locaux pris à bail par la SCM des Docteurs [Personne physico-morale 9] ainsi que les habitudes des patients ne suffisent pas, en l'état des seuls documents comptables produits pour les années 2010, 2011 et 2012, à caractériser la réalité d'une perte de patientèle, ni le préjudice moral allégué ; que le jugement doit donc être confirmé, y compris en ce qu'il a constaté l'absence de démonstration d'un abus dans l'action en justice et rejeté la demande reconventionnelle en dommages et intérêts ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE, sur la demande basée sur le non-respect du contrat de bail, le bail signé par acte authentique devant notaire le 27 janvier 2000 entre la SCP et la SCI LA PERRIERE prévoyait une clause de résiliation stipulant que « chacune des parties pourra notifier à l'autre son intention de ne pas renouveler ce bail à son expiration, en respectant un préavis d'un an. » ; qu'en marge de cette clause, il est précisé « qu'en cas de résiliation à l'initiative du preneur, le bailleur ne pourra relouer le... (illisible) objet des présentes à un cabinet de médecins de mêmes spécialités et ce, pendant une durée de deux années, à compter de la prise d'effet de la résiliation » ; que le requérant soutient que la SCI a commis une faute contractuelle en acceptant, en pleine connaissance de cause, de consentir un nouveau bail à ses anciens associés en violation de cette clause de non-réinstallation et invoque à l'encontre de ces derniers ainsi que la nouvelle entité juridique qu'ils ont créée, une faute de nature délictuelle ayant concouru à ne pas respecter cette clause ; qu'il convient de souligner en premier lieu que Monsieur [H] est tiers par rapport à ce bail signé exclusivement entre la SCP et la SCI et qu'il ne peut donc prétendre agir sur un fondement contractuel mais uniquement sur un fondement délictuel y compris à l'encontre du bailleur ; que même tiers au contrat, le Docteur [H] peut en effet, par application des dispositions de l'article 1165 du code civil, invoquer une mauvaise exécution du contrat s'il est démontré qu'elle lui a causé un préjudice ; qu'il est nécessaire pour ce faire d'évoquer tout d'abord dans quelles conditions s'est effectuée la dissolution de la SCP, la dénonciation du bail ainsi que la concrétisation d'un nouveau bail au profit de la SCM ; que le procès-verbal de l'assemblée générale extraordinaire en date du 17 décembre 2010 à laquelle les quatre associés étaient présents, et dont l'ordre du jour était le projet de dissolution de la SCP ainsi que celui d'une constitution de la SCM, a donné lieu à un vote favorable pour cette dissolution " au 31 mars 2011 au plus tard de la part des Docteurs [Q], [G], [V] ; que ne figure pas la position du Docteur [H] qui dit que son refus a bien été exprimé mais n'a pas été mentionné au procès-verbal ; que la majorité des 3/4 imposée par les statuts ayant été atteinte, le principe de la dissolution a été arrêté nonobstant l'absence de validation du Docteur [H] ; que ce dernier a pris seul l'initiative par courrier recommandé en date du 25 janvier 2011 de signifier au bailleur une résiliation du bail avec début de préavis immédiat ; que les statuts de la SCP ne lui en donnaient pourtant pas le pouvoir, l'article 14 prévoyant que la qualité de co-gérant de chacun des médecins ne leur permet d'exercer que « les actes de gestion que demande l'intérêt de la société » ; que l'article 15 dispose que « les décisions excédant les pouvoirs des gérants doivent être prises par les associés réunis en assemblée » ; que nul doute que la résiliation du bail détenu par la SCP devait faire l'objet d'une décision collective ; que si donc le Docteur [H] a excédé manifestement ses pouvoirs en prenant seul l'initiative de résilier le bail au nom de la SCP, pour autant celle-ci, par le biais de son liquidateur, n'a pas remis en cause la nécessité de cette résiliation et l'a avalisée auprès du bailleur avant de s'orienter vers la conclusion d'un nouveau contrat avec celui-ci ; que l'assemblée générale extraordinaire du 21 février 2011 a décidé alors de la liquidation de la SCP à effet du 31 mars 2011 sous un régime conventionnel et désigné le Docteur [Q] en qualité de liquidateur avec notamment comme fonction de vendre l'actif existant et de « céder ou résilier tous baux ou locations, avec ou sans indemnité, transiger si nécessaire, afin de réduire les coûts pour la société » ; qu'il a été ajouté un peu plus loin que « le liquidateur devra faire tous ses efforts pour négocier avec le bailleur de telle sorte que la résiliation dudit bail puisse prendre effet au 31 mars 2011, sans qu'aucun préavis n'ait à être supporté par la société. Il devra s'assurer si la résiliation lancée à l'initiative du Docteur [H] a bien été effectuée, et faire tous ses efforts afin que la société ne soit pas impactée négativement par le préavis contractuel en résultant » ; que c'est dans les suites de cette assemblée générale que le Docteur [H] s'est, d'une part, installé dans de nouveaux locaux dès la dissolution de la SCP et d'autre part, qu'a été signé en date du 12 décembre 2011, le protocole d'accord transactionnel entre la SCP via son liquidateur, et la SCI LA PERRIERE pour régler les questions financières découlant de la résiliation du bail ; qu'il a ainsi été décidé aux termes de l'article 1 du protocole que la SCP devait payer au bailleur une somme équivalente à 50% du préavis soit 9 600 euros pour solde de tout compte avec un bail définitivement résilié au 31 mars 2011, l'article 2 prévoyant que le bailleur s'engageait à renoncer à toute procédure d'indemnisation sous la condition essentielle que les Docteurs [V], [Q] et [G] se maintiennent durablement dans les lieux et concluent un nouveau bail professionnel ; qu'or, la SCI LA PERRIERE était tenue par les clauses du contrat antérieur souscrit avec la SCP qui lui interdisait, en cas de résiliation du bail à l'initiative du preneur, de consentir un nouveau bail avec un cabinet de médecins de mêmes spécialités ce qui était évidemment le cas des membres de la nouvelle SCM ; que ce bailleur ne peut aujourd'hui opposer au Docteur [H] la transaction signée en décembre 2011 et notamment son article 3 mentionnant que « les parties renoncent de manière irrévocable et définitive à se prévaloir de toute réclamation à l'encontre de l'autre relative aux stipulations du bail querellé » puisque le Docteur [H] est par définition resté tiers à cette transaction qui n'a, en application des dispositions 2044 et suivants du code civil, d'effets qu'entre les parties et ne peut préjudicier aux droits des tiers ; qu'en définitive, l'appréciation du bien-fondé de l'action engagée par le Docteur [H] à l'encontre de l'ensemble des défendeurs suppose que soit démontré qu'il y a bien eu une violation des dispositions du contrat de bail et que cela lui a causé un préjudice bien qu'il soit extérieur à ce contrat ; que s'agissant tout d'abord du manquement contractuel, il est loisible de constater que la clause de non-réinstallation était connue de tous et que le nouveau bail a été signé entre le bailleur et les anciens associés en pleine connaissance de l'interdiction posée par cette clause puisque celle-ci leur avait été rappelée de façon parfaitement claire par le Docteur [H] dans plusieurs courriers, avant même la dissolution effective de la SCP; qu'à aucun moment pour autant, les associés n'ont envisagé de quitter les lieux en témoigne le procès-verbal d'assemblée générale du 21 février 2011 qui a inséré le paragraphe suivant à la fin de la première résolution adoptée à l'unanimité par les médecins : " l'assemblée générale décide concernant le numéro de téléphone de la société que le numéro actuel 04 76 08 40 86 sera conservé pendant au moins 12 mois, avec mise en place d'un répondeur, au cas où un ou plusieurs des associés actuels de la société ne souhaiterai(en)t pas rester dans leur locaux professionnels actuels, et devenir associé de la société civile de moyen en cours de constitution à cet effet" ; que d'ailleurs, dans les questions diverses figurant à la fin du procès-verbal, il est spécifié que « les associés décident qu'il est proposé à chacun des associés actuels de la société de devenir associé de la société civile de moyen à constituer, dans les mêmes locaux, avec les associés présents » ; que le Docteur [H] s'est abstenu de signer cette résolution considérant la question hors sujet ; que le procès-verbal de conciliation du 11 mai 2011 sous l'égide du Conseil de l'Ordre témoigne que cette difficulté a de nouveau été évoquée et n'a pu être réglée entre les membres de la SCP principalement en raison de l'introduction du Docteur [Y] comme nouvel associé ; que si la violation de la clause est ainsi patente, il faut pour qu'elle soit utilement soulevée, que le requérant démontre le préjudice qui lui a été ainsi causé ; qu'en l'espèce, le Docteur [H] invoque une véritable stratégie d'éviction mise en oeuvre à son détriment par ses anciens associés qui ont dissous la SCP, l'amenant à quitter les lieux sans lui racheter ses parts, puis se sont maintenus dans les locaux en détournant tout ou partie de sa clientèle ; que s'il apparaît manifeste que la dissolution de la SCP s'est réalisée sans son accord puisque procédant de la volonté de ses trois autres membres, il résulte pour autant du procès-verbal de l'assemblée générale extraordinaire du 21 février 2011 (sous l'intitulé "questions diverses" mentionné plus haut), qu'il avait la possibilité d'intégrer la nouvelle SCM envisagée et que c'est donc de son propre chef qu'il a refusé cette possibilité ; qu'il ne peut dès lors parler d'éviction unilatérale et forcée ; qu'il a d'ailleurs très vite, après l'annonce de la dissolution à venir de la SCP, fait part à ses associés de sa décision de se désolidariser d'eux et reprendre une activité médicale indépendante ; qu'il ne peut pas non plus alléguer un préjudice lié au fait d'avoir dû quitter les locaux où il exerçait jusque-là puisque, si la clause avait été appliquée comme il le souhaitait, il aurait été obligé lui, comme les autres médecins, de déménager son cabinet ailleurs ; que le seul dommage en réalité dont il peut faire état résulte dans une éventuelle distorsion de concurrence liée à ce déménagement qu'il est le seul à avoir réalisé tandis que ses confrères sont restés dans les anciens locaux ; que ce préjudice suppose d'être démontré ; qu'à cet égard, il doit être observé qu'il a trouvé un local professionnel dans la même commune du Touvet à quelques centaines de mètres de son ancien cabinet, que l'on peut considérer que dans le cas d'un médecin généraliste, la relation de confiance développée avec le patient prévaut sur l'emplacement du cabinet lorsque le praticien est bien sûr resté dans le même périmètre géographique ; que les documents comptables qu'il produit pour établir ses pertes financières montrent qu'il est passé de 141.602 euros de chiffre d'affaires en 2010 à 112.824 euros en 2011, avec deux mois néanmoins sans aucune activité (janvier et février) puis qu'il a remonté son chiffre à 124.666 euros pour l'année 2012. Aucune pièce n'a été communiquée pour les années postérieures ; qu'on ne peut, sur la base de ces seuls éléments parcellaires, retenir l'existence d'un préjudice financier qui découlerait de la non-application de la clause du bail ; que le Docteur [H] ne démontre pas davantage le préjudice moral qu'il aurait subi du fait des agissements fautifs à son égard de ses anciens associés qui auraient sciemment essayé, après son départ, de conserver ses patients notamment en ne communiquant pas ses nouvelles coordonnées téléphoniques ou auraient conservé moult biens de la SCP sans lui remettre sa part ; qu'aucune pièce probante n'est en effet produite au soutien de ses affirmations ; qu'il convient dès lors de le débouter de ses demandes ;
1°) ALORS QUE toute personne qui, avec connaissance, aide autrui à enfreindre les obligations contractuelles pesant sur elle, commet une faute délictuelle à l'égard de la victime de l'infraction ; qu'en se bornant à affirmer, pour débouter le Docteur [H] de ses demandes de dommages-intérêts, que la difficulté existante, faisant suite à la dissolution de la Société CABINET MEDICAL des Docteurs [Personne physico-morale 10], relative à la mise en place d'un message sur le répondeur de la société indiquant les coordonnées du Docteur [H], avait été rapidement résolue, sans rechercher, comme elle y était invitée, si la seule circonstance que les médecins aient continué d'exercer au sein d'une nouvelle société, dans les mêmes locaux, en méconnaissance de la clause de non-réinstallation prévue au bail du 17 janvier 2000, était constitutive d'une faute, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1165 et 1382 du Code civil, dans leurs rédactions antérieures à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ;
2°) ALORS QUE toute personne qui, avec connaissance, aide autrui à enfreindre les obligations contractuelles pesant sur elle, commet une faute délictuelle à l'égard de la victime de l'infraction ; que la méconnaissance d'une clause de non-réinstallation crée nécessairement un préjudice, fût-il seulement moral ; qu'en décidant néanmoins que le Docteur [H] ne démontrait pas l'existence d'un préjudice résultant de la réinstallation par les Docteurs [Q], [V], [G] et [Y], dans les mêmes locaux que ceux pris à bail par la Société CABINET MEDICAL des Docteurs [Personne physico-morale 10], en méconnaissance de la clause de non-réinstallation stipulée au bail du 17 janvier 2000, bien que la violation de la clause de non-réinstallation ai nécessairement causé un préjudice au Docteur [H], fût-il seulement moral, la Cour d'appel a violé les articles 1165 et 1382 du Code civil, dans leurs rédactions antérieures à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ;
3°) ALORS QUE, subsidiairement, toute personne qui, avec connaissance, aide autrui à enfreindre les obligations contractuelles pesant sur elle, commet une faute délictuelle à l'égard de la victime de l'infraction ; qu'en se bornant à affirmer, pour décider que le Docteur [H] ne démontrait pas l'existence d'un préjudice résultant de la réinstallation par les Docteurs [Q], [V], [G] et [Y] dans les mêmes locaux que ceux pris à bail par la Société CABINET MEDICAL des Docteurs [Personne physico-morale 10], en méconnaissance de la clause de non-réinstallation stipulée au bail du 17 janvier 2000, que les documents comptables produits par le Docteur [H] ne permettaient pas de retenir l'existence d'une perte de patientèle, ni d'un préjudice moral, sans rechercher, comme elle y était invitée, si ce préjudice résultait du seul fait que la Société civile de moyens des Docteurs [Personne physico-morale 11], ainsi que ses associés, exerçaient une activité concurrente à proximité du cabinet du Docteur [H], le privant ainsi d'une partie de la clientèle potentielle présente dans le secteur, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1165 et 1382 du Code civil, dans leurs rédactions antérieures à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016.