LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 2
LM
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 1er juillet 2021
Rejet
M. PIREYRE, président
Arrêt n° 674 FS-D
Pourvoi n° F 19-22.069
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 1ER JUILLET 2021
1°/ M. [V] [S],
2°/ Mme [O] [D], épouse [S],
domiciliés tous deux [Adresse 1],
ont formé le pourvoi n° F 19-22.069 contre l'arrêt rendu le 13 juin 2019 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 1-3), dans le litige les opposant :
1°/ à Mme [Z] [M], domiciliée [Adresse 2], prise en qualité de liquidateur de la société See Canino menuiserie,
2°/ à la société R+4 Architecte, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 3],
3°/ à la société Menuiserie générale moriéroise (MGM), société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 4],
4°/ à la société Allianz Iard, société anonyme, dont le siège est [Adresse 5], et le service courrier [Adresse 6],
défenderesses à la cassation.
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Durin-Karsenty, conseiller, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de M. et Mme [S], de la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat de la société Allianz Iard, de la SCP Boulloche, avocat de la société R+4 Architecte, de la SCP de Nervo et Poupet, avocat de la société Menuiserie générale moriéroise (MGM), et l'avis de M. Gaillardot, premier avocat général, après débats en l'audience publique du 26 mai 2021 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Durin-Karsenty, conseiller rapporteur, Mme Martinel, conseiller doyen, Mme Maunand, conseiller, M. de Leiris, conseiller référendaire le plus ancien ayant voix délibérative, Mmes Lemoine, Jollec, Bohnert, M. Cardini, Mme Dumas, conseillers référendaires, M. Gaillardot, premier avocat général, et Mme Thomas, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article L. 431-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 13 juin 2019), M. et Mme [S], invoquant des désordres affectant la construction d'une maison individuelle, ont fait assigner devant un tribunal de grande instance la société See Canino menuiserie, puis M. [R] et M. [M], les sociétés Menuiserie générale moriéroise (MGM), R+4 Architecte et la société Allianz Iard en vue de voir engager leur responsabilité. Partiellement déboutés de leurs demandes, ils ont interjeté appel.
Recevabilité du pourvoi examinée d'office, après avis donné aux parties en application de l'article 1015 du code de procédure civile
2. Il résulte des articles 963 et 964 du code de procédure civile qu'en cas d'irrecevabilité de l'appel prononcée en application de l'article 963 précité, c'est seulement si la décision a été prise sans que les parties aient été convoquées ou citées à comparaître à l'audience à l'issue de laquelle le juge a statué, qu'elle peut être rapportée dans les conditions prévues par l'article 964 du même code, de sorte que, dans ce cas, le recours ne peut être exercé sans que la demande de rapport ait été préalablement formée.
3. M. et Mme [S] ayant été convoqués à l'audience de la cour d'appel, qui a déclaré leur appel irrecevable à défaut d'acquittement du droit prévu par l'article 963 précité, leur pourvoi est, dès lors, recevable.
Examen du moyen
4. M. et Mme [S] font grief à l'arrêt de déclarer irrecevable leur appel interjeté le 10 avril 2017 à l'encontre du jugement rendu le 22 mars 2017 par le tribunal de grande instance de Digne-les-Bains et de les condamner solidairement à verser à la société Allianz Iard et à la société R+4 Architecte, chacune, la somme de 1 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure, ainsi qu'aux entiers dépens, alors :
« 1°/ que le jugement doit à peine de nullité exposer succinctement les prétentions respectives des parties et leurs moyens ; que cet exposé peut revêtir la forme d'un visa des conclusions des parties avec l'indication de leur date ; que l'arrêt attaqué, qui ne mentionne ni exposé des moyens des parties ni visa de leurs conclusions, a violé les articles 455, alinéa 1er, et 458 du code de procédure civile ;
2°/ que pour juger irrecevable l'appel de M. et Mme [S], la cour d'appel a retenu que « Monsieur [V] [S] et Madame [O] [S], ni la société Menuiserie générale moriéroise, ne se sont pas acquittés du droit prévu à l'article 1635 bis P du Code général des impôts alors que l'appel qu'ils ont formé relève d'une procédure avec représentation obligatoire » ; qu'en statuant ainsi, sans avoir invité M. et Mme [S] à s'expliquer sur le défaut de justification du paiement du droit prévu à l'article 1635 bis P du code général des impôts alors qu'il ne ressort pas des productions et du dossier de la procédure qu'un avis a préalablement été adressé par le greffe à l'avocat des époux [S] en vue de cette justification, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile, ensemble les articles 963 du même code et 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. »
Réponse de la Cour
5. En application de l'article 16 du code de procédure civile, la fin de non-recevoir tirée du défaut de justification du paiement du droit prévu par l'article 1635 bis P du code général des impôts ne peut être retenue sans que la partie concernée ait été invitée à s'en expliquer ou, qu'à tout le moins, un avis d'avoir à justifier de ce paiement lui ait été préalablement adressé par le greffe.
6. Il ressort des productions en défense que le greffe de la cour d'appel a, le 23 novembre 2018, invité les appelants à justifier de l'acquittement du droit prévu l'article 1635 bis P du code général des impôts, à peine d'irrecevabilité de l'appel.
7. Dès lors, c'est sans encourir le grief du moyen que la cour d'appel, après des débats qui se sont tenus le 24 avril 2019, relevant que M. et Mme [S] n'ont pas acquitté le droit prévu à l'article 1635 bis P précité, a déclaré l'appel irrecevable.
8. Le moyen, dont la première branche est inopérante, n'est dès lors pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. et Mme [S] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. et Mme [S] et les condamne à payer à la société R+4 Architecte la somme globale de 2 000 euros, à la société Menuiserie générale moriéroise (MGM) la somme globale de 2 000 euros, et à la société Allianz Iard la somme globale de 2 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé par le président en son audience publique du premier juillet deux mille vingt et un et signé par lui et Mme Martinel, conseiller doyen, en remplacement du conseiller rapporteur empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour M. et Mme [S]
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré irrecevable l'appel interjeté par Monsieur [V] [S] et Madame [O] [S], le 10 avril 2017, à l'encontre du jugement rendu le 22 mars 2017 par le Tribunal de grande instance de DIGNE LES BAINS et de les avoir condamnés solidairement à verser à la SA ALLIANZ IARD et à la SARL R+4 ARCHITECTES, chacune, la somme de 1.000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure, ainsi qu'aux entiers dépens ;
AUX MOTIFS Qu'aux termes de l'article 963 du Code de procédure civile, lorsque l'appel entre dans le champ d'application de l'article 1635 bis P du Code général des impôts, les parties justifient, à peine d'irrecevabilité de l'appel ou des défenses au fond selon le cas, de l'acquittement du droit prévu à cet article ; que Monsieur [V] [S] et Madame [O] [S], ni la société MENUISERIE GENERALE MORIEROISE, ne se sont pas acquittés du droit prévu à l'article 1635 bis P du Code général des impôts alors que l'appel qu'ils ont formé relève d'une procédure avec représentation obligatoire ; qu'il y a donc lieu de déclarer irrecevables l'appel interjeté le 10 avril 2017 par Monsieur [V] [S] et Madame [O] [S] à l'encontre du jugement prononcé le 22 mars 2017 par le Tribunal de grande instance de DIGNE LES BAINS et les conclusions notifiées le 7 novembre 2017 par la société MENUISERIE GENERALE MORIEROISE ; qu'il apparaît inéquitable de laisser à la charge de la SA ALLIANZ IARD et de la SARL R+4 ARCHITECTES les frais engagés dans la présente instance ; que Monsieur [V] [S] et Madame [O] [S] seront condamnés solidairement à leur verser, chacune, la somme de 1.000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile ;
ALORS, D'UNE PART, QUE le jugement doit à peine de nullité exposer succinctement les prétentions respectives des parties et leurs moyens ; que cet exposé peut revêtir la forme d'un visa des conclusions des parties avec l'indication de leur date ; que l'arrêt attaqué, qui ne mentionne ni exposé des moyens des parties, ni visa de leurs conclusions, a violé les articles 455, alinéa 1er, et 458 du Code de procédure civile ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE, pour juger irrecevable l'appel des exposants, la Cour d'appel a retenu que « Monsieur [V] [S] et Madame [O] [S], ni la société MENUISERIE GENERALE MORIEROISE, ne se sont pas acquittés du droit prévu à l'article 1635 bis P du Code général des impôts alors que l'appel qu'ils ont formé relève d'une procédure avec représentation obligatoire » ; qu'en statuant ainsi, sans avoir invité les exposants à s'expliquer sur le défaut de justification du paiement du droit prévu à l'article 1635 bis P du Code général des impôts alors qu'il ne ressort pas des productions et du dossier de la procédure qu'un avis a préalablement été adressé par le greffe à l'avocat des époux [S] en vue de cette justification, la Cour d'appel a violé l'article 16 du Code de procédure civile, ensemble les articles 963 du même Code et 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.