LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 2
CF
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 1er juillet 2021
Rejet
M. PIREYRE, président
Arrêt n° 693 F-D
Pourvoi n° U 20-14.127
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 1ER JUILLET 2021
La SCI du Domaine de Notre-Dame, société civile immobilière, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° U 20-14.127 contre l'arrêt rendu le 9 décembre 2019 par la cour d'appel de Nancy (chambre de l'exécution), dans le litige l'opposant à la société Crédit immobilier de France développement (CIFD), société anonyme, venant aux droit du Crédit immobilier d'Alsace-Lorraine filiale financière, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Cardini, conseiller référendaire, les observations de Me Le Prado, avocat de la SCI du Domaine de Notre-Dame, de la SCP Ortscheidt, avocat de la société Crédit immobilier de France développement, après débats en l'audience publique du 26 mai 2021 où étaient présents M. Pireyre, président, M. Cardini, conseiller référendaire rapporteur, Mme Martinel, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Nancy, 9 décembre 2019), le Crédit immobilier de France développement (la banque), venant aux droits du Crédit immobilier d'Alsace Lorraine filiale financière, a fait pratiquer une saisie-vente et une saisie-attribution à l'encontre de la SCI du Domaine de Notre-Dame (la SCI), qui a saisi un juge de l'exécution, notamment d'une demande d'annulation du commandement aux fins de saisie-vente.
Examen des moyens
Sur le premier moyen et le second moyen, pris en sa première branche, ci-après annexés
2. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le second moyen, pris en ses deuxième et troisième branches
3. La SCI fait grief à l'arrêt de la débouter de toutes ses demandes et notamment d'annulation de la saisie-attribution et du commandement alors :
« 2°/ subsidiairement, qu'à supposer même qu'en l'absence de disposition légale ou réglementaire précisant que la nullité d'un commandement de saisie vente n'est pas encourue lorsque celui-ci est délivré pour une somme supérieure à celle qui est due au créancier, l'acte de saisie-vente délivré pour une somme supérieure au montant réel de la dette ne peut demeurer valable qu'à concurrence de ce seul montant ; qu'en ne retranchant pas d'office de la créance faisant l'objet de la saisie-vente la somme de 28 205,62 euros, correspondant à l'indemnité de défaillance mentionnée dans le commandement, laquelle selon ses propres constatations n'avait pourtant pas été stipulée dans l'acte de prêt, la cour d'appel a violé les articles L. 221-1 et R. 221-1du code des procédures civiles d'exécution ;
3°/ que l'acte de saisie-attribution, délivré pour une somme supérieure au montant réel de la dette, ne peut en toute hypothèse demeurer valable qu'à concurrence de ce seul montant ; qu'en ne retranchant pas d'office, de la créance, faisant l'objet de la saisie-attribution, la somme de 28 205,62 euros correspondant à l'indemnité de défaillance mentionnée dans le commandement, laquelle selon ses propres constatations n'avait pourtant pas été stipulée dans l'acte de prêt, la cour d'appel a violé l'article L. 211-1 ensemble l'article R. 211-1 du code des procédures civiles d'exécution. »
Réponse de la Cour
4. Ayant exactement retenu, après avoir relevé que l'indemnité de défaillance n'apparaissait pas avoir été prévue aux termes de l'acte de prêt, que le montant erroné de la créance ne remettait pas en cause la validité de la saisie ou du commandement aux fins de saisie-vente, c'est sans encourir les griefs du moyen que la cour d'appel, qui n'avait pas à procéder d'office au cantonnement des saisies qui ne lui était pas demandé, a statué comme elle l'a fait.
5. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la SCI du Domaine de Notre-Dame aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la SCI du Domaine de Notre-Dame et la condamne à payer au Crédit immobilier de France développement la somme de 1 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du premier juillet deux mille vingt et un, et signé par lui et Mme Martinel, conseiller doyen, en remplacement du conseiller référendaire rapporteur empêché, conformément aux dispositions des article 452 et 456 du code de procédure civile.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par Me Le Prado, avocat aux Conseils, pour la SCI du Domaine de Notre-Dame
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR dit que La dette due par la SCI du domaine de Notre-Dame au titre de ?l'emprunt contracté auprès de la société Crédit Immobilier de France Développement, venant aux droits du Crédit Immobilier d'Alsace Lorraine filiale financière, n'est pas prescrite et dit en conséquence que l'action a été engagée par le Crédit Immobilier France Développement à l'intérieur du délai de prescription.
AUX MOTIFS QU' «il ressort des pièces produites aux débats qu'un protocole d'accord a été signé par les parties alors que la déchéance du terme avait été prononcée le 31 août 2011 ; que dans ce protocole, ainsi que le rappelle le premier juge, il est indiqué que le CREDIT IMMOBILIER a consenti entre autres à la SCI DU DOMAINE NOTREDAME un prêt ; que la dette de la SCI DU DOMAINE NOTRE-DAME est de 475.794 euros et que les poursuites sont suspendues pendant trois ans par le prêteur à charge pour les emprunteurs de mettre à profit ce délai pour rééquilibrer leur patrimoine et trouver des solutions pour reprendre le paiement de la dette à l'issue de la période de trois ans ;qu'il s'en évince que la prescription de la créance a été interrompue, en vertu de l'article 2240 du Code Civil par ce protocole d'accord d'où il ressort une reconnaissance expresse par le débiteur, la SCI DU DOMAINE NOTRE-DAME, de toutes sommes qu'elle doit au CREDIT IMMOBILIER, peu importe les modalités d'expression de cette dette ; que pour autant, ce protocole suspend les poursuites mais ne prévoit pas la suspension du délai de prescription ; que dès lors, c'est à bon droit que le premier juge a retenu que le nouveau délai de prescription a recommencé à courir le 21 septembre 2011, date du protocole pour s'interrompre cinq ans plus tard ; que toutefois les paiements même partiels faits par le débiteur pour s'acquitter de sa dette ont le caractère d'actes interruptifs de prescription ; qu'il ressort des documents produits par l'établissement financier que la SCI DU DOMAINE NOTRE-DAME a effectué en 2015 et 2016 plusieurs virements au profit du CREDIT IMMOBILIER apparaissant sur ses relevés de compte bancaire avec l'identification précise du débiteur ; que les paiements effectués sont autant d'actes interruptifs de la prescription évoquée, étant observé que la société intimée se limite à contester l'admission de ces preuves sans pour autant rapporter la preuve contraire ; que le commandement ayant été délivré à l'intérieur du délai de prescription, le jugement déféré sera infirmé en ce qu'il a contesté la prescription de la créance de l'établissement financier ».
ALORS QU'il incombe à celui qui invoque un paiement partiel interruptif de prescription de rapporter la preuve de la réalité de ce paiement ; que lorsque les décomptes produits par la banque pour justifier de paiements réalisés par l'emprunteur sont contestés, il appartient à celle-ci de produire des éléments de nature à établir l'effectivité des versements dont elle se prévaut ; que pour retenir le versement d'acomptes interruptifs de prescription, l'arrêt se fondant sur les seuls relevés produits par la banque, relève que plusieurs virements ont été effectués sur le compte en 2015 et 2016 ; qu'en statuant ainsi, cependant qu'en l'état des contestations émises par la débitrice soutenant que les relevés litigieux étaient issus de fichiers internes du prêteur, il appartenait à celle-ci de fournir des éléments justifiant de la réalité des versements allégués, la cour d'appel, qui a inversé la charge de la preuve, a violé l'article 1315, devenu 1353 du code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR débouté la SCI du Domaine de Notre-Dame de toutes ses demandes et notamment d'annulation de la saisie-attribution et du commandement.
AUX MOTIFS QU' « à titre subsidiaire la SCI DOMAINE DE NOTRE-DAME sollicite l'annulation de la saisie attribution et du commandement de payer aux motifs que la créance ne serait ni certaine, ni liquide, ni exigible ; qu'elle remet en cause l'application d'une indemnité de défaillance non définie contractuellement ; qu'or, au regard du décompte descriptif de la dette, faisant apparaître tant le capital que les échéances impayées ou les intérêts, outre les frais, la contestation de la SCI DU DOMAINE NOTRE DAME doit être rejetée ; que si l'indemnité de défaillance n'apparaît pas avoir été prévue aux termes de l'acte de prêt, le montant erroné de la créance ne remet pas en cause la validité de la saisie ou du commandement aux fins de saisie-vente mais aurait pu conduire le débiteur à en demander le cantonnement. »
ALORS. D'UNE PART, QUE selon l'article R 221-1 du code des procédures civiles d'exécution, le commandement de payer prévu à l'article L 221-1 du même code contient, à peine de nullité, mention du titre exécutoire en vertu duquel les poursuites sont exercées avec le décompte distinct des sommes réclamées en principal, frais et intérêts échus, ainsi que l'indication du taux des intérêts ; qu'à défaut de disposition légale ou réglementaire précisant que la nullité n'est pas encourue au motif que les sommes réclamées sont supérieures à celles qui sont dues au créancier, le commandement de payer délivré pour une somme supérieure à la créance doit être annulé ; qu'en refusant d'annuler le commandement de saisie-vente délivré le 19 juillet 2017 à la débitrice, lequel selon ses propres constatations incluait pourtant une indemnité de défaillance non stipulée dans l'acte de prêt, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
ALORS D'AUTRE PART, et subsidiairement, QU' à supposer même qu'en l'absence de disposition légale ou réglementaire précisant que la nullité d'un commandement de saisie vente n'est pas encourue lorsque celui-ci est délivré pour une somme supérieure à celle qui est due au créancier, l'acte de saisie-vente délivré pour une somme supérieure au montant réel de la dette ne peut demeurer valable qu'à concurrence de ce seul montant ; qu'en ne retranchant pas d'office de la créance faisant l'objet de la saisie-vente la somme de 28.205,62 euros, correspondant à l'indemnité de défaillance mentionnée dans le commandement, laquelle selon ses propres constatations n'avait pourtant pas été stipulée dans l'acte de prêt, la cour d'appel a violé les articles L. 221-1 et R. 221-1du code des procédures civiles d'exécution.
ALORS ENFIN QUE l'acte de saisie-attribution, délivré pour une somme supérieure au montant réel de la dette, ne peut en toute hypothèse demeurer valable qu'à concurrence de ce seul montant ; qu'en ne retranchant pas d'office, de la créance, faisant l'objet de la saisie-attribution, la somme de 28.205,62 euros correspondant à l'indemnité de défaillance mentionnée dans le commandement, laquelle selon ses propres constatations n'avait pourtant pas été stipulée dans l'acte de prêt, la cour d'appel a violé l'article L. 211-1 ensemble l'article R. 211-1 du code des procédures civiles d'exécution.