LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 3
MF
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 12 octobre 2022
Cassation
Mme TEILLER, président
Arrêt n° 706 F-D
Pourvoi n° N 21-19.070
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 12 OCTOBRE 2022
1°/ M. [Z] [C], domicilié [Adresse 4],
2°/ M. [T] [C], domicilié [Adresse 3],
3°/ Mme [G] [C], épouse [I], domiciliée [Adresse 1],
ont formé le pourvoi n° N 21-19.070 contre l'arrêt rendu le 4 mai 2021 par la cour d'appel de Lyon (1re chambre civile B, expropriations), dans le litige les opposant à la société d'Equipement du Rhône et de Lyon, société anonyme, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Djikpa, conseiller référendaire, les observations de la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, avocat des consorts [C], de la SARL Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat de la société d'Equipement du Rhône et de Lyon, après débats en l'audience publique du 6 septembre 2022 où étaient présents Mme Teiller, président, Mme Djikpa, conseiller référendaire rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen, et Mme Besse, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. L'arrêt attaqué (Lyon, 4 mai 2021) fixe les indemnités revenant à MM. [Z] et [T] [C] et Mme [G] [C] épouse [I] (les consorts [C]) par suite de l'expropriation, au profit de la Société d'équipement du Rhône et de Lyon, de plusieurs parcelles leur appartenant.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
2. Les consorts [C] font grief à l'arrêt de fixer comme il fait les indemnités leur revenant, alors « que pour les biens soumis au droit de préemption, la date de référence est, en application de l'article L. 213-4 a) du code de l'urbanisme, la date à laquelle est devenu opposable aux tiers le plus récent des actes rendant public, approuvant, révisant ou modifiant le plan local d'urbanisme et délimitant la zone dans laquelle est situé le bien ; qu'au sens du texte précité, la modification du plan local d'urbanisme est celle qui affecte une ou plusieurs caractéristiques de la zone dans laquelle sont situés les biens expropriés, y compris si elle n'affecte pas le périmètre de la zone ; que la cour d'appel a constaté que dans le cadre de la révision du PLU de la commune de Trévoux approuvée le 13 février 2019, l'écoquartier des Orfèvres, où se situent les parcelles expropriées, était passé d'un classement en zone Uo datant de la mise en compatibilité du PLU, à un classement en zone U secteur de densité 2, c'est-à-dire en zone urbaine directement constructible correspondant aux espaces urbanisés de la commune, ladite révision ayant modifié les caractéristiques de la zone quant à la nature des constructions autorisées, à leur implantation, hauteur et emprise au sol ; qu'en refusant de fixer la date de référence au 26 février 2019, date à laquelle avait été rendue opposable la délibération du 13 février 2019 révisant le PLU, au motif que cette modification du PLU ne délimitait pas la ZAC de l'écoquartier des Orfèvres qu'elle traite comme un secteur à part entière d'ores et déjà délimité, quand il résultait de ses constatations que la délibération du 13 février 2019 avait modifié les caractéristiques de la zone de l'écoquartier des Orfèvres où se situent les parcelles expropriées, la cour d'appel a violé les articles L. 213-4 a) et L. 213-6 du code de l'urbanisme. »
Réponse de la Cour
Vu les articles L. 213-4, a), et L. 213-6 du code de l'urbanisme :
3. Il résulte de la combinaison de ces textes que, lorsqu'un bien soumis au droit de préemption fait l'objet d'une expropriation pour cause d'utilité publique, la date de référence prévue à l'article L. 322-2 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique, est, pour les biens non compris dans une zone d'aménagement différé, la date à laquelle est devenu opposable aux tiers le plus récent des actes rendant public, approuvant, révisant ou modifiant le plan local d'urbanisme et délimitant la zone dans laquelle est situé le bien.
4. Pour fixer la date de référence au 22 octobre 2007, date d'approbation du plan local d'urbanisme de la commune de [Localité 5], l'arrêt retient que l'acte révisant le plan local d'urbanisme du 13 février 2019 ne délimite pas la zone d'aménagement concerté (ZAC) de l'écoquartier des Orfèvres où sont situées les parcelles expropriées, traitée comme un secteur à part entière déjà délimité, cette modification s'inscrivant dans la suite de l'aménagement de la ZAC, de sorte que cet acte modificatif ne peut être retenu pour fixer la date de référence.
5. En statuant ainsi, alors que la modification du plan local d'urbanisme à prendre en compte pour déterminer la date de référence est celle qui affecte une ou plusieurs caractéristiques de la zone dans laquelle sont situés les biens expropriés, y compris lorsqu'elle n'en affecte pas la délimitation, la cour d'appel, qui avait constaté que la révision du plan local d'urbanisme du 13 février 2019 modifiait les caractéristiques de la zone dans laquelle étaient situées les parcelles expropriées, a violé les textes susvisés.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 4 mai 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ;
Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Chambéry ;
Condamne la société d'Equipement du Rhône et de Lyon aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société d'Equipement du Rhône et de Lyon et la condamne à payer la somme globale de 3 000 euros à MM. [Z] et [T] [C] et Mme [G] [C] épouse [I] ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze octobre deux mille vingt-deux.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, avocat aux Conseils, pour les consorts [C]
MM. [C] et Mme [C] épouse [I] reprochent à l'arrêt attaqué d'avoir fixé l'indemnité leur étant due à la somme de 454 722,50 euros correspondant à une indemnité principale d'expropriation de 412 475 euros et une indemnité de remploi de 42 247,50 euros,
ALORS QUE pour les biens soumis au droit de préemption, la date de référence est, en application de l'article L 213-4 a) du code de l'urbanisme, la date à laquelle est devenu opposable aux tiers le plus récent des actes rendant public, approuvant, révisant ou modifiant le plan local d'urbanisme et délimitant la zone dans laquelle est situé le bien ; qu'au sens du texte précité, la modification du plan local d'urbanisme est celle qui affecte une ou plusieurs caractéristiques de la zone dans laquelle sont situés les biens expropriés, y compris si elle n'affecte pas le périmètre de la zone ; que la cour d'appel a constaté que dans le cadre de la révision du PLU de la commune de Trévoux approuvée le 13 février 2019, l'écoquartier des Orfèvres, où se situent les parcelles expropriées, était passé d'un classement en zone Uo datant de la mise en compatibilité du PLU, à un classement en zone U secteur de densité 2, c'est-à-dire en zone urbaine directement constructible correspondant aux espaces urbanisés de la commune, ladite révision ayant modifié les caractéristiques de la zone quant à la nature des constructions autorisées, à leur implantation, hauteur et emprise au sol ; qu'en refusant de fixer la date de référence au 26 février 2019, date à laquelle avait été rendue opposable la délibération du 13 février 2019 révisant le PLU, au motif que cette modification du PLU ne délimitait pas la ZAC de l'écoquartier des Orfèvres qu'elle traite comme un secteur à part entière d'ores et déjà délimité, quand il résultait de ses constatations que la délibération du 13 février 2019 avait modifié les caractéristiques de la zone de l'écoquartier des Orfèvres où se situent les parcelles expropriées, la cour d'appel a violé les articles L 213-4 a) et L. 213-6 du code de l'urbanisme.