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01/03/2023 | FRANCE | N°21-24166

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 01 mars 2023, 21-24166


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 1

CF

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 1er mars 2023

Rejet

M. CHAUVIN, président

Arrêt n° 141 F-B

Pourvoi n° B 21-24.166

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 1ER MARS 2023

La société BNP Paribas, société anonyme, dont le siège est [Adress

e 1], a formé le pourvoi n° B 21-24.166 contre l'arrêt rendu le 14 septembre 2021 par la cour d'appel de Reims (chambre civile, 1re section), dans ...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 1

CF

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 1er mars 2023

Rejet

M. CHAUVIN, président

Arrêt n° 141 F-B

Pourvoi n° B 21-24.166

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 1ER MARS 2023

La société BNP Paribas, société anonyme, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° B 21-24.166 contre l'arrêt rendu le 14 septembre 2021 par la cour d'appel de Reims (chambre civile, 1re section), dans le litige l'opposant :

1°/ à M. [L] [D], domicilié [Adresse 2],

2°/ à Mme [P] [X], notaire associé, domiciliée [Adresse 3],

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Kloda, conseiller référendaire, les observations de la SCP Marc Lévis, avocat de la société BNP Paribas, de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de M. [D] et de Mme [X], après débats en l'audience publique du 17 janvier 2023 où étaient présents M. Chauvin, président, Mme Kloda, conseiller référendaire rapporteur, Mme Guihal, conseiller doyen, et Mme Vignes, greffier de chambre,

la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Reims, 14 septembre 2021), rendu sur renvoi après cassation (1re Civ., 4 juillet 2019, pourvoi n° 18-16.138), par acte reçu le 24 avril 1992 par M. [D] (le notaire), la société BNP Paribas (la banque) a consenti à M. et Mme [E] une ouverture de crédit, avec le cautionnement hypothécaire de la société Dabiflor et des groupements fonciers agricoles (GFA) de Sapincourt et de l'Île [Localité 4], le cautionnement de plusieurs personnes physiques et le nantissement des parts détenues par ces dernières ainsi que par M. et Mme [E] dans la société Dabiflor et des GFA.

2. Un arrêt irrévocable du 8 novembre 2010 a annulé le cautionnement hypothécaire du GFA de Sapincourt.

3. La banque a assigné le notaire en responsabilité et indemnisation du préjudice subi du fait de la perte de cette garantie.

4. Les dispositions irrévocables d'un arrêt du 27 février 2018 ont déclaré le notaire responsable de l'annulation de ce cautionnement hypothécaire.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en ses première, deuxième, troisième et cinquième branches

5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le moyen, pris en sa quatrième branche

Enoncé du moyen

6. La banque fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes indemnitaires à l'encontre du notaire, alors « que le propre de la responsabilité civile est de rétablir aussi exactement que possible l'équilibre détruit par le dommage et de replacer la victime dans la situation où elle se serait trouvée si l'acte dommageable ne s'était point produit ; que le notaire qui a mis par sa faute un créancier dans une situation désavantageuse en lui faisant perdre le bénéfice d'une sûreté doit en supporter les conséquences préjudiciables, même si la victime, en sa qualité de créancier, dispose en théorie d'actions contre d'autres personnes pour compenser la perte de cette sûreté ; qu'en déboutant néanmoins la banque de ses prétentions indemnitaires au motif qu'elle n'avait pas suffisamment justifié de l'impossibilité irrémédiablement compromise d'obtenir, dans le cadre de la liquidation judiciaire de chacun des autres garants et cautions, le paiement de tout ou partie de sa créance, dans la limite des plafonds garantis par chacun, après avoir pourtant retenu que le notaire était responsable de l'annulation du cautionnement hypothécaire dont elle bénéficiait en garantie de sa créance, la cour d'appel a violé l'article 1382, devenu 1240, du code civil. »

Réponse de la Cour

7. Ayant retenu que la banque disposait, pour le recouvrement de sa créance, contre la co-empruntrice et contre les cautions personnelles, de recours qu'elle n'avait pas mis en oeuvre et qui n'étaient pas la conséquence de la situation dommageable imputée à la faute du notaire, la cour d'appel en a exactement déduit que le préjudice allégué n'était pas actuel et certain.

8. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société BNP Paribas aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société BNP Paribas et la condamne à payer à M. [D] la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du premier mars deux mille vingt-trois.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Marc Lévis, avocat aux Conseils, pour la société BNP Paribas

La société BNP Paribas fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR rejeté ses prétentions indemnitaires formées à l'encontre de M. [D] ;

1°) ALORS QUE la portée de la cassation est déterminée par le dispositif de l'arrêt qui la prononce ; qu'en l'espèce, l'arrêt de la première chambre civile du 4 juillet 2019 a cassé l'arrêt du 27 février 2019 de la cour d'appel de Reims « mais seulement en ce qu'il condamne M. [D] à payer à la société BNP Paribas la somme de 3 532 090 euros en réparation du préjudice subi en raison de la perte de la garantie » laissant intacte la disposition de ce même arrêt qui a déclaré Me [D], notaire « responsable de l'annulation du cautionnement hypothécaire dont bénéficiait BNP Paribas en garantie de sa créance au titre du prêt consenti aÌ M. [U] [E] le 24 avril 1992 » ; qu'en déboutant néanmoins purement et simplement la société BNP Paribas de ses prétentions indemnitaires, quand la cour d'appel était tenue d'évaluer le préjudice de la société BNP Paribas définitivement admis en son principe par l'arrêt du 27 février 2018 qui avait déclaré le notaire « responsable », la cour d'appel a violé les articles 624 du code de procédure civile et 4 du code civil ;

2°) ALORS QUE celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation ; qu'en retenant, pour exclure tout préjudice de la banque, « qu'il ne peut pas être exclu qu'elle aurait continué à percevoir des sommes issues des répartitions et dividendes des procédures collectives », la cour d'appel a inversé la charge de la preuve de telles perceptions et, partant, a violé l'article 1315 devenu 1353 du code civil ;

3°) ALORS QUE en refusant d'évaluer, à tout le moins, le dommage résultant de la perte de chance de ne pas contracter le prêt, dont elle a constaté l'existence en son principe après avoir même fixé la chance perdue à hauteur de 50 %, la cour d'appel a violé l'article 4 du code civil ;

4°) ALORS QUE le propre de la responsabilité civile est de rétablir aussi exactement que possible l'équilibre détruit par le dommage et de replacer la victime dans la situation où elle se serait trouvée si l'acte dommageable ne s'était point produit ; que le notaire qui a mis par sa faute un créancier dans une situation désavantageuse en lui faisant perdre le bénéfice d'une sûreté doit en supporter les conséquences préjudiciables, même si la victime, en sa qualité de créancier, dispose en théorie d'actions contre d'autres personnes pour compenser le perte de cette sûreté ; qu'en déboutant néanmoins la société BNP Paribas de ses prétentions indemnitaires au motif que « la banque n'a pas suffisamment justifié de l'impossibilité irrémédiablement compromise d'obtenir, dans la cadre de la liquidation judiciaire de chacun [des autres garants et cautions], le paiement de tout ou partie de sa créance, dans la limite des plafonds garantis par chacun », après avoir pourtant retenu que Me [D] était responsable de l'annulation du cautionnement hypothécaire dont elle bénéficiait en garantie de sa créance, la cour d'appel a violé l'article 1382 devenu 1240 du code civil ;

5°) ALORS QUE le juge qui doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction, ne peut retenir, dans sa décision, les moyens, les explications et les documents invoqués ou produits par les parties que si celles-ci ont été à même d'en débattre contradictoirement ; qu'en relevant d'office, pour débouter la société BNP Paribas de ses prétentions indemnitaires, le moyen tiré de l'absence de perte définitive démontrée de sa créance auprès des époux [E], débiteurs principaux, en dépit de la procédure de liquidation judiciaire dont a fait preuve M. [U] [E], perte qui n'était pourtant pas contestée par Me [D], sans le soumettre à la discussion préalable des parties, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 21-24166
Date de la décision : 01/03/2023
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

OFFICIERS PUBLICS OU MINISTERIELS - Notaire - Responsabilité - Dommage - Réparation - Préjudice certain - Exclusion - Cas - Défaut d'exercice par le créancier de recours contre le coemprunteur ou contre les cautions personnelles

RESPONSABILITE DELICTUELLE OU QUASI DELICTUELLE - Dommage - Préjudice certain - Notaire - Coemprunteur ou cautions personnelles - Recours du prêteur - Défaut de mise en oeuvre - Portée CAUTIONNEMENT - Recours du créancier - Exercice - Défaut - Portée OFFICIERS PUBLICS OU MINISTERIELS - Notaire - Responsabilité - Dommage - Réparation - Préjudice certain - Existence d'une action de la victime contre un tiers - Voie de droit découlant de la situation dommageable créée par le notaire - Exclusion - Cas - Exercice par le créancier du recours contre le coemprunteur ou les cautions personnelles

Ayant retenu qu'un établissement prêteur disposait, pour le recouvrement de sa créance, contre la co-empruntrice et contre les cautions personnelles, de recours qu'elle n'avait pas mis en oeuvre et qui n'étaient pas la conséquence de la situation dommageable imputée à la faute du notaire instrumentaire, la cour d'appel en déduit exactement que le préjudice allégué n'est pas actuel et certain


Références :

Article 1382, devenu 1240, du code civil.

Décision attaquée : Cour d'appel de Reims, 14 septembre 2021

1re Civ., 27 février 2013, pourvoi n° 12-16891, Bull. 2013, I, n° 27 (cassation partielle).


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 01 mar. 2023, pourvoi n°21-24166, Bull. civ.
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles

Composition du Tribunal
Président : M. Chauvin
Avocat(s) : SCP Lévis, SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret

Origine de la décision
Date de l'import : 25/04/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2023:21.24166
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