LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 2
CM
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 30 mars 2023
Cassation partielle
Mme LEROY-GISSINGER, conseiller doyen
faisant fonction de président
Arrêt n° 325 F-D
Pourvoi n° R 21-20.039
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 30 MARS 2023
M. [Z] [N], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° R 21-20.039 contre l'arrêt rendu le 11 février 2021 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 1-6), dans le litige l'opposant :
1°/ à Mme [J] [F], épouse [U], domiciliée [Adresse 5],
2°/ au Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages, dont le siège est [Adresse 2],
3°/ à la Caisse régionale de crédit agricole mutuel Provence Côte d'Azur (Alpes de Haute Provence-Alpes Maritimes-Var), dont le siège est [Adresse 4],
4°/ à la caisse primaire d'assurance maladie du Var, dont le siège est [Adresse 6],
5°/ à la société Pacifica, société anonyme, dont le siège est [Adresse 3],
défenderesses à la cassation.
Le Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages a formé
un pourvoi incident éventuel contre le même arrêt.
Le demandeur au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, un moyen unique de cassation.
Le demandeur au pourvoi incident éventuel invoque, à l'appui de son recours, deux moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Isola, conseiller, les observations de la SARL Le Prado - Gilbert, avocat de M. [N], de Me Balat, avocat de la Caisse régionale de crédit agricole mutuel Provence Côte d'Azur (Alpes de Haute Provence-Alpes Maritimes-Var) et de la société Pacifica, de la SARL Delvolvé et Trichet, avocat du Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages, et l'avis de Mme Nicolétis, avocat général, après débats en l'audience publique du 14 février 2023 où étaient présents Mme Leroy-Gissinger, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Isola, conseiller rapporteur, M. Martin, conseiller, et M. Carrasco, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 11 février 2021), le 4 avril 2014, M. [N], qui pilotait son scooter, a chuté et a été blessé alors qu'il avait entrepris une manoeuvre de dépassement d'un véhicule par la gauche et a été surpris par la présence de Mme [U], piéton, qui s'était engagée sur la chaussée en dehors d'un passage protégé.
2. La société Pacifica (l'assureur), assureur de Mme [U] au titre d'une police multirisques habitation souscrite par l'intermédiaire de la société Caisse régionale de crédit agricole mutuel Provence Côte d'Azur (la banque), agissant en qualité de courtier, a refusé sa garantie à Mme [U], motif pris de la résiliation du contrat antérieure à l'accident, pour défaut de paiement de prime.
3. M. [N] a assigné Mme [U], la banque et la caisse primaire d'assurance maladie du Var devant un tribunal de grande instance en indemnisation de ses préjudices.
4. L'assureur et le Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages (le FGAO) sont intervenus volontairement à l'instance.
Examen des moyens
Sur les moyens du pourvoi incident éventuel du FGAO
5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Mais sur le moyen du pourvoi principal de M. [N], pris en sa seconde branche
Enoncé du moyen
6. M. [N] fait grief à l'arrêt de prononcer la mise hors de cause du FGAO, alors « que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction et ne peut fonder sa décision sur les moyens de droit qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ; qu'en l'espèce, le FGAO avait demandé aux juges de débouter M. [N] de ses demandes en prétendant d'une part qu'aucune faute ne pourrait être retenue à l'encontre de Mme [U] et d'autre part, et à titre subsidiaire, que l'assureur n'a pas justifié s'être conformé aux dispositions de l'article R.421-5 du code des assurances en avisant dans le même temps et selon les mêmes formes le FGAO et la victime de son exception de garantie; qu'après avoir rejeté cette argumentation et déclaré Mme [U] entièrement responsable du dommage corporel subi par M. [N], la cour d'appel a néanmoins prononcé la mise hors de cause du FGAO en retenant d'office que « les contrats d'assurance visés par (l'article L. 421-1, § I, du code des assurances) sont des contrats d'assurance automobile. Le contrat d'assurance ayant lié Mme [U] et l'assureur était un contrat d'assurance multirisques d'habitation. L'intervention du Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages est donc sans objet » ; qu'en statuant ainsi sans avoir au préalable invité les parties à débattre préalablement et contradictoirement de ce moyen relevé d'office, la cour d'appel a violé de l'article 16 du code de procédure civile ».
Réponse de la Cour
Vu l'article 16 du code de procédure civile :
7. Selon ce texte, le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction.
8. Pour prononcer la mise hors de cause du FGAO, l'arrêt énonce que les contrats d'assurance visés par l'article L. 421-1, I, du code des assurances sont des contrats d'assurance automobile, alors que le contrat d'assurance ayant lié Mme [U] et l'assureur était un contrat d'assurance multirisques habitation, de sorte que l'intervention du FGAO est sans objet.
9. En statuant ainsi, sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations sur ce moyen relevé d'office, la cour d'appel a violé le texte susvisé.
Mises hors de cause
10. En application de l'article 625 du code de procédure civile, il y a lieu de mettre hors de cause l'assureur et la banque, dont la présence n'est pas nécessaire devant la cour d'appel de renvoi.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief du pourvoi principal, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il infirme le jugement en ce qu'il a été déclaré commun et opposable au Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages et prononce la mise hors de cause du Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages, l'arrêt rendu le 11 février 2021, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;
Met hors de cause la société Pacifica et la société Caisse régionale de crédit agricole mutuel Provence Côte d'Azur ;
Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Aix-en-Provence autrement composée ;
Laisse les dépens à la charge du Trésor public ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Pacifica à l'encontre de M. [N] et condamne le Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages à payer, d'une part, à M. [N] la somme de 3 000 euros, d'autre part, à la société Pacifica et la société Caisse régionale de crédit agricole mutuel Provence Côte d'Azur la somme globale de 1 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trente mars deux mille vingt-trois.