LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 2
LM
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 6 avril 2023
Cassation
Mme TAILLANDIER-THOMAS, conseiller doyen
faisant fonction de président
Arrêt n° 358 F-D
Pourvoi n° K 21-17.642
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 6 AVRIL 2023
L'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF) Aquitaine, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° K 21-17.642 contre l'arrêt rendu le 1er avril 2021 par la cour d'appel de Bordeaux (chambre sociale, section B), dans le litige l'opposant à Mme [E] [K], domiciliée [Adresse 2], défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Rovinski, conseiller, les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de l'URSSAF Aquitaine, de la SCP Zribi et Texier, avocat de Mme [K], et l'avis de M. de Monteynard, avocat général, après débats en l'audience publique du 28 février 2023 où étaient présents Mme Taillandier-Thomas, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Rovinski, conseiller rapporteur, Mme Renault-Malignac, conseiller, et Mme Catherine, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 1er avril 2021), la caisse du régime social des indépendants Aquitaine, aux droits de laquelle vient l'URSSAF Aquitaine (l'URSSAF), a notifié à Mme [K] (la cotisante), cinq mises en demeure portant sur les cotisations et majorations de retard au titre de la régularisation 2011 et 2012, du 4e trimestre 2013, des 2e, 3e et 4e trimestres 2014 et du 1er trimestre 2015, suivies d'une contrainte du 13 avril 2016, à laquelle la cotisante a formé opposition.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
2. L'URSSAF fait grief à l'arrêt d'annuler la contrainte au titre des cotisations des années 2013 et 2014 et du premier trimestre 2015, alors « que l'objet du litige est fixé par les prétentions respectives des parties et ne peut être modifié par le juge ; qu'en l'espèce, la cotisante se prévalait de la nullité de la contrainte du 13 avril 2016 en soulignant qu'elle s'était acquittée de l'intégralité des cotisations appelées visées par cette contrainte ; que, pour prononcer l'annulation partielle de la contrainte du 13 avril 2016, la cour d'appel a relevé d'office le moyen selon lequel la mise en demeure du 11 février 2014 visée par la contrainte n'avait pas permis à la cotisante d'apprécier la nature, la cause et l'étendue de son obligation, en violation de l'article 4 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 4 du code de procédure civile :
3. L'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties.
4. Pour annuler partiellement la contrainte, l'arrêt énonce que l'URSSAF admet que les appels à cotisations 2012 pour lesquels la cotisante a procédé à plusieurs versements ont été affectés à l'arriéré des cotisations restant dues au titre des échéances 2009 et 2010 sur un premier compte de travailleur indépendant ouvert le 25 mai 2007 par la cotisante auprès du RSI Pays de Loire et fermé le 31 décembre 2010 et qu'elle a ré-affecté ensuite le reliquat des versements sur un compte de travailleur indépendant ouvert le 1er janvier 2011, que si l'URSSAF fournit le détail des régularisations des cotisations 2009-2010 portées à la connaissance de la cotisante en octobre 2010, en revanche et d'une part, il ne ressort pas des documents produits que la cotisante a été informée de la ré-affectation en paiement des cotisations 2009-2010 des chèques émis en 2012 en règlement des appels de cotisations 2012 et, d'autre part, l'URSSAF reconnaît que les versements effectués par la cotisante les 10 juin et 4 septembre 2013 ont été également ré-affectés au règlement des cotisations 2009-2010, que Mme [K] n'a pas été informée de cette décision de ré-affectation et que ces versements ont été encaissés par le RSI Aquitaine qui, en raison de l'indépendance juridique des organismes de sécurité sociale, n'avait pas le pouvoir de les ré-affecter pour régler les créances du RSI Pays de Loire. Il en déduit que la mise en demeure du 11 février 2014 n'a pas permis à la cotisante d'apprécier la nature, la cause et l'étendue de son obligation.
5. En statuant ainsi, alors que, dans ses conclusions d'appel, la cotisante ne contestait pas la régularité formelle de la mise en demeure au motif qu'elle ne répondrait pas aux exigences des articles L. 244-2 et R. 244-1 du code de la sécurité sociale mais se bornait à contester les causes de la contrainte, en prétendant avoir réglé l'intégralité de celles-ci, la cour d'appel, qui a modifié l'objet du litige, a violé le texte susvisé.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi, la Cour :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 1er avril 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Bordeaux ;
Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux, autrement composée ;
Condamne Mme [K] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par Mme [K] et la condamne à payer à l'URSSAF Aquitaine la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du six avril deux mille vingt-trois.