LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 2
LM
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 30 novembre 2023
Rejet
Mme MARTINEL, président
Arrêt n° 1234 F-B
Pourvoi n° E 22-14.260
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 30 NOVEMBRE 2023
L'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF) d'Ile-de-France, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° E 22-14.260 contre l'arrêt rendu le 13 janvier 2022 par la cour d'appel de Versailles (5e chambre sociale), dans le litige l'opposant à la société [3], société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Labaune, conseiller référendaire, les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de l'URSSAF d'Ile-de-France, de la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, avocat de la société [3], et l'avis de M. Grignon Dumoulin, avocat général, après débats en l'audience publique du 24 octobre 2023 où étaient présents Mme Martinel, président, M. Labaune, conseiller référendaire rapporteur, Mme Renault-Malignac, conseiller doyen, et Mme Catherine, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 13 janvier 2022), la société [3] (la société) a adressé, le 18 juillet 2017, à l'URSSAF d'Ile-de-France (l'URSSAF) une demande de rescrit social relative aux modalités de calcul de l'exonération des cotisations patronales prévue par l'article L. 241-10, III, du code de la sécurité sociale.
2. L'URSSAF lui ayant répondu, le 13 septembre 2018, que les conditions d'exonération n'étaient pas remplies, l'association a saisi d'un recours une juridiction chargée du contentieux de la sécurité sociale.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa seconde branche
3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
4. L'URSSAF fait grief à l'arrêt de faire droit au recours de la société, alors « que les dispositions de l'article L. 241-10, III, du code de la sécurité sociale sont d'interprétation stricte ; qu'il résulte de l'article L. 241-10, III, b) du code de la sécurité sociale, qui renvoie expressément au 2ème alinéa de l'article L. 222-3 du code de l'action sociale et des familles, que les prestations d'aide à domicile éligibles à l'exonération des cotisations patronales de sécurité sociale sont, soit les prestations d'aide ménagère, soit les actions d'un technicien ou d'une technicienne de l'intervention sociale et familiale de sorte que l'activité des éducateurs spécialisés et intervenants psychoéducateurs, non assimilable à celle des techniciens de l'intervention sociale et familiale ou d'une aide ménagère, ne peut bénéficier de l'exonération ; qu'en décidant du contraire au prétexte erroné que les a et b de l'article L. 241-10 ne sont pas des conditions cumulatives, la cour d'appel a violé l'article L. 241-10, III du code de la sécurité sociale dans sa version issue de la loi n° 2016-1917 du 29 décembre 2016 applicable au litige, ensemble l'article L. 222-3 du code de l'action sociale et des familles. »
Réponse de la Cour
5. Selon l'article L. 241-10, III, du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue de la loi n° 2016-1917 du 29 décembre 2016, applicable au litige, l'exonération de cotisations patronales de sécurité sociale qu'il prévoit s'applique à la fraction des rémunérations versée en contrepartie de l'exécution des tâches effectuées au domicile à usage privatif :
a) Des personnes mentionnées au I ;
b) Des bénéficiaires soit de prestations d'aide ménagère aux personnes âgées ou handicapées au titre de l'aide sociale légale ou dans le cadre d'une convention conclue entre les structures susmentionnées et un organisme de sécurité sociale, soit des prestations mentionnées au deuxième alinéa de l'article L. 222-3 du code de l'action sociale et des familles ou des mêmes prestations d'aide et d'accompagnement aux familles dans le cadre d'une convention conclue entre ces structures et un organisme de sécurité sociale, dans la limite, pour les tâches effectuées au bénéfice des personnes visées au a du I du présent article, du plafond prévu par ce même a.
6. Selon l'article L. 241-10, I, de ce code, la rémunération d'une aide à domicile est exonérée des cotisations patronales de sécurité sociale, à l'exception de celles dues au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles, lorsque celle-ci est employée effectivement à leur service personnel, à leur domicile ou chez des membres de leur famille, par, notamment, des personnes ayant à charge un enfant ouvrant droit au complément de l'allocation d'éducation de l'enfant handicapé mentionné à l'article L. 541-1 ou à la prestation de compensation dans les conditions définies au 1° du III de l'article L. 245-1 du code de l'action sociale et des familles.
7. Il résulte de ce texte que les structures qu'il mentionne peuvent prétendre au bénéfice de l'exonération de cotisations sur la rémunération des aides à domicile qui concourent à l'exécution de leurs missions auprès des personnes mentionnées au I.
8. L'arrêt retient que les conditions posées par les alinéas a et b de l'article L. 241-10, III, précité ne sont pas cumulatives. Il relève que la société fournit des prestations à destination exclusive des personnes présentant un trouble du spectre autistique consistant en la dispensation d'apprentissages individualisés et adaptés spécifiquement à l'enfant, fonctionnels dans son « environnement naturel » et généralisés en présence des parents. Il en déduit que les interventions de la société auprès d'enfants ouvrant droit au complément de l'allocation d'éducation de l'enfant handicapé ou à la prestation de compensation, mentionnés à l'article L. 241-10, I, du code de la sécurité sociale, permet à la société de prétendre à l'exonération litigieuse.
9. De ces constatations et énonciations, la cour d'appel a exactement déduit que la société pouvait prétendre au bénéfice de l'exonération des cotisations patronales de sécurité sociale pour la fraction des rémunérations versée en contrepartie de l'exécution des tâches effectuées par les éducateurs spécialisés et les intervenants psycho-éducateurs qu'elle emploie au domicile à usage privatif des personnes mentionnées au I de l'article L. 241-10.
10. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi.
Condamne l'URSSAF d'Ile-de-France aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par l'URSSAF d'Ile-de-France et la condamne à payer à la société [3] la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trente novembre deux mille vingt-trois.