LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 2
LM
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 25 janvier 2024
Rejet
Mme MARTINEL, président
Arrêt n° 67 F-B
Pourvoi n° W 22-16.966
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 25 JANVIER 2024
La société Mutuelle assurance des instituteurs de France (MAIF), société d'assurance mutuelle, dont le siège est [Adresse 2], venant aux droits de la société Filia MAIF, a formé le pourvoi n° W 22-16.966 contre l'arrêt rendu le 29 mars 2022 par la cour d'appel de Poitiers (1re chambre civile), dans le litige l'opposant :
1°/ à M. [H] [E], domicilié [Adresse 6],
2°/ à la caisse primaire d'assurance maladie du [Localité 5], dont le siège est [Adresse 1],
3°/ au Fonds de garantie des assurances obligatoire de dommages, dont le siège est [Adresse 3],
4°/ à M. [B] [G], domicilié [Adresse 4],
défendeurs à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, quatre moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Ittah, conseiller référendaire, les observations de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat de la société Mutuelle assurance des instituteurs de France (MAIF), venant aux droits de la société Filia MAIF, de la SARL Cabinet Briard, avocat de M. [E], de la SARL Delvolvé et Trichet, avocat du Fonds de garantie des assurances obligatoire de dommages, de la SCP Foussard et Froger, avocat de la caisse primaire d'assurance maladie du [Localité 5], et l'avis de Mme Nicolétis, avocat général, après débats en l'audience publique du 5 décembre 2023 où étaient présents Mme Martinel, président, M. Ittah, conseiller référendaire rapporteur, Mme Leroy-Gissinger, conseiller doyen, et Mme Cathala, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
Désistement partiel
1. Il est donné acte à la société MAIF du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre M. [G].
Faits et procédure
2. Selon l'arrêt attaqué (Poitiers, 29 mars 2022), M. [E] a été grièvement blessé dans un accident de la circulation survenu le 5 septembre 2016 en Belgique, impliquant un véhicule automobile immatriculé en France, dans lequel il avait pris place comme passager arrière et où se trouvait également M. [G].
3. La société Filia MAIF, devenue la société MAIF (l'assureur), auprès de laquelle le véhicule avait été assuré, a refusé de prendre en charge les conséquences dommageables de l'accident, au motif que le véhicule avait été cédé le 4 mars 2016 et qu'elle avait procédé, à effet du 23 juin 2016, à la suppression des garanties souscrites, ce dont elle avait informé son ancienne assurée par lettre du 25 juillet 2016.
4. M. [E] a assigné devant un tribunal de grande instance M. [G] et l'assureur, à fin d'indemnisation, en présence de la caisse primaire d'assurance maladie du [Localité 5].
5. Le Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages (le FGAO), à qui l'assignation a été dénoncée, est intervenu volontairement à l'instance.
Examen des moyens
Sur les premier, troisième et quatrième moyens
6. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le deuxième moyen
Enoncé du moyen
7. L'assureur fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevable son exception de non-assurance, d'ordonner une expertise médicale, de le condamner à payer à M. [E] une somme de 150 000 euros à titre de provision à valoir sur l'indemnisation de son préjudice corporel, de juger qu'il est tenu de réparer entièrement les conséquences préjudiciables pour M. [E] de l'accident du 5 septembre 2016 et de le condamner à payer à ce dernier une provision complémentaire de 120 000 euros à valoir sur l'indemnisation de son préjudice, et à la caisse une somme de 370 890 euros à titre de provision à valoir sur l'indemnisation devant lui revenir au titre de ses débours, ainsi qu'une autre somme de 1 066 euros en application de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, de mettre le FGAO hors de cause et de débouter les parties de leurs demandes plus amples ou contraires, alors :
« 1°/ que les règles de double notification prévues par l'article R. 421-5 du code des assurances s'appliquent aux accidents survenus en France métropolitaine, dans les départements d'outre-mer et à Mayotte ; que s'agissant des accidents survenus à l'étranger, l'assureur est seulement tenu de notifier son exception au fonds de garantie, conformément à l'article R. 421-68 du même code ; qu'en opposant, pour écarter l'application de cette dernière disposition, que l'article R. 421-70 du code des assurances renvoyait à la section I du chapitre Ier du titre II du livre IV de la partie réglementaire du code des assurances contenant « l'article 425-1 » [R. 421-5], quand ce renvoi n'est opéré au texte qu'à titre supplétif, sous l'expresse réserve des dispositions de la section contenant l'article R. 421-68, la cour d'appel a violé les articles R. 421-5 du code des assurances, par fausse application, et R. 421-68 du même code, par refus d'application ;
2°/ que contrairement à l'article R. 421-5 du code des assurances, qui impose à l'assureur de notifier concomitamment et par lettre recommandée son refus de garantie au fonds de garantie et à la victime, l'article R. 421-68 ne lui impose de notifier ce refus, même par lettre simple, qu'au fonds de garantie ; qu'en affirmant néanmoins que les dispositions de l'article R. 421-68 du code des assurances ne dérogeaient pas à celles de l'article R. 421-5 du même code, la cour d'appel a violé ensemble les articles R. 421-5 et R. 421-68 du code des assurances. »
Réponse de la Cour
8. Selon l'article L. 421-11 du code des assurances, le FGAO prend en charge l'indemnisation des victimes d'accidents causés par des véhicules soumis à l'assurance obligatoire de responsabilité civile qui ont leur stationnement habituel en France lorsque l'accident survient, notamment, dans un État de l'Union européenne, à condition que le responsable du dommage ne soit pas assuré et que l'indemnisation de la victime soit effectuée dans les conditions prévues par la législation nationale de l'État sur le territoire duquel s'est produit l'accident.
9. L'article R. 421-64 du même code prévoit que, pour l'application de l'article L. 421-11 susmentionné, le FGAO rembourse au bureau central français les sommes qu'il aura dû verser au bureau national d'assurance étranger, qui a indemnisé la victime de l'accident survenu sur son territoire.
10. Par ailleurs, selon l'article R. 421-70 du code des assurances, l'article R. 421-5 du même code est applicable aux accidents survenus à l'étranger, sous réserve de l'application des dispositions des articles R. 421-64 à R. 421-71.
11. Il en résulte que ce n'est que lorsque la victime a bénéficié d'une indemnisation par un bureau national d'assurance étranger que sont applicables les dispositions de l'article R. 421-68 du code des assurances, qui prévoit que l'assureur qui invoque une exception pour refuser sa garantie ou en réduire l'étendue ne doit la déclarer qu'au FGAO, et non également à la victime.
12. En dehors de cette hypothèse, les dispositions de l'article R. 421-5 du code des assurances, qui imposent à l'assureur d'en informer tant le FGAO que la victime, s'appliquent.
13. C'est, donc, par une exacte application de ces dispositions que la cour d'appel a retenu, en l'absence d'indemnisation de la victime par le bureau national d'assurance belge, que les dispositions de l'article R. 421-5, alinéa 1, du code des assurances devaient s'appliquer.
14. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi.
Condamne la société MAIF, venant aux droits de la société Filia MAIF, aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société MAIF, venant aux droits de la société Filia MAIF, et la condamne à payer à M. [E] et au Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages la somme de 3 000 euros chacun ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq janvier deux mille vingt-quatre.