LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 2
LM
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 23 mai 2024
Rejet
Mme MARTINEL, président
Arrêt n° 473 F-D
Pourvois n°
G 22-19.415
J 22-19.416 Jonction
Aides juridictionnelles partielles en défense
au profit de Mme [K].
Admissions du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 4 avril 2023 dans le pourvoi n° G 22-19.415
et du 10 novembre 2022 dans le pourvoi n° J 22-19.416.
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 23 MAI 2024
I. La société Propreté multi services (PMS) Nancy, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° G 22-19.415 contre l'arrêt rendu le 27 janvier 2022 par la cour d'appel de Nancy (chambre sociale, section 2), dans le litige l'opposant à Mme [W] [K], domiciliée [Adresse 1], défenderesse à la cassation.
II. La société Propreté multi services (PMS) Nancy, société par actions simplifiée, a formé le pourvoi n° J 22-19.416 contre l'arrêt rendu le 4 mars 2021 par la même cour d'appel, dans le litige l'opposant à Mme [W] [K], défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, Ã l'appui de ses pourvois, deux moyens de cassation.
Les dossiers ont été communiqués au procureur général.
Sur le rapport de Mme Latreille, conseiller référendaire, les observations de la SARL Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de la société Propreté multi services (PMS) Nancy, de la SCP Ohl et Vexliard, avocat de Mme [K], et l'avis de M. Adida-Canac, avocat général, après débats en l'audience publique du 3 avril 2024 où étaient présentes Mme Martinel, président, Mme Latreille, conseiller référendaire rapporteur, Mme Durin-Karsenty, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Jonction
1. En raison de leur connexité, les pourvois n° G 22-19.415 et J 22-19.416 sont joints.
Faits et procédure
2. Selon les arrêts attaqués (Nancy, 4 mars 2021 et 27 janvier 2022) et les productions, Mme [K] a été engagée par la société Polinec, aux droits de laquelle vient la société Propreté multi services (PMS) Nancy (la société), suivant contrat à durée indéterminée à compter du 12 octobre 1999, en qualité d'agent d'entretien.
3. Soutenant que l'employeur avait réduit unilatéralement sa durée du travail, Mme [K] a saisi un conseil de prud'hommes par requête du 22 janvier 2013.
4. L'affaire a été radiée par ordonnance du 20 mars 2015 subordonnant la réinscription de l'affaire au dépôt de pièces et de conclusions.
5. La reprise d'instance a été sollicitée le 20 mars 2017 par conclusions de Mme [K] accompagnées de pièces déposées au greffe de la juridiction.
6. L'affaire a été réinscrite au rôle.
7. Par jugement du 14 septembre 2018, un conseil de prud'hommes a dit que les demandes de Mme [K] étaient mal fondées et l'en a déboutée.
8. Mme [K] ayant relevé appel de cette décision, un conseiller de la mise en état a, le 9 septembre 2020, rejeté l'incident de péremption formé par la société et renvoyé l'affaire à la mise en état, décision confirmée sur déféré le 4 mars 2021 par la cour d'appel.
9. Par arrêt du 27 janvier 2022, la cour d'appel, statuant au fond, a constaté qu'un arrêt du 4 mars 2021 avait dit que l'appel était recevable et non périmé, infirmé partiellement le jugement du conseil des prud'hommes en date du 14 septembre 2018 en ce qu'il avait débouté Mme [K] et, statuant à nouveau, condamné la société à payer à cette dernière diverses sommes à titre des rappels de salaire et d'indemnité de congés payés.
Examen des moyens
Sur le second moyen, pris en sa seconde branche
10. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le premier moyen
Enoncé du moyen
11. La société fait grief aux arrêts de dire que la péremption de l'instance n'était pas acquise, alors :
« 1°/ que l'instance est périmée lorsqu'aucune des parties n'accomplit de diligence pendant deux ans ; que les ordonnances prononçant la radiation d'une affaire n'ont pas pour effet d'interrompre le délai de péremption ; qu'en l'espèce, pour décider que l'instance n'était pas périmée, la cour d'appel a retenu, par motifs propres et adoptés, que les pièces produites par la salariée démontraient qu'elle avait accompli les diligences nécessaires dans le délai prévu par loi, que l'ordonnance de radiation du 20 mars 2015 avait subordonné la réinscription de l'affaire au dépôt de pièces et conclusions et que la salariée avait sollicité la reprise d'instance par courrier du 20 mars 2017 auquel étaient jointes des conclusions et pièces, soit dans le délai de deux ans à compter du 20 mars 2015, de sorte que la péremption n'était pas encourue ; qu'en statuant ainsi, quand l'ordonnance de radiation du 20 mars 2015 n'avait pas interrompu le délai de péremption et qu'elle devait rechercher la date de la dernière diligence accomplie par les parties pour fixer le point de part du délai de péremption, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 386 du code de procédure civile ;
2°/ que l'exposante faisait valoir que l'ordonnance prononçant la radiation n'interrompt pas la péremption, que seule devait être prise en compte la dernière diligence ayant pour but de faire avancer le litige vers sa conclusion, qu'en l'espèce, la dernière diligence mise à la charge des parties avait été de fixer l'affaire aux fins de plaidoirie au bureau de jugement du 20 décembre 2013, qu'à la date du 20 mars 2017, aucune diligence n'avait été accomplie depuis plus de deux ans et qu'en retenant que l'instance n'était pas périmée, le premier juge avait procédé à une confusion entre la possibilité de reprendre une procédure après radiation et le décompte du délai de péremption d'instance ; qu'en se bornant à retenir que les pièces produites par la salariée démontraient qu'elle avait accompli les diligences nécessaires dans le délai prévu par la loi sans répondre à ces conclusions faisant valoir que la dernière diligence en vue de faire avancer le litige vers sa conclusion remontaient au 20 décembre 2013, de sorte que celle du 20 mars 2017 a été effectuée après expiration du délai de péremption, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
12. Aux termes de l'article R. 1452-8 du code du travail, abrogé à compter du 1er août 2016 par le décret n° 2016-660 du 20 mai 2016, alors applicable, en matière prud'homale, l'instance n'est périmée que lorsque les parties s'abstiennent d'accomplir, pendant le délai de deux ans mentionné à l'article 386 du code de procédure civile, les diligences qui ont été expressément mises à leur charge par la juridiction.
13. Par avis rendu le 14 avril 2021 (n° 21-70.005), la Cour de cassation a affirmé qu'il résulte des articles 8 et 45 du décret n° 2016-660 du 20 mai 2016 que les dispositions de l'article R. 1452-8 du code du travail demeurent applicables aux instances d'appel dès lors que le conseil de prud'hommes a été saisi avant le 1er août 2016.
14. Il ressort des constatations de la cour d'appel qu'à la suite d'une radiation de l'affaire décidée par une ordonnance du 20 mars 2015, qui subordonnait la réinscription de l'affaire au dépôt de pièces et de conclusions, Mme [K] a sollicité la reprise de l'instance par conclusions accompagnées de pièces déposées au greffe de la juridiction par son avocat le 20 mars 2017.
15. Il résulte de tout ce qui précède que l'instance n'était pas périmée.
16. Par ce seul motif de pur droit, substitué aux motifs critiqués, après avis donné aux parties en application de l'article 1015 du code de procédure civile, l'arrêt se trouve légalement justifié.
Sur le second moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
17. La société fait grief à l'arrêt du 27 janvier 2022 de la condamner à payer à Mme [K] les sommes de 8 715,71 euros au titre des rappels de salaire et 871,57 euros au titre de l'indemnité de congés payés, alors « que la cassation à intervenir sur le premier moyen, concernant l'arrêt avant dire droit du 4 mars 2021, emportera par voie de conséquence la cassation de l'arrêt sur le fond du 27 janvier 2022, en application de l'article 625 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
18. Le premier moyen ayant fait l'objet d'un rejet, le grief est sans portée.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE les pourvois ;
Condamne la société Propreté multi services (PMS) Nancy aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Propreté multi services (PMS) Nancy et la condamne à payer à la SCP Ohl et Vexliard la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois mai deux mille vingt-quatre.