La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

08/01/2025 | FRANCE | N°22-12.477

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale - formation de section, 08 janvier 2025, 22-12.477


SOC.

CH9



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 8 janvier 2025




Rejet


M. SOMMER, président



Arrêt n° 25 FS-B

Pourvoi n° S 22-12.477




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 8 JANVIER 2025

La commune de Toulouse, représentée par son maire en exercice, domiciliÃ

©e [Adresse 3], a formé le pourvoi n° S 22-12.477 contre l'arrêt rendu le 14 janvier 2022 par la cour d'appel de Toulouse (4e chambre, section 2), dans le litige l'opposant à ...

SOC.

CH9



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 8 janvier 2025




Rejet


M. SOMMER, président



Arrêt n° 25 FS-B

Pourvoi n° S 22-12.477




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 8 JANVIER 2025

La commune de Toulouse, représentée par son maire en exercice, domiciliée [Adresse 3], a formé le pourvoi n° S 22-12.477 contre l'arrêt rendu le 14 janvier 2022 par la cour d'appel de Toulouse (4e chambre, section 2), dans le litige l'opposant à M. [Z] [D], domicilié [Adresse 1], défendeur à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Rinuy, conseiller, les observations de la SCP Foussard et Froger, avocat de la commune de Toulouse, de la SAS Buk Lament-Robillot, avocat de M. [D], et l'avis de Mme Canas, avocat général, après débats en l'audience publique du 27 novembre 2024 où étaient présents M. Sommer, président, M. Rinuy, conseiller rapporteur, M. Huglo, conseiller doyen, Mmes Ott, Sommé, Bouvier, Bérard, M. Dieu, conseillers, Mmes Chamley-Coulet, Lanoue, Ollivier, Arsac, conseillers référendaires, Mme Canas, avocat général, et Mme Pontonnier, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 14 janvier 2022), M. [D] a été engagé en qualité de responsable technique de la régie municipale des pompes funèbres par la commune de Toulouse, suivant contrat à durée déterminée à compter du 15 mai 2006, pour remplacer un salarié absent. Un contrat à durée indéterminée a ensuite été conclu à compter du 1er mars 2008 pour un poste d'assistant funéraire à la régie des pompes funèbres de la ville de [Localité 4], affecté au crématorium.

2. Le 23 mai 2018, M. [D] a saisi la juridiction prud'homale aux fins de résiliation judiciaire du contrat de travail. En cours de procédure, il a été admis, par arrêté du 3 juillet 2018, à faire valoir ses droits à retraite et radié des cadres à compter du 25 juin 2018.

3. Devant la juridiction prud'homale, M. [D] a demandé la requalification de sa mise à la retraite en licenciement sans cause réelle et sérieuse et le paiement de diverses sommes.

4. La commune de Toulouse a soulevé l'incompétence du conseil de prud'hommes au profit de la juridiction administrative.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

5. La commune de Toulouse fait grief à l'arrêt de dire que le conseil de prud'hommes est compétent pour statuer, alors :

« 1°/ que, à moins que la loi n'en dispose autrement, le caractère administratif d'un service public est présumé ; que la présomption n'est écartée au profit de la qualification de service public à caractère industriel et commercial qu'à la triple condition que les opérations formant son activité soient identiques à celles auxquelles se livrent, ou pourraient se livrer, des personnes privées, que son financement soit assuré pour l'essentiel par les recettes provenant des redevances versées par les usagers comme prix des prestations fournies, et qu'enfin sa gestion soit assurée selon les règles du droit privé ; qu'en se bornant à relever que la gestion d'un crématorium Cornebarrieu pouvait parfaitement être assurée par une entreprise privée et que le crématorium faisait l'objet d'un budget annexe, sans rechercher si la gestion du crématorium était assurée selon les règles du droit privé, la cour d'appel de Toulouse a privé sa décision de base légale au regard du principe de la séparation des pouvoirs, de la loi des 16-24 août 1790 et du décret du 16 fructidor an III ;

2°/ que le seul fait qu'un service public fasse l'objet d'un budget annexe n'est pas de nature à établir qu'il est essentiellement financé par les redevances versées par les usagers ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé le principe de la séparation des pouvoirs, la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;

3°/ que le seul fait que la gestion d'un service public puisse être assurée par une entreprise privée par voie de délégation ne permet pas d'établir que l'objet de ce service est industriel et commercial ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé le principe de la séparation des pouvoirs, la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;

4°/ que seule la loi peut imposer la qualification de service public industriel et commercial ; qu'en mettant en avant le fait qu'un rapport du budget de la ville de Toulouse, qu'une note de présentation du projet de construction d'un deuxième crématorium et qu'une délibération du conseil de la métropole avaient qualifié le crématorium de service public d'industriel et commercial quand ces différents documents étaient dépourvues de valeur législative, la cour d'appel a violé le principe de la séparation des pouvoirs, la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;

5°/ que le fait qu'un service soit géré en régie ne constitue pas un indice de son caractère industriel et commercial ; qu'en soulignant que le crématorium était géré en régie pour retenir la qualification de service public industriel et commercial, la cour d'appel a violé le principe de la séparation des pouvoirs, la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III. »

Réponse de la Cour

6. Saisi par la Cour de cassation (Soc., 6 mars 2024, pourvoi n° 22-12.477), en application de l'article 35 du décret n° 2015-233 du 27 février 2015, le Tribunal des conflits a, par arrêt du 8 juillet 2024 (n° 4314), énoncé :

« En vertu de l'article L. 2223-19 du code général des collectivités territoriales, la mission de service public du service extérieur des pompes funèbres "peut être assurée par les communes, directement ou par voie de gestion déléguée. Les communes ou leurs délégataires ne bénéficient d'aucun droit d'exclusivité pour l'exercice de cette mission. Elle peut être également assurée par toute autre entreprise ou association bénéficiaire de l'habilitation prévue à l'article L. 2223-23". Selon l'article L. 2223-23 du même code, les "régies, les entreprises ou les associations et chacun de leurs établissements qui, habituellement, sous leur marque ou non, fournissent aux familles des prestations énumérées à l'article L. 2223-19 ou définissent cette fourniture ou assurent l'organisation des funérailles doivent être habilités à cet effet selon des modalités et une durée prévues par décret en Conseil d'Etat".
Aux termes du premier alinéa de l'article L. 2223-40 du même code : "Les communes et les établissements publics de coopération intercommunale sont seuls compétents pour créer et gérer les crématoriums et les sites cinéraires. Les crématoriums et les sites cinéraires qui leur sont contigus peuvent être gérés directement ou par voie de gestion déléguée. Les sites cinéraires inclus dans le périmètre d'un cimetière ou qui ne sont pas contigus à un crématorium doivent être gérés directement." En vertu de l'article L. 2223-41 du même code, les "régies, entreprises ou associations gestionnaires d'un crématorium conformément à l'article L. 2223-40 sont soumises à l'habilitation prévue à l'article L. 2223-23".
Compte tenu de son objet, de l'origine de ses ressources, constituées principalement du prix acquitté par les usagers en paiement des prestations, et de ses modalités de fonctionnement, marquées par la pluralité des intervenants publics ou privés, le service extérieur des pompes funèbres assuré par la régie des pompes funèbres de la commune de [Localité 4] présente le caractère d'un service public industriel et commercial. Il en va de même pour la gestion, par la régie des pompes funèbres, du crématorium de [Localité 2] où était affecté M. [D], sans qu'y fasse obstacle la circonstance que l'article L. 2223-40 réserve aux communes la compétence pour créer et gérer les crématoriums.
Il s'ensuit que M. [D], employé comme agent au sein de ce crématorium, était lié à la commune de [Localité 4] par un contrat de droit privé. Par suite, le litige l'opposant à la commune relève de la compétence de la juridiction judiciaire. »

7. Conformément à l'article 11 de la loi du 24 mai 1872 modifiée relative au Tribunal des conflits, cette décision s'impose à toutes les juridictions judiciaires et administratives.

8. Il s'ensuit que la cour d'appel a dit à bon droit que le conseil de prud'hommes était compétent pour statuer sur le litige opposant M. [D] à la commune de Toulouse.

9. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la commune de [Localité 4] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la commune de [Localité 4] et la condamne à payer à M. [D] la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du huit janvier deux mille vingt-cinq.


Synthèse
Formation : Chambre sociale - formation de section
Numéro d'arrêt : 22-12.477
Date de la décision : 08/01/2025
Sens de l'arrêt : Rejet

Analyses

Saisi par la Cour de cassation (Soc., 6 mars 2024, pourvoi n° 22-12.477), en application de l'article 35 du décret n° 2015-233 du 27 février 2015, le Tribunal des conflits a, par arrêt du 8 juillet 2024 (n° 4314), énoncé que, en l'état de la législation applicable, compte tenu de son objet, de l'origine de ses ressources, constituées principalement du prix acquitté par les usagers en paiement des prestations, et de ses modalités de fonctionnement, marquées par la pluralité des intervenants publics ou privés, le service extérieur des pompes funèbres assuré par la régie des pompes funèbres d'une commune présente le caractère d'un service public industriel et commercial et qu'il en va de même pour la gestion, par la régie des pompes funèbres, du crématorium, sans qu'y fasse obstacle la circonstance que l'article L. 2223-40 réserve aux communes la compétence pour créer et gérer les crématoriums et qu'il s'ensuit que la personne, employée comme agent au sein de ce crématorium, était liée à la commune par un contrat de droit privé et que le litige l'opposant à la commune relève de la compétence de la juridiction judiciaire

separation des pouvoirs.


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Toulouse 42


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc. - formation de section, 08 jan. 2025, pourvoi n°22-12.477, Bull. civ.Publié au
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles Publié au

Origine de la décision
Date de l'import : 09/01/2025
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2025:22.12.477
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award