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16/01/2025 | FRANCE | N°22-17.732

France | France, Cour de cassation, Deuxième chambre civile - formation restreinte hors rnsm/na, 16 janvier 2025, 22-17.732


CIV. 2

AF1



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 16 janvier 2025




Cassation partielle


Mme MARTINEL, président



Arrêt n° 39 F-B

Pourvoi n° D 22-17.732



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 16 JANVIER 2025

M. [W] [D], domicilié [Adresse 2], a formé le po

urvoi n° D 22-17.732 contre l'arrêt rendu le 24 mars 2022 par la cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion (chambre sociale), dans le litige l'opposant à l'association [3],...

CIV. 2

AF1



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 16 janvier 2025




Cassation partielle


Mme MARTINEL, président



Arrêt n° 39 F-B

Pourvoi n° D 22-17.732



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 16 JANVIER 2025

M. [W] [D], domicilié [Adresse 2], a formé le pourvoi n° D 22-17.732 contre l'arrêt rendu le 24 mars 2022 par la cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion (chambre sociale), dans le litige l'opposant à l'association [3], dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.

L'association [3] a formé un pourvoi incident contre le même arrêt.

M. [W] [D], demandeur au pourvoi principal, invoque, à l'appui de son recours, un moyen unique de cassation.

L'association [3], demanderesse au pourvoi incident, invoque, à l'appui de son recours, un moyen unique de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Grandemange, conseiller, les observations de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de M. [D], de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat de l'association [3], et l'avis de M. Adida-Canac, avocat général, après débats en l'audience publique du 27 novembre 2024 où étaient présentes Mme Martinel, président, Mme Grandemange, conseiller rapporteur, Mme Durin-Karsenty, conseiller doyen, et Mme Sara, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Saint-Denis de La Réunion, 24 mars 2022), M. [D] (le salarié) a été engagé par I'association [3] (l'association) en qualité de directeur, à compter du 20 janvier 2015.

2. Licencié le 30 novembre 2018, il a saisi la juridiction prud'homale en annulation de son licenciement et en réintégration, subsidiairement en contestation de son bien-fondé.

3. Les 1er et 11 décembre 2020, le salarié et l'association ont successivement formé un appel principal, le salarié a formé appel incident sur l'appel principal de l'association par conclusions du 24 mai 2021. Les instances enrôlées sous des numéros différents, ont été jointes par ordonnance du conseiller de la mise en état du 4 octobre 2021.

Examen du moyen du pourvoi principal

Enoncé du moyen

4. Le salarié fait grief à l'arrêt de confirmer le jugement rendu le 17 novembre 2020 par le conseil de prud'hommes sauf en ce qu'il a condamné l'association à lui payer la somme de 40 646,36 euros à titre d'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse et la somme de 3 000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice distinct, statuant à nouveau des chefs infirmés, de condamner l'association à lui payer la somme de 33 870 euros à titre d'indemnité pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, alors :

« 1°/ que la jonction d'instances ne créant pas une procédure unique la cour d'appel doit statuer sur les dernières écritures déposées dans chaque instance par la partie qui n'a pas conclu après la jonction ; que par ailleurs, l'appel incident est formé de la même manière que le sont les demandes incidentes ; qu'il peut l'être par conclusions ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, ayant joint par ordonnance du 4 octobre 2021 les appels respectivement interjetés contre le jugement du 17 novembre 2020, par le salarié le 1er décembre 2020 (n° RG 20/02118), et par l'association le 11 décembre 2020 (n° RG 20/02234), s'est exclusivement fondée sur la déclaration d'appel et les conclusions notifiées par le salarié le 3 septembre 2021 dans l'instance n° RG 20/02118 pour décider qu'elle n'était pas saisie du chef du jugement l'ayant débouté de sa demande de nullité du licenciement et de réintégration ; que cependant le salarié avait, dans l'instance (n° RG 20/02234) ouverte par l'appel de l'association, formé un appel incident par conclusions du 24 mai 2021 ; qu'en statuant comme elle l'a fait sans qu'il résulte de sa décision qu'elle ait pris en considération l'appel incident ainsi formé par le salarié, qui n'avait pas conclu après la jonction, la cour d'appel a violé les articles 367, 368, 561 et 954 du code de procédure civile ;

2°/ qu'aux termes de l'article 551 du code de procédure civile, l'appel incident est formé de la même manière que le sont les demandes incidentes ; qu'est dès lors recevable un appel incident formé par conclusions conformes aux articles 910-4 et 954 du code de procédure civile ; que selon ce dernier texte, les conclusions contiennent « un dispositif récapitulant les prétentions » de leur auteur, et la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a retenu à l'appui de sa décision « que l'acte par lequel le salarié a interjeté appel du jugement entrepris ne critique le jugement qu'en ce qu'il l'a débouté de ses demandes subsidiaires tendant à voir l'association condamnée à lui payer 81 294,72 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, 13 549,12 euros à titre de dommages intérêts pour licenciement survenu dans des circonstances vexatoires et 5 000 euros au titre des frais non répétibles d'instance ; que ni cet acte, ni celui par lequel l'association a interjeté appel du jugement entrepris n'ont dévolu à la cour la question de la nullité du licenciement, ni celles subséquentes ; qu'il n'y aura par conséquent pas lieu de les examiner, la cour n'en étant pas saisie » ; que cependant, les conclusions formant appel incident déposées par le salarié le 24 mai 2021 dans l'instance ouverte sur l'appel de l'association le 11 décembre 2020 (n° RG 20/02234), priaient la cour d'appel, dans leur dispositif, « A titre principal [d']Infirmer le jugement rendu le 17 novembre 2020 par le conseil de prud'hommes de Saint-Denis en toutes ses dispositions ; Statuant à nouveau Dire et juger que le licenciement pour faute grave du salarié est fondé sur une liberté fondamentale du salarié, la liberté d'expression, Par conséquent Dire et juger que le licenciement pour faute grave du salarié est nul ; Annuler la période de mise à pied [...] ; Ordonner la réintégration du salarié au sein de l'Association dans son emploi, à défaut dans un emploi équivalent [...] » ; qu'en retenant à l'appui de sa décision que ne lui avait pas été dévolue la question de la nullité du licenciement de sorte qu'il n'y avait pas lieu de l'examiner, la cour d'appel a violé les textes susvisés, ensemble l'article 562 du code de procédure civile ;

3°/ que l'appel incident peut émaner, sur l'appel principal ou incident qui le provoque, de toute personne ayant été partie en première instance ; que la partie qui a limité son appel principal peut ainsi étendre sa critique du jugement sur l'appel principal ou incident de son adversaire ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a retenu à l'appui de sa décision « que l'acte par lequel le salarié a interjeté appel du jugement entrepris ne critique le jugement qu'en ce qu'il l'a débouté de ses demandes subsidiaires tendant à voir l'association condamnée à lui payer 81 294,72 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, 13 549,12 euros à titre de dommages intérêts pour licenciement survenu dans des circonstances vexatoires et 5 000 euros au titre des frais non répétibles d'instance ; que ni cet acte, ni celui par lequel l'association a interjeté appel du jugement entrepris n'ont dévolu à la cour la question de la nullité du licenciement, ni celles subséquentes ; qu'il n'y aura par conséquent pas lieu de les examiner, la cour n'en étant pas saisie » ; qu'en statuant de la sorte quand l'appel incident du salarié provoqué par l'appel principal formé contre le jugement par l'association avait étendu sa critique du jugement aux chefs le déboutant de sa demande de nullité de son licenciement et de sa demande de réintégration, la cour d'appel a violé l'article 549 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 367, 551, 562 et 954 du code de procédure civile, ces derniers dans leur rédaction issue du décret n° 2017-891 du 6 mai 2017 applicable au litige :

5. Il résulte du premier et du quatrième de ces textes que, la jonction d'instances ne créant pas une procédure unique, la cour d'appel doit statuer sur les dernières écritures déposées dans chaque instance par la partie qui n'a pas conclu après la jonction.

6. Selon le deuxième, l'appel incident est formé de la même manière que le sont les demandes incidentes.

7. Selon le troisième, l'appel défère à la cour d'appel la connaissance des chefs de jugement qu'il critique expressément et de ceux qui en dépendent.

8. Il en découle que l'appel principal d'une partie ne lui interdit pas de former, de la même manière que le sont les demandes incidentes, un appel incident sur l'appel principal de la partie adverse et d'étendre ainsi sa critique du jugement.

9. Pour dire que la cour d'appel n'est pas saisie de la demande en nullité du licenciement et de ses demandes subséquentes, et confirmer le jugement, sauf en ce qui concerne le montant des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et l'octroi de dommages et intérêts pour préjudice distinct, l'arrêt relève que le salarié a limité sa déclaration d'appel aux chefs du jugement ayant statué sur ses demandes subsidiaires formées contre l'association à fin de la voir condamner à paiement de sommes pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, et licenciement vexatoire.

10. En statuant ainsi, alors qu'elle devait statuer sur l'appel incident du salarié et en particulier sur celles des demandes formées dans ses conclusions remises le 24 mai 2021 tendant à l'annulation du licenciement, à la réintégration du salarié, au paiement du salaire pendant la mise à pied conservatoire et d'une indemnité d'éviction, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le pourvoi incident, la Cour :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il déboute M. [D] de sa demande en paiement de dommages et intérêts pour licenciement vexatoire, l'arrêt rendu le 24 mars 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion autrement composée ;

Condamne I'association [3] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par I'association [3] et la condamne à payer à M. [D] la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du seize janvier deux mille vingt-cinq.


Synthèse
Formation : Deuxième chambre civile - formation restreinte hors rnsm/na
Numéro d'arrêt : 22-17.732
Date de la décision : 16/01/2025
Sens de l'arrêt : Cassation

Analyses

L'appel principal d'une partie ne lui interdit pas de former, de la même manière que le sont les demandes incidentes, un appel incident sur l'appel principal de la partie adverse et d'étendre ainsi sa critique du jugement

appel civil.


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Saint Denis de la Réunion


Publications
Proposition de citation : Cass. Deuxième chambre civile - formation restreinte hors rnsm/na, 16 jan. 2025, pourvoi n°22-17.732, Bull. civ.Publié au
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles Publié au

Origine de la décision
Date de l'import : 17/01/2025
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2025:22.17.732
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