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12/02/2025 | FRANCE | N°23-10.813

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale financière et économique - formation restreinte hors rnsm/na, 12 février 2025, 23-10.813


COMM.

HM



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 12 février 2025




Cassation partielle


M. VIGNEAU, président



Arrêt n° 80 F-D

Pourvoi n° D 23-10.813




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 12 FÉVRIER 2025

La société Château Ci

tran Medoc, société anonyme, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° D 23-10.813 contre l'arrêt rendu le 17 octobre 2022 par la cour d'appel de Bordeaux (4e chambre c...

COMM.

HM



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 12 février 2025




Cassation partielle


M. VIGNEAU, président



Arrêt n° 80 F-D

Pourvoi n° D 23-10.813




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 12 FÉVRIER 2025

La société Château Citran Medoc, société anonyme, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° D 23-10.813 contre l'arrêt rendu le 17 octobre 2022 par la cour d'appel de Bordeaux (4e chambre civile), dans le litige l'opposant à M. [D] [U], domicilié [Adresse 2] (Italie), défendeur à la cassation.

M. [U] a formé un pourvoi incident contre le même arrêt.

La demanderesse au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, quatre moyens de cassation.

Le demandeur au pourvoi incident, à l'appui de son recours, un moyen de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Ducloz, conseiller, les observations de la SARL Cabinet Rousseau et Tapie, avocat de la société Château Citran Medoc, de la SCP Spinosi, avocat de M. [U], après débats en l'audience publique du 17 décembre 2024 où étaient présents M. Vigneau, président, Mme Ducloz, conseiller rapporteur, M. Ponsot, conseiller doyen, et Mme Bendjebbour, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 17 octobre 2022), M. [U] était, jusqu'au 24 juin 2014, le président du conseil d'administration de la société anonyme Château Citran Médoc (la société).

2. Le 23 juin 2017, la société a assigné M. [U] en responsabilité en sa qualité d'ancien dirigeant.

Examen des moyens

Sur le premier moyen du pourvoi principal, en ce qu'il fait grief à l'arrêt de rejeter les demandes de la société en paiement des sommes de 50 830,17 euros au titre du contentieux prud'homal initié par M. [F] et de 36 587,76 euros correspondant à l'appauvrissement subi par la société au titre de la sortie d'un tapis de même valeur des immobilisations en 2012, et de dire prescrite la demande en paiement des sommes de 85 544,23 euros au titre des factures impayées, 358 439,81 euros en réparation du préjudice consécutif aux fautes de gestion de la relation avec la société Compagnie libournaise de distribution de crus, et 32 480,72 euros au titre des intérêts perçus sur le compte courant, et sur le moyen du pourvoi incident

3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le premier moyen du pourvoi principal, en ce qu'il fait grief à l'arrêt de dire prescrite la demande de la société en paiement de la somme de 696 659,67 euros au titre de l'insuffisance de M. [U] du paiement du logement occupé

Enoncé du moyen

4. La société fait grief à l'arrêt de dire prescrite la demande de la société en paiement de la somme de 696 659,67 euros au titre de l'insuffisance de M. [U] du paiement du logement occupé, alors « que le juge doit statuer sur les dernières conclusions déposées ; que la société avait déposé, via le RPVA, ses dernières conclusions le 7 septembre 2022 développant une argumentation complémentaire aux précédentes conclusions déposées le 29 août 2022, et accompagnées de nouvelles pièces visées dans le bordereau figurant en annexe, pour répondre aux dernières conclusions adverses déposées le 1er septembre 2022 ; qu'en statuant au visa de ses "dernières conclusions" de la société du 29 août 2022, par des motifs dont il ne résulte pas qu'elle aurait pris en considération ses dernières conclusions déposées le 7 septembre 2022 et ses nouvelles pièces, la cour d'appel a violé les articles 4, 455 et 954 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 455 et 954 du code de procédure civile :

5. Il résulte de la combinaison de ces textes que le visa des conclusions des parties avec l'indication de leur date n'est pas nécessaire si le juge expose succinctement leurs prétentions respectives et leurs moyens et statue sur l'ensemble des prétentions formulées et des moyens soulevés.

6. Pour dire prescrite la demande de la société en paiement d'une somme au titre des loyers dûs par M. [U] à compter du 23 juin 2012, l'arrêt, qui se prononce au visa des conclusions notifiées par celle-ci le 29 août 2022, retient que le bilan établi au 31 décembre 2008, versé aux débats par M. [U] dans ses dernières écritures du 1er septembre 2022, mentionne au titre des « débiteurs et créditeurs divers » les loyers dus par ce dernier.

7. En statuant ainsi, alors qu'il ressort des productions que la société avait déposé le 7 septembre 2022 des conclusions développant une argumentation complémentaire tirée de ce que les comptes annuels publiés et certifiés conformes par M. [U] ne contenaient aucune indication quant aux dettes de loyer de ce dernier, la cour d'appel, qui n'a pas visé ces conclusions et qui s'est prononcée par des motifs dont il ne résulte pas qu'elle les aurait prises en considération, a violé les textes susvisés.

Sur le deuxième moyen du pourvoi principal, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

8. La société fait grief à l'arrêt de dire prescrite sa demande en paiement de la somme de 85 544,23 euros au titre des factures impayées, alors « que le juge ne peut dénaturer les documents de la cause ; qu'en l'espèce, il résultait des attestations de l'expert-comptable de la société que le solde des factures impayées avait été enregistré en comptabilité en 2016 ; qu'en retenant néanmoins que "les 41 factures citées par la société figurent toutes dans la comptabilité de la société, sont pour la plupart antérieures à l'année 2009, seules deux factures ayant été émises en 2013, de sorte que la faute éventuelle qu'aurait commise M. [U] en sa qualité de dirigeant de la société ne peut être recherchée sur le fondement de l'article L. 225-251 du code de commerce, la prescription étant encourue, et la demande présentée étant de ce fait irrecevable", quand il résultait des attestations de l'expert-comptable, qui étaient les seules pièces versées aux débats pour établir la dissimulation des factures aux organes de la personne morale, que le solde des factures avait été enregistré en comptabilité en 2016, la cour d'appel a dénaturé les attestations et méconnu le principe susvisé. »

Réponse de la Cour

Vu l'obligation pour le juge de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis :

9. Pour dire prescrite la demande de la société en paiement d'une somme au titre des factures impayées, l'arrêt retient que les factures en litige figurent toutes dans la comptabilité de la société et qu'elles sont pour la plupart antérieures à l'année 2009, seules deux factures ayant été émises en 2013, de sorte que la faute éventuelle qu'aurait commise M. [U] en sa qualité de dirigeant de la société ne peut être recherchée sur le fondement de l'article L. 225-250 du code de commerce, la prescription étant encourue.

10. En statuant ainsi, alors qu'il résultait de l'attestation de l'expert-comptable de la société, produite aux débats, que le solde des factures en litige avait été enregistré dans les comptes de la société au titre de l'exercice clôt le 31 décembre 2016, la cour d'appel, qui a dénaturé les termes clairs et précis de cette attestation, a violé le principe susvisé.

Et sur le troisième moyen du pourvoi principal, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

11. La société fait grief à l'arrêt de dire prescrite sa demande en paiement de la somme de 358 439,81 euros en réparation du préjudice consécutif aux fautes de gestion de la relation avec la société Compagnie libournaise de distribution de crus, alors « que les juges du fond doivent motiver leur décision ; qu'ils ne peuvent procéder par voie de simple affirmation et doivent préciser sur quels éléments ils se fondent pour retenir telle circonstance ; qu'en retenant que "des pièces versées aux débats, il ressort que les retards récurrents de paiement de la société Compagnie libournaise de distribution de crus figuraient chaque année dans les comptes de résultat de la société, que l'usage de délais de paiement non contractuels constituait un mode de gestion habituel et non dissimulé de M. [U], gestion qui n'a soulevé aucune critique lors de l'approbation des comptes annuels, de sorte que la demande à ce titre, qui vise des faits certes datant de 2014, factures de mars 2014 impayées, mais connus depuis de très nombreuse années, apparaît prescrite", sans préciser sur quel(s) élément(s) de preuve elle s'est fondée pour dire que les retards de la société Compagnie libournaise de distribution de crus figuraient chaque année dans les comptes de résultat de la société, la cour d'appel a méconnu l'article 455 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 455 du code de procédure civile :

12. Selon ce texte, tout jugement doit être motivé.

13. Pour dire prescrite la demande de la société en paiement d'une somme au titre des fautes de gestion de M. [U], relatives à ses relations avec la société Compagnie libournaise de distribution de crus, l'arrêt, après avoir relevé que la société avait introduit son action en responsabilité le 23 juin 2017, retient qu'il ressort des pièces versées aux débats que les retards récurrents de paiement de la société Compagnie libournaise de distribution de crus figuraient chaque année dans les comptes de résultat de la société, que l'usage de délais de paiement non contractuels constituait un mode de gestion habituel et non dissimulé de M. [U], gestion qui n'a soulevé aucune critique lors de l'approbation des comptes annuels, de sorte que la demande à ce titre, qui vise des faits certes datant de 2014 (factures de mars 2014 impayées), mais connus depuis de très nombreuses années, apparaît prescrite.

14. En statuant ainsi, sans préciser sur quels éléments de preuve elle se fondait pour dire que les retards de paiement de la société Compagnie libournaise de distribution de crus figuraient chaque année dans les comptes de résultat de la société, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déclare prescrites les demandes de la société Château Citran Médoc en paiement des sommes de 696 659,67 euros au titre de « l'insuffisance de M. [U] du paiement du logement occupé », 85 544,23 euros au titre des factures impayées et 358 439,81 euros en réparation du préjudice consécutif aux fautes commises par M. [U] dans sa gestion de la relation avec la société Compagnie libournaise de distribution de crus, et en ce qu'il statue sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 17 octobre 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Bordeaux ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Toulouse ;

Condamne M. [U] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. [U] et le condamne à payer à la société Château Citran Médoc la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé en l'audience publique du douze février deux mille vingt-cinq et signé par M. Ponsot, conseiller doyen en ayant délibéré, en remplacement de M. Vigneau président, empêché, le conseiller rapporteur et M. Doyen, greffier de chambre, qui a assisté au prononcé de l'arrêt, conformément aux dispositions des articles 452, 456 et 1021 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale financière et économique - formation restreinte hors rnsm/na
Numéro d'arrêt : 23-10.813
Date de la décision : 12/02/2025
Sens de l'arrêt : Cassation

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Bordeaux 02


Publications
Proposition de citation : Cass. Com. financière et économique - formation restreinte hors rnsm/na, 12 fév. 2025, pourvoi n°23-10.813


Origine de la décision
Date de l'import : 17/02/2025
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2025:23.10.813
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