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12/02/2025 | FRANCE | N°23-19.739

France | France, Cour de cassation, Première chambre civile - formation restreinte hors rnsm/na, 12 février 2025, 23-19.739


CIV. 1

MY1



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 12 février 2025




Rejet


Mme CHAMPALAUNE, président



Arrêt n° 95 F-D

Pourvoi n° F 23-19.739




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 12 FÉVRIER 2025

1°/ La société Expertises Philatélie, société à

responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 1], [Localité 6],

2°/ M. [J] [S],

3°/ Mme [B] [K], épouse [S], venant aux droits d'[O] [K], décédé le 26 janvier 2021,

to...

CIV. 1

MY1



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 12 février 2025




Rejet


Mme CHAMPALAUNE, président



Arrêt n° 95 F-D

Pourvoi n° F 23-19.739




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 12 FÉVRIER 2025

1°/ La société Expertises Philatélie, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 1], [Localité 6],

2°/ M. [J] [S],

3°/ Mme [B] [K], épouse [S], venant aux droits d'[O] [K], décédé le 26 janvier 2021,

tous deux domiciliés [Adresse 9], [Localité 8],

4°/ M. [C] [K], domicilié [Adresse 5], [Localité 2], venant aux droits d'[O] [K], décédé le 26 janvier 2021,

5°/ M. [L] [K], domicilié [Adresse 4], [Localité 10], venant aux droits d'[O] [K], décédé le 26 janvier 2021,

ont formé le pourvoi n° F 23-19.739 contre l'arrêt rendu le 15 juin 2023 par la cour d'appel de Paris (pôle 4, chambre 3), dans le litige les opposant à la société Shurgard France, dont le siège est [Adresse 3], [Localité 7], défenderesse à la cassation.

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, cinq moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Bruyère, conseiller, les observations de la SCP Gouz-Fitoussi, avocat de la société Expertises Philatélie, de M. [S], de Mme [B] [K] et de MM. [C] et [L] [K], tous trois venant aux droits de [O] [K] de la SARL Matuchansky, Poupot, Valdelièvre et Rameix, avocat de la société Shurgard France, et l'avis de Mme Mallet-Bricout, avocat général, après débats en l'audience publique du 17 décembre 2024 où étaient présents Mme Champalaune, président, M. Bruyère, conseiller rapporteur, Mme Guihal, conseiller doyen, et Mme Vignes, greffier de chambre,

la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 15 juin 2023), le 29 novembre 2014, [O] [K] a conclu avec la société Shurgard France (la société Shurgard) un contrat ayant pour objet la mise à sa disposition par celle-ci d'un local de 15 m ².

2. Le même jour, il a signé avec cette société un acte intitulé « autorisation de transfert de propriété » rédigé comme suit :

« Je soussigné (e), Monsieur [O] [K], accepte sans réserve la prise d'effet du présent transfert de propriété dès l'instant où les conditions suivantes seraient réunies :
- Mon compte présenterait un retard de paiement de plus de 60 jours.
- Shurgard m'aurait avisé au préalable de la résiliation du contrat par courrier RAR.
Dans ces conditions ci-dessus mentionnées, je déclare abandonner au profit de la Société Shurgard les biens meubles sis dans la pièce N° 412303, localisée sur le site de [Localité 11] - [Localité 12].

La société Shurgard Self-stockage reprendrait alors la disposition de la pièce n° 412303 par vente, Ie produit de la vente venant diminuer le montant de ma dette, ou par mise au rebut des meubles sans valeur marchande.

Par ailleurs, je prends connaissance que la société Shurgard se réserve le droit de poursuivre le recouvrement de la créance restant due. »

3. Au mois de février 2017, des redevances restant impayées, la société Shurgard a résilié le contrat et a fait procéder à un inventaire des objets se trouvant dans le local puis à leur vente aux enchères publiques.

4. Par lettre en date du 18 juillet 2017, M. [S] et la société Expertises Philatélie ont demandé à la société Shurgard la restitution des biens leur appartenant, qui étaient entreposés dans ce local.

5. Les parties n'étant pas parvenues à trouver une issue amiable au litige, [O] [K], M. [S] et la société Expertises Philatélie ont assigné la société Shurgard en indemnisation de leurs préjudices.

6. [O] [K] est décédé le 26 janvier 2021. L'instance a été reprise par ses héritiers, Mme [B] [K] et MM. [C] et [L] [K] (les consorts [K]).

Examen des moyens

Sur les deuxième et cinquième moyens

7. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

8. Les consorts [K], M. [S] et la société Expertises Philatélie font grief à l'arrêt de rejeter leurs demandes tendant à juger que l'acte « Autorisation de transfert de propriété » du 29 novembre 2014 doit être requalifié en un pacte commissoire entaché de nullité car il ne prévoit aucune clause de détermination de la valeur du bien au jour du transfert en contravention aux articles 2333 et suivants du code civil, juger que les clauses afférentes au transfert de propriété de l'acte d'autorisation de transfert de propriété sont abusives et réputées non écrites, juger que la société Shurgard n'a pas respecté les conditions stipulées dans l'acte intitulé "Autorisation de transfert de propriété", juger que la société Shurgard a exécuté de mauvaise foi et commis des fautes dans l'exécution de l'acte intitulé "Autorisation de transfert de propriété" du 29 novembre 2014 tant sur la forme que sur le fond en contravention aux dispositions des articles 1104 et 1137 du code civil, juger que les conditions générales de vente de Shurgard leur sont inopposables, « alors que selon l'article 954, alinéa 3, du code de procédure civile, la cour d'appel ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion ; qu'en refusant de statuer sur les prétentions énoncées dans le dispositif des conclusions tendant à "juger que", aux motifs que ces demandes n'étaient pas des prétentions mais uniquement des moyens, la cour d'appel, qui était tenue d'examiner ces prétentions, a violé l'article 954 du code de procédure civile. ».

Réponse de la Cour

9. Après avoir écarté la qualification de gage, estimé que les dispositions sur les clauses abusives n'étaient pas applicables au contrat, examiné les conditions de son exécution, ainsi que la clause applicable à la valorisation des marchandises, l'arrêt rejette les demandes indemnitaires des consorts [K], de M. [S] et de la société Expertises Philatélie.

10. La cour d'appel ayant ainsi examiné l'ensemble des moyens des parties et répondu à toutes leurs prétentions, le grief manque en fait.

Sur le troisième moyen

Enoncé du moyen

11. M. [S], la société Expertises Philatélie et les consorts [K] font grief à l'arrêt de rejeter leurs demandes de voir juger que les clauses afférentes au transfert de propriété de l'acte d'autorisation de transfert de propriété sont abusives et réputées non écrites et de condamner la société Shurgard à payer, en réparation des préjudices subis, à la société Expertises Philatélie la somme de 920 516,86 euros, à M. [S] celles de 753 241 euros et de 50 000 euros au titre de son préjudice moral, alors :

« 1°/ que dans les contrats conclus entre professionnels et consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat ; que pour appliquer les dispositions sur les clauses abusives, il convient d'apprécier la qualité de la personne qui a signé le contrat et non la qualité de la personne qui a bénéficié du contrat ; que dans le cadre d'un contrat d'autorisation de transfert de propriété, une personne physique qui n'agit pas dans le cadre de son activité commerciale peut invoquer à son profit les dispositions relatives aux clauses abusives, même si l'emplacement a été au final également utilisé par la société qu'il dirige ; qu'en refusant d'appliquer les dispositions relatives aux clauses abusives, aux motifs que l'emplacement avait en réalité été utilisé par la société Expertises Philatélie, après avoir pourtant constaté que le contrat avait été signé par M. [K], la cour d'appel a violé l'article L.212-1 du code de la consommation ;

2°/ à titre subsidiaire, que dans les contrats conclus entre professionnels et consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat ; qu'est un consommateur toute personne physique qui agit à des fins qui n'entrent pas dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale ou agricole ; qu'en refusant d'appliquer les dispositions relatives aux clauses abusives, alors qu'en signant, par personne interposée, le contrat d'autorisation de transfert de propriété, la société Philatélie n'agissait pas à des fins entrant dans le cadre de son activité professionnelle, la cour d'appel a violé l'article L.212-1 du code de la consommation ;

3°/ que dans les contrats conclus entre professionnels et consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat ; qu'en jugeant valide la clause litigieuse figurant dans le contrat d'autorisation de transfert de propriété, au motif inopérant que cette clause n'était que facultative et que M. [K] n'avait signé librement en faisant précéder sa signature de la mention « bon pour transfert », la cour d'appel a violé l'article L.212-1 du code de la consommation. »

Réponse de la Cour

12. Selon l'article L. 132-1 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, dans les contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.

13. L'arrêt retient que la pièce mise à disposition de M. [K] par la société Shurgard était, en réalité, utilisée par M. [S] et sa société Expertises Philatélie pour y entreposer des biens nécessaires à leur activité professionnelle, et fait ressortir que les demandes de dommages et intérêts, fondées sur la responsabilité contractuelle, n'étaient formées que par M. [S] et par la société Expertises Philatélie.

14. De ces seules constatations et appréciations souveraines, la cour d'appel a exactement déduit que, le contrat ayant été conclu à des fins professionnelles, les dispositions relatives aux clauses abusives ne lui étaient pas applicables, de sorte que le moyen, inopérant en sa troisième branche qui porte sur un motif surabondant, est mal fondé pour le surplus.

Sur le quatrième moyen

Enoncé du moyen

15. M. [S], la société Expertises Philatélie et les consorts [K] font grief à l'arrêt de rejeter leurs demandes tendant à voir juger que la société Shurgard n'a pas respecté les conditions stipulées dans l'acte intitulé « Autorisation de transfert de propriété » et de rejeter leurs demandes tendant à la voir condamner à payer à la société Expertises Philatélie la somme de 920 516,86 euros au titre de la réparation du préjudice subi, à M. [J] [S] la somme de 753 241 euros au titre de la réparation du préjudice subi et à M. [J] [S] la somme de 50 000 euros au titre de la réparation du préjudice moral subi, alors « qu'un courrier recommandé avec accusé de réception retourné avec la mention défaut d'accès ou d'adressage, ne constitue pas une notification valable ; qu'en affirmant néanmoins que la société Shurgard avait respecté son obligation lui incombant de l'envoi par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, après avoir pourtant constaté que le pli avait été retourné avec la mention "défaut d'accès ou d'adressage", ce dont il résulte que cette lettre ne constituait pas une notification valable, la cour d'appel qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations a violé l'article 1134 devenu 1103 du code civil. »

Réponse de la Cour

16. La mise en demeure que le créancier doit adresser au débiteur en application de l'article 1146 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, n'étant pas de nature contentieuse, le défaut de réception effective par le débiteur de la mise en demeure, adressée par lettre recommandée, n'affecte pas sa validité.

17. La cour d'appel ayant retenu que la société Shurgard justifiait avoir adressé la mise en demeure préalable à la résiliation du contrat par lettre simple et par lettre recommandée à l'adresse indiquée par son co-contractant, en a exactement déduit que les conditions de la résiliation étaient satisfaites.

18. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. [S], la société Expertises Philatélie, Mme [B] [K] et MM. [C] et [L] [K] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. [S], la société Expertises Philatélie, Mme [B] [K] et MM. [C] et [L] [K] et les condamne à payer à la société Shurgard France la somme globale de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze février deux mille vingt-cinq.


Synthèse
Formation : Première chambre civile - formation restreinte hors rnsm/na
Numéro d'arrêt : 23-19.739
Date de la décision : 12/02/2025
Sens de l'arrêt : Rejet

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris G3


Publications
Proposition de citation : Cass. Première chambre civile - formation restreinte hors rnsm/na, 12 fév. 2025, pourvoi n°23-19.739


Origine de la décision
Date de l'import : 17/02/2025
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2025:23.19.739
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