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19/03/2025 | FRANCE | N°23-17.696

France | France, Cour de cassation, Première chambre civile - formation restreinte hors rnsm/na, 19 mars 2025, 23-17.696


CIV. 1

CR12



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 19 mars 2025




Rejet


Mme CHAMPALAUNE, président



Arrêt n° 176 F-D

Pourvoi n° K 23-17.696






R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 19 MARS 2025

1°/ la société MMA IARD, société anonyme, ven

ant aux droits de la société Covéa Risks, dont le siège est [Adresse 1], agissant en qualité d'assureur de M. [B],

2°/ la société MMA IARD assurances mutuelles, société d'assurance ...

CIV. 1

CR12



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 19 mars 2025




Rejet


Mme CHAMPALAUNE, président



Arrêt n° 176 F-D

Pourvoi n° K 23-17.696






R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 19 MARS 2025

1°/ la société MMA IARD, société anonyme, venant aux droits de la société Covéa Risks, dont le siège est [Adresse 1], agissant en qualité d'assureur de M. [B],

2°/ la société MMA IARD assurances mutuelles, société d'assurance mutuelle à cotisations fixes, venant aux droits de la société Covéa Risks, dont le siège est [Adresse 1], agissant en qualité d'assureur de M. [B],

ont formé le pourvoi n° K 23-17.696 contre l'arrêt rendu le 25 avril 2023 par la cour d'appel de Lyon (1re chambre civile B), dans le litige les opposant :

1°/ à Mme [X] [L], domiciliée [Adresse 3],

2°/ à M. [T] [B], domicilié [Adresse 2],

défendeurs à la cassation.



M. [B] a formé un pourvoi incident contre le même arrêt.

Les demanderesses au pourvoi principal invoquent, à l'appui de leur recours, deux moyens de cassation.

Le demandeur au pourvoi incident invoque, à l'appui de son recours, deux moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Jessel, conseiller, les observations de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat des sociétés MMA IARD et MMA IARD assurances mutuelles et de M. [B], de Me Laurent Goldman, avocat de Mme [L], et l'avis de Mme Mallet-Bricout, avocat général, après débats en l'audience publique du 28 janvier 2025 où étaient présents Mme Champalaune, président, M. Jessel, conseiller rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, et Mme Sara, greffier de chambre,

la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Lyon, 25 avril 2023), se plaignant de différents désordres affectant la maison qu'elle a acquise le 18 décembre 1997, Mme [L] a sollicité une expertise en référé, réalisée par M. [B] (l'expert), et assigné en garantie décennale les vendeurs et les entrepreneurs chargés de la construction. Ses demandes ont été rejetées par un arrêt du 11 janvier 2011, devenu irrévocable à la suite du rejet du pourvoi formé contre celui-ci (3e Civ., 3 avril 2013, pourvoi n° 11-13.917).

2. Le 10 février 2017, Mme [L] a assigné en responsabilité et indemnisation l'expert et la société Covea Risks, aux droits de laquelle se trouvent les sociétés MMA IARD SA et MMA IARD assurances mutuelles (les sociétés MMA), lesquels ont opposé une fin de non-recevoir tirée de la prescription et les sociétés MMA ont sollicité, en outre, le paiement de dommages et intérêts pour procédure abusive.

Examen des moyens

Sur le premier moyen du pourvoi principal et le premier moyen du pourvoi incident, rédigés en termes similaires, réunis

Enoncé du moyen

3. Les sociétés MMA et l'expert font grief à l'arrêt de déclarer recevable l'action de Mme [L], alors « que les actions personnelles se prescrivent par cinq à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer ; qu'en retenant que la prescription de l'action exercée par Mme [L] à l'encontre de M. [B], expert, à qui elle reprochait d'avoir établi un rapport erroné ou incomplet qui aurait conduit au rejet de l'action qu'elle avait intentée contre ses vendeurs et des entrepreneurs, avait commencé à courir le 3 avril 2013, date à laquelle la Cour de cassation avait rejeté le pourvoi formé par Mme [L] à l'encontre de l'arrêt du 11 janvier 2011 ayant écarté cette action, sans rechercher ainsi qu'elle y était invitée si le préjudice invoqué par Mme [L] n'était pas certain dès l'arrêt rendu par cette cour d'appel dès lors que le pourvoi ne pouvait permettre de remettre en cause l'appréciation souveraine, imputée à M. [B], qui avait justifié le rejet de ses demandes dirigées contre ses vendeurs et les entrepreneurs, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 2224 du code civil. »

Réponse de la Cour

4. En application de l'article 2224 du code civil, lorsque l'action principale en responsabilité tend à l'indemnisation du préjudice subi par le demandeur, né de la reconnaissance d'un droit contesté au profit d'un tiers, seule la décision juridictionnelle devenue irrévocable établissant ce droit met l'intéressé en mesure d'exercer l'action en réparation du préjudice qui en résulte. Il s'en déduit que cette décision constitue le point de départ de la prescription (Ch. mixte., 19 juillet 2024, pourvoi n° 20-23.527, publié)

5. C'est donc à bon droit que la cour d'appel a retenu que le délai de l'action en responsabilité et indemnisation engagée contre l'expert et les assureurs n'avait couru qu'à compter du 3 avril 2013, date du rejet du pourvoi en cassation formé contre l'arrêt du 11 janvier 2011.

6. Elle en a exactement déduit que l'action en responsabilité engagée le 10 février 2017 n'était pas prescrite.

7. Le moyen n'est donc pas fondé.

Sur le second moyen du pourvoi principal et le second moyen du pourvoi incident, rédigés en termes similaires, réunis

Enoncé du moyen

8. Les sociétés MMA et l'expert font grief à l'arrêt de les condamner in solidum au paiement de dommages-intérêts à Mme [L] et de rejeter leur demande d'indemnisation, alors :

« 1°/ que, sauf à ce qu'il ait provoqué une erreur que les parties n'ont pu dénoncer, un expert ne saurait se voir imputer les conséquences d'une décision juridictionnelle rendue après un débat contradictoire au cours duquel a été contesté la valeur et le caractère probant du rapport qu'il a établi ; qu'en retenant, pour condamner M. [B], expert, à indemniser Mme [L] des conséquences préjudiciables de la décision qui l'avait déboutée de son action en responsabilité décennale, qu'il existait une probabilité qu'il soit fait droit à ses demandes, mais que celle-ci avait disparu en partie du fait des imprécisions du rapport d'expertise qu'il avait établi, quand l'expert ne pouvait se voir imputer les conséquences de cette décision juridictionnelle par laquelle la cour d'appel de Lyon avait décidé en connaissance des griefs adressés à l'expertise par Mme [L] d'écarter l'existence des désordres décennaux invoqués, tout en refusant d'ordonner l'expertise complémentaire sollicitée par cette dernière, en retenant que les lacunes du rapport lui étaient notamment imputables, la cour d'appel a violé l'article 1382, devenu 1240 du code civil ;

2°/ que, sauf à ce que le juge ait été trompé et n'ait pas disposé de tous les éléments nécessaires, une décision juridictionnelle a pour seule cause les appréciations portées par le juge ; qu'en retenant, pour condamner M. [B], expert, à indemniser Mme [L] des conséquences préjudiciables de la décision qui l'avait déboutée de son action en responsabilité décennale, qu'il existait une probabilité qu'il soit fait droit à ses demandes, mais que celle-ci avait disparu en partie du fait des imprécisions du rapport d'expertise qu'il avait établi, bien que la cour d'appel de Lyon ait décidé en connaissance des griefs adressés à l'expertise par Mme [L] d'écarter l'existence des désordres décennaux invoqués, tout en refusant d'ordonner l'expertise complémentaire sollicitée par cette dernière, en retenant que l'impossibilité d'établir le caractère décennal des désordres allégués lui était notamment imputable, de sorte que cette décision rendue par des magistrats disposant de tout les éléments d'appréciation contradictoirement débattus, avait pour seule cause l'appréciation qu'ils avaient portée en toute connaissance de cause, la cour d'appel a violé l'article 1382, devenu 1240 du code civil. »

Réponse de la Cour

9. L'expert judiciaire engage sa responsabilité à raison des fautes commises dans l'accomplissement de sa mission, conformément aux règles de droit commun de la responsabilité civile.

10. Dès lors que la cour d'appel a constaté que la juridiction saisie de l'action en garantie décennale avait rejeté la demande de Mme [L] en l'absence de preuve d'un dommage portant atteinte à la solidité de l'ouvrage ou le rendant impropre à sa destination dans le délai de dix ans et retenu que cette situation résultait pour partie du caractère hypothétique et imprécis des conclusions de l'expert, non étayées par des investigations sur la cause des
désordres, elle a pu en déduire, sans être tenue d'ordonner une nouvelle expertise, que celui-ci avait commis une faute ayant fait perdre à Mme [L] une chance d'obtenir gain de cause en justice, souverainement évaluée à 40% .

11. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE les pourvois ;

Condamne M. [B] et les sociétés MMA IARD et MMA IARD assurances mutuelles aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes formées par M. [B] et les sociétés MMA IARD et MMA IARD assurances mutuelles et condamne celles-ci à payer à Mme [L] la somme globale de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf mars deux mille vingt-cinq.


Synthèse
Formation : Première chambre civile - formation restreinte hors rnsm/na
Numéro d'arrêt : 23-17.696
Date de la décision : 19/03/2025
Sens de l'arrêt : Rejet

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Lyon 1B


Publications
Proposition de citation : Cass. Première chambre civile - formation restreinte hors rnsm/na, 19 mar. 2025, pourvoi n°23-17.696


Origine de la décision
Date de l'import : 24/03/2025
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2025:23.17.696
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