N° X 23-86.799 F-D
N° 00378
ODVS
25 MARS 2025
CASSATION
M. BONNAL président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 25 MARS 2025
M. [Y] [H] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion, chambre correctionnelle, en date du 13 mars 2023, qui, sur renvoi après cassation (Crim., 7 décembre 2021, pourvoi n° 20-86.523), dans la procédure suivie contre lui du chef de diffamation publique envers un fonctionnaire public, a prononcé sur les intérêts civils.
Des mémoires ont été produits, en demande et en défense.
Sur le rapport de M. Dary, conseiller, les observations de la SCP Waquet, Farge, Hazan et Féliers, avocat de M. [Y] [H], les observations de la SARL Matuchansky, Poupot, Valdelièvre et Rameix, avocat de M. [V] [E], et les conclusions de Mme Gulphe-Berbain, avocat général, après débats en l'audience publique du 25 février 2025 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Dary, conseiller rapporteur, Mme Labrousse, conseiller de la chambre, et Mme Dang Van Sung, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit.
2. Par acte du 19 novembre 2018, M. [E], directeur général adjoint de l'agence régionale de santé Océan indien, a fait citer devant le tribunal correctionnel M. [Y] [H], en sa qualité de directeur de la publication du Journal de l'Ile de La Réunion, et la société [1], civilement responsable, pour diffamation publique envers un fonctionnaire, à raison de ses fonctions ou de sa qualité, pour divers propos tenus publiés dans ce quotidien, les 25 et 31 août, 1er et 8 septembre 2018.
3. Par jugement du 27 août 2019, le tribunal correctionnel a retenu la culpabilité de M. [H] pour deux propos poursuivis, numérotés 5 et 6 dans l'acte de poursuite, l'a relaxé pour le surplus, l'a condamné à une amende de 5 000 euros, a dit n'y avoir lieu à publication du jugement et a prononcé sur les intérêts civils.
4. Sur les appels du prévenu, du civilement responsable et de la partie civile, la cour d'appel a, par arrêt du 29 octobre 2020, confirmé cette décision.
5. La Cour de cassation a cassé cet arrêt, en ses seules dispositions ayant débouté la partie civile de ses demandes au titre du propos, numéroté 7 dans l'acte de poursuite, et renvoyé l'affaire devant la cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion, autrement composée.
Examen des moyens
Sur le premier moyen
Enoncé du moyen
6. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il mentionne que la cour d'appel était composée du seul premier président lors des débats, alors « que les arrêts de la chambre de l'instruction ainsi que les arrêts et jugements rendus en dernier ressort par les juridictions de jugement sont déclarés nuls lorsqu'ils ne sont pas rendus par le nombre de juges prescrit ; que les règles sur la composition et la compétence des juridictions sont d'ordre public ; qu'il résulte de l'article 510 du code de procédure pénale que la chambre des appels correctionnels ne peut statuer à juge unique que lorsque le jugement attaqué a lui-même été rendu à juge unique ; qu'il résulte en l'espèce des mentions de l'arrêt attaqué que la cour était composée lors des débats, le 12 décembre 2022, de monsieur Chateauneuf, premier président, seul, qui a prononcé l'arrêt lors de l'audience du 13 mars 2023 ; que le jugement attaqué avait été rendu par une formation collégiale ; que les articles 510 et 592 du code de procédure pénale ont été méconnus en sorte que l'arrêt ne satisfait pas, en la forme, aux conditions essentielles de son existence légale. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 510 du code de procédure pénale :
7. Il résulte de ce texte, dans sa rédaction issue de la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019, modifié par la loi n° 2020-1672 du 24 décembre 2020, que la chambre des appels correctionnels, qui siège en principe en formation collégiale, peut statuer à juge unique lorsque le jugement attaqué a lui-même été rendu à juge unique, soit en application de l'article 398, alinéa 3, du code de procédure pénale renvoyant à l'article 398-1 dudit code mentionnant la liste des délits le permettant, soit en vertu de l'avant-dernier alinéa de l'article 464 du même code, lorsque sont seuls en cause les intérêts civils.
8. En statuant dans une composition comprenant son seul président, ainsi qu'il résulte des mentions de l'arrêt attaqué, les notes d'audience, quoique datées et signées du président et du greffier, ne pouvant prévaloir sur les mentions de l'arrêt avec lesquelles elles sont en contradiction, alors que le jugement entrepris avait été rendu par une formation collégiale, la cour d'appel a méconnu le texte susvisé et le principe ci-dessus rappelé.
9. La cassation est par conséquent encourue de ce chef.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu d'examiner le second moyen de cassation proposé, la Cour :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion, en date du 13 mars 2023, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ;
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
DIT n'y avoir lieu à application de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq mars deux mille vingt-cinq.