CIV. 1
CF
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 26 mars 2025
Rejet
Mme CHAMPALAUNE, président
Arrêt n° 204 F-B
Pourvoi n° U 22-22.507
Aide juridictionnelle totale en défense
au profit de Mme [U].
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 6 mars 2023.
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 26 MARS 2025
Mme [N] [F], domiciliée [Adresse 2], a formé le pourvoi n° U 22-22.507 contre l'arrêt rendu le 25 août 2022 par la cour d'appel de Douai (chambre 7, section 2), dans le litige l'opposant à Mme [M] [U], domiciliée [Adresse 1], défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Duval, conseiller référendaire, les observations de la SAS Buk Lament-Robillot, avocat de Mme [F], de la SAS Boucard Capron-Maman, avocat de Mme [U], et l'avis de Mme Caron-Déglise, avocat général, après débats en l'audience publique du 4 février 2025 où étaient présents Mme Champalaune, président, M. Duval, conseiller référendaire rapporteur, Mme Auroy, conseiller doyen, et Mme Layemar, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Douai, 25 août 2022), Mme [U] et Mme [F] se sont mariées le 3 septembre 2016.
2. Le 11 décembre 2016, Mme [F] a donné naissance à l'enfant [G].
3. Par requête du 3 septembre 2019, Mme [U] a sollicité le prononcé de l'adoption plénière de [G] à laquelle Mme [F] avait consenti par acte notarié du 3 juin 2019.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa troisième branche
4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le moyen, pris ses deux premières branches
Enoncé du moyen
5. Mme [F] fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande tendant à voir retenir la rétractation de son consentement et, par conséquent, de prononcer l'adoption plénière de [G] [F] par Mme [U] et dire que l'adoptée portera le nom de [F] [U], alors :
« 1°/ que l'opposition, par le parent biologique, à l'adoption de son enfant par son conjoint équivaut à une demande de restitution de l'enfant, laquelle doit être accueillie de plein droit, bien que formulée postérieurement au délai de rétractation de deux mois, lorsque l'enfant n'a été ni placé en vue de l'adoption, ni recueilli par le conjoint qui refuse de le rendre ; qu'en se fondant, pour prononcer l'adoption plénière de [G] [F], sur la circonstance que le consentement donné par Mme [F] en qualité de mère de l'enfant n'avait pas été rétracté dans le délai de deux mois, qu'il était en effet produit une attestation du notaire certifiant l'absence de rétractation et qu'aucune rétractation tacite résultant de la remise de l'enfant ne saurait être retenue s'agissant de l'enfant du conjoint après séparation de sorte qu'aucune caducité du consentement ne saurait être prononcée, laquelle circonstance n'était pourtant pas de nature à exclure l'existence d'une opposition formulée par Mme [F] postérieurement au délai de rétractation de deux mois, laquelle devait être accueillie de plein droit dès lors que l'enfant n'avait pas été placée en vue de l'adoption, ni recueilli par le conjoint qui refusait de la rendre, la cour d'appel s'est prononcée par des motifs inopérants et a, dès lors, violé l'article 348-3 du code civil, dans sa rédaction issue de la loi n° 2010-1609 du 22 décembre 2010 ;
2°/ qu'en énonçant qu'à supposer même que la présente action de Mme [F] fut considérée comme une demande de restitution de l'enfant, il conviendrait que soit apprécié l'intérêt de l'enfant, la cour d'appel, qui devait accueillir cette demande de plein droit dès lors que l'enfant n'avait pas été placée en vue de l'adoption, ni recueillie par le conjoint qui refusait de la rendre, a violé l'article 348-3 du code civil, dans sa rédaction issue de la loi n° 2010-1609 du 22 décembre 2010. »
Réponse de la Cour
6. Il résulte de l'article 345-1, 1°, devenu 370-1-3, 1°, du code civil et des articles 348-1 et 348-3 du même code, dans leur version alors applicable, que l'adoption plénière de l'enfant du conjoint, permise lorsque l'enfant n'a de filiation établie qu'à l'égard de ce conjoint, requiert le consentement de celui-ci, lequel peut être rétracté pendant deux mois.
7. L'alinéa 3 de l'article 348-3 du code civil, dans sa version alors applicable, prévoyant que « Si à l'expiration du délai de deux mois, le consentement n'a pas été rétracté, les parents peuvent encore demander la restitution de l'enfant à condition que celui-ci n'ait pas été placé en vue de l'adoption. Si la personne qui l'a recueilli refuse de le rendre, les parents peuvent saisir le tribunal qui apprécie, compte tenu de l'intérêt de l'enfant, s'il y a lieu d'en ordonner la restitution. La restitution rend caduc le consentement à l'adoption », qui présuppose que l'enfant a été remis à un tiers, n'est pas applicable à l'adoption de l'enfant du conjoint.
8. Il s'en déduit qu'à défaut de rétractation de son consentement à l'adoption de son enfant dans le délai légal, l'opposition du conjoint ne lie pas le juge, qui doit seulement vérifier que les conditions légales de l'adoption de l'enfant sont remplies et si celle-ci est conforme à son intérêt.
9. Ayant constaté que Mme [F] avait consenti à l'adoption de [G] par Mme [U] et n'avait pas rétracté son consentement dans le délai prévu par la loi, c'est dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation que la cour d'appel a estimé que, malgré la séparation de l'adoptante et de la mère de l'enfant, et l'opposition de celle-ci, l'adoption demandée était conforme à l'intérêt de l'enfant et a, en conséquence, prononcé celle-ci.
10. Le moyen n'est donc pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme [F] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par Mme [F] et la condamne à payer à la SAS Boucard-Capron-Maman la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six mars deux mille vingt-cinq.