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26/03/2025 | FRANCE | N°23-17.544

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale - formation restreinte hors rnsm/na, 26 mars 2025, 23-17.544


SOC.

ZB1



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 26 mars 2025




Rejet


Mme MARIETTE, conseiller doyen
faisant fonction de président



Arrêt n° 310 F-B

Pourvoi n° V 23-17.544





R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 26 MARS 2025

M. [U] [H], domicilié [Adre

sse 2], a formé le pourvoi n° V 23-17.544 contre l'arrêt rendu le 20 avril 2023 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 7), dans le litige l'opposant à l'Afdas, association,...

SOC.

ZB1



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 26 mars 2025




Rejet


Mme MARIETTE, conseiller doyen
faisant fonction de président



Arrêt n° 310 F-B

Pourvoi n° V 23-17.544





R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 26 MARS 2025

M. [U] [H], domicilié [Adresse 2], a formé le pourvoi n° V 23-17.544 contre l'arrêt rendu le 20 avril 2023 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 7), dans le litige l'opposant à l'Afdas, association, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Maitral, conseiller référendaire, les observations de la SARL Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de M. [H], de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de l'Afdas, après débats en l'audience publique du 25 février 2025 où étaient présents Mme Mariette, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Maitral, conseiller référendaire rapporteur, M. Barincou, conseiller, et Mme Pontonnier, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 20 avril 2023), M. [H], engagé en qualité d'aide comptable par l'Afdas le 30 mai 1985, occupait en dernier lieu les fonctions de directeur des partenariats et des relations institutionnelles.

2. Licencié pour faute grave le 19 juillet 2017, il a saisi la juridiction prud'homale de demandes au titre de l'exécution et de la rupture de son contrat de travail.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en ses première et deuxième branches

3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le moyen, pris en ses troisième à cinquième branches

Enoncé du moyen

4. Le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de ses demandes tendant à voir juger son licenciement sans cause réelle et sérieuse et en paiement de sommes à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement, d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'indemnité compensatrice de préavis et congés payés afférents, de rappel de salaire sur la mise à pied à titre conservatoire et congés payés afférents, et de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail et pour préjudice moral, alors :

« 3°/ qu'un fait de la vie personnelle du salarié, même s'il occasionne un trouble dans l'entreprise, ne peut justifier un licenciement disciplinaire, sauf s'il se rattache à la vie professionnelle et qu'il constitue un manquement de l'intéressé à une obligation découlant de son contrat de travail ; que ne se rattache pas à la vie de l'entreprise et ne peut donc constituer une faute de nature à justifier un licenciement, le fait pour un salarié d'utiliser une seule fois sa messagerie professionnelle pour exprimer son besoin d'explication à la suite de la rupture de sa relation amoureuse nouée avec une salariée de l'entreprise en dehors du lieu de travail ; qu'en l'espèce, pour dire le licenciement pour faute grave fondé, la cour a considéré que le fait d'avoir "utilisé son adresse professionnelle (…) suffit à caractériser le lien existant entre le comportement adopté et l'activité professionnelle" ; qu'en statuant ainsi, quand M. [H] n'avait utilisé qu'une seule fois sa messagerie professionnelle pour exprimer son besoin d'explication suite à la rupture de sa relation amoureuse avec une salariée de l'association, au surplus dans un message dans lequel il l'assurait sur le fait que, dans l'espace professionnel, il ne l'appelait que pour évoquer des sujets professionnels, la cour d'appel a violé les articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail, ensemble les articles 9 du code civil, 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et L. 1121-1 du code du travail ;

4°/ que le fait pour un salarié de tenter d'obtenir une explication à un dépit amoureux ou de tenter de renouer le dialogue à la suite de la rupture d'une relation amoureuse nouée avec une salariée de l'entreprise ne constitue pas un manquement aux obligations nées du contrat de travail ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé les articles L. 1221-1 et L. 1331-1 du code du travail et 1103 du code civil ;

5°/ que la faute grave est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise ; que le fait de tenter d'obtenir une explication à un dépit amoureux ou de tenter de renouer le dialogue à la suite de la rupture d'une relation amoureuse nouée avec une salariée, par un salarié comptant plus de trente-deux années d'ancienneté sans passé disciplinaire, ne rend pas impossible son maintien dans l'entreprise et n'est donc pas constitutif d'une faute grave ; que, pour dire le licenciement pour faute grave fondé, la cour d'appel a retenu que le fait d'avoir instauré une pression à l'égard d'une salariée "sur le lieu et le temps du travail par un salarié dans une position hiérarchique élevée dans le but d'obtenir une explication en raison d'un possible dépit amoureux ou aux fins d'entretenir une relation malgré le refus clairement opposé par une collaboratrice (…) constitue un manquement à ses obligations découlant de son contrat de travail incompatible avec ses responsabilités" et qu' "une telle attitude, qui est de nature à porter préjudice aux relations d'ordre professionnel et de surcroît à la santé psychique d'une autre salariée, constitue un comportement fautif susceptible de rendre impossible le maintien de M. [H], cadre dirigeant, au sein de l'entreprise" ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail. »

Réponse de la Cour

5. Un motif tiré de la vie personnelle du salarié ne peut pas en principe justifier un licenciement disciplinaire à moins qu'il constitue un manquement du salarié à une obligation découlant de son contrat de travail.

6. Aux termes de l'article L. 4122-1 du code du travail, tout salarié doit prendre soin de sa santé et de sa sécurité ainsi que de celles de ses collègues et autres personnes se trouvant en sa présence sur son lieu de travail, et ce, en fonction de sa formation et de ses possibilités.
7. La cour d'appel, après avoir constaté que l'attention de l'employeur avait été attirée par le médecin du travail sur la situation de mal-être de l'une de ses collaboratrices, potentiellement délétère pour sa santé, en lien avec des difficultés relationnelles avec le salarié, a relevé qu'il résultait notamment des courriels envoyés sur la boîte professionnelle de cette collaboratrice, du témoignage de sa manager et du courrier du médecin du travail que le salarié avait adopté un comportement déplacé envers cette collaboratrice malgré le souhait que celle-ci avait clairement exprimé d'en rester à une relation strictement professionnelle, générant une souffrance au travail.

8. Elle a ajouté qu'au-delà de la relation nouée en dehors du lieu de travail, la salariée avait clairement indiqué à la fin du mois de mai 2017 qu'elle souhaitait en rester à une relation strictement professionnelle mais que l'intéressé avait pourtant encombré son téléphone et surtout sa messagerie professionnelle de messages se faisant de plus en plus insistants et n'hésitant pas à faire valoir sa qualité de membre du comité directeur.

9. Elle a ensuite retenu que, s'il n'était pas fait référence dans la lettre de licenciement à des faits de harcèlement à proprement parler, la juridiction conservait la possibilité d'apprécier la qualification des faits énoncés dans la lettre de licenciement pour dire s'ils constituaient ou non une cause réelle et sérieuse de licenciement et que les éléments de fait versés aux débats révélaient l'instauration par le salarié d'une pression à l'égard de sa collègue, qui, sans être sa subordonnée, n'en était pas moins à un niveau hiérarchique moindre dans l'entreprise, la réalité de la souffrance de cette dernière en raison de l'attitude de l'intéressé étant établie au travers du témoignage de sa manager et le courrier du médecin du travail.

10. De ces constatations et énonciations, elle a pu déduire que le comportement, sur le lieu et le temps du travail, du salarié dans une position hiérarchique élevée, dans le but d'obtenir une explication en raison d'un possible dépit amoureux ou aux fins d'entretenir une relation malgré le refus clairement opposé par une collaboratrice, peu important qu'elle ne soit pas sous sa subordination directe, constituait un manquement à ses obligations découlant du contrat de travail, incompatible avec ses responsabilités et qu'une telle attitude, de nature à porter atteinte à la santé psychique d'une autre salariée, rendait impossible son maintien au sein de l'entreprise.

11. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. [H] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six mars deux mille vingt-cinq.


Synthèse
Formation : Chambre sociale - formation restreinte hors rnsm/na
Numéro d'arrêt : 23-17.544
Date de la décision : 26/03/2025
Sens de l'arrêt : Rejet

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris K7


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc. - formation restreinte hors rnsm/na, 26 mar. 2025, pourvoi n°23-17.544, Bull. civ.Publié au
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles Publié au

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2025
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2025:23.17.544
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