CIV. 2
FD
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 27 mars 2025
Rejet
Mme MARTINEL, président
Arrêt n° 289 F-B
Pourvoi n° Z 22-18.970
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 27 MARS 2025
1°/ M. [R] [F], domicilié [Adresse 3],
2°/ M. [Y] [W], domicilié [Adresse 2],
3°/ M. [U] [W], domicilié [Adresse 6],
4°/ M. [X] [W], domicilié [Adresse 9],
ont formé le pourvoi n° Z 22-18.970 contre l'arrêt rendu le 18 mai 2022 par la cour d'appel de Bastia (chambre civile), dans le litige les opposant :
1°/ à M. [I] [F], domicilié [Adresse 4],
2°/ à Mme [V] [F], épouse [G], domiciliée [Adresse 7],
3°/ à M. [O] [Z], domicilié [Adresse 1],
4°/ à M. [K] [Z], domicilié [Adresse 5],
5°/ à Mme [M] [Z], épouse [T], domiciliée [Adresse 8],
défendeurs à la cassation.
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, un moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Caillard, conseiller, les observations de la SAS Buk Lament-Robillot, avocat de M. [F], MM. [Y], [U] et [X] [W], de la SCP Gaschignard, Loiseau et Massignon, avocat de M. [I] [F], de Mme [V] [F], de MM. [O] et [K] [Z] et de Mme [M] [Z], et l'avis de Mme Trassoudaine-Verger, avocat général, après débats en l'audience publique du 12 février 2025 où étaient présentes Mme Martinel, président, Mme Caillard, conseiller rapporteur, Mme Durin-Karsenty, conseiller doyen, et Mme Cathala, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Bastia, 18 mai 2022) et les productions, par un jugement du 23 novembre 2010, un tribunal de grande instance a ordonné l'ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage de deux successions, dans le litige opposant M. [R] [F] et MM. [Y], [U] et [X] [W] à M. [I] [F], Mme [V] [F], MM. [O] et [K] [Z] et Mme [M] [Z].
2. Par une ordonnance du 30 novembre 2020, dont M. [R] [F] et MM. [Y], [U] et [X] [W] ont relevé appel par deux déclarations d'appel successives des 15 décembre 2020 et 31 mars 2021, un juge commis pour surveiller les opérations de partage a ordonné une expertise immobilière et une expertise comptable, portant sur des biens de la succession.
3. Un conseiller de la mise en état a déclaré l'appel irrecevable, par une ordonnance du 7 décembre 2021 que les appelants ont déférée à la cour d'appel.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
4. M. [R] [F] et MM. [Y], [U] et [X] [W] font grief à l'arrêt de confirmer l'ordonnance du conseiller de la mise en état de la cour d'appel de Bastia du 7 décembre 2021 en ce qu'elle avait déclaré irrecevable l'appel qu'ils avaient interjeté le 31 mars 2021 contre l'ordonnance du juge commis aux opérations de partage du tribunal judiciaire de Bastia du 30 novembre 2020 et les avait déboutés de leurs demandes contraires, alors :
« 1°/ que la décision du juge commis aux opérations de partage qui épuise sa saisine en ordonnant une expertise avant tout procès, sur le fondement de l'article 1371, alinéa 3, du code de procédure civile, peut faire l'objet d'un appel immédiat et échappe aux prévisions de l'article 272 du code de procédure civile ; que la cour d'appel en énonçant, pour déclarer irrecevable l'appel formé le 31 mars 2021 par les exposants contre l'ordonnance du juge commis aux opérations de partage du tribunal judiciaire de Bastia du 30 novembre 2020, qu'ils n'avaient pas sollicité, dans le délai imparti par l'article 272 du code de procédure civile, l'autorisation du premier président pour interjeter appel de l'ordonnance du juge commis ayant ordonné une expertise immobilière et une expertise comptable et que ce juge n'était pas dessaisi de l'affaire qui pouvait revenir devant lui une fois le rapport d'expertise rendu, a violé l'article 272 du code de procédure civile ;
2°/ que la saisine irrégulière d'une cour d'appel, qui fait encourir une irrecevabilité à l'appel, n'interdit pas à son auteur de former un second appel, même sans désistement préalable de son premier appel, sous réserve de l'absence d'expiration du délai d'appel, tant que le premier appel n'a pas été déclaré irrecevable ; qu'en se fondant, pour déclarer irrecevable l'appel formé le 31 mars 2021 par les exposants contre l'ordonnance du juge commis aux opérations de partage du tribunal judiciaire de Bastia du 30 novembre 2020, sur la circonstance que cette ordonnance avait déjà fait l'objet d'un appel par une déclaration des mêmes parties du 15 décembre 2020 qui avait été frappée de caducité par une ordonnance du 15 juillet 2021, laquelle n'interdisait pas à ses auteurs de former un second appel par déclaration du 31 mars 2021, date à laquelle le délai d'appel n'était pas expiré et aucune caducité n'avait été prononcée contre la première déclaration d'appel, la cour d'appel a violé l'article 911-1, alinéa 3, du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
5. Aux termes de l'article 272, alinéa 1er, du code de procédure civile, la décision ordonnant l'expertise peut être frappée d'appel indépendamment du jugement sur le fond sur autorisation du premier président de la cour d'appel s'il est justifié d'un motif grave et légitime.
6. Aux termes de l'article 1364, alinéa 1er, du code de procédure civile, si la complexité des opérations le justifie, le tribunal désigne un notaire pour procéder aux opérations de partage et commet un juge pour surveiller ces opérations.
7. Selon l'article 1365, alinéas 2 et 3, du même code, le notaire rend compte au juge commis des difficultés rencontrées et peut solliciter de lui toute mesure de nature à en faciliter le déroulement ; il peut, si la valeur ou la consistance des biens le justifie, s'adjoindre un expert choisi d'un commun accord entre les parties ou, à défaut, désigné par le juge commis.
8. Selon l'article 1371, alinéa 1er, du même code, le juge commis veille au bon déroulement des opérations de partage. Selon l'article 1371, alinéa 3, du même code, le juge commis statue, en outre, sur les demandes relatives à la succession pour laquelle il a été commis.
9. Il en découle que le juge commis pour surveiller les opérations de partage, qui ordonne une expertise portant sur des actifs de la masse à partager aux fins de liquidation de celle-ci en vue de son partage, tient son pouvoir de désigner un expert des articles 1365 et 1371, alinéa 1er, précités, et non de l'article 1371, alinéa 3 précité.
10. En usant de ce pouvoir, il ne vide pas sa saisine, restant saisi de la surveillance des opérations de partage.
11. Le moyen, pris en sa première branche, procède d'un postulat erroné, selon lequel le juge commis aurait agi sur le fondement de l'article 1371, alinéa 3 précité et aurait épuisé sa saisine.
12. Le moyen qui, pris en sa première branche, manque en droit, ne peut être accueilli en sa seconde branche, rendue inopérante par suite du rejet de la première branche.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. [R] [F] et MM. [Y], [U] et [X] [W] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. [R] [F] et MM. [Y], [U] et [X] [W] et les condamne à payer à M. [I] [F], Mme [V] [F], MM. [O] et [K] [Z] et Mme [M] [Z] la somme globale de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept mars deux mille vingt-cinq.