La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

27/03/2025 | FRANCE | N°23-13.760

France | France, Cour de cassation, Troisième chambre civile - formation de section, 27 mars 2025, 23-13.760


CIV. 3

CL



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 27 mars 2025




Rejet


Mme TEILLER, président



Arrêt n° 175 FS-B

Pourvoi n° H 23-13.760




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 27 MARS 2025

M. [U] [K], domicilié [Adresse 12], a formé le pourvoi n° H 2

3-13.760 contre l'arrêt rendu le 26 octobre 2021 par la cour d'appel de Pau (1re chambre), dans le litige l'opposant à la commune de [Localité 14] représentée par son maire en ...

CIV. 3

CL



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 27 mars 2025




Rejet


Mme TEILLER, président



Arrêt n° 175 FS-B

Pourvoi n° H 23-13.760




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 27 MARS 2025

M. [U] [K], domicilié [Adresse 12], a formé le pourvoi n° H 23-13.760 contre l'arrêt rendu le 26 octobre 2021 par la cour d'appel de Pau (1re chambre), dans le litige l'opposant à la commune de [Localité 14] représentée par son maire en exercice domicilié en cette qualité en l'Hôtel de ville, [Adresse 11], défenderesse à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Baraké, conseiller référendaire, les observations de la SAS Boucard-Capron-Maman, avocat de M. [K], de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la commune de [Localité 14], et l'avis de Mme Morel-Coujard, avocat général, après débats en l'audience publique du 25 février 2025 où étaient présents Mme Teiller, président, M. Baraké, conseiller référendaire rapporteur, Mme Proust, conseiller doyen, Mmes Grandjean, Grall, M. Bosse-Platière, Mmes Pic, Oppelt, conseillers, Mmes Aldigé, Gallet, Davoine, MM. Pons, Choquet, conseillers référendaires, et Mme Maréville, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Pau, 26 octobre 2021), M. [K] est propriétaire de diverses parcelles bordées par un chemin rural appartenant au domaine privé de la commune de [Localité 14] (la commune).

2. Soutenant que l'assiette de ce chemin avait été déplacée au préjudice de ses parcelles, celui-ci a assigné la commune en bornage.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

3. M. [K] fait grief à l'arrêt d'homologuer le rapport d'expertise, de dire que la limite séparative de propriété entre ses parcelles et le chemin rural sera constituée par la ligne parallèle située à deux mètres à l'ouest de l'axe dudit chemin rural et reliant les points et segments figurés sur le plan d'état des lieux établi par l'expert, alors :

« 1°/ que saisis d'une action en bornage, les juges du fond doivent fixer de façon précise les limites des propriétés contiguës, ce qui implique d'écarter des débats un procès-verbal de bornage amiable de parcelles voisines de celles qui sont l'objet de l'action, qui ne mentionne pas la distance entre les différents points retenus, n'est pas coté et ne comporte ni coordonnées ni échelle ; qu'en l'espèce, M. [K] faisait valoir que le bornage amiable du 19 décembre 2000, délimitant le côté est du [Adresse 13] avec sa parcelle H [Cadastre 6] (nouvellement H [Cadastre 3]) et les parcelles H [Cadastre 5], [Cadastre 8] et [Cadastre 9] à [Cadastre 10] appartenant aux consorts [D], ne mentionnait pas la distance entre les différents points retenus, n'était pas coté et ne comportait ni coordonnées ni échelle, et en déduisait qu'il ne pouvait servir de fondement à la détermination de la ligne divisoire entre les parcelles [Cadastre 1], [Cadastre 2], [Cadastre 3] et [Cadastre 4] et le côté ouest du [Adresse 13] ; que la cour d'appel a refusé d'écarter des débats ce bornage amiable, a homologué le rapport d'expertise qui s'y appuyait et a fixé conformément à ses préconisations la ligne divisoire entre les parcelles de M. [K] et le côté ouest du [Adresse 13] ; que pour statuer ainsi, la cour d'appel a retenu que le bornage du 19 décembre 2000 était opposable à M. [K] qui l'avait signé en tant que propriétaire de la parcelle H [Cadastre 6], que le tracé de ce bornage n'avait été contesté ni par M. [K] ni par aucun autre propriétaire concerné, de même que l'implantation des bornes B, C, D, E, F, G et H qui s'en est suivie ; qu'en statuant ainsi, par des motifs impropres à justifier que le procès-verbal du 19 décembre 2000 puisse être utilisé pour déterminer avec précision la ligne divisoire entre les parcelles [Cadastre 1], [Cadastre 2], [Cadastre 3] et [Cadastre 4] et le côté ouest du [Adresse 13] en dépit des vices structurels dénoncés par M. [K], la cour d'appel a violé l'article 646 du code civil, ensemble l'article D. 161-13 du code rural et de la pêche maritime ;

2°/ que saisis d'une action en bornage, les juges du fond doivent fixer de façon précise les limites des propriétés contiguës, ce qui implique d'écarter des débats un procès-verbal de bornage amiable de parcelles voisines de celles qui sont l'objet de l'action, qui ne mentionne pas la distance entre les différents points retenus, n'est pas coté et ne comporte ni coordonnées ni échelle ; qu'en l'espèce, M. [K] faisait valoir que le bornage amiable du 19 décembre 2000, délimitant le côté est du [Adresse 13] avec sa parcelle H [Cadastre 6] (nouvellement H [Cadastre 3]) et les parcelles H [Cadastre 5], [Cadastre 8] et [Cadastre 9] à [Cadastre 10] appartenant aux consorts [D], ne mentionnait pas la distance entre les différents points retenus, n'était pas coté et ne comportait ni coordonnées ni échelle, et en déduisait qu'il ne pouvait servir de fondement à la détermination de la ligne divisoire entre les parcelles [Cadastre 1], [Cadastre 2], [Cadastre 3] et [Cadastre 4] et le côté ouest du [Adresse 13] ; que la cour d'appel a refusé d'écarter des débats ce bornage amiable, a homologué le rapport d'expertise qui s'y appuyait et a fixé conformément à ses préconisations la ligne divisoire entre les parcelles de M. [K] et le côté ouest du [Adresse 13] ; que pour statuer ainsi, la cour d'appel a retenu que l'exposant ne démontrait pas que M. [R], géomètre ayant établi le bornage du 19 décembre 2000, fût tenu de mentionner les éléments ayant déterminé la fixation des limites divisoires et la localisation précise de ces limites, et d'indiquer sur le croquis de bornage des cotes, des coordonnées et une échelle ; qu'elle a rajouté que l'exposant ne produisait pas le recueil des prestations édité par l'ordre des géomètres, privant la cour de la possibilité de vérifier les règles préconisées et applicables en 2000, étant rappelé, d'une part, que la directive de l'ordre des géomètres en matière de bornage valant règles de l'art datant du 5 mars 2002 ne dispose que pour l'avenir et, d'autre part, que le décret du 31 mai 1996 portant règlement de la profession de géomètre ne contient à cet égard aucune disposition ; qu'en statuant ainsi, par des motifs impropres à justifier que le procès-verbal du 19 décembre 2000 puisse être utilisé pour déterminer avec précision la ligne divisoire entre les parcelles [Cadastre 1], [Cadastre 2], [Cadastre 3] et [Cadastre 4] et le côté ouest du [Adresse 13] en dépit des vices structurels dénoncés par M. [K], la cour d'appel a violé l'article 646 du code civil, ensemble l'article D. 161-13 du code rural et de la pêche maritime ;

3°/ qu'une borne ne peut être implantée sur le fonds d'un propriétaire en exécution d'un bornage amiable auquel il n'est pas partie et dont il n'a pas signé le procès-verbal ; qu'une borne ainsi irrégulièrement implantée ne peut servir de base à un bornage judiciaire ultérieur de parcelles voisines de celle sur laquelle elle se situe ; qu'au cas présent, M. [K] soutenait que la borne H résultant du bornage amiable du 19 décembre 2000 n'avait pas été régulièrement implantée car elle se situait sur une parcelle H [Cadastre 7] appartenant alors à M. [T] puis vendue ultérieurement à M. [W] et que M. [T] n'était pas partie au bornage amiable ; qu'il en déduisait que la borne H ne pouvait servir de base à la fixation de la ligne divisoire entre les parcelles [Cadastre 1], [Cadastre 2], [Cadastre 3] et [Cadastre 4] et le côté ouest du [Adresse 13] ; que pour écarter ce moyen, homologuer le rapport d'expertise qui s'appuyait sur le procès-verbal du 19 décembre 2000 et fixer conformément à ses préconisations la ligne divisoire entre les parcelles de M. [K] et le côté ouest du [Adresse 13], la cour d'appel a retenu que l'implantation de la borne H n'avait jamais été contestée auparavant, ni par M. [T], ni par M. et Mme [W], ni par M. [K], lequel avait signé ce procès-verbal et donc accepté la limite du point A au point H ; qu'en statuant ainsi, par des motifs inopérants, la cour d'appel a violé l'article 646 du code civil ;

4°/ qu'une borne ne peut être implantée sur le fonds d'un propriétaire en exécution d'un bornage amiable auquel il n'est pas partie et dont il n'a pas signé le procès-verbal ; qu'une borne ainsi irrégulièrement implantée ne peut servir de base à un bornage judiciaire ultérieur de parcelles voisines de celle sur laquelle elle se situe, ce dont tout signataire du procès-verbal peut se prévaloir ; qu'en l'espèce, M. [K] soutenait que la borne H résultant du bornage amiable du 19 décembre 2000 n'avait pas été régulièrement implantée car elle se situait sur une parcelle H [Cadastre 7] appartenant alors à M. [T] puis vendue ultérieurement à M. [W] et que M. [T] n'était pas partie au bornage amiable et n'était pas signataire du procès-verbal ; qu'il en déduisait que la borne H ne pouvait servir de base à la fixation de la ligne divisoire entre les parcelles [Cadastre 1], [Cadastre 2], [Cadastre 3] et [Cadastre 4] et le côté ouest du [Adresse 13] ; que pour écarter ce moyen, homologuer le rapport d'expertise qui s'appuyait sur le procès-verbal du 19 décembre 2000 et fixer conformément à ses préconisations la ligne divisoire entre les parcelles de M. [K] et le côté ouest du [Adresse 13], la cour d'appel a retenu que seuls M. et Mme [W] avaient qualité pour soulever l'absence de signature du procès-verbal du 19 décembre 2000 par M. [T], que ce dernier n'avait jamais élevé de contestation et que la borne H se situait en limite de propriétés qui n'appartenaient pas à M. [K], lequel avait signé ce procès-verbal et donc accepté la limite du point A au point H ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé l'article 646 du code civil. »

Réponse de la Cour

4. La cour d'appel a relevé, d'abord, que l'expert avait indiqué que la partie est du chemin rural avait été délimitée, pour une portion, par des bornes « B à H » qui avaient été implantées en 2000 dans le cadre d'un bornage amiable, sans qu'aucune contestation n'ait été élevée par les propriétaires concernés, s'agissant, en particulier, de l'emplacement du point H critiqué par M. [K], et, pour une autre portion, par un talus naturel.

5. Elle a relevé, ensuite, que l'expert avait conclu, d'une part, que la largeur moyenne du chemin pouvait être fixée à 4 mètres sur la base de l'ancien plan cadastral et de plusieurs bornes en béton retrouvées sur site, plus anciennes dont l'une au droit d'une des parcelles de M. [K], d'autre part, au vu notamment de photographies aériennes, qu'aucun déplacement significatif de l'emprise du chemin rural vers les parcelles de M. [K] n'avait été constaté.

6. Appréciant ainsi souverainement la valeur des divers indices soumis à son examen, la cour d'appel a pu, s'appropriant les conclusions de l'expert, fixer la limite séparative comme elle l'a fait.

7. Le moyen n'est donc pas fondé.

Sur le second moyen

Enoncé du moyen

8. M. [K] fait grief à l'arrêt d'ordonner la mise en place de bornes, par les soins de l'expert, à ses frais exclusifs pour assurer le maintien de la limite, de rejeter toutes ses demandes et de le condamner aux entiers dépens de l'instance et de ses suites incluant notamment le coût de l'expertise et celui du bornage ordonné, alors « que le bornage, même judiciaire, se fait à frais communs ; que les frais du bornage, englobant l'achat et l'implantation des bornes, et qui doivent être partagés, se distinguent des dépens, qui englobent l'expertise judiciaire, et qui sont en principe mis à la charge de la partie dont les prétentions ont échoué ; que pour ordonner la mise en place de bornes par les soins de l'expert aux frais exclusifs de M. [K] et le condamner aux entiers dépens de l'instance, la cour d'appel a retenu, par motifs adoptés, que si le bornage se fait à frais communs lorsque les parties sont d'accord, il en est autrement en cas de contestation de l'une d'elles, la partie qui échoue dans ses réclamations devant supporter tout ou partie des dépens que le débat par elle provoqué a occasionné ; qu'elle en a déduit que M. [K], succombant, devait être condamné aux entiers dépens de l'instance et de ses suites incluant notamment le coût de l'expertise et celui du bornage ; qu'en incluant ainsi les frais d'abornement dans les dépens pour condamner le succombant à supporter les premiers en totalité, la cour d'appel a violé l'article 646 du code civil. »

Réponse de la Cour

9. Il est jugé que si, aux termes de l'article 646 du code civil, le bornage se fait à frais communs, il en va différemment lorsque l'un des propriétaires soulève une contestation et la soumet au juge. Lorsque celui-ci échoue dans ses réclamations, le juge peut, usant du pouvoir discrétionnaire qui est le sien, mettre à la charge de cette partie tous les dépens occasionnés par le débat qu'elle a ainsi provoqué (3e Civ., 16 juin 1976, pourvoi n° 75-11.167, Bull. n° 273).

10. Lorsque la mission de l'expert comprend le bornage des parcelles selon la limite séparative retenue par le juge, les frais d'achat et d'implantation des bornes relèvent alors des dépens visés par l'article 695 du code de procédure civile.

11. La mise en place des bornes ayant été confiée à l'expert judiciairement désigné avec mission de dresser un procès-verbal des opérations, la cour d'appel a, à bon droit, inclus ces frais dans les dépens qu'elle mettait à la charge de M. [K], partie succombante.

12. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. [K] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. [K] et le condamne à payer à la commune de [Localité 14] la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept mars deux mille vingt-cinq.


Synthèse
Formation : Troisième chambre civile - formation de section
Numéro d'arrêt : 23-13.760
Date de la décision : 27/03/2025
Sens de l'arrêt : Rejet

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Pau 01


Publications
Proposition de citation : Cass. Troisième chambre civile - formation de section, 27 mar. 2025, pourvoi n°23-13.760, Bull. civ.Publié au
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles Publié au

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2025
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2025:23.13.760
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award