LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 2
AF1
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 3 avril 2025
Rejet
Mme MARTINEL, président
Arrêt n° 319 F-D
Pourvoi n° G 23-14.336
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 3 AVRIL 2025
M. [F] [M], domicilié [Adresse 2], a formé le pourvoi n° G 23-14.336 contre l'arrêt rendu le 9 février 2023 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 1-6), dans le litige l'opposant :
1°/ à Mme [Z] [V], domiciliée [Adresse 1],
2°/ au Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages, dont le siège est [Adresse 3],
3°/ à la caisse primaire d'assurance maladie du Vaucluse, dont le siège est [Adresse 4],
défendeurs à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Philippart, conseiller référendaire, les observations de Me Ridoux, avocat de M. [M], de la SARL Delvolvé et Trichet, avocat du Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages, et l'avis de Mme Nicolétis, avocat général, après débats en l'audience publique du 26 février 2025 où étaient présentes Mme Martinel, président, Mme Philippart, conseiller référendaire rapporteur, Mme Isola, conseiller doyen, et Mme Cathala, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 9 février 2023), le 25 novembre 2014, M. [M] a été victime d'un accident de la circulation impliquant un véhicule non assuré conduit par Mme [V].
2. Le 8 juillet 2019, M. [M] a assigné en indemnisation de ses préjudices le Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages (le FGAO) devant le tribunal judiciaire de Marseille, commune dans laquelle se situe sa délégation.
3. Le 6 août 2020, M. [M] a assigné Mme [V] devant le même tribunal. Les deux procédures ont été jointes.
4. Le FGAO, faisant valoir que l'accident ne s'était pas produit dans le ressort du tribunal judiciaire de Marseille et que Mme [V] n'y était pas domiciliée, a saisi le juge de la mise en état d'une exception d'incompétence territoriale.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en ses deux branches
Enoncé du moyen
5. M. [M] fait grief à l'arrêt de confirmer l'ordonnance déférée en tant qu'elle déclare le tribunal judiciaire de Marseille incompétent au profit du tribunal judiciaire de Carpentras, et, en conséquence, renvoie l'affaire devant ce tribunal judiciaire, alors :
« 1°/ que la juridiction territorialement compétente est, sauf disposition contraire, celle du lieu où demeure le défendeur ; que s'il y a plusieurs défendeurs, le demandeur saisit, à son choix, la juridiction du lieu où demeure l'un d'eux ; le FGAO, assigné par la victime, à la suite du refus de la proposition d'indemnisation qu'il a émise, dans le cadre d'une action visant à voir prendre en charge par le FGAO l'indemnisation de tous les dommages résultant d'atteintes à la personne dont est responsable un conducteur non assuré, a la qualité de défendeur ; que dès lors, en jugeant en l'espèce que le FGAO, assigné par M. [M], n'avait pas la qualité de défendeur, la cour d'appel a violé l'article 42 du code de procédure civile, ensemble les articles L. 421-1, R. 421-14 et R. 421-15 du code des assurances ;
2°/ que la juridiction territorialement compétente est, sauf disposition contraire, celle du lieu où demeure le défendeur ; que s'il y a plusieurs défendeurs, le demandeur saisit, à son choix, la juridiction du lieu où demeure l'un d'eux ; que le FGAO peut être cité en justice par la victime en cas de désaccord sur l'existence des diverses conditions d'ouverture du droit à l'indemnité ; qu'il a alors la qualité de défendeur ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté qu'à la suite du rapport d'expertise du 21 juin 2017, le FGAO a présenté une offre d'indemnisation en retenant une réduction de moitié du droit à indemnisation de M. [M] ; que contestant cette offre, tant au regard de la réduction du droit à indemnisation que de l'évaluation des préjudices, M. [M] a fait assigner le responsable des dommages et le FGAO devant le tribunal de grande instance de Marseille en vue d'obtenir l'indemnisation de son préjudice corporel et sa prise en charge par le Fonds ; que dès lors, en jugeant que le FGAO ne pouvait être directement cité en justice et qu'il n'avait pas la qualité de défendeur, la cour d'appel a violé l'article 42 du code de procédure civile, ensemble les articles L. 421-1 et R. 421-14 du code des assurances. »
Réponse de la Cour
6. La faculté ouverte au demandeur, par l'article 42, alinéa 2, du code de procédure civile, s'il y a plusieurs défendeurs, de saisir à son choix la juridiction du lieu où demeure l'un d'eux, ne peut être mise en oeuvre qu'autant qu'une action personnelle et directe est exercée contre le défendeur dont la demeure se trouve dans le ressort de la juridiction saisie.
7. En application de l'article R. 421-14 du code des assurances, le FGAO ne peut être cité en justice par la victime, sauf s'il a fait connaître son désaccord sur une transaction intervenue entre la victime et le responsable connu de l'accident, sur la fixation de l'indemnité par une décision de justice qui lui serait inopposable ou sur l'existence des diverses conditions d'ouverture du droit à indemnité.
8. Ne constitue pas un désaccord sur l'existence des diverses conditions d'ouverture du droit à indemnité la proposition faite par le FGAO de réduction du droit à indemnisation en raison de la faute commise par la victime.
9. En l'absence de désaccord au sens de l'article R. 421-14 du code des assurances, le FGAO ne peut qu'intervenir à l'instance engagée par la victime contre le responsable de l'accident pour que la décision de justice rendue sur la demande d'indemnité lui soit déclarée opposable.
10. Ayant constaté, d'une part, que le conducteur du véhicule impliqué dans l'accident est connu, d'autre part, que le FGAO, retenant une réduction de moitié du droit à indemnisation de M. [M], lui avait présenté une offre d'indemnisation qu'il a refusée, l'arrêt énonce à bon droit que M. [M] ne pouvait pas assigner le FGAO en indemnisation de ses préjudices et ne pouvait former ses demandes indemnitaires qu'à l'encontre de la responsable de l'accident sans pouvoir obtenir la condamnation du FGAO, même in solidum.
11. Il en déduit exactement que le FGAO n'a pas la qualité de défendeur au sens de l'article 42 du code de procédure civile et que doit être accueillie l'exception d'incompétence territoriale du tribunal judiciaire de Marseille.
12. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. [M] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trois avril deux mille vingt-cinq.