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10/04/2025 | FRANCE | N°32500205

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 10 avril 2025, 32500205


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


CIV. 3


JL






COUR DE CASSATION
______________________




Audience publique du 10 avril 2025








Cassation partielle




Mme TEILLER, président






Arrêt n° 205 F-D


Pourvoi n° C 24-11.598








R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E


_________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
____________________

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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 10 AVRIL 2025


M. [L] [B], domicilié [Adresse 2], agissant tant en son nom personnel qu'en sa qualité de syndic de la copropriété du 8 rue de l'Abattoir à Borde...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

JL

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 10 avril 2025

Cassation partielle

Mme TEILLER, président

Arrêt n° 205 F-D

Pourvoi n° C 24-11.598

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 10 AVRIL 2025

M. [L] [B], domicilié [Adresse 2], agissant tant en son nom personnel qu'en sa qualité de syndic de la copropriété du 8 rue de l'Abattoir à Bordeaux, a formé le pourvoi n° C 24-11.598 contre l'arrêt rendu le 6 juillet 2023 par la cour d'appel de Bordeaux (2e chambre civile), dans le litige l'opposant :

1°/ à M. [F] [Z],

2°/ à Mme [M] [D], épouse [Z],

tous deux domiciliés [Adresse 1],

défendeurs à la cassation.

M. [B], agissant en qualité de syndic de la copropriété du 8 rue de l'Abattoir à Bordeaux, a formé un pourvoi incident contre le même arrêt.

Le demandeur au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, trois moyens de cassation.

Le demandeur au pourvoi incident invoque, à l'appui de son recours, trois moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Choquet, conseiller référendaire, les observations de la SCP Gadiou et Chevallier, avocat de M. [B], de la SCP Le Bret-Desaché, avocat de M. et Mme [Z], après débats en l'audience publique du 11 mars 2025 où étaient présents Mme Teiller, président, M. Choquet, conseiller référendaire rapporteur, Mme Proust, conseiller doyen, et Mme Maréville, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 6 juillet 2023), M. [B] est propriétaire d'un appartement au rez-de-chaussée d'un immeuble soumis au statut de la copropriété et syndic bénévole du syndicat des copropriétaires de cet immeuble.

2. Reprochant à M. et Mme [Z], propriétaires de l'immeuble voisin, dont l'un des murs donne sur son appartement et la cour attenante constituant une partie commune dont il a la jouissance privative, d'avoir remplacé sur ce mur des jours translucides par des fenêtres transparentes et coulissantes et empiété sur le fonds de la copropriété par les débords de ces fenêtres, M. [B], agissant tant en son nom personnel qu'en qualité de syndic, les a assignés en remplacement des verres clairs des menuiseries par des verres à fer maillé, remplacement des huisseries extérieures par un ouvrage à châssis fixe et verres dormants et suppression de tout débord de l'huisserie ou de tout ouvrage sur le fonds de la copropriété et en indemnisation de son préjudice de jouissance.

Examen des moyens

Sur les premiers moyens, sur les deuxièmes moyens, en ce qu'ils font grief à l'arrêt de rejeter les demandes de M. [B] tendant à la condamnation de M. et Mme [Z] à supprimer tout débord de l'huisserie ou de tout ouvrage qu'ils ont installé sur la propriété des requérants, et sur les troisièmes moyens du pourvoi principal et du pourvoi incident

3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur les deuxièmes moyens, pris en leurs deuxièmes et troisièmes branches, du pourvoi principal et du pourvoi incident, en ce qu'ils font grief à l'arrêt de rejeter les demandes tendant à la condamnation sous astreinte de M. et Mme [Z] à remplacer les verres clairs de leur menuiserie donnant sur la cour de la copropriété du [Adresse 2] et le jardin dont M. [B] a la jouissance exclusive par des verres de fer maillé et à remplacer leurs huisseries extérieures par un ouvrage à châssis fixe et verres dormants et la demande tendant à la condamnation de M. et Mme [Z] à payer à M. [B] une certaine somme au titre de son préjudice de jouissance, rédigés en termes identiques, réunis

Enoncé des moyens

4. M. [B], agissant tant en son nom personnel qu'en qualité de syndic, fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes de condamnation sous astreinte de M. et Mme [Z] à remplacer les verres clairs de leur menuiserie donnant sur la cour de la copropriété du [Adresse 2] et le jardin dont il a la jouissance exclusive par des verres de fer maillé et à remplacer leurs huisseries extérieures par un ouvrage à châssis fixe et verres dormants, et de condamnation de M. et Mme [Z] à lui payer une certaine somme au titre de son préjudice de jouissance, alors :

« 2°/ qu'en se fondant, pour retenir l'existence d'un consentement de M. [B] à l'ouverture litigieuse, sur la pièce n° 10 de M. et Mme [Z], qui se borne à faire état de deux « rendez-vous préparatoire de présentation projet et concertation avec M. [B] », c'est-à-dire deux entretiens entre l'architecte et M. et Mme [Z] pour préparer une présentation du projet à M. [B], la cour d'appel n'a pas, en toutes hypothèses, justifié sa décision au regard de l'article 675 du code civil ;

3°/ qu'en retenant que M. [B] a « été pleinement associé aux travaux modificatifs entrepris par ces voisins », dans des conditions qu'elle ne précise pas, et ne s'est pas « opposé à leur réalisation avant que soit pratiquée l'ouverture critiquée » la cour d'appel n'a pas caractérisé le consentement de celui-ci à l'ouverture litigieuse, privant ainsi sa décision de base légale au regard de l'article 675 du code civil. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 675 du code civil :

5. Aux termes de ce texte, l'un des voisins ne peut, sans le consentement de l'autre, pratiquer dans le mur mitoyen aucune fenêtre ou ouverture, en quelque manière que ce soit, même à verre dormant.

6. Pour rejeter les demandes en remplacement des ouvrages installés par M. et Mme [Z] sur le mur mitoyen, l'arrêt retient que M. [B] a été pleinement associé aux travaux modificatifs entrepris par ses voisins, comme l'atteste le document de l'architecte en charge de cette opération, et qu'il ne démontre pas s'être opposé à leur réalisation avant que soit pratiquée l'ouverture critiquée.

7. En se déterminant ainsi, par des motifs impropres à caractériser le consentement du voisin propriétaire du mur mitoyen à la mise en oeuvre des ouvrages, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.

Et sur les deuxièmes moyens, pris en leurs quatrièmes et cinquièmes branches, du pourvoi principal et du pourvoi incident, en ce qu'ils font les mêmes griefs à l'arrêt, rédigés en termes identiques, réunis

Enoncé des moyens

8. M. [B], agissant tant en son nom personnel qu'en qualité de syndic, fait les mêmes griefs à l'arrêt, alors :

« 4°/ qu'en se bornant, pour retenir l'existence d'une prescription acquisitive, à affirmer que l'acte notarié du 7 septembre 2016 atteste de l'ancienneté de l'immeuble et fait état d'une verrière, qui a été simplement remplacée par des menuiseries modernes sans modifier pour autant l'emplacement et la dimension des ouvertures préexistantes, la cour d'appel, qui ne constate pas que cette verrière existait depuis trente ans au moins, n'a pas justifié légalement sa décision au regard de l'article 690 du code civil ;

5°/ qu'en se bornant à retenir qu'il résulte de l'acte notarié du 7 septembre 2016 que « la verrière du bien immobilier leur appartenant a simplement été remplacée par des menuiseries modernes sans modifier pour autant l'emplacement et la dimension des ouvertures préexistantes », s'attachant ainsi à leur dimension et positionnement, sans déterminer, en l'état de la contestation élevée à cet égard par M. [B], si le vitrage clair était ou non transparent et permettait ou non la vue depuis l'origine, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 690 du code civil. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 690 du code civil :

9. Aux termes de ce texte, les servitudes continues et apparentes s'acquièrent par titre, ou par la possession de trente ans.

10. Pour dire que M. et Mme [Z] peuvent se prévaloir d'une servitude de vue acquise par prescription profitant à leur fonds, l'arrêt retient qu'au regard de l'acte notarié qu'ils produisent, attestant l'ancienneté de l'immeuble, la verrière du bien immobilier leur appartenant a simplement été remplacée par des menuiseries modernes sans modifier pour autant l'emplacement et la dimension des ouvertures préexistantes, et que la vue sur la propriété de M. [B] existait ainsi depuis plus de trente ans.

11. En se déterminant ainsi, sans constater qu'un vitrage transparent avait permis depuis l'origine l'exercice de la vue ni préciser la date à partir de laquelle le délai trentenaire de prescription acquisitive de la vue aurait couru, la cour d'appel, qui n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle, n'a pas donné de base légale à sa décision.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette les demandes de M. [B], agissant tant en son nom personnel qu'en qualité de syndic bénévole du syndicat des copropriétaires du 8 rue de l'Abattoir à Bordeaux, tendant à la condamnation sous astreinte de M. et Mme [Z] à remplacer les verres clairs de leur menuiserie donnant sur la cour de la copropriété du [Adresse 2] et le jardin dont M. [B] a la jouissance exclusive par des verres de fer maillé et à remplacer leurs huisseries extérieures par un ouvrage à châssis fixe et verres dormants, ainsi que la demande tendant à la condamnation de M. et Mme [Z] à payer à M. [B] la somme de 5 000 euros au titre de son préjudice de jouissance, et en ce qu'il statue sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 6 juillet 2023, entre les parties, par la cour d'appel de Bordeaux ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Toulouse ;

Condamne M. et Mme [Z] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes formées par M. et Mme [Z] et les condamne à payer à M. [B], agissant tant en son nom personnel qu'en qualité de syndic du syndicat des copropriétaire du 8 rue de l'Abattoir à Bordeaux, la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de la décision partiellement cassée ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix avril deux mille vingt-cinq.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 32500205
Date de la décision : 10/04/2025
Sens de l'arrêt : Cassation partielle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Bordeaux,


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 10 avr. 2025, pourvoi n°32500205


Composition du Tribunal
Président : Mme Teiller (président)
Avocat(s) : SCP Gadiou et Chevallier, SCP Le Bret-Desaché

Origine de la décision
Date de l'import : 29/04/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2025:32500205
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