CIV. 2
CH10
COUR DE CASSATION
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Arrêt du 22 mai 2025
Cassation
Mme MARTINEL, président
Arrêt n° 497 F-B
Pourvoi n° N 23-14.133
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 22 MAI 2025
1°/ la société [E] [U] Consulting, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 2],
2°/ M. [E] [U], domicilié [Adresse 2],
3°/ la société Velvet Consulting, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 3],
4°/ Mme [N] [T], domiciliée lieu-dit [Adresse 4],
5°/ la société Learnengo, société à responsabilité limitée unipersonnelle, dont le siège est lieu-dit [Adresse 4],
ont formé le pourvoi n° N 23-14.133 contre l'arrêt rendu le 9 février 2023 par la cour d'appel de Paris (pôle 1, chambre 2), dans le litige les opposant à la société Ioda Group, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, un moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Bohnert, conseiller référendaire, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société [E] [U] Consulting, de M. [U], de la société Velvet Consulting, de Mme [T] et de la société Learnengo, de la SAS Hannotin Avocats, avocat de la société Ioda Group, et l'avis de Mme Trassoudaine-Verger, avocat général, après débats en l'audience publique du 2 avril 2025 où étaient présents Mme Martinel, président, Mme Bohnert, conseiller référendaire rapporteur, Mme Durin-Karsenty, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 9 février 2023), la société Ioda Group, soupçonnant Mme [T] et la société Learnengo d'avoir commis des actes de concurrence déloyale à son encontre avec le concours de M. [U] et de la société [E] [U] Consulting, a obtenu du président d'un tribunal de commerce, le 7 janvier 2021, une ordonnance sur requête ordonnant, sur le fondement de l'article 145 du code de procédure civile, des mesures d'instruction in futurum.
2. Par une ordonnance du 12 mai 2022, le juge des référés d'un tribunal de commerce, a débouté la société Ioda Group de sa demande de voir dire caduques les assignations qui avaient engagé l'instance jointe devant lui, dit recevables ces assignations et réduit la portée de la mesure d'instruction.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
3. Mme [T], la société Learnengo, M. [U], la société [E] [U] Consulting et la société Velvet Consulting font grief à l'arrêt de déclarer caduques les assignations délivrées à la société Ioda Group, en conséquence d'annuler l'ordonnance rendue par le tribunal de commerce de Paris le 12 mai 2022, de dire que la cour n'est pas saisie par l'effet dévolutif de l'appel et de débouter les parties de leurs autres demandes, alors « que le recours en référé-rétractation est soumis à la procédure de référé applicable devant le juge saisi du recours, c'est-à-dire le juge qui a rendu l'ordonnance attaquée ; que la procédure de référé devant le président du tribunal de commerce est régie par les articles 484 à 492 du code de procédure civile ; qu'aucun délai n'est ainsi exigé entre la remise de la copie de l'assignation au greffe et l'audience, le juge étant seulement tenu de s'assurer qu'un temps suffisant s'est écoulé entre l'assignation et l'audience pour que la partie assignée ait pu préparer sa défense ; qu'en déclarant caduques les assignations délivrées à la société Ioda Group par les exposants, au motif que le délai de huit jours entre la remise de la copie de l'assignation au greffe et l'audience n'avait pas été respecté et qu'aucune dérogation n'avait été demandée au président du tribunal, la cour d'appel a violé les articles 857 et 858 du code de procédure civile, par fausse application. »
Réponse de la Cour
Vu les articles 485, 486, 857 et 858 du code de procédure civile :
4. Selon les deux premiers de ces textes, inclus dans le titre relatif aux dispositions communes à toutes les juridictions, la demande en référé est portée par voie d'assignation à une audience tenue à cet effet aux jour et heure habituels des référés, le juge s'assurant qu'il s'est écoulé un temps suffisant entre l'assignation et l'audience pour que la partie assignée ait pu préparer sa défense.
5. Les troisième et quatrième de ces textes, relatifs à l'introduction de l'instance devant le tribunal de commerce et inclus dans le titre relatif aux dispositions particulières au tribunal de commerce, prévoient un délai d'enrôlement de l'assignation de huit jours précédant la date de l'audience, sanctionné par la caducité de l'assignation et la possibilité de réduction des délais de comparution et de remise de l'assignation par autorisation du président du tribunal, en cas d'urgence.
6. Il résulte de ces textes, que la procédure de référé devant le tribunal de commerce est régie par les dispositions communes à toutes les juridictions en matière de référé.
7. Pour déclarer caduques les assignations délivrées à la société Ioda Group, l'arrêt retient que les assignations qui lui ont été délivrées avaient été placées ou remises au greffe du tribunal de commerce le 7 avril 2021 par Mme [T] et la société Learnengo, le 8 avril 2021 par M. [U] et la société [E] [U] Consulting et le 21 avril 2021 par la société Velvet Consulting pour des audiences fixées au 13 avril 2021 pour les assignations de Mme [T], la société Learnengo, M. [U] et la société [E] [U] Consulting et au 21 avril 2021 pour l'assignation de la société Velvet Consulting, et qu'aucune autorisation de réduction du délai de remise de l'assignation n'avait été requise du président du tribunal conformément à l'article 858 du code de procédure civile, de sorte que le délai résultant de l'article 857 du même code n'avait pas été respecté.
8. En statuant ainsi, alors que les dispositions applicables à la procédure au fond devant le tribunal de commerce ne trouvent pas à s'appliquer à la procédure de référé régie par les articles 484 et suivants du code de procédure civile, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 9 février 2023, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;
Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ;
Condamne la société Ioda Group aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Ioda Group et la condamne à payer à la société [E] [U] Consulting, M. [U], la société Velvet Consulting, Mme [T] et la société Learnengo la somme globale de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé publiquement le vingt-deux mai deux mille vingt-cinq par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.