La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

28/05/2025 | FRANCE | N°22500511

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 28 mai 2025, 22500511


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


CIV. 2


AF1






COUR DE CASSATION
______________________




Arrêt du 28 mai 2025








Cassation partielle




Mme MARTINEL, président






Arrêt n° 511 F-D


Pourvoi n° R 23-11.307








R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E


_________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
>


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 28 MAI 2025


La société GMF assurances, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° R 23-11.307 contre l'arrêt rendu le 25 novembre 2022 par la cour d'appel de Saint...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

AF1

COUR DE CASSATION
______________________

Arrêt du 28 mai 2025

Cassation partielle

Mme MARTINEL, président

Arrêt n° 511 F-D

Pourvoi n° R 23-11.307

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 28 MAI 2025

La société GMF assurances, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° R 23-11.307 contre l'arrêt rendu le 25 novembre 2022 par la cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion (chambre civile), dans le litige l'opposant à M. [S] [D], domicilié [Adresse 1], défendeur à la cassation.

M. [S] [D] a formé un pourvoi incident contre le même arrêt.

La demanderesse au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, deux moyens de cassation.

Le demandeur au pourvoi incident invoque, à l'appui de son recours, un moyen de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Cassignard, conseiller, les observations de la SARL Cabinet Rousseau et Tapie, avocat de la société GMF assurances, de la SCP Alain Bénabent, avocat de M. [D], et l'avis de Mme Nicolétis, avocat général, après débats en l'audience publique du 9 avril 2025 où étaient présentes Mme Martinel, président, Mme Cassignard, conseiller rapporteur, Mme Isola, conseiller doyen, et Mme Cathala, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Saint-Denis de la Réunion, 25 novembre 2022), M. [D], motocycliste, a été victime, le 11 septembre 2016, d'un accident de la circulation impliquant un véhicule assuré auprès de la société GMF assurances (l'assureur).

2. M. [D] a assigné l'assureur devant un tribunal de grande instance, en présence de la Caisse générale de sécurité sociale de la Réunion, en indemnisation de ses préjudices.

Examen des moyens

Sur le moyen du pourvoi incident, formé par M. [D]

Enoncé du moyen

3. M. [D] fait grief à l'arrêt de rejeter toutes demandes plus amples ou contraires, en cela incluse sa demande de capitalisation des intérêts produits par les sommes allouées par le juge, alors :

« 1°/ que les intérêts échus, dus au moins pour une année entière, produisent intérêt si le contrat l'a prévu ou si une décision de justice le précise ; que le juge doit ordonner la capitalisation des intérêts lorsque les conditions de celles-ci sont réunies, à savoir qu'une demande judiciaire en a été faite et que les intérêts ont couru pendant un an au moins ; que dans ses conclusions d'appel, M. [D] demandait la capitalisation des intérêts produits par les sommes qui lui seraient accordées par le juge et qui avaient couru pendant plus d'un an à la date de l'arrêt ; qu'en rejetant pourtant la demande de capitalisation des intérêts formée par M. [D], la cour d'appel a violé l'article 1342-3 (lire 1343-2) du code civil ;

« 2°/ que les intérêts échus, dus au moins pour une année entière, produisent intérêt si le contrat l'a prévu ou si une décision de justice le précise ; que le juge doit ordonner la capitalisation des intérêts lorsque les conditions de celles-ci sont réunies, à savoir qu'une demande judiciaire en a été faite et que les intérêts ont couru pendant un an au moins ; que dans ses conclusions d'appel, M. [D] demandait la capitalisation des intérêts produits par les sommes qui lui seraient accordées par le juge et que ceux-ci avaient couru pendant plus d'un an à la date de l'arrêt ; qu'en rejetant le surplus des demandes des parties sans nullement justifier le rejet d'une telle demande, la cour d'appel a privé sa décision de motifs, violant ainsi l'article 455 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

4. Sous couvert de griefs tirés d'une violation des articles 1343-2 du code civil et 455 du code de procédure civile, le moyen ne tend qu'à critiquer une omission de statuer pouvant être réparée par la procédure prévue à l'article 463 du code de procédure civile.

5. Le moyen est, dès lors, irrecevable.

Mais sur le premier moyen du pourvoi principal, formé par l'assureur

Enoncé du moyen

6. L'assureur fait grief à l'arrêt de le condamner à payer à M. [D], après avoir alloué à ce dernier la somme de 176 406,07 euros à laquelle il convient de déduire la somme déjà perçue par lui de 185 291,71 euros correspondant à la créance de l'organisme social au titre du capital invalidité, arrérages échus compris, de sorte que le solde restant dû s'élève à zéro, la somme de 50 000 euros au titre de l'incidence professionnelle et de dire que les indemnités prononcées par l'arrêt produiront de plein droit intérêt au double du taux d'intérêt légal à compter du 29 octobre 2021 jusqu'au 25 novembre 2022, date de l'arrêt, alors « que la pension d'invalidité prévue par l'article L. 341-1 du code de la sécurité sociale indemnise, d'une part, les pertes de gains professionnels et les incidences professionnelles de l'incapacité, d'autre part, le déficit fonctionnel permanent ; qu'il en résulte que si le montant de la pension d'invalidité excède celui accordé en réparation des préjudices subis au titre du poste de la perte de gains professionnels futurs, le reliquat doit s'imputer sur le poste de préjudice d'incidence professionnelle ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a alloué à M. [D], au titre de la perte de gains professionnels futurs, la somme de 176 406,07 euros mais, constatant que le montant de la pension invalidité déjà perçue par lui était de 185 291,71 euros, elle a dit que le solde restant dû s'élevait à zéro ; qu'en condamnant l'assureur au paiement de la somme de 50 000 euros au titre de l'incidence professionnelle sans déduire de ce poste le reliquat de la pension d'invalidité d'un montant de 8 885,64 euros (185 291,71 ¿ 176 406,07), la cour d'appel a violé le principe de la réparation intégrale sans perte ni profit pour la victime. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 341-1 du code de la sécurité sociale, l'article 31 de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 et le principe de la réparation intégrale sans perte ni profit pour la victime :

7. Il résulte du second de ces textes que le recours des tiers payeurs s'exerce poste par poste sur les seules indemnités qui réparent des préjudices qu'elles ont pris en charge, à l'exclusion des préjudices à caractère personnel.

8. La pension d'invalidité visé au premier de ces textes répare les postes de pertes de gains professionnels et d'incidence professionnelle.

9. Après avoir alloué à M. [D] la somme de 176 406,07 euros au titre des pertes de gains professionnels futurs (PGPF) et rappelé qu'il a perçu une pension d'invalidité de 185 291,71 euros, l'arrêt retient que le solde restant dû au titre des PGPF s'élève à 0, sans imputer le reliquat de la pension d'invalidité sur la somme de 50 000 euros accordée au titre du poste d'incidence professionnelle.

10. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes et le principe susvisés.

Et sur le second moyen du pourvoi principal

Enoncé du moyen

11. L'assureur fait grief à l'arrêt de dire que les indemnités prononcées par l'arrêt produiront de plein droit intérêt au double du taux de l'intérêt légal à compter du 29 octobre 2021 jusqu'au 25 novembre 2022, date de l'arrêt, alors :

« 1°/ que, lorsqu'en application des articles L. 211-9 et suivants du code des assurances, l'assureur de responsabilité a formulé une offre d'indemnisation sérieuse mais tardive, la sanction du doublement du taux de l'intérêt légal a pour assiette l'indemnité offerte par l'assureur ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a relevé que par courrier du 30 novembre 2021, la société GMF avait fait une offre d'indemnisation à M. [D] ; qu'en retenant, pour juger que la sanction constituée par le versement d'intérêts au double du taux légal avait pour assiette le montant des indemnités qu'elle allouait, que cette offre était tardive, la cour d'appel, qui n'a pas retenu qu'elle aurait été insuffisante, a privé sa décision de toute base légale au regard des articles L. 211-9 et L. 211-13 du code des assurances ;

2°/ que, lorsque l'offre n'a pas été faite dans les délais impartis par l'article L. 211-9 du code des assurances mais qu'elle est suffisante, le montant de l'indemnité offerte par l'assureur produit intérêt de plein droit au double du taux de l'intérêt légal à compter de l'expiration du délai applicable jusqu'au jour de l'offre ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a relevé que la société GMF avait fait une offre par courrier du 30 novembre 2021 ; qu'en retenant, pour juger que les indemnités produiraient des intérêts au double du taux légal à compter du 29 octobre 2021, date de la connaissance par l'assureur de la date de la consolidation de l'assuré, jusqu'au 25 novembre 2022, date de l'arrêt, la cour d'appel, qui n'a pas retenu que cette offre aurait été insuffisante, a derechef privé sa décision de toute base légale au regard des articles L. 211-9 et L. 211-13 du code des assurances. »

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 211-9 et L. 211-13 du code des assurances :

12. Il résulte de ces textes que l'assureur qui garantit la responsabilité du conducteur d'un véhicule impliqué dans un accident de la circulation est tenu de présenter à la victime une offre d'indemnité comprenant tous les éléments indemnisables du préjudice et que lorsque l'offre n'a pas été faite dans les délais impartis par le premier texte, le montant de l'indemnité offerte par l'assureur ou allouée par le juge à la victime produit intérêts de plein droit, au double du taux de l'intérêt légal, à compter de l'expiration du délai et jusqu'au jour de l'offre ou du jugement devenu définitif.

13. Pour dire que les indemnités dues par l'assureur produiront de plein droit intérêt au double du taux de l'intérêt légal à compter du 29 octobre 2021 jusqu'au 25 novembre 2022, date de la décision, l'arrêt constate que le délai dont disposait l'assureur pour faire une offre expirait le 29 octobre 2021 et que l'offre définitive d'indemnisation adressée à M. [D] le 30 novembre 2021 est hors délai.

14. En se déterminant ainsi, en faisant courir les intérêts au double du taux de l'intérêt légal sur les indemnités fixées par l'arrêt, sans rechercher si l'offre présentée par l'assureur le 30 novembre 2021, dont il se prévalait, était manifestement insuffisante, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.

Portée et conséquences de la cassation

15. La cassation des chefs de dispositif condamnant l'assureur à payer à M. [D] la somme de 50 000 euros au titre de l'incidence professionnelle et disant que les indemnités prononcées par l'arrêt produiront de plein droit intérêt au double du taux de l'intérêt légal à compter du 29 octobre 2021 jusqu'au 25 novembre 2022, date de l'arrêt, n'emporte pas celle des chefs de dispositif de l'arrêt condamnant l'assureur aux dépens ainsi qu'au paiement d'une somme en application de l'article 700 du code de procédure civile, justifiés par d'autres condamnations prononcées à l'encontre de celui-ci.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi incident ;

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société GMF assurances à payer à M. [S] [D] la somme de 50 000 euros au titre de l'incidence professionnelle et dit que les indemnités prononcées par l'arrêt produiront de plein droit intérêt au double du taux de l'intérêt légal à compter du 29 octobre 2021 jusqu'au 25 novembre 2022, date de l'arrêt, l'arrêt rendu le 25 novembre 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Saint Denis de la Réunion, autrement composée ;

Condamne M. [D] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé publiquement le vingt-huit mai deux mille vingt-cinq par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 22500511
Date de la décision : 28/05/2025
Sens de l'arrêt : Cassation partielle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Saint Denis de la Réunion, 25 novembre 2022


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 28 mai. 2025, pourvoi n°22500511


Composition du Tribunal
Président : Mme Martinel (président)
Avocat(s) : SARL Cabinet Rousseau et Tapie, SCP Alain Bénabent

Origine de la décision
Date de l'import : 03/06/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2025:22500511
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award