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05/06/2025 | FRANCE | N°23-11.500

France | France, Cour de cassation, Troisième chambre civile - formation de section, 05 juin 2025, 23-11.500


CIV. 3

JL



COUR DE CASSATION
______________________


Arrêt du 5 juin 2025




Cassation


Mme TEILLER, président



Arrêt n° 283 FS-B

Pourvoi n° A 23-11.500




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 5 JUIN 2025

1°/ Mme [M] [I], domiciliée [Adresse 1],

2°/ l'élevage des D

unes des sages, dont le siège est [Adresse 2],

ont formé le pourvoi n° A 23-11.500 contre l'ordonnance rendue le 17 janvier 2023 par la cour d'appel de Bordeaux (juridiction premier...

CIV. 3

JL



COUR DE CASSATION
______________________


Arrêt du 5 juin 2025




Cassation


Mme TEILLER, président



Arrêt n° 283 FS-B

Pourvoi n° A 23-11.500




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 5 JUIN 2025

1°/ Mme [M] [I], domiciliée [Adresse 1],

2°/ l'élevage des Dunes des sages, dont le siège est [Adresse 2],

ont formé le pourvoi n° A 23-11.500 contre l'ordonnance rendue le 17 janvier 2023 par la cour d'appel de Bordeaux (juridiction premier président, recours en matière de visites et saisies domiciliaires), dans le litige les opposant à la direction départementale de la protection des populations de la Gironde, dont le siège est [Adresse 3], défenderesse à la cassation.

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, deux moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Brillet, conseiller, les observations de la SCP Sevaux et Mathonnet, avocat de Mme [I] et de l'élevage des Dunes des sages, et l'avis de Mme Delpey-Corbaux, avocat général, après débats en l'audience publique du 29 avril 2025 où étaient présents Mme Teiller, président, M. Brillet, conseiller rapporteur, M. Boyer, conseiller doyen, Mme Abgrall, M. Pety, Mmes Foucher-Gros, Guillaudier, conseillers, M. Zedda, Mmes Vernimmen, Rat, Bironneau, M. Cassou de Saint-Mathurin, conseillers référendaires, Mme Delpey-Corbaux, avocat général, et Mme Maréville, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'ordonnance attaquée, rendue par le premier président d'une cour d'appel (Bordeaux, 17 janvier 2023), Mme [I] exploite un élevage de chiens sous la dénomination des Dunes des sages.

2. Mme [I] a fait appel de l'ordonnance d'un juge des libertés de la détention ayant, sur la requête du directeur départemental de la protection des populations de la Gironde (la DDPP) visant les articles L. 172-5 du code de l'environnement et les articles L. 206-1 et L. 214-23 du code rural et de la pêche maritime, autorisé certains agents de cette direction à procéder à des perquisitions et saisies à son domicile et au sein de l'élevage.

Recevabilité du pourvoi, en ce qu'il est formé par l'élevage des Dunes des sages, examinée d'office

3. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 16 du code de procédure civile, il est fait application de l'article 32 de ce code.

4. Aux termes de ce texte, est irrecevable toute prétention émise par ou contre une personne dépourvue du droit d'agir.

5. L'élevage des Dunes des sages ne disposant pas de la personnalité juridique, le pourvoi, en tant que formé par celui-ci, est irrecevable.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

6. Mme [I] fait grief à l'ordonnance de confirmer la décision du juge des libertés et de la détention ayant autorisé les agents de la DDPP à procéder, sans l'assentiment des personnes chez qui ces opérations auront lieu, à des perquisitions et saisies, alors « qu'en matière environnementale, l'autorisation d'effectuer une visite domiciliaire, sans le consentement de la personne concernée, ne peut être demandée au juge des libertés et de la détention, lorsqu'il n'y a pas flagrance, que par le procureur de la République et selon les formes du code de procédure pénale ; qu'en retenant que la DDPP tient de l'article L. 172-5 du code de l'environnement le pouvoir de saisir elle-même le juge des libertés et de la détention par requête pour que ses agents soient autorisés à accéder aux locaux en cas de refus du propriétaire des lieux ou lorsque ceux-ci comprennent des parties à usage d'habitation et que, par conséquent, les griefs faits à l'ordonnance déférée, tenant au non-respect des dispositions de l'article 76 du code de procédure pénale relatives aux perquisitions, visites domiciliaires et saisies effectuées dans le cadre d'une enquête préliminaire, autorisées par le juge des libertés et de la détention sur saisine du ministère public, en ce que la requête n'émane pas de ce dernier et en ce que l'ordonnance ne vise pas la qualification des infractions pénales recherchées sont inopérants même si l'ordonnance vise improprement ces dispositions, lorsque seul l'article 76 précité était applicable, le premier président de la cour d'appel a violé l'article L. 172-5 du code de l'environnement et a commis un excès de pouvoir. »

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 172-5, dernier alinéa, du code de l'environnement et 76, alinéa 4, du code de procédure pénale :

7. Selon le premier de ces textes, dans leurs missions de recherche et de constat des infractions prévues par le code de l'environnement, les fonctionnaires et agents habilités à cet effet ne peuvent procéder à la visite des domiciles et des locaux comportant des parties à usage d'habitation, à défaut d'assentiment de l'occupant des lieux, qu'en présence d'un officier de police judiciaire agissant conformément aux dispositions du code de procédure pénale relatives aux visites domiciliaires, perquisitions et saisies des pièces à conviction.

8. Si, en matière d'enquête préliminaire, le juge des libertés et de la détention peut, dans les conditions prévues par le second de ces textes, décider que les perquisitions, visites domiciliaires et saisies seront effectuées sans l'assentiment de la personne chez qui elles ont lieu, il ne peut être saisi à cette fin que par le procureur de la République.

9. Il en résulte que le juge des libertés et de la détention ne peut pas être saisi, sur le fondement de ces textes, par les fonctionnaires et agents précités pour être autorisés à procéder à une visite des domiciles et des locaux comportant des parties à usage d'habitation aux fins de recherche et de constat des infractions prévues par ce code.

10. Pour confirmer l'ordonnance ayant autorisé certains agents de la DDPP à procéder, sans son assentiment, à des perquisitions et saisies aux domicile et dépendances de Mme [I] et au sein de l'élevage des Dunes des sages, l'ordonnance constate que le juge des libertés et de la détention a été saisi sur le fondement de divers textes, notamment l'article L. 172-5 du code de l'environnement.

11. Elle retient qu'en application de ces dispositions, la DDPP, dans le cadre de ses pouvoirs de contrôle administratif et de recherche et constatation d'infractions, peut elle-même saisir le juge des libertés et de la détention par requête pour que ses agents soient autorisés à accéder aux locaux en cas de refus opposé par le propriétaire des lieux ou lorsque ceux-ci comprennent des parties à usage d'habitation.

12. Elle ajoute que les contestations tirées des dispositions de l'article 76 du code de procédure pénale relatives aux perquisitions, visites domiciliaires et saisies effectuées dans le cadre d'une enquête préliminaire autorisées par le juge des libertés et de la détention, prévoyant que la requête émane du procureur de la République et que l'ordonnance vise la qualification des infractions pénales recherchées, sont inopérantes, le visa de ce texte, impropre, restant sans effet sur la régularité de la décision.

13. En statuant ainsi, le premier président, qui ne pouvait pas autoriser des perquisitions et des saisies à la demande de la DDPP, a violé les textes susvisés.

Et sur le second moyen

Enoncé du moyen

14. Mme [I] fait le même grief à l'ordonnance, alors « que le juge des libertés et de la détention ne tient de l'article L. 206-1 du code rural et de la pêche maritime que le pouvoir d'autoriser l'accès aux locaux et ne peut autoriser les agents à effectuer des perquisitions et saisies ; qu'en confirmant l'ordonnance du juge des libertés et de la détention ayant autorisé, sur le fondement de l'article L. 206-1 du code rural et de la pêche maritime, les agents appartenant à la DDPP à procéder, sans l'assentiment des personnes chez qui ces opérations auront lieu, à des perquisitions et saisies chez Mme [I] et au sein de l'élevage des Dunes des sages et non à une visite domiciliaire, le premier président de la cour d'appel a violé l'article L. 206-1 du code rural et de la pêche maritime et a excédé ses pouvoirs. »





Réponse de la Cour

Vu les articles L. 206-1, I, alinéa 1er, et L. 214-23, I, 5°, du code rural et de la pêche maritime :

15. Selon le second de ces textes, pour l'exercice des inspections, des contrôles et des interventions de toute nature qu'implique l'exécution des mesures de protection des animaux prévues aux articles L. 214-3 à L. 214-18, L. 215-10 et L. 215-11, des règlements communautaires ayant le même objet et des textes pris pour leur application, les fonctionnaires et agents habilités à cet effet peuvent solliciter du juge des libertés et de la détention, dans les formes et conditions prescrites par l'article L. 206-1, l'autorisation d'accéder à des locaux professionnels ou à des locaux comprenant des parties à usage d'habitation, dont l'accès leur a été refusé par l'occupant, pour y procéder à des contrôles.

16. Aux termes du premier, lorsque l'accès aux locaux est refusé aux agents, ou lorsque ceux-ci comprennent des parties à usage d'habitation, cet accès peut être autorisé par ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire dans le ressort duquel sont situés les lieux à visiter.

17. Pour confirmer l'ordonnance ayant autorisé certains agents de la DDPP à procéder, sans son assentiment, à des perquisitions et saisies aux domicile et dépendances de Mme [I] et au sein de l'élevage des Dunes des sages, l'ordonnance constate que le juge des libertés et de la détention a été saisi sur le fondement de divers textes, notamment les articles L. 206-1 et L. 214-23 du code rural et de la pêche maritime.

18. Elle retient qu'en application de ces dispositions, la DDPP, dans le cadre de ses pouvoirs de contrôle administratif et de recherche et constatation d'infractions, peut elle-même saisir le juge des libertés et de la détention par requête pour que ses agents soient autorisés à accéder aux locaux en cas de refus opposé par le propriétaire des lieux ou lorsque ceux-ci comprennent des parties à usage d'habitation.

19. Elle ajoute que les contestations tirées des dispositions de l'article 76 du code de procédure pénale relatives aux perquisitions, visites domiciliaires et saisies effectuées dans le cadre d'une enquête préliminaire autorisées par le juge des libertés et de la détention, prévoyant que la requête émane du procureur de la République et que l'ordonnance vise la qualification des infractions pénales recherchées, sont inopérantes, le visa de ce texte, impropre, restant sans effet sur la régularité de la décision.

20. En statuant ainsi, alors que le juge des libertés et de la détention, saisi sur le fondement de l'article L. 206-1 du code rural et de la pêche maritime, ne peut autoriser les fonctionnaires et agents habilités à procéder à des perquisitions et des saisies, mais peut seulement les autoriser à accéder à certains locaux, le premier président a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief, la Cour :

DECLARE irrecevable le pourvoi en tant que formé par l'élevage des Dunes des sages ;

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'ordonnance rendue le 17 janvier 2023, entre les parties, par le premier président de la cour d'appel de Bordeaux ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la juridiction du premier président de la cour d'appel de Bordeaux autrement composée ;

Condamne la direction départementale de la protection des populations de la Gironde aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'ordonnance cassée ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé publiquement le cinq juin deux mille vingt-cinq par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Troisième chambre civile - formation de section
Numéro d'arrêt : 23-11.500
Date de la décision : 05/06/2025
Sens de l'arrêt : Cassation

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Bordeaux OP


Publications
Proposition de citation : Cass. Troisième chambre civile - formation de section, 05 jui. 2025, pourvoi n°23-11.500, Bull. civ.Publié au
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles Publié au

Origine de la décision
Date de l'import : 06/06/2025
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2025:23.11.500
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