CIV. 3
CL
COUR DE CASSATION
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Arrêt du 19 juin 2025
Rejet
Mme TEILLER, président
Arrêt n° 313 FS-B
Pourvoi n° V 23-19.292
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 19 JUIN 2025
La société Assistance et gestion intégrale, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° V 23-19.292 contre l'arrêt rendu le 2 juin 2023 par la cour d'appel de Paris (pôle 4, chambre 1), dans le litige l'opposant :
1°/ à la société FRA 203, société civile immobilière, dont le siège est [Adresse 1],
2°/ à la Fédération générale des syndicats de la police nationale CGT, dont le siège est [Adresse 3],
défenderesses à la cassation.
La société civile immobilière FRA 203 a formé, par un mémoire déposé au greffe, un pourvoi incident éventuel contre le même arrêt.
La demanderesse au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, un moyen de cassation.
La demanderesse au pourvoi incident éventuel invoque, à l'appui de son recours, un moyen de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Aldigé, conseiller référendaire, les observations de la SCP Foussard et Froger, avocat de la société Assistance et gestion intégrale, de la SCP Gaschignard, Loiseau et Massignon, avocat de la société FRA 203, et l'avis de Mme Compagnie, avocat général, après débats en l'audience publique du 6 mai 2025 où étaient présents Mme Teiller, président, Mme Aldigé, conseiller référendaire rapporteur, Mme Proust, conseiller doyen, Mmes Grandjean, Grall, M. Bosse-Platière, Mmes Pic, Oppelt, conseillers, Mme Schmitt, M. Baraké, Mmes Gallet, Davoine, MM. Pons, Choquet, conseillers référendaires, Mme Morel-Coujard, avocat général, et Mme Letourneur, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 2 juin 2023), la Fédération générale des syndicats de la police nationale-CGT (la bailleresse), propriétaire de plusieurs lots dans un immeuble, les a vendus à la société civile immobilière FRA 203 (l'acquéreuse).
2. La société Assistance et gestion intégrale (la locataire), preneuse à bail commercial d'une partie de l'un des lots, se prévalant de l'article L. 145-46-1 du code de commerce, a assigné la bailleresse et l'acquéreuse en nullité de la vente.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
3. La locataire fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande, alors « que le droit de préférence du locataire commercial en cas de vente du local loué par le bailleur-propriétaire n'est exclu qu'en cas notamment de cession unique de plusieurs locaux d'un ensemble commercial et de cession unique de locaux commerciaux distincts ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a relevé que la vente litigieuse avait porté sur « - le lot n° 11 à usage de cave, - le lot n° 16 à usage de box, - le lot n° 17 à usage de box, - le lot n° 29 à usage de bureaux d'une superficie de 139,86 m² », et que « le lot n° 29, après division, a été loué pour une partie correspondant à une surface de 99 m² à la société Assistance et gestion intégrale, l'autre partie n'ayant pas fait l'objet d'une location » ; qu'il résultait de ces constatations que la cession ne constituait ni une cession unique de plusieurs locaux d'un ensemble commercial, ni une cession unique de locaux commerciaux distincts, mais une cession unique d'un seul local situé dans un immeuble en copropriété, loué selon bail commercial du 1er février 1994, renouvelé le 1er juin 2011, peu important que la cession porte également sur des lots à usage de cave et de box ; qu'en retenant, pour juger que la société Agi ne pouvait se prévaloir du droit de préférence prévu à l'article L. 145-46-1 du code de commerce, que ce texte excluait « le bénéfice de ce droit en cas de cession unique de plusieurs locaux d'un ensemble commercial et de cession unique de locaux commerciaux distincts », la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé l'article L. 145-46-1 du code de commerce. »
Réponse de la Cour
4. Selon l'article L. 145-46-1, alinéa 1er, du code de commerce, lorsque le propriétaire d'un local à usage commercial ou artisanal envisage de vendre celui-ci, il en informe le locataire par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, ou remise en main propre contre récépissé ou émargement, cette notification valant offre de vente au preneur.
5. Selon le dernier alinéa du même texte, ces dispositions ne sont pas applicables à la cession globale d'un immeuble comprenant des locaux commerciaux.
6. Cette exception au droit de préférence, prévue pour la catégorie générique des locaux commerciaux, s'applique en cas de cession d'un immeuble comprenant un seul local commercial.
7. Il en résulte que le locataire à bail commercial ne bénéficie pas d'un droit de préférence lorsque le local pris à bail ne constitue qu'une partie de l'immeuble vendu, même si celui-ci ne comprend qu'un seul local commercial.
8. La cour d'appel ayant constaté que les locaux loués ne constituaient qu'une partie des lots objets de la vente, elle en a exactement déduit que la locataire ne bénéficiait pas d'un droit de préférence.
9. Le moyen n'est donc pas fondé.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le pourvoi incident qui n'est qu'éventuel, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Assistance et gestion intégrale aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Assistance et gestion intégrale et la condamne à payer à la société civile immobilière FRA 203 la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé publiquement le dix-neuf juin deux mille vingt-cinq par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, et signé par Mme Proust, conseiller doyen en ayant délibéré, en remplacement de Mme Teiller, président empêché, le conseiller rapporteur et le greffier conformément aux dispositions des articles 452, 456 et 1021 du code de procédure civile.