SOC.
HE1
COUR DE CASSATION
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Arrêt du 25 juin 2025
Rejet
M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président
Arrêt n° 728 F-B
Pourvoi n° T 23-17.266
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 25 JUIN 2025
L'Institut [3], association, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° T 23-17.266 contre l'arrêt rendu le 14 avril 2023 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 4-1), dans le litige l'opposant à Mme [Z] [V], domiciliée [Adresse 1], défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, quatre moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Sommé, conseillère, les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de l'Institut [3], de la SCP Sevaux et Mathonnet, avocat de Mme [V], après débats en l'audience publique du 4 juin 2025 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Sommé, conseillère rapporteure, M. Rinuy, conseiller, et Mme Piquot, greffière de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 14 avril 2023) et les productions, Mme [V], agent contractuel de l'Etat exerçant les fonctions de professeure des écoles, a été mise à disposition par le ministre de l'Education nationale, à compter du 18 septembre 2008, pour exercer des missions à temps partiel auprès de l'Institut [3] (l'institut), lequel est un institut supérieur de formation de l'enseignement privé. La relation de travail s'est poursuivie dans le cadre d'un contrat de travail conclu entre les parties le 1er septembre 2016, aux termes duquel la salariée a été engagée par l'institut à temps complet en qualité d'adjointe de direction et formatrice.
2. Par lettre du 4 juillet 2017, la salariée a été convoquée à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé le 18 juillet suivant. Elle a été licenciée pour motif économique par lettre du 10 août 2017.
3. Soutenant avoir subi un harcèlement moral, elle a saisi la juridiction prud'homale, le 9 février 2018, de demandes tendant à la nullité de son licenciement et au paiement de diverses sommes au titre du harcèlement moral et de la rupture de son contrat de travail.
Examen des moyens
Sur les premier, deuxième et troisième moyens et sur le quatrième moyen, pris en sa seconde branche
4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le quatrième moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
5. L'institut fait grief à l'arrêt de le condamner au paiement d'une certaine somme à titre de dommages-intérêts pour licenciement nul, alors « que le salaire à prendre en considération pour l'évaluation de l'indemnité pour licenciement nul visée par l'article L 1235-3-1 du code du travail est celui dû par l'employeur qui a prononcé le licenciement ; que lorsque le salarié licencié est un agent public mis à disposition d'un organisme de droit privé, dont le traitement a continué de lui être versé par l'Etat pendant sa mise à disposition, puis après son licenciement notifié par l'organisme de droit privé, l'indemnité pour licenciement nul due par ce dernier est calculée sur la base du seul complément de salaire que ce dernier lui versait, et non sur le traitement qu'il percevait de son corps d'origine ; qu'il résulte des constatations de l'arrêt que pendant sa mise à disposition au sein de l'Institut [3], Mme [V], agent de droit public, professeur des écoles, percevait un traitement de 2 360,74 euros qui lui était versé par le rectorat, ainsi qu'un complément de salaire de 917,25 euros que lui versait l'Institut [3], soit une rémunération totale de 3 270,99 euros, qui s'établissait en dernier lieu à la somme de 3 289,24 euros; qu'en prenant pour base la totalité de sa rémunération pour évaluer le montant de son indemnité pour licenciement nul due par l'Institut [3], la cour d'appel a violé l'article L 1235-3-1 du code du travail. »
Réponse de la Cour
6. Il résulte des articles L. 1221-1 du code du travail et 33-1 du décret n° 86-83 du 17 janvier 1986 relatif aux dispositions générales applicables aux agents contractuels de l'Etat, dans sa rédaction antérieure au décret n° 2020-1493 du 30 novembre 2020, que l'agent contractuel de l'Etat mis à disposition d'un organisme de droit privé pour accomplir un travail est lié à cet organisme par un contrat de travail et que le licenciement prononcé par ce dernier est régi notamment par les articles L. 1235-1 et suivants du code du travail.
7. En application de l'article L. 1235-3-1 du code du travail, en cas de nullité du licenciement, lorsque le salarié ne demande pas la poursuite de l'exécution de son contrat de travail ou que sa réintégration est impossible, le juge lui octroie une indemnité, à la charge de l'employeur, qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois.
8. Il en résulte qu'eu égard à sa qualité d'employeur l'organisme de droit privé est tenu, lorsque le licenciement de l'agent contractuel de l'Etat mis à sa disposition est jugé nul et que ce dernier ne demande pas sa réintégration ou que celle-ci est impossible, d'indemniser l'agent de la perte injustifiée de son emploi au sein de cet organisme en lui versant une indemnité qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois, peu important que la rémunération de l'intéressé ait été versée, en tout ou partie, par son administration d'origine.
9. Ayant constaté qu'à compter du mois de septembre 2016, la salariée avait perçu au titre d'un temps complet un salaire mensuel brut de 3 270,99 euros, comprenant le traitement versé par le rectorat d'un montant de 2 360,74 euros et le salaire versé par l'institut s'élevant à 917,25 euros, la cour d'appel a exactement retenu que les dommages-intérêts pour licenciement nul dus à la salariée devaient être calculés sur la base du salaire total perçu par celle-ci, soit en dernier lieu 3 289,24 euros, peu important qu'une partie de cette rémunération ait été versée par le rectorat.
10. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne l'association Institut [3] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par l'association Institut [3] et la condamne à payer à Mme [V] la somme de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé publiquement le vingt-cinq juin deux mille vingt-cinq par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.