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25/06/2025 | FRANCE | N°23-17.999

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale - formation de section, 25 juin 2025, 23-17.999


SOC.

ZB1



COUR DE CASSATION
______________________


Arrêt du 25 juin 2025




Cassation partielle


M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président



Arrêt n° 689 FS-B

Pourvoi n° Q 23-17.999


R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 25 JUIN 2025

Mme [T] [Y], domiciliée [Adresse 1], a for

mé le pourvoi n° Q 23-17.999 contre l'arrêt rendu le 30 mars 2023 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 8), dans le litige l'opposant :

1°/ à la société Alians,...

SOC.

ZB1



COUR DE CASSATION
______________________


Arrêt du 25 juin 2025




Cassation partielle


M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président



Arrêt n° 689 FS-B

Pourvoi n° Q 23-17.999


R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 25 JUIN 2025

Mme [T] [Y], domiciliée [Adresse 1], a formé le pourvoi n° Q 23-17.999 contre l'arrêt rendu le 30 mars 2023 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 8), dans le litige l'opposant :

1°/ à la société Alians, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 5],

2°/ à la société Generali, société anonyme,

3°/ à la société Generali vie, société anonyme, venant aux droits de la société Generali France assurances-vie,

toutes deux ayant leur siège [Adresse 3],

4°/ à la société Malakoff Humanis prévoyance, dont le siège est [Adresse 4], anciennement Malakoff Médéric prévoyance,

5°/ à la société Euroditas, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 2],

6°/ à la société Consorex, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 8],

7°/ à la caisse primaire d'assurance maladie du Morbihan, dont le siège est [Adresse 7],

8°/ à la caisse primaire d'assurance maladie de Seine-et-Marne, dont le siège est [Adresse 6],

défenderesses à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Chiron, conseiller référendaire, les observations de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de Mme [Y], de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Alians, et l'avis de M. Charbonnier, avocat général, après débats en l'audience publique du 26 mai 2025 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Chiron, conseiller référendaire rapporteur, Mme Capitaine, conseiller doyen, Mmes Degouys, Lacquemant, Nirdé-Dorail, Palle, Ménard, Filliol, conseillers, Mmes Valéry, Pecqueur, M. Leperchey, conseillers référendaires, M. Charbonnier, avocat général, et Mme Piquot, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Désistement partiel

1. Il est donné acte à Mme [Y] du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre les sociétés Malakoff Humanis prévoyance anciennement Malakoff Médéric prévoyance, Euroditas, Consorex, la caisse primaire d'assurance maladie du Morbihan, la caisse primaire d'assurance maladie de Seine-et-Marne et les sociétés Generali et Generali vie venant aux droits de la société Generali France assurances-vie.

Faits et procédure

2. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 30 mars 2023), Mme [Y], engagée en qualité de gestionnaire sinistre classe C le 16 décembre 2013 par la société Alians, a été placée en arrêt de travail pour maladie du 13 janvier 2014 au 17 août 2014.

3. Le 22 juillet 2014, l'employeur lui a notifié la fin de sa période d'essai à effet au 18 août 2014.

4. La salariée a saisi la juridiction prud'homale de demandes au titre de la nullité de la rupture de son contrat de travail et de ses droits à la prévoyance.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

5. La salariée fait grief à l'arrêt de condamner l'employeur à lui payer une certaine somme à titre de dommages-intérêts au titre de la rupture abusive de sa période d'essai, alors :

« 1°/ que la rupture d'une période d'essai fondée sur un motif discriminatoire est nulle ; qu'en retenant, pour condamner la société Alians à verser à Mme [Y] la seule somme de 5 000 euros, à titre de dommages-intérêts, que la rupture de sa période d'essai, intervenue quelques temps après l'annonce de sa grave maladie et, partant, discriminatoire, était fautive, la cour d'appel a violé l'article L. 1132-4 du code du travail ;

2°/ que ce qui est nul est censé n'avoir jamais existé ; qu'en retenant, pour refuser d'appliquer l'indemnité égale au moins aux six derniers mois de salaires, due en cas de nullité de la rupture du contrat, et fixer à la seule somme de 5 000 euros les dommages-intérêts dus à Mme [Y], qu'en application de l'article L. 1231-1 du code du travail, les règles du licenciement n'étaient pas applicables à la période d'essai, quand, en raison de la discrimination subie, la rupture de la période d'essai était nulle et censée n'être jamais intervenue de sorte que Mme [Y] devait être réintégrée ou à défaut, obtenir l'indemnité prévue comme sanction de la discrimination, la cour d'appel a violé l'article L. 1132-4 du code du travail, ensemble l'article L. 1235-3 du même code, dans sa version applicable à la cause ;

3°/ que la sanction d'une discrimination doit être effective, proportionnée et dissuasive ; qu'en retenant que la sanction d'un licenciement discriminatoire, à savoir la réintégration et, à défaut, des dommages-intérêts au moins équivalents à six mois de salaire, ne pouvait être appliquée à la rupture de la période d'essai, ce qui avait pour effet d'assimiler la rupture discriminatoire à une simple rupture abusive, en ne l'assortissant pas d'une sanction plus sévère, la cour d'appel, qui a privé l'interdiction des discriminations d'une sanction effective, proportionnée et dissuasive, a violé les articles L. 1132-1 et L. 1132-4 du code du travail, interprétés à la lumière de la directive n° 2000/78/CE du 27 novembre 2000. »

Réponse de la Cour

6. Selon les articles L. 1132-1 et L. 1132-4 du code du travail, toute rupture du contrat de travail prononcée à l'égard d'un salarié en raison de son état de santé est nulle.

7. Selon l'article L. 1231-1 du même code, les dispositions du titre III du livre II du code du travail relatif à la rupture du contrat de travail à durée indéterminée ne sont pas applicables pendant la période d'essai.

8. Il résulte de ces textes que le salarié dont la rupture de la période d'essai est nulle pour motif discriminatoire ne peut prétendre à l'indemnité prévue en cas de licenciement nul mais à la réparation du préjudice résultant de la nullité de cette rupture.

9. L'article 1er de la directive n° 2000/78/CE du Conseil du 27 novembre 2000 énonce que celle-ci a pour objet d'établir un cadre général pour lutter contre la discrimination fondée sur la religion ou les convictions, l'handicap, l'âge ou l'orientation sexuelle, en ce qui concerne l'emploi et le travail, en vue de mettre en oeuvre, dans les États membres, le principe de l'égalité de traitement et n'est donc pas applicable en cas de discrimination en raison de l'état de santé.

10. La cour d'appel, qui a retenu que la salariée présentait des éléments laissant supposer l'existence d'une discrimination, puis que l'employeur ne démontrait pas que sa décision de rompre la période d'essai était justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination, a exactement retenu que la salariée pouvait prétendre à des dommages-intérêts en réparation du préjudice résultant de cette rupture dont elle a souverainement fixé le montant.

11. Le moyen, inopérant en sa troisième branche, n'est donc pas fondé.

Mais sur le second moyen, pris en sa troisième branche

Enoncé du moyen

12. La salariée fait grief à l'arrêt de condamner l'employeur à lui verser la somme de 3 000 euros de dommages-intérêts au titre des garanties de prévoyance qu'elle n'avait pu percevoir, alors « que le juge doit en toutes circonstances respecter le principe de la contradiction ; qu'en retenant, pour condamner la société Alians à verser à Mme [Y] la somme de 3 000 euros seulement de dommages-intérêts, que son préjudice, né de ce que l'employeur n'avait pas déclaré sa maladie auprès de la société Malakoff Mederic de sorte qu'elle n'avait pu percevoir de complément de rémunération pendant la période d'incapacité temporaire, ne pouvait "s'analyser que comme une perte de chance", sans inviter les parties à s'expliquer sur ce moyen relevé d'office, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 16 du code de procédure civile :

13. Selon ce texte, le juge doit, en toutes circonstances, faire respecter et observer lui-même le principe de la contradiction.

14. Pour limiter à une certaine somme les dommages-intérêts au titre des garanties de prévoyance, l'arrêt retient que le préjudice subi par la salariée résultant de l'absence de déclaration de son arrêt de travail à l'organisme de prévoyance ne peut s'analyser que comme une perte de chance.

15. En statuant ainsi, alors qu'il n'était pas soutenu que le préjudice allégué consistait en une perte de chance, la cour d'appel, qui a relevé d'office le moyen tiré de l'existence d'un tel préjudice sans inviter préalablement les parties à présenter leurs observations, a violé le texte susvisé.

Portée et conséquences de la cassation

16. La cassation du chef de dispositif condamnant l'employeur à payer une somme à la salariée au titre de la perte de chance n'emporte pas celle des chefs de dispositif de l'arrêt le condamnant aux dépens ainsi qu'au paiement d'une somme en application de l'article 700 du code de procédure civile, justifiés par d'autres condamnations prononcées à l'encontre de celui-ci.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société Alians à payer à Mme [Y] la somme de 3 000 euros en indemnisation de sa perte de chance, l'arrêt rendu le 30 mars 2023, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ;

Condamne la société Alians aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Alians et la condamne à payer à Mme [Y] la somme de 3 000 euros ;


Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé publiquement le vingt-cinq juin deux mille vingt-cinq par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale - formation de section
Numéro d'arrêt : 23-17.999
Date de la décision : 25/06/2025
Sens de l'arrêt : Cassation

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris K8


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc. - formation de section, 25 jui. 2025, pourvoi n°23-17.999, Bull. civ.Publié au
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles Publié au

Origine de la décision
Date de l'import : 27/06/2025
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2025:23.17.999
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