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25/06/2025 | FRANCE | N°23-22.430

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale financière et économique - formation de section, 25 juin 2025, 23-22.430


COMM.

MB



COUR DE CASSATION
______________________


Arrêt du 25 juin 2025




Rejet


M. VIGNEAU, président



Arrêt n° 353 FS-B

Pourvoi n° F 23-22.430







R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 25 JUIN 2025

La société Transopco, société par ac

tions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° F 23-22.430 contre l'arrêt rendu le 28 septembre 2023 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 5), dans le litig...

COMM.

MB



COUR DE CASSATION
______________________


Arrêt du 25 juin 2025




Rejet


M. VIGNEAU, président



Arrêt n° 353 FS-B

Pourvoi n° F 23-22.430







R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 25 JUIN 2025

La société Transopco, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° F 23-22.430 contre l'arrêt rendu le 28 septembre 2023 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 5), dans le litige l'opposant à la société Viacab, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Bessaud, conseiller référendaire, les observations de la SARL Delvolvé et Trichet, avocat de la société Transopco, de la SCP Françoise Fabiani - François Pinatel , avocat de la société Viacab, et l'avis de M. Douvreleur, avocat général, après débats en l'audience publique du 13 mai 2025 où étaient présents M. Vigneau, président, Mme Bessaud, conseiller référendaire rapporteur, M. Mollard, conseiller doyen, Mmes Poillot-Peruzzetto, Michel-Amsellem, Sabotier, Tréfigny, conseillers, M. Le Masne de Chermont, Mmes Comte, Bellino, M. Regis, conseillers référendaires, M. Douvreleur, avocat général, et Mme Labat, greffière de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, du président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 28 septembre 2023), la société Viacab, gestionnaire d'une centrale de réservation de taxis en région parisienne, a aussi, de juin 2011 à juin 2017, exploité une activité de voitures de transport avec chauffeur (VTC). Elle proposait la réservation de ses VTC par le biais de sites internet et, à compter du 5 mars 2012, également via une application pour téléphone de dernière génération (smartphone).

2. La société Transopco France (la société Transopco), venant aux droits de la société Transcovo, exploite une plate-forme de mise en relation d'exploitants de VTC avec des clients au moyen d'une application pour smartphone.

3. Soutenant que la société Transopco, en ne respectant pas diverses lois et réglementations en matière de droit des transports et de droit du travail, commettait des actes constitutifs de concurrence déloyale à son égard, la société Viacab l'a assignée aux fins de cessation de ces pratiques et d'indemnisation de son préjudice.

Examen des moyens

Sur le second moyen

4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le premier moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

5. La société Transopco fait grief à l'arrêt de juger qu'elle a agi en qualité d'opérateur de transport et de la condamner à payer à la société Viacab la somme de 75 000 euros en réparation de son préjudice économique au titre de l'activité d'exploitant VTC et celle de 75 000 euros en réparation de son préjudice économique au titre de l'activité de taxi, alors « que la maraude ne se confond pas avec une simple activité de circulation portée à la connaissance de tiers, mais implique une activité de circulation mue par la recherche de clients, de telle sorte que la prohibition de la maraude électronique, faite à toute personne réalisant des prestations de transport routier de personnes à titre onéreux avec des véhicules de moins de dix places ou aux intermédiaires auxquels elles ont recours, consiste dans l'interdiction d'informer leur client de la localisation et de la disponibilité immédiate d'un véhicule, lorsqu'ils lui donnent en outre la possibilité de sélectionner et de réserver le véhicule de son choix parmi ceux qui lui sont présentés ; qu'en se bornant à constater, pour retenir que la société Transopco méconnaissait ces dispositions, qu'antérieurement à la réservation du véhicule par le biais de l'application, le client [était] déjà informé de la localisation de véhicule et de sa disponibilité", sans s'assurer, comme elle y était invitée, que le client disposait bien de la faculté de sélectionner, parmi les véhicules, dont la localisation et la disponibilité lui avaient été communiquées, celui qu'il entendait réserver, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 3120-2, III, du code des transports »

Réponse de la Cour

6. Constitue un acte de concurrence déloyale le non-respect d'une réglementation dans l'exercice d'une activité commerciale, qui induit nécessairement un avantage concurrentiel indu pour son auteur.

7. Il en résulte que le fait pour un concurrent de s'affranchir des obligations imposées par la législation du travail peut être constitutif d'une faute de concurrence déloyale.

8. Il résulte de l'article L. 3120-2, III, 1° du code des transports, qu'il est interdit aux chauffeurs de VTC et aux centrales de réservation auxquelles ils ont recours d'informer un client, avant une réservation préalable, quel que soit le moyen utilisé, à la fois de la localisation et de la disponibilité d'un véhicule quand il est situé sur la voie ouverte à la circulation publique.

9. Lorsque le client est informé, avant réservation, à la fois de la localisation et de la disponibilité de tous les véhicules situés sur la voie ouverte à la circulation publique les plus proches du lieu où il se trouve, ce texte n'exige pas qu'il puisse sélectionner de façon spécifique l'un d'entre eux.

10. Après avoir retenu que la plate-forme Transopco favorisait l'exercice de la maraude physique sur la voie publique par les chauffeurs de VTC en leur préconisant de se connecter à l'application lorsqu'ils se trouvaient « dans [Localité 3] intra-muros », l'arrêt relève que l'article 6.1 du contrat de partenariat conclu entre la société Transopco et le chauffeur partenaire rappelle que « la qualité de service proposée par Transopco France dépend de la disponibilité des chauffeurs, via un temps d'approche calculé à partir de la position du chauffeur le plus proche et présenté aux clients sur l'interface » et retient que la société Transopco indique sur son application les véhicules disponibles en circulation autour du client et le temps d'approche, et ce avant la commande. Il en déduit qu'antérieurement à la réservation du véhicule par le biais de l'application de la société Transopco, le client est déjà informé de la localisation du véhicule et de sa disponibilité.

11. Par ces seuls motifs, la cour d'appel qui n'était pas tenue de procéder à une recherche inopérante, a légalement justifié sa décision.

Sur le premier moyen, pris en ses deuxième à neuvième branches

Enoncé du moyen

12. La société Transopco fait le même grief à l'arrêt, alors :

« 2°/ que l'existence d'une relation de travail ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties ni de la dénomination qu'elles ont donnée à leur convention, mais des conditions de fait dans lesquelles est exercée l'activité des travailleurs ; que le contrat de travail est la convention par laquelle un travailleur s'engage à fournir une prestation de travail à une autre personne sous la subordination juridique de laquelle elle se place, moyennant rémunération ; qu'il en résulte que la caractérisation d'une relation de travail salariée entre une plate-forme de mise en relation par voie électronique et des chauffeurs VTC suppose de caractériser l'obligation pour les chauffeurs de se connecter à l'application de mise en relation ou, à tout le moins, d'accepter les courses proposées par la plate-forme et, lorsqu'ils y sont connectés, d'exécuter ses courses conformément aux directives données par la plate-forme ; qu'en l'espèce, la société Transopco soutenait que les chauffeurs ne s'acquittent d'aucun frais d'inscription ou d'une redevance qui les contraindrait à se connecter et à réaliser un certain nombre de courses, qu'ils sont libres de se connecter à l'application aux heures ou pour la durée de leur choix, de se connecter sur d'autres plate-formes et d'effectuer des courses pour une clientèle personnelle, de refuser les courses proposées même lorsqu'ils sont connectés à l'application et de suivre l'itinéraire de leur choix pour réaliser les courses acceptées ; qu'elle justifiait qu'en pratique le taux d'acceptation des courses proposées était d'environ 50 % et que les chauffeurs VTC se connectaient en moyenne 8,5 heures par semaine à l'application ; que la cour d'appel a elle-même relevé que l'article 6-1 du contrat de partenariat prévoit que le chauffeur est libre de se connecter ou pas sur l'application, en indiquant sa disponibilité, et d'accepter ou non la course, qu'il se voit proposer un itinéraire conseillé de transport en ayant la liberté de l'organiser comme il le souhaite" ; qu'en retenant néanmoins que la société Transopco organise un service de transport de personnes et agit comme un opérateur de transport en employant des chauffeurs", sans faire ressortir de ses constatations que les chauffeurs VTC seraient tenus de fournir une prestation de travail au service de la société Transopco, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1221-1 et L. 8221-6 du code du travail ;

3°/ que le lien de subordination juridique se caractérise par l'exécution d'un travail sous l'autorité de l'employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné ; que le travail au sein d'un service organisé peut constituer un indice du lien de subordination lorsque l'employeur détermine unilatéralement les conditions d'exécution du travail ; que la fixation, par une plate-forme de mobilité, du prix et des principales caractéristiques, de qualité notamment, des prestations de service offertes aux clients par les chauffeurs VTC partenaires est insuffisant à caractériser le travail dans un service organisé et a fortiori un lien de subordination juridique ; qu'en relevant principalement, pour retenir l'existence d'un lien de subordination juridique entre la société Transopco et les chauffeurs VTC, que la société Transopco fixe unilatéralement le tarif de la prestation de transport et pratique des offres promotionnelles qui s'imposent aux chauffeurs, que le contrat de partenariat prévoit que le chauffeur doit respecter une procédure stricte et détaillée composée de directives depuis la connexion jusqu'à la fin de la prestation, s'analysant en un ordre de course, prévoyant notamment qu'il doit ‘se rendre immédiatement, sans détour, et par le plus court chemin possible de son choix vers le lieu de prise en charge mentionné' et qu'ainsi il ne peut décider librement des conditions de réalisation de la prestation", et que la charte qualité constituant l'annexe cinq du contrat de partenariat stipule que le partenaire doit fournir un service conforme à l'image de Transopco France et impose notamment de fournir une bouteille d'eau, n'interagir que si le client le souhaite, ouvrir les portes à l'accueil et à la dépose", la cour d'appel, qui a simplement constaté la détermination unilatérale par la plate-forme du prix et des caractéristiques des prestations offertes aux clients, compte tenu du positionnement haut de gamme des services offerts aux clients, s'est fondée sur des motifs insuffisants à caractériser un lien de subordination juridique, privant sa décision de base légale au regard des articles L. 1221-1 et L. 8221-6 du code du travail ;

4°/ que la géolocalisation du chauffeur est une condition même du bon fonctionnement de la plate-forme, dès lors qu'elle permet d'assurer une répartition optimisée et efficace des courses ; que le recours à un système de géolocalisation ne peut en conséquence participer à caractériser un lien de subordination qu'à la condition qu'il soit utilisé pour contrôler l'exécution, par le chauffeur, de directives données par la plate-forme relatives à l'exécution des courses ; qu'en se bornant à affirmer que la société Transopco contrôlait, notamment par la géolocalisation, le respect des directives données, sans relever l'existence d'une directive, ni la manifestation d'aucun contrôle de ces directives opéré via le système de géolocalisation, la cour d'appel s'est fondée sur un motif insuffisant à caractériser un lien de subordination juridique, privant encore sa décision de base légale au regard des articles L. 1221-1 et L. 8221-6 du code du travail ;

5°/ qu'en se bornant à juger que la société Transopco contrôla[i]t, notamment par la géolocalisation, le respect des directives données", sans indiquer précisément, outre la géolocalisation, les autres moyens par lequel la société Transopco exerçait un contrôle sur l'activité des chauffeurs partenaires, la cour d'appel, qui n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle, a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1221-1 et L. 8221-6 du code du travail ;

6°/ que l'article 3.1.3. du contrat de partenariat reconnaissait au chauffeur la possibilité de réaliser des prestations de transport par l'intermédiaire d'une société concurrente et/ou à son propre compte, à son seul profit et sous sa seule responsabilité, étant précisé que la clientèle personnelle du partenaire demeure sa propriété" ; que la société Transopco soutenait en outre que la plupart des chauffeurs utilisent en pratique plusieurs applications de réservation de courses en même temps ; qu'en se bornant à relever que l'article 13 du contrat de partenariat interdit aux chauffeurs de détourner les clients obtenus par l'application, sans s'expliquer sur la faculté reconnue aux chauffeurs, en revanche, d'utiliser d'autres applications et d'effectuer des courses pour leurs propres clients, la cour d'appel, qui n'a pas caractérisé l'impossibilité, pour les chauffeurs, de se constituer une clientèle personnelle, a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1221-1 et L. 8221-6 du code du travail ;

7°/ que le juge ne peut dénaturer, même par omission, l'écrit qui lui est soumis ; qu'en l'espèce, le contrat de partenariat conclu par la société Transopco avec chaque chauffeur prévoyait la possibilité pour celui-ci de réaliser des prestations de transport par l'intermédiaire d'une société concurrente et/ou à son propre compte, à son seul profit et sous sa seule responsabilité, étant précisé que la clientèle personnelle du partenaire demeure sa propriété" ; qu'en jugeant toutefois qu'il résultait des articles 11.1 et 13 de ce contrat, relatifs au démarchage des seuls clients adressés au chauffeur par le biais de l'application, que le chauffeur a l'interdiction de développer une clientèle personnelle", la cour d'appel a dénaturé par omission ce contrat, dont l'article 3.1.3 offrait expressément la possibilité aux chauffeurs de développer une clientèle personnelle, en violation du principe susvisé ;

8°/ que, s'agissant d'identifier une relation de travail salariée, les conditions effectives d'exécution de la prestation de travail prévalent sur les stipulations contractuelles contraires ; qu'en l'espèce, la société Transopco soutenait que, si le contrat de partenariat comporte un engagement contractuel habituel entre partenaires commerciaux, d'interdiction de détournement de la clientèle, cette stipulation n'était pas appliquée de manière effective ; qu'elle justifiait ainsi avoir répondu à un chauffeur VTC, qui lui demandait s'il pouvait remettre sa carte de visite aux clients, vous êtes autorisés à le faire, si le client accepte et n'y voit aucun inconvénient" ; qu'en se bornant à relever, pour affirmer que le chauffeur a l'interdiction de développer une clientèle personnelle", que le contrat de partenariat prévoit, en son article 13 que le chauffeur s'engage à s'abstenir d'entrer en relation, démarcher, solliciter, détourner ou tenter de détourner (…) les clients obtenus par l'intermédiaire de l'application" et que le contrat peut être résilié de manière anticipée en cas de tentative de démarchage active ou passive, sans s'expliquer sur la faculté reconnue, dans les faits, aux chauffeurs, de distribuer leurs cartes de visites professionnelles aux clients obtenus par le biais de l'application, ni constater la mise en œuvre d'une sanction contre un chauffeur à raison de la violation de cette clause contractuelle, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1221-1 et L. 8221-6 du code du travail ;

9°/ que la possibilité pour un contractant de rompre unilatéralement une relation contractuelle en cas de manquement grave de son cocontractant aux obligations du contrat ne constitue pas l'exercice d'un pouvoir de sanction caractéristique du contrat de travail ; qu'en vertu de l'article 11 du contrat de partenariat, la société Transopco ne peut mettre fin au contrat de partenariat, de manière anticipée, qu' en cas de difficultés graves et récurrentes, quant à la qualité des prestations de transport fournies par le chauffeur, ayant conduit à une appréciation moyenne par les clients inférieure à 4 sur 5 sur les deux derniers mois" ; qu'en se fondant sur cette stipulation pour retenir que la société Transopco avait le pouvoir de sanctionner l'inobservation des directives adressées aux chauffeurs sur les modalités d'exécution du travail, cependant que cette clause reconnaît uniquement à la plate-forme une faculté de résiliation unilatérale du contrat en cas de grave manquement de son cocontractant à ses obligations, la cour d'appel s'est fondée sur un motif insuffisant à caractériser un lien de subordination juridique, privant sa décision de base légale au recours des articles L. 1221-2 et L. 8221-6 du code du travail. »

Réponse de la Cour

13. Il résulte de l'article L. 8221-6 du code du travail que les personnes physiques, dans l'exécution de l'activité donnant lieu à immatriculation aux registres que ce texte énumère, sont présumées ne pas être liées avec le donneur d'ordre par un contrat de travail. L'existence d'un contrat de travail peut toutefois être établie lorsque ces personnes fournissent des prestations dans des conditions qui les placent dans un lien de subordination juridique permanente à l'égard du donneur d'ordre.

14. Le lien de subordination est caractérisé par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné. Peut constituer un indice de subordination le travail au sein d'un service organisé lorsque l'employeur en détermine unilatéralement les conditions d'exécution.

15. Ayant analysé le contrat de partenariat proposé par la société Transopco aux chauffeurs souhaitant recourir à son application, l'arrêt retient que si les chauffeurs n'ont pas d'obligation de connexion, l'application développée par cette société prévoit un système de bonus conditionné à un nombre de courses réalisées selon des créneaux horaires, fixe unilatéralement le tarif de la prestation de transport, pratique des offres promotionnelles qui s'imposent aux chauffeurs et facture le prix de la course.

16. Il ajoute qu'une fois connectés, les chauffeurs doivent être immédiatement disponibles et respecter une procédure stricte et détaillée, composée de directives depuis la connexion jusqu'à la fin de la prestation. Il relève que la géolocalisation permet à l'application de leur adresser un ordre de course, leur indiquant de « se rendre immédiatement, sans détour, et par le plus court chemin possible de son choix vers le lieu de prise en charge mentionné », de sorte que le chauffeur ne peut décider librement des conditions de réalisation de la prestation, la société Transopco contrôlant, notamment par la géolocalisation, le respect des directives données et pouvant appliquer des pénalités en cas de retard.

17. L'arrêt estime que la faculté de résiliation anticipée unilatérale prévue au contrat au bénéfice de la société Transopco, en ce qu'elle lui permet de sanctionner le non-respect des modalités d'exécution du travail définies par la charte qualité annexée au contrat ainsi que l'absence de conformité à l'image de marque de la société Transopco, ayant conduit à une appréciation moyenne par le client inférieure à quatre sur cinq sur les deux derniers mois, caractérise le pouvoir de sanction de la plate-forme sur le chauffeur.

18. Il retient enfin, par une interprétation souveraine du contrat de partenariat et de ses différentes clauses, exclusive de toute dénaturation, que l'interdiction d'entrer en relation, démarcher, solliciter, détourner ou tenter de détourner, ou même de servir à des fins personnelles ou au profit de tiers les clients obtenus par l'intermédiaire de l'application et de la possibilité pour la société Transopco de résilier le contrat de manière anticipée en cas de « tentative de démarchage active ou passive des clients obtenus par le biais de l'application » caractérise l'interdiction faite aux chauffeurs de développer une clientèle personnelle.

19. En l'état de ces constatations et appréciations, faisant ressortir les contraintes collectives imposées à la communauté de chauffeurs, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de suivre la société Transopco dans le détail de son argumentation ni de s'expliquer sur les éléments de preuve qu'elle décidait d'écarter, a pu déduire des termes du contrat de partenariat et des conditions effectives dans lesquelles les chauffeurs exercent leur activité via l'application, l'existence d'un pouvoir de direction, de contrôle et de sanction de la société Transopco à l'égard des chauffeurs travaillant pour elle caractérisant l'existence d'un lien de subordination, de nature à renverser la présomption d'indépendance édictée à l'article L. 8226-1 du code du travail.

20. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Transopco aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Transopco et la condamne à payer à la société Viacab la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé publiquement le vingt-cinq juin deux mille vingt-cinq par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale financière et économique - formation de section
Numéro d'arrêt : 23-22.430
Date de la décision : 25/06/2025
Sens de l'arrêt : Rejet

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris I5


Publications
Proposition de citation : Cass. Com. financière et économique - formation de section, 25 jui. 2025, pourvoi n°23-22.430, Bull. civ.Publié au
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles Publié au

Origine de la décision
Date de l'import : 27/06/2025
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2025:23.22.430
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