TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]
[1] C.C.C.F.E. + C.C.C.
délivrées le :
à Me BILLARD-SEROR (B1157)
C.C.C.
délivrée le :
à Me CREHANGE (C1312)
■
18° chambre
2ème section
N° RG 22/12105
N° Portalis 352J-W-B7G-CYAT3
N° MINUTE : 2
Assignation du :
06 Octobre 2022
ORDONNANCE DU JUGE DE LA MISE EN ÉTAT
rendue le 24 Juillet 2024
DEMANDERESSE
S.A.R.L. COMPAGNIE FRANÇAISE D’INVESTISSEMENT CFI (RCS de Paris 330 433 426)
[Adresse 1]
[Localité 4]
représentée par Maître Laurent CREHANGE de la S.E.L.A.S. CREHANGE & KLEIN ASSOCIÉS, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, vestiaire #C1312
DÉFENDEURS
Monsieur [B] [O]
[Adresse 7]
[Localité 3]
Madame [E] [G] épouse [O]
[Adresse 6]
[Localité 3]
représentés par Maître Brigitte BILLARD-SEROR, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, vestiaire #B1157
MAGISTRAT DE LA MISE EN ÉTAT
Cédric KOSSO-VANLATHEM, Juge
assisté de Henriette DURO, Greffier
DÉBATS
À l'audience du 17 Mai 2024, avis a été donné aux avocats que l'ordonnance serait rendue par mise à disposition au greffe le 24 Juillet 2024.
ORDONNANCE
Rendue publiquement
Contradictoire
En premier ressort
EXPOSÉ DE L'INCIDENT
Par acte sous signature privée en date du 1er juillet 2016, la S.A.R.L. COMPAGNIE FRANÇAISE D'INVESTISSEMENT CFI a donné à bail commercial renouvelé à Monsieur [B] [O] et à sa conjointe Madame [E] [G] épouse [O] des locaux composés d'une salle de café, d'une cuisine et de sanitaires en rez-de-chaussée, d'un appartement en premier étage, et d'une réserve avec chambre froide en sous-sol, constituant les lots n°1 et n°3 d'un immeuble soumis au statut de la copropriété sis [Adresse 2] et [Adresse 8] 4ème cadastré section AN numéro [Cadastre 5] pour une durée de neuf années à effet rétroactif au 1er avril 2016 afin qu'y soit exercée une activité de café, de brasserie, de tabac, de loterie et jeux agréés, de bimbeloterie, ainsi que de vente de tickets RATP et de tous articles vendus dans les bureaux de tabac à titre accessoire, moyennant le versement d'un loyer annuel initial d'un montant de 64.000 euros hors taxes et hors charges payable trimestriellement à terme échu.
Par lettre recommandée en date du 24 mai 2019 réceptionnée le 27 mai 2019, la S.A.R.L. COMPAGNIE FRANÇAISE D'INVESTISSEMENT CFI a sollicité auprès de Monsieur [B] [O] et de Madame [E] [G] épouse [O] le paiement de la somme de 28.426,94 euros correspondant au coût des travaux de ravalement de la façade de l'immeuble réalisés au cours de l'année 2014.
En l'absence de règlement, la S.A.R.L. COMPAGNIE FRANÇAISE D'INVESTISSEMENT CFI a, par lettre recommandée en date du 18 février 2021, mis en demeure Monsieur [B] [O] et Madame [E] [G] épouse [O] de procéder à ce règlement.
Par lettre recommandée en date du 17 mai 2021 réceptionnée le 19 mai 2021, la S.A.R.L. COMPAGNIE FRANÇAISE D'INVESTISSEMENT CFI a proposé à Monsieur [B] [O] et à Madame [E] [G] épouse [O] un échéancier de dix-huit mois consistant en un versement mensuel d'un montant de 1.579,27 euros entre le 1er juin 2021 et le 1er novembre 2022.
Par courriel en date du 12 octobre 2021, Madame [E] [G] épouse [O] a indiqué à la S.A.R.L. COMPAGNIE FRANÇAISE D'INVESTISSEMENT CFI qu'elle et son époux se trouvaient dans l'incapacité de respecter l'échéancier proposé, soulignant qu'aucun des copropriétaires n'avait réglé le coût des travaux de ravalement dans la mesure où ces derniers avaient été financés par la redevance perçue en contrepartie de l'installation d'une antenne de téléphonie sur la toiture de l'immeuble.
Après plusieurs courriels échangés par les parties entre le 12 octobre et le 30 novembre 2021, la S.A.R.L. COMPAGNIE FRANÇAISE D'INVESTISSEMENT CFI a, par actes d'huissier en date des 4 mars et 17 mai 2022, fait signifier respectivement à Monsieur [B] [O], puis à celui-ci et à Madame [E] [G] épouse [O], deux commandements de payer visant la clause résolutoire insérée au contrat de bail commercial portant sur la somme principale de 28.426,94 euros, outre le coût de l'acte d'un montant de 234,93 euros, et en l'absence de règlement les a, par exploits d'huissier en date du 6 octobre 2022, fait assigner devant le tribunal judiciaire de Paris en constatation de l'acquisition de la clause résolutoire, en expulsion sous astreinte, en paiement du coût des travaux de ravalement de façade et en fixation d'une indemnité d'occupation jusqu'à la libération effective des locaux.
Aux termes de leurs dernières conclusions d'incident remises au greffe et notifiées par RPVA le 13 mai 2024, Monsieur [B] [O] et Madame [E] [G] épouse [O] demandent au juge de la mise en état, sur le fondement des articles 15, 30, 31, 32, 122, 132 et 788 du code de procédure civile, et de l'article 1379 du code civil, de :
– faire injonction à la S.A.R.L. COMPAGNIE FRANÇAISE D'INVESTISSEMENT CFI de communiquer l'exemplaire original de l'acte de renouvellement du contrat de bail commercial en date du 1er juillet 2016, ainsi que l'exemplaire original de l'inventaire de répartition des charges correspondant à sa pièce n°7, et ce sous astreinte de 300 euros par jour de retard à compter de l'ordonnance à intervenir ;
– dans l'hypothèse où la S.A.R.L. COMPAGNIE FRANÇAISE D'INVESTISSEMENT CFI devrait se soustraire à cette communication, écarter des débats sa pièce n°7 ;
– condamner la S.A.R.L. COMPAGNIE FRANÇAISE D'INVESTISSEMENT CFI à leur payer la somme de 3.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
– condamner la S.A.R.L. COMPAGNIE FRANÇAISE D'INVESTISSEMENT CFI aux dépens.
À l'appui de ses prétentions, Madame [E] [G] épouse [O] s'oppose à la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité à agir soulevée à son encontre, faisant remarquer que d'une part, c'est la S.A.R.L. COMPAGNIE FRANÇAISE D'INVESTISSEMENT CFI elle-même qui a fait le choix de l'assigner, et qu'en tout état de cause, elle est bien signataire, conjointement avec son époux, tant du contrat de bail commercial initial en date du 3 octobre 1997 que du dernier acte de renouvellement en date du 1er juillet 2016, de sorte qu'elle est bien recevable en sa demande de communication de pièce ainsi qu'en ses moyens de défense.
Monsieur [B] [O] et Madame [E] [G] épouse [O] font valoir que la pièce adverse n°7 consistant en l'acte de renouvellement du contrat de bail commercial en date du 1er juillet 2016, auquel est jointe une annexe d'une page intitulée « Inventaire des charges, impôts, taxes et redevances incombant au preneur et au bailleur (Article L. 145-40-2 du Code de commerce) », ne correspond pas à l'exemplaire en leur possession, lequel ne comporte pas une telle annexe, de sorte que l'authenticité de celle-ci se révèle douteuse, ce qui justifie leur demande de production de pièce en original.
Aux termes de ses dernières conclusions d'incident remises au greffe et notifiées par RPVA le 18 janvier 2024, la S.A.R.L. COMPAGNIE FRANÇAISE D'INVESTISSEMENT CFI sollicite du juge de la mise en état, sur le fondement des articles 31 et 32 du code de procédure civile, et de l'article 1379 du code civil, de :
– déclarer Madame [E] [G] épouse [O] irrecevable en ses demandes ;
– débouter Monsieur [B] [O] et Madame [E] [G] épouse [O] de l'ensemble de leurs demandes ;
– condamner in solidum Monsieur [B] [O] et Madame [E] [G] épouse [O] à lui payer la somme de 2.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
– réserver les dépens.
Au soutien de ses demandes, la S.A.R.L. COMPAGNIE FRANÇAISE D'INVESTISSEMENT CFI soulève une fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité à agir de Madame [E] [G] épouse [O] à son encontre, soulignant que par acte sous signature privée en date du 6 juillet 2018, les parties ont signé un avenant n°1 dont il résulte que cette dernière n'a que la qualité de conjointe collaboratrice de son époux, sans être partie au contrat de bail commercial, si bien que les prétentions de celle-ci sont irrecevables.
Elle s'oppose à la demande de communication de pièce formée par les défendeurs, précisant que la pièce n°5 qu'elle produit aux débats est parfaitement fiable, et comporte en annexe un inventaire des charges, impôts, taxes et redevances dûment paraphé par chacune des parties, de sorte que la production de l'exemplaire original de l'acte de renouvellement du contrat de bail commercial ne présenterait aucun intérêt pour la solution du présent litige.
L'incident a été évoqué à l'audience du 17 mai 2024, et la décision a été mise en délibéré au 24 juillet 2024, les parties en ayant été avisées.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité à agir
Aux termes des dispositions des premier, huitième et onzième alinéas de l'article 789 du code de procédure civile, lorsque la demande est présentée postérieurement à sa désignation, le juge de la mise en état est, jusqu'à son dessaisissement, seul compétent, à l'exclusion de toute autre formation du tribunal, pour : 6°) statuer sur les fins de non-recevoir. Les parties ne sont plus recevables à soulever ces fins de non-recevoir au cours de la même instance à moins qu'elles ne surviennent ou soient révélées postérieurement au dessaisissement du juge de la mise en état.
En outre, en application des dispositions de l'article 122 du même code, constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée.
En vertu des dispositions de l'article 30 dudit code, l'action est le droit, pour l'auteur d'une prétention, d'être entendu sur le fond de celle-ci afin que le juge la dise bien ou mal fondée. Pour l'adversaire, l'action est le droit de discuter le bien-fondé de cette prétention.
Selon les dispositions de l'article 31 de ce code, l'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d'agir aux seules personnes qu'elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé.
D'après les dispositions de l'article 32 du code susvisé, est irrecevable toute prétention émise par ou contre une personne dépourvue du droit d'agir.
Enfin, conformément aux dispositions de l'article 1165 du code civil dans sa rédaction applicable à la date de conclusion du dernier acte de renouvellement du contrat de bail commercial litigieux, c'est-à-dire dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'article 2 de l'ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations entrée en vigueur le 1er octobre 2016, les conventions n'ont d'effet qu'entre les parties contractantes ; elles ne nuisent point au tiers, et elles ne lui profitent que dans le cas prévu par l'article 1121.
En l'espèce, il ressort des éléments produits aux débats : que par acte sous signature privée en date du 3 octobre 1997, un contrat de bail commercial portant sur les locaux en cause a été conclu entre Madame [A] [M] épouse [V] en qualité de bailleresse d'une part, et « Monsieur [B], [Y] [O] et Madame [L], [R], [K] [G], son épouse [...] Ci-après dénommés "LE PRENEUR", D'AUTRE PART », dont le préambule rappelle que « 2. Suivant acte reçu par Maître [C] [I], Notaire Associé à [Localité 9], le 1er Juin 1987, Monsieur et Madame [T], sus-nommés, ONT VENDU à Monsieur et Madame [O] soussignés, le fonds de commerce de MARCHAND DE VINS - LIQUEURS - BUREAU DE TABAC, qu'ils possédaient et exploitaient à [Adresse 8] et [Adresse 2] », et que « NOUVEAU BAIL COMMERCIAL : Madame [V] FAIT BAIL par les présentes ET DONNE À LOYER, À Monsieur et Madame [O], preneurs conjoints et solidaires qui acceptent pour une durée de NEUF ANNÉES entières et consécutives qui commenceront à courir à compter du premier octobre mil neuf cent quatre-vingt-dix-sept [...] les lieux ci-après désignés » (pièce n°1 en demande, pages 1, 2 et 3) ; que par acte sous signature privée en date du 15 janvier 2010, le contrat de bail commercial a été renouvelé pour une nouvelle durée de neuf années à effet rétroactif au 1er avril 2007 au profit de « 1/ Monsieur [B] [Y] [O] [...] Et [...] 2/ Madame [E] [G] épouse [O] [...] Ci-après désignés par les termes "LE PRENEUR" » (pièce n°4 en demande, page 1) ; et que par acte sous signature privée en date du 1er juillet 2016, le contrat de bail commercial a été renouvelé pour une nouvelle durée de neuf années à effet rétroactif au 1er avril 2016 au profit de « Monsieur [B] [Y] [O] et Madame [E], [R], [K] [G] épouse [O] [...] Ci-après désignés par les termes "LE PRENEUR" » (pièce n°5 en demande, page 1) ; de sorte qu'il est établi que Madame [E] [G] épouse [O] a bien la qualité de preneuse.
Si la demanderesse communique un avenant n°1 en date du 6 juillet 2018 relatif aux modalités d'un éventuel changement d'activité dans l'hypothèse d'une éventuelle cession du droit au bail, lequel mentionne cette fois-ci « 1/ Monsieur [B] [Y] [O] [...] en tant que propriétaire du fonds de commerce [...] Ci-après désignés par les termes "LE PRENEUR", En présence de : 2/ Madame [E], [R], [K] [G] épouse [O] [...] en tant que Conjoint-Collaborateur » (pièce n°17 en demande), force est toutefois de constater que ce document n'est pas susceptible de remettre en cause la qualité de preneuse de Madame [E] [G] épouse [O], dès lors que la S.A.R.L. COMPAGNIE FRANÇAISE D'INVESTISSEMENT CFI n'en a, ultérieurement, tiré aucune conséquence.
En effet, il y a lieu de relever que postérieurement à la conclusion de cet avenant, la bailleresse : a fait signifier un commandement de payer visant la clause résolutoire insérée au contrat de bail commercial en date du 17 mai 2022 à chacun des deux défendeurs (pièce n°14 en demande) ; a délibérément fait le choix d'assigner les deux défendeurs ; et sollicite toujours, dans ses dernières conclusions au fond remises au greffe et notifiées par RPVA le 27 juillet 2023, notamment la condamnation in solidum de Monsieur [B] [O] et de Madame [E] [G] épouse [O] à lui payer la somme de 28.426,94 euros ainsi qu'une indemnité d'occupation.
En tout état de cause, si la demanderesse estimait réellement que Madame [E] [G] épouse [O] est dépourvue de la qualité de preneuse à bail, il lui appartenait, soit de ne pas l'assigner, soit de se désister ultérieurement de ses demandes en paiement formées à son encontre, ce dont elle s'est abstenue, de sorte qu'en sa qualité de partie au litige, la co-défenderesse demeure recevable à soulever tout moyen de défense pour contrer les prétentions formées à son encontre.
Il s'évince de l'ensemble de ces éléments que la demande de communication de pièce formée par Madame [E] [G] épouse [O] est recevable.
En conséquence, il convient de débouter la S.A.R.L. COMPAGNIE FRANÇAISE D'INVESTISSEMENT CFI de sa fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité à agir et à défendre de Madame [E] [G] épouse [O], et de déclarer cette dernière recevable en sa demande de communication de pièce ainsi qu'en l'intégralité de ses moyens de défense et demandes reconventionnelles formées devant le tribunal statuant au fond.
Sur la demande de communication de pièce
Aux termes des dispositions de l'article 788 du code de procédure civile, le juge de la mise en état exerce tous les pouvoirs nécessaires à la communication, à l'obtention et à la production des pièces.
En outre, en application des dispositions de l'article 11 du même code, les parties sont tenues d'apporter leur concours aux mesures d'instruction sauf au juge à tirer toute conséquence d'une abstention ou d'un refus. Si une partie détient un élément de preuve, le juge peut, à la requête de l'autre partie, lui enjoindre de le produire, au besoin à peine d'astreinte. Il peut, à la requête de l'une des parties, demander ou ordonner, au besoin sous la même peine, la production de tous documents détenus par des tiers s'il n'existe pas d'empêchement légitime.
En vertu des dispositions de l'article 138 dudit code, si, dans le cours d'une instance, une partie entend faire état d'un acte authentique ou sous seing privé auquel elle n'a pas été partie ou d'une pièce détenue par un tiers, elle peut demander au juge saisi de l'affaire d'ordonner la délivrance d'une expédition ou la production de l'acte ou de la pièce.
Selon les dispositions de l'article 139 de ce code, la demande est faite sans forme. Le juge, s'il estime cette demande fondée, ordonne la délivrance ou la production de l'acte ou de la pièce, en original, en copie ou en extrait selon le cas, dans les conditions et sous les garanties qu'il fixe, au besoin à peine d'astreinte.
D'après les dispositions de l'article 142 du code susvisé, les demandes de production des éléments de preuve détenus par les parties sont faites, et leur production a lieu, conformément aux dispositions des articles 138 et 139.
Les trois premiers alinéas de l'article 1325 ancien du code civil disposent quant à eux que les actes sous seing privé qui contiennent des conventions synallagmatiques ne sont valables qu'autant qu'ils ont été faits en autant d'originaux qu'il y a de parties ayant un intérêt distinct. Il suffit d'un original pour toutes les personnes ayant le même intérêt. Chaque original doit contenir la mention du nombre des originaux qui en ont été faits.
Enfin, conformément aux dispositions de l'article 1334 ancien du même code, les copies, lorsque le titre original subsiste, ne font foi que de ce qui est contenu au titre, dont la représentation peut toujours être exigée.
En l'espèce, il y a lieu de relever que la S.A.R.L. COMPAGNIE FRANÇAISE D'INVESTISSEMENT CFI produit aux débats la photocopie en noir et blanc d'un acte de renouvellement du contrat de bail commercial conclu avec Monsieur [B] [O] et Madame [E] [G] épouse [O] en date du 1er juillet 2016 établi sur cinq pages, auquel est jointe une annexe d'une page paraphée intitulée « Inventaire des charges, impôts, taxes et redevances incombant au preneur et au bailleur (Article L. 145-40-2 du Code de commerce) » prévoyant notamment : « I/ CHARGES INCOMBANT AU PRENEUR : [...] 1.3. Les Travaux d'entretien et de conservation de l'immeuble : Tous les travaux d'entretien et de réparation et ce inclus les travaux de ravalement ou de réfection des parties communes (façades, courettes de l'immeuble) [...] à la seule exception des dépenses relevant strictement de l'article 606 du Code civil » (pièce anciennement n°7 désormais n°5 en demande).
Cependant, comme le soulignent à juste titre les défendeurs, cet acte de renouvellement mentionne au titre des « Pièces annexées : - Bail du 30 octobre 1997 ; - Renouvellement du bail du 15 janvier 2010 ; - PV d'AGO 2015, 2014, 2013 ; - Décompte de charges 2015 ; - diagnostic technique amiante, diagnostic de performance énergétique, état des risques naturels, miniers et technologiques, état d'urbanisme » (pièce anciennement n°7 désormais n°5 en demande, page 5).
Force est de constater que d'une part, aucune des pièces listées ci-dessus n'est jointe à l'exemplaire communiqué par la bailleresse, et que d'autre part, la seule annexe jointe intitulée « Inventaire des charges, impôts, taxes et redevances incombant au preneur et au bailleur (Article L. 145-40-2 du Code de commerce) » ne fait pas partie des pièces listées.
D'ailleurs, les preneurs versent aux débats, pour leur part, la photocopie en couleurs de ce même acte de renouvellement du contrat de bail commercial en date du 1er juillet 2016 établi sur cinq pages, auquel sont joints : la première page des procès-verbaux de l'assemblée générale ordinaire des copropriétaires de l'immeuble en date du 11 mars 2016, du 6 mars 2015 et du 9 février 2014 ; un décompte de charges en date du 4 avril 2016 de deux pages émis par la S.A.S. SULLY GESTION en sa qualité de syndic de copropriété relatif à la période comprise entre le 1er janvier et le 31 décembre 2015 ; un plan des risques naturels d'une page ; une demande de renseignements d'urbanisme déposée auprès de la mairie de Paris en date du 21 juin 2016 de trois pages ; un état des risques naturels, miniers et technologiques en date du 22 juin 2016 d'une page ; un rapport intitulé « DTA DOSSIER TECHNIQUE AMIANTE » en date du 22 juin 2016 de quinze pages rédigé par la S.A.S. ALPHA AUDIT ANALYSES ; ainsi qu'un diagnostic de performance énergétique en date du 22 juin 2016 d'une page établi par cette dernière société (pièce n°1 en défense).
Force est de constater que ces annexes correspondent à celles listées dans l'acte de renouvellement, et que l'exemplaire communiqué par les défendeurs ne contient aucun « Inventaire des charges, impôts, taxes et redevances incombant au preneur et au bailleur (Article L. 145-40-2 du Code de commerce) » (pièce n°1 en défense).
Il existe donc une discordance entre l'exemplaire produit par la bailleresse et celui communiqué par les locataires.
Néanmoins, il y a lieu de relever que la communication de l'exemplaire original détenu par la S.A.R.L. COMPAGNIE FRANÇAISE D'INVESTISSEMENT CFI, si celui-ci devait comporter l'annexe litigieuse, ne serait pas susceptible de mettre fin à cette discordance dès lors que l'exemplaire original détenu par Monsieur [B] [O] et par Madame [E] [G] épouse [O] ne contient pas une telle annexe.
De plus, il convient de rappeler qu'aux termes des dispositions de l'article 1161 ancien du code civil, toutes les clauses des conventions s'interprètent les unes par les autres, en donnant à chacune le sens qui résulte de l'acte entier.
En outre, en application des dispositions de l'article 1162 ancien du même code, dans le doute, la convention s'interprète contre celui qui a stipulé et en faveur de celui qui a contracté l'obligation.
Or, l'acte de renouvellement du contrat de bail commercial litigieux en date du 1er juillet 2016 stipule expressément, en sa clause intitulée « CHARGES ET CONDITIONS », que « le présent bail est consenti aux charges et conditions ordinaires et de droit et notamment à celles du bail d'origine du 30 octobre 1997 et qui est, en tant que de besoin, annexé aux présentes (les clauses 1 à 21) » (pièces anciennement n°7 désormais n°5 en demande et n°1 en défense, page 3), lesquelles clauses n°1 à n°21 du contrat de bail originel ne mentionnent nullement de quelconques travaux de ravalement (pièce n°1 en demande, pages 4 à 7), de sorte que la communication de l'exemplaire original de l'acte de renouvellement serait insusceptible de remédier à cette contradiction entre les clauses du bail et celle de la prétendue annexe invoquée par la demanderesse.
Enfin, il appartiendra à la S.A.R.L. COMPAGNIE FRANÇAISE D'INVESTISSEMENT CFI de s'expliquer devant le tribunal statuant au fond sur l'application de l'annexe querellée aux travaux de ravalement dont le paiement est recherché, alors qu'il est démontré que ces derniers ont été achevés le 31 décembre 2014, comme en atteste le document intitulé « QUOTE-PART PARTICIPATION CFI - TRAVAUX DE RAVALEMENT [Adresse 2] » (pièce anciennement n°8 désormais n°6 en demande), c'est-à-dire à une période où les relations contractuelles entre les parties étaient régies par un acte de renouvellement du contrat de bail commercial en date du 15 janvier 2010 applicable à compter rétroactivement du 1er avril 2007 jusqu'au 31 mars 2016 (pièce anciennement n°6 désormais n°4 en demande), peu importe que la demanderesse ait ultérieurement émis une facture à son en-tête en date du 24 mai 2019 afférents à ces travaux (pièce anciennement n°8 désormais n°6 en demande).
Il s'évince de l'ensemble de ces éléments que la production par la bailleresse de son exemplaire original de l'acte de renouvellement du contrat de bail commercial en date du 1er juillet 2016 ne se révèle pas essentielle à la solution du litige, étant observé qu'il appartiendra au tribunal statuant au fond d'apprécier la force probante des pièces communiquées par chacune des parties, sans qu'il y ait lieu à ce stade d'écarter des débats la photocopie versée par la demanderesse.
En conséquence, il convient de débouter Monsieur [B] [O] et Madame [E] [G] épouse [O] de leur demande de communication sous astreinte de l'exemplaire original de l'acte de renouvellement du contrat de bail commercial en date du 1er juillet 2016 détenu par la S.A.R.L. COMPAGNIE FRANÇAISE D'INVESTISSEMENT CFI ainsi que de leur demande de rejet des débats de la photocopie versée par cette dernière.
Sur la poursuite de la procédure
Aux termes des dispositions des deux premiers alinéas de l'article 780 du code de procédure civile, l'affaire est instruite sous le contrôle d'un magistrat de la chambre saisie ou à laquelle l'affaire a été distribuée. Celui-ci a mission de veiller au déroulement loyal de la procédure, spécialement à la ponctualité de l'échange des conclusions et de la communication des pièces.
En outre, en vertu des dispositions du premier alinéa de l'article 781 du même code, le juge de la mise en état fixe, au fur et à mesure, les délais nécessaires à l'instruction de l'affaire, eu égard à la nature, à l'urgence et à la complexité de celle-ci, et après avoir provoqué l'avis des avocats.
En l'espèce, il y a lieu de relever que la S.A.R.L. COMPAGNIE FRANÇAISE D'INVESTISSEMENT CFI a conclu au fond en dernier lieu le 27 juillet 2023, soit depuis près d'un an à la date de la présente décision.
En conséquence, il convient de renvoyer l'affaire à l'audience de mise en état du 8 octobre 2024 pour que Monsieur [B] [O] et Madame [E] [G] épouse [O] notifient leurs conclusions en réponse au fond, selon les modalités fixées au dispositif de la présente décision.
Sur les mesures accessoires
Aux termes des dispositions de l'article 790 du code de procédure civile, le juge de la mise en état peut statuer sur les dépens et les demandes formées en application de l'article 700.
En l'espèce, la S.A.R.L. COMPAGNIE FRANÇAISE D'INVESTISSEMENT CFI, partie perdante pour l'essentiel dès lors qu'elle succombe en sa fin de non-recevoir, sera condamnée aux dépens de l'incident, et il ne sera pas fait droit à sa demande formée au titre des frais irrépétibles.
Elle sera également condamnée à payer à Madame [E] [G] épouse [O] une indemnité au titre des frais non compris dans les dépens que cette dernière a été contrainte d'exposer pour faire valoir ses droits dans le cadre du présent incident, que l'équité et la situation économique des parties commandent de fixer à la somme de 800 euros, conformément aux dispositions de l'article 700 du même code.
Il convient de rappeler que la présente décision est assortie de l'exécution provisoire de droit, en vertu des dispositions de l'article 514 dudit code, étant observé qu'aucune des parties ne sollicite que celle-ci soit écartée sur le fondement des dispositions de l'article 514-1 de ce code.
PAR CES MOTIFS
Le juge de la mise en état, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par ordonnance contradictoire rendue en premier ressort,
DÉBOUTE la S.A.R.L. COMPAGNIE FRANÇAISE D'INVESTISSEMENT CFI de sa fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité à agir et à défendre de Madame [E] [G] épouse [O],
DÉCLARE Madame [E] [G] épouse [O] recevable en sa demande de communication de pièce ainsi qu'en l'intégralité de ses moyens de défense et demandes reconventionnelles formées devant le tribunal statuant au fond à l'encontre de la S.A.R.L. COMPAGNIE FRANÇAISE D'INVESTISSEMENT CFI,
DÉBOUTE Monsieur [B] [O] et Madame [E] [G] épouse [O] de leur demande de communication sous astreinte de l'exemplaire original de l'acte de renouvellement du contrat de bail commercial en date du 1er juillet 2016 détenu par la S.A.R.L. COMPAGNIE FRANÇAISE D'INVESTISSEMENT CFI,
DÉBOUTE Monsieur [B] [O] et Madame [E] [G] épouse [O] de leur demande de rejet des débats de la photocopie de l'acte de renouvellement du contrat de bail commercial en date du 1er juillet 2016 communiquée par la S.A.R.L. COMPAGNIE FRANÇAISE D'INVESTISSEMENT CFI,
RENVOIE l'affaire à l'audience de mise en état dématérialisée de la 18ème chambre - 3ème section du mardi 8 octobre 2024 à 11h30, avec invitation à Maître Brigitte BILLARD-SEROR à notifier ses conclusions au fond pour le compte de Monsieur [B] [O] et de Madame [E] [G] épouse [O] pour le 7 octobre 2024 au plus tard,
RAPPELLE que sauf convocation spécifique à l'initiative du juge de la mise en état ou d'entretien avec ce dernier sollicité par les conseils, les audiences de mise en état se tiennent sans présence des conseils, par échange de messages électroniques via le RPVA ; que les éventuelles demandes d'entretien avec le juge de la mise en état doivent être adressées, par voie électronique, au plus tard la veille de l'audience à 12h00 en précisant leur objet, l'entretien se tenant alors le jour de l'audience susvisée à 11h30,
DÉBOUTE la S.A.R.L. COMPAGNIE FRANÇAISE D'INVESTISSEMENT CFI et Monsieur [B] [O] de leur demande d'indemnité respective présentée sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNE la S.A.R.L. COMPAGNIE FRANÇAISE D'INVESTISSEMENT CFI à payer à Madame [E] [G] épouse [O] la somme de 800 (HUIT CENTS) euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNE la S.A.R.L. COMPAGNIE FRANÇAISE D'INVESTISSEMENT CFI aux dépens de l'incident,
RAPPELLE que la présente décision est exécutoire de droit à titre provisoire.
Faite et rendue à Paris le 24 Juillet 2024
Le Greffier Le Juge de la mise en état
Henriette DURO Cédric KOSSO-VANLATHEM