TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]
[1] Copie conforme délivrée
le :
à : Monsieur [F] [H]
Copie exécutoire délivrée
le :
à : Maître Fabrice POMMIER
Pôle civil de proximité
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PCP JCP ACR référé
N° RG 24/02767 - N° Portalis 352J-W-B7I-C4IQZ
N° MINUTE :
ORDONNANCE DE REFERE
rendue le 23 août 2024
DEMANDERESSE
S.A. REGIE IMMOBILIERE DE LA VILLE DE [Localité 4],
[Adresse 1] - [Localité 3]
représentée par Maître Fabrice POMMIER de l’ASSOCIATION AMIGUES, AUBERTY, JOUARY & POMMIER, avocats au barreau de PARIS,
DÉFENDEUR
Monsieur [F] [H],
[Adresse 2] - [Localité 5]
comparant en personne
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Clara SPITZ, Juge, juge des contentieux de la protection assistée de Aurélia DENIS, Greffier,
DATE DES DÉBATS
Audience publique du 24 mai 2024
ORDONNANCE
contradictoire et en premier ressort prononcée par mise à disposition le 23 août 2024 par Clara SPITZ, Juge, assistée de Aurélia DENIS, Greffier
Décision du 23 août 2024
PCP JCP ACR référé - N° RG 24/02767 - N° Portalis 352J-W-B7I-C4IQZ
EXPOSÉ DU LITIGE
Par acte sous seing privé du 31 juillet 2015, la S.A REGIE IMMOBILIERE DE LA VILLE DE [Localité 4] (ci-après, la RIVP) a consenti un bail d’habitation à M. [H] [F] sur des locaux situés au [Adresse 2] à [Localité 5], 5ème étage, porte 1, moyennant le paiement d’un loyer mensuel de 602,28 euros.
Par acte de commissaire de justice du 8 décembre 2023, la bailleresse a fait délivrer au locataire un commandement de payer la somme principale de 3 268,69 euros au titre de l'arriéré locatif dans un délai de six semaines, en visant une clause résolutoire.
La commission de coordination des actions prévention des expulsions locatives a été informée de la situation de M. [H] [F] le 11 décembre 2023.
Par assignation du 21 février 2024, la RIVP a ensuite saisi le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Paris en référé pour faire constater l’acquisition de la clause résolutoire, être autorisée à faire procéder à l’expulsion de M. [H] [F], statuer sur le sort des meubles et obtenir sa condamnation au paiement des sommes suivantes :
une indemnité mensuelle d’occupation d’un montant égal à celui du loyer indexé et des charges, à compter de la résiliation du bail et jusqu’à libération des lieux,3701,54 euros à titre de provision sur l’arriéré locatif arrêté au 12 février 2024, avec intérêts au taux légal à compter du commandement de payer,1000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens en ce compris le coût de l’assignation, de sa dénonciation à la préfecture et des commandements de payer.
L’assignation a été notifiée au représentant de l’État dans le département le 22 février 2024, mais aucun diagnostic social et financier n'est parvenu au greffe avant l'audience.
À l'audience du 24 mai 2024, la RIVP, représentée par son conseil, maintient l'intégralité de ses demandes, et précise que la dette locative, actualisée au 13 mai 2024, s'élève désormais à 3947,67 euros. Elle considère qu'il y a bien eu une reprise du paiement intégral du loyer courant avant l'audience, au sens de l’article 24 de la loi du 6 juillet 1989 et accepte le plan d’apurement proposé par le défendeur à hauteur de 125 euros par mois.
M. [H] [F], comparaissant en personne, reconnaît le principe de la dette locative mais indique qu’elle s’élève à la somme de 2 954 euros compte tenu des versements qu’il a fait. Il demande à pouvoir se maintenir dans les lieux moyennant le versement d'une mensualité d'apurement de 124 euros, en plus du loyer courant.
À l’issue des débats, la décision a été mise en délibéré jusqu’à ce jour, où elle a été mise à disposition des parties au greffe.
La RIVP a adressé, comme il lui avait été demandé par la présidente d’audience, un décompte actualisé à la date du 27 mai 2024, laissant apparaître un solde débiteur de 2 951.02 euros et la reprise du paiement du loyer courant.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur la demande de constat de la résiliation du bail
En application des dispositions des articles 834 et 835 du code de procédure civile, dans tous les cas d’urgence, le juge du contentieux de la protection peut, dans les limites de sa compétence, ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l’existence d’un différend. Il peut également allouer au créancier une provision, lorsque l’obligation n’est pas sérieusement contestable.
Sur la recevabilité de la demande
La RIVP justifie avoir notifié l’assignation au représentant de l’État dans le département plus de six semaines avant l’audience.
Elle justifie également avoir saisi la commission de coordination des actions prévention des expulsions locatives deux mois au moins avant la délivrance de l’assignation.
Son action est donc recevable au regard des dispositions de l’article 24 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989.
Sur la résiliation du bail
Aux termes de l’article 24 de la loi du 6 juillet 1989 modifié par la loi du 27 juillet 2023, tout contrat de bail d'habitation contient une clause prévoyant la résiliation de plein droit du contrat de location pour défaut de paiement du loyer ou des charges aux termes convenus ou pour non-versement du dépôt de garantie. Cette clause ne produit effet que six semaines après un commandement de payer demeuré infructueux.
Toutefois, les dispositions de l'article 10 de la loi n° 2023-668 du 27 juillet 2023, en ce qu'elles modifient le délai minimal imparti au locataire pour s'acquitter de sa dette après la délivrance d'un commandement de payer visant la clause résolutoire insérée au bail prévu par l'article 24, alinéa 1er et 1°, de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989, n'ont pas pour effet de modifier les délais figurant dans les clauses contractuelles des baux en cours au jour de l'entrée en vigueur de la loi qui est d’application immédiate mais non rétroactive (Civ. 3ème, 13 juin 2024, avis n°24-70.002).
En l’espèce, un commandement de payer reproduisant textuellement les dispositions légales a été signifié à Monsieur [H] [F] le 08 décembre 2023 lui laissant un délai de six semaines pour régler la somme de 3 268.69 euros au principal.
Le bail ayant été tacitement reconduit, pour la dernière fois le 31 juillet 2021, soit antérieurement à l’entrée en vigueur de la loi, il y a simplement lieu de considérer que les effets de la clause résolutoire sont acquis depuis le 09 février 2024 à minuit, soit deux mois après la délivrance du commandement de payer, en l’absence de tout règlement de la part de Monsieur [H] [F] dans ce délai.
La bailleresse est donc bien fondée à se prévaloir des effets de la clause résolutoire, dont les conditions sont réunies depuis le 9 février 2024.
Sur la dette locative
Aux termes de l’article 835 du code de procédure civile, dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, le juge des contentieux de la protection saisi en référé peut accorder une provision au créancier, ou ordonner l’exécution de l’obligation même s’il s’agit d’une obligation de faire.
En l’espèce, la RIVP verse aux débats un décompte démontrant qu’à la date du 27 mai 2024, M. [H] [F] lui devait la somme de 2951.02 euros, montant qu’il avait reconnu lors de l’audience.
Il sera donc condamné à payer cette somme à la bailleresse, à titre de provision, avec intérêts au taux légal à compter de la signification de la présente décisions, compte-tenu des règlements intervenus depuis la délivrance du commandement de payer et qui en ont intégralement réglé les causes, en application des articles 1231-6, 1231-7 et 1344-1 du code civil.
Cependant, selon l’article 24 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989, le juge peut, à la demande du locataire, du bailleur ou d'office, à la condition que le locataire soit en situation de régler sa dette locative et qu'il ait repris le versement intégral du loyer courant avant la date de l'audience, accorder des délais de paiement dans la limite de trois années, par dérogation au délai prévu au premier alinéa de l'article 1343-5 du code civil, au locataire en situation de régler sa dette locative.
Lorsque le juge est saisi en ce sens par le bailleur ou par le locataire, et à la condition que celui-ci ait repris le versement intégral du loyer courant avant la date de l'audience, les effets de la clause de résiliation de plein droit peuvent être suspendus pendant le cours des délais ainsi accordés par le juge. Cette suspension prend fin dès le premier impayé ou dès lors que le locataire ne se libère pas de sa dette locative dans le délai et selon les modalités fixés par le juge. Ces délais et les modalités de paiement accordés ne peuvent affecter l'exécution du contrat de location et notamment suspendre le paiement du loyer et des charges. Si le locataire se libère de sa dette locative dans le délai et selon les modalités fixés par le juge, la clause de résiliation de plein droit est réputée ne pas avoir joué. Dans le cas contraire, elle reprend son plein effet.
En l’espèce, il résulte du dernier décompte que Monsieur [H] [F] a repris le paiement intégral du loyer courant.
Par ailleurs, il ressort des pièces produites et des débats que ses revenus lui permettent raisonnablement d’assumer le paiement d’une somme de 125 euros par mois en plus du loyer courant afin de régler sa dette.
Dans ces conditions, il convient d’accorder au locataire des délais de paiement pour s’acquitter des sommes dues, selon les modalités prévues ci-après, et de faire droit à la demande de Monsieur [H] [F] de suspension les effets de la clause résolutoire durant le cours de ces délais.
En cas de respect de ces modalités de paiement, la clause résolutoire sera donc réputée n’avoir pas joué, et l’exécution du contrat de bail pourra se poursuivre.
L’attention du locataire est toutefois attirée sur le fait qu’à défaut de paiement d’une seule échéance comprenant le loyer et la mensualité d’apurement, la clause résolutoire sera acquise, et le bail résilié de plein droit, sans qu’une nouvelle décision de justice ne soit nécessaire : dans ce cas, et pour le cas où les lieux ne seraient pas libérés spontanément, la bailleresse pourra faire procéder à son expulsion, et à celle de tout occupant de son chef.
En cas de maintien dans les lieux des locataires ou de toute personne de leur chef malgré la résiliation du bail, une indemnité d’occupation sera due, égale au montant du loyer et charges si le bail s'était poursuivi, à partir du1er avril 2024, et ne cessera d’être due qu’à la libération effective des locaux avec remise des clés à la RIVP ou à son mandataire.
Sur les demandes accessoires
Monsieur [H] [F], partie perdante, sera condamnée aux dépens de la présente instance, conformément à l’article 696 du code de procédure civile.
En revanche, compte tenu de sa situation économique, il n'y a pas lieu de la condamner à une quelconque indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
La présente décision est exécutoire à titre provisoire, conformément à l'article 514-1 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS,
La juge des contentieux de la protection, statuant après débats publics, par ordonnance mise à disposition au greffe, contradictoire et en premier ressort,
CONSTATONS que la dette locative visée dans le commandement de payer du 08 décembre 2023 n’a pas été réglée dans le délai de deux mois,
CONSTATONS, en conséquence, que le contrat conclu le 31 juillet 2015 entre la RIVP, d’une part, et M. [H] [F], d’autre part, concernant les locaux situés au [Adresse 2] à [Localité 5], 5ème étage, porte 1 est résilié depuis le 9 février 2024,
CONDAMNONS M. [H] [F] à payer à la RIVP la somme de 2 951,02 euros (deux mille neuf cent cinquante et un euros et deux centimes) à titre de provision sur l’arriéré locatif arrêté au 27 mai 2024, avec intérêts au taux légal à compter de la signification de la présente décision,
AUTORISONS M. [H] [F] à se libérer de sa dette en réglant chaque mois pendant 32 mois, en plus du loyer courant, une somme minimale de 125 euros (cent vingt-cinq euros), la dernière échéance étant majorée du solde de la dette en principal, intérêts et frais,
DISONS que le premier règlement devra intervenir dans les dix jours suivant la signification de la présente décision, puis, pour les paiements suivants, en même temps que le loyer, au plus tard le dixième jour de chaque mois, sauf meilleur accord entre les parties,
SUSPENDONS les effets de la clause résolutoire pendant l’exécution des délais de paiement accordés à M. [H] [F],
DISONS que si les délais accordés sont entièrement respectés, la clause résolutoire sera réputée n’avoir jamais été acquise,
DISONS qu’en revanche, pour le cas où une mensualité, qu'elle soit due au titre du loyer et des charges courants ou de l’arriéré, resterait impayée quinze jours après l’envoi d'une mise en demeure par lettre recommandée avec avis de réception,
le bail sera considéré comme résilié de plein droit depuis le 9 février 2024,
le solde de la dette deviendra immédiatement exigible,
la bailleresse pourra, à défaut de libération spontanée des lieux et dès l’expiration d’un délai de deux mois suivant la délivrance d’un commandement d’avoir à libérer les lieux, faire procéder à l’expulsion de M. [H] [F] et à celle de tous occupants de son chef, au besoin avec l’assistance de la force publique,
le sort des meubles sera régi conformément aux dispositions des articles L. 433-1 et L. 433-2 du code des procédures civiles d'exécution,
M. [H] [F] sera condamné à verser à la RIVP une indemnité d’occupation mensuelle égale au montant des loyers et charges qui auraient été dus en cas de poursuite du bail, et ce, jusqu’à la date de libération effective et définitive des lieux,
DEBOUTONS la RIVP de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNONS M. [H] [F] aux dépens comprenant notamment le coût du commandement de payer du 8 décembre 2023 et celui de l'assignation du 21 février 2024,
RAPPELONS que la présente ordonnance est exécutoire de droit à titre provisoire,
Ainsi jugé par mise à disposition au greffe le 23 août 2024, et signé par la juge et la greffière susnommées.
La Greffière La Juge