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13/01/1998 | LUXEMBOURG | N°10241C

Luxembourg | Luxembourg, Cour administrative, 13 janvier 1998, 10241C


GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle: 10241C Inscrit le 18 août 1997

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Audience publique du 13 janvier 1998 Recours formé par Ministre du Travail et de l’Emploi contre … JEAN VILLANUEVA en matière de: Permis de travail - Appel

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Vu la requête d’appel déposée au greffe de la Cour administrative le 18 août 1997 par Maître Pierre BERMES, avocat inscrit à la liste I

du tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg, repré...

GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle: 10241C Inscrit le 18 août 1997

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Audience publique du 13 janvier 1998 Recours formé par Ministre du Travail et de l’Emploi contre … JEAN VILLANUEVA en matière de: Permis de travail - Appel

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Vu la requête d’appel déposée au greffe de la Cour administrative le 18 août 1997 par Maître Pierre BERMES, avocat inscrit à la liste I du tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg, représenté par son Ministre d’Etat, Ministre du Travail et de l’Emploi, tendant à la réformation d’un jugement rendu par le tribunal administratif à la date du 14 juillet 1997 sur le recours en annulation d’un arrêté du ministre du Travail et de l’Emploi du 27 janvier 1997 en matière de permis de travail à l’encontre de … JEAN VILLANUEVA;

Vu l’acte de signification de ladite requête d’appel à … JEAN VILLANUEVA par exploit d’huissier Pierre BIEL du 18 août 1997;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative à la date du 16 décembre 1997 par Maître Henri FRANK, avocat inscrit à la liste I du tableau de l’ordre des avocats à Luxembourg, au nom de … JEAN VILLANUEVA;

Vu l’acte de signification dudit mémoire en réponse à l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg par exploit d’huissier Guy ENGEL du 17 novembre 1997;

Vu les pièces versées en cause et notamment le jugement entrepris;

Vu les articles 2 et 99 de la loi du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif;

1 Ouï la vice-présidente en son rapport et Maître Pierre BERMES ainsi que Maître Christian Charles LAUER, en remplacement de Maître Henri FRANK, en leurs plaidoiries respectives.

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Par arrêté ministériel du 27 janvier 1997 … JEAN VILLANUEVA, de nationalité mexicaine, s’est vu refuser le permis de travail par lui sollicité aux motifs suivants:

« - pour des raisons inhérentes à la situation et à l’organisation du marché de l’emploi;

- priorité à l’emploi des ressortissants de l’Espace Economique Européen (E.E.E.);

-des demandeurs d’emploi sont disponibles sur place ».

Suite à un recours en annulation introduit par … JEAN VILLANUEVA, le tribunal administratif, par jugement rendu à la date du 14 juillet 1997, a déclaré le recours fondé, annulé l’arrêté ministériel du 27 janvier 1997 et renvoyé l’affaire devant le ministre du Travail et de l’Emploi.

Par requête déposée au greffe de la Cour administrative le 18 août 1997 et signifiée à … JEAN VILLANUEVA par acte d’huissier Pierre BIEL du même jour, Maître Pierre BERMES, avocat inscrit à la liste I du tableau de l’ordre des avocats à Luxembourg, au nom de l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg, représenté par son Ministre du Travail et de l’Emploi et pour autant que de besoin par le Ministre d’Etat, a relevé appel du prédit jugement du 14 juillet 1997.

La partie appelante demande la réformation du jugement entrepris dans le sens du rétablissement de la décision du ministre du Travail et de l’Emploi du 27 janvier 1997 ayant refusé à la partie intimée le permis de travail.

Elle reproche au jugement entrepris d’avoir négligé le moyen du défaut d’autorisation de séjour dans le chef de l’actuel intimé, moyen qu’elle qualifie d’ordre public qui aurait dû justifier le rejet du recours.

En ordre subsidiaire, la partie appelante critique le jugement entrepris dans la mesure où la décision ministérielle a été déclarée ne pas répondre au critère de précision requis.

Elle renvoie à la situation du marché de l’emploi invoquée par le ministre et au cas concret de la partie intimée largement examiné au cours de la procédure administrative à la base de la décision ministérielle.

En dernier lieu, la partie appelante reproche au juge de première instance d’avoir décidé à tort, en présence d’un demandeur d’emploi domicilié à l’étranger, que la déclaration de poste vacant par un employeur et la déclaration d’engagement peuvent être concomitantes.

Dans un mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative le 16 décembre 1997 et signifié par acte d’huissier Guy ENGEL du 17 novembre 1997 à 2 l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg, Maître Henri FRANK demande pour la partie intimée la confirmation du jugement entrepris.

Il fait valoir qu’aucun texte légal n’impose la délivrance d’une autorisation de séjour préalablement à l’octroi d’un permis de travail. Il conteste l’inscription auprès de l’administration de l’emploi d’autres candidats en qualité d’assistant technique dentaire et souligne le défaut d’assignation d’un autre candidat à sa partie par l’administration de l’emploi. Il relève que finalement le poste de travail a été déclaré vacant auprès de l’administration de l’emploi pour conclure au mal fondé de l’acte d’appel.

Quant au moyen du défaut d’autorisation de séjour:

Il est vrai que la loi du 28 mars 1972 telle que modifiée dispose dans son article 4 qu’aucun étranger ne pourra résider au pays sans disposer d’une autorisation de séjour.

L’article 2 de la même loi tel que complété par la loi du 18 août 1995 énonce que l’entrée et le séjour au Grand-Duché pourront être refusés à l’étranger « qui ne dispose pas de moyens personnels suffisants pour supporter les frais de voyage et de séjour ».

Il résulte des travaux préparatoires à la loi précitée que ledit ajout est destiné à éviter de voir tomber les étrangers à la charge de l’Etat et qu’un engagement personnel de prise en charge par un tiers ne doit pas être pris en considération, alors que l’expérience a montré que les personnes ayant signé une prise en charge soit la retirent après un certain temps, soit ne sont financièrement pas en mesure de remplir les obligations qu’elles ont assumées.

L’article 26 de la même loi, sous réserve des dispositions de l’article 28, prohibe à tout étranger d’être occupé sur le terriroire du Grand-Duché sans permis de travail.

Aucune disposition légale ne règle l’ordre chronologique dans lequel un étranger est obligé à se procurer une autorisation de séjour et un permis de travail.

Pour se mettre en accord avec les exigences de l’article 2 précité, il est indispensable qu’un étranger introduise en premier lieu une demande en obtention d’un permis de travail.

Il est évident que seul l’octroi subséquent d’une autorisation de séjour met le postulant étranger en situation régulière au Grand-Duché.

Ce moyen d’appel n’est donc pas fondé.

Quant au moyen du défaut de précision de la décision ministérielle attaquée:

Pour motiver sa décision de refus, le ministre du Travail et de l’Emploi a énoncé trois raisons: la situation et l’organisation du marché de l’emploi, la priorité à l’emploi des ressortissants de l’Espace Economique Européen (E.E.E.) et la disponibilité de demandeurs d’emploi appropriés sur place.

3 Il résulte des termes du jugement entrepris que le délégué du Gouvernement a complété la motivation de la décision ministérielle en précisant que le travail d’aide-

dentiste constitue une fonction ne nécessitant aucune qualification particulière et en ajoutant que la disponibilité de demandeurs d’emploi bénéficiant d’une priorité d’accès à l’emploi ressortirait d’une déclaration de l’ADEM produite, documentant qu’en date du 13 juin 1997, 89 demandeurs d’emploi étaient inscrits dans les bureaux de placement de l’ADEM et recherchaient activement un emploi en tant qu’assistant médical.

Une obligation de motivation expresse d’un arrêté ministériel de refus d’une autorisation de travail n’est imposée ni par la loi du 28 mars 1972 concernant, entre autres, l’emploi de la main-d’oeuvre étrangère, telle que modifiée, ni par le règlement grand-ducal d’exécution du 12 mai 1972, tel que modifié.

En application de l’article 6 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 relatif à la procédure à suivre par les administrations relevant de l’Etat et des communes, toute décision administrative doit baser sur des motifs légaux, une décision de refus doit formellement indiquer les motifs par l’énoncé au moins sommaire de la cause juridique qui lui sert de fondement et des circonstances de fait à sa base et dans les cas où, tel qu’en l’espèce, la motivation expresse n’est pas imposée, l’administré a le droit d’exiger la communication des motifs.

Si la motivation expresse de l’acte de refus n’est pas imposée explicitement par le texte qui constitue sa base légale, tel qu’en l’espèce, il suffit en l’occurrence, pour que l’acte de refus soit valable, que ces motifs aient existé au moment du refus, quitte à ce que l’administration concernée les fournisse à posteriori sur demande de l’administré, le cas échéant au cours d’une procédure contentieuse.

Dans le cas d’espèce, la motivation sommaire de l’arrêté ministériel attaqué ensemble avec le complément de motivation fourni en cours d’instance rendent l’acte ministériel attaqué valable au sens des dispositions légales précitées, l’acte attaqué renvoyant à la situation juridique du demandeur d’emploi, à savoir sa qualité de non ressortissant de l’Espace Economique Européen et à la situation de fait, à savoir le chômage et l’existence de bon nombre d’autres demandeurs d’emploi, cette dernière affirmation ayant été utilement précisée à l’audience par rapport à des candidats aptes à l’assistance médicale et n’étant actuellement ébranlée par aucun argument précis.

Il résulte encore des pièces versées en cause que l’administration de l’emploi a été saisie de la part du médecin-dentiste De Ruyver d’une déclaration de vacance de place munie d’une demande d’embauche limitée au seul intimé, de sorte que l’administration de l’emploi, à défaut de demande expresse, n’était pas tenue à assigner d’autres candidats à l’employeur.

Ce moyen d’appel est partant fondé et le jugement entrepris est à réformer sur ce point.

La « déclaration d’engagement tenant lieu de demande en obtention du permis de travail » datée du 26 novembre 1996 et entrée au service de l’administration de 4 l’emploi le 6 décembre 1996 énoncant comme date d’entrée en service le 2 janvier 1997, c’est à bon droit que les juges de première instance ont décidé que les dipositions spécifiques de l’article 4 du règlement grand-ducal du 12 mai 1972 déterminant les mesures applicables pour l’emploi des travailleurs étrangers sur le territoire du Grand-Duché de Luxembourg ont été respectées.

Il résulte pourtant de la prédite déclaration d’engagement que l’intimé était domicilié en Belgique au moment de la présentation de la demande, de sorte que c’est à juste titre que la partie appelante fait valoir que dans le cas d’espèce, les dipositions de l’article 16 de la loi du 21 février 1976 concernant l’organisation et le fonctionnement de l’Administration de l’Emploi et portant création d’une Commission nationale de l’Emploi n’ont pas été respectées.

En effet, l’article 16 (1) précité fixe en principe pour l’administration de l’Emploi le monopole de procéder au recrutement de travailleurs à l’étranger et cela pour des raisons inhérentes à la surveillance du marché de l’emploi, ensuite pour des motifs concernant la santé publique, l’ordre public et la sécurité publique, enfin dans l’intérêt de la protection de l’emploi de la main-d’oeuvre occupée dans le pays (travaux parlementaires no.1682, exposé des motifs).

Pour prospérer dans son intention d’engager la partie intimée et en application des dispositions de l’article 16 (2) de la loi précitée, le médecin-dentiste Monique De Ruywer aurait par conséquent dû solliciter en premier lieu auprès de l’administration de l’Emploi l’autorisation de recruter un travailleur à l’étranger.

L’appel de l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg est partant à déclarer fondé et le jugement dont appel est à réformer.

La farde de pièces déposée par le mandataire de la partie intimée après la prise en délibéré de l’affaire est à écarter pour dépôt tardif.

Par ces motifs:

la Cour, statuant contradictoirement, reçoit la requête d’appel de l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg;

la dit fondée;

partant, par réformation du jugement du 14 juillet 1997, déclare non justifié le recours en annulation de … JEAN VILLANUEVA contre l’arrêté du Ministre du Travail et de l’Emploi du 27 janvier 1997 lui refusant le permis de travail;

condamne … JEAN VILLANUEVA aux dépens des deux instances.

5 Ainsi jugé par Marion LANNERS, vice-présidente, rapporteur, Jean-Mathias GOERENS, premier conseiller Christiane DIEDERICH-TOURNAY, conseiller et lu par la vice-présidente Marion LANNERS, en audience publique à Luxembourg au local ordinaire des audiences de la Cour à la date indiquée en tête, en présence du greffier de la Cour Anne-Marie WILTZIUS.

Le Greffier La Vice-Présidente 6


Synthèse
Numéro d'arrêt : 10241C
Date de la décision : 13/01/1998

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;cour.administrative;arret;1998-01-13;10241c ?

Source

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