N° 148 / 2024 pénal du 17.10.2024 Not. 9487/21/CD Numéro CAS-2023-00188 du registre La Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg a rendu en son audience publique du jeudi, dix-sept octobre deux mille vingt-quatre, sur le pourvoi de PERSONNE1.), demeurant à F-ADRESSE1.), citant direct et demandeur au civil, demandeur en cassation, comparant par Maître François PRUM, avocat à la Cour, en l’étude duquel domicile est élu, contre la société anonyme SOCIETE1.) (LUXEMBOURG), établie et ayant son siège social à L-ADRESSE2.), représentée par le conseil d’administration, inscrite au registre de commerce et des sociétés sous le numéro NUMERO1.), citée directe et défenderesse au civil, défenderesse en cassation, comparant par la société anonyme Arendt & Medernach, inscrite à la liste V du tableau de l’Ordre des avocats du barreau de Luxembourg, en l’étude de laquelle domicile est élu, représentée aux fins de la présente procédure par Maître Philippe DUPONT, avocat à la Cour, en présence du Ministère public, l’arrêt qui suit :
Vu l’arrêt attaqué rendu le 5 décembre 2023 sous le numéro 419/23 V. par la Cour d’appel du Grand-Duché de Luxembourg, cinquième chambre, siégeant en matière correctionnelle ;
Vu le pourvoi en cassation au pénal et au civil formé par Maître Lionel SPET, avocat à la Cour, en remplacement de Maître François PRUM, avocat à la Cour, au nom de PERSONNE1.), suivant déclaration du 21 décembre 2023 au greffe de la Cour supérieure de Justice ;
Vu le mémoire en cassation signifié le 16 janvier 2024 par PERSONNE1.) à la société anonyme SOCIETE1.) (LUXEMBOURG), déposé le 19 janvier 2024 au greffe de la Cour ;
Vu le mémoire en réponse signifié le 12 février 2024 par la société SOCIETE1.) (LUXEMBOURG) à PERSONNE1.), déposé le 15 février 2024 au greffe de la Cour ;
Sur les conclusions de l’avocat général Anita LECUIT.
Sur les faits Selon l’arrêt attaqué, le Tribunal d’arrondissement de Luxembourg, siégeant en matière correctionnelle, avait été saisi d’une citation directe de PERSONNE1.) dirigée contre la société SOCIETE1.) (LUXEMBOURG) pour violation du secret bancaire. Le demandeur en cassation avait fait l’objet d’un redressement fiscal de la part des autorités fiscales françaises, redressement effectué sur base des informations transmises par la société SOCIETE1.) (LUXEMBOURG) à l’administration fiscale luxembourgeoise en vue de leur transmission aux autorités françaises suite à leur demande en application de la directive 2011/16 du Conseil du 15 février 2011 relative à la coopération administrative dans le domaine fiscal et abrogeant la directive 77/99/CEE, transposée en droit interne par la loi du 29 mars 2013 relative à la coopération administrative dans le domaine fiscal.
Le Tribunal d’arrondissement avait déclaré la citation directe ainsi que la demande civile du citant direct irrecevables. La Cour d’appel a déclaré irrecevable l’appel interjeté au pénal par PERSONNE1.) et non fondé l’appel au civil.
Sur le premier moyen de cassation Enoncé du moyen « Tiré de la violation sinon du refus d’application sinon du défaut d’application, sinon de la fausse application de l’article 183 du Code de procédure pénale aux termes duquel :
2 ville où siège le tribunal ; la citation énoncera les faits, et tiendra lieu de plainte ».
En ce que l’arrêt attaqué a confirmé le jugement de première instance et a ainsi déclaré la citation directe de Monsieur PERSONNE1.) irrecevable faute d’intérêt à agir dans son chef.
Au motif que :
Etant donné qu’il se dégage des développements faits ci-avant que l’avantage matériel ou moral que PERSONNE1.) entend retirer de sa demande est sans substance, ce dommage étant purement théorique, sans être effectif, il en suit que la matérialité d’un préjudice indemnisable en tant que conséquence de l’infraction qui est reprochée à la BANQUE fait défaut, de sorte qu’il faut en déduire, indépendamment de tout autre débat, que la condition ayant trait à l’intérêt à agir n’est pas donnée dans le chef de PERSONNE1.).
La citation directe, au pénal, encourt, partant, l’irrecevabilité, le jugement entrepris étant à confirmer à cet égard, ceci ayant comme conséquence, au civil, que la demande civile de PERSONNE1.) subit le même sort, de sorte que le jugement entrepris est encore à confirmer à ce titre, y compris en ce qu’il a été débouté, par voie de conséquence de sa demande en obtention d’une indemnité de procédure.
Alors que :
• Première branche du moyen : la Cour d’appel a analysé la question de l’existence in concreto d’un préjudice dans le chef du citant direct , en lieu et place de se concentrer d’abord sur l’examen de la faute pénale reprochée dans la citation directe comme des préjudices allégués par la partie citante • Deuxième branche du moyen : en faisant complètement abstraction du fait qu’au stade de la recevabilité de la demande, il est uniquement exigé de la partie civile qu’elle puisse se prétendre personnellement lésée par l’infraction pénale objet de l’infraction. » Réponse de la Cour Le demandeur en cassation fait grief aux juges d’appel de lui avoir, au niveau de la recevabilité de la citation directe, dénié tout intérêt à agir par le constat de l’absence d’un préjudice indemnisable.
Ce grief, tenant aux conditions d’existence de l’action en justice, est étranger à l’article 183 du Code de procédure pénale qui a trait aux conditions de régularité formelle d’une citation directe.
Il s’ensuit que le moyen est irrecevable.
Sur le deuxième moyen de cassation « Tiré de la violation sinon du défaut d’application, sinon de la fausse application de l’article 183-1 du Code de procédure pénale disposant que .
En ce que l’arrêt attaqué a confirmé le jugement de première instance et a ainsi déclaré la citation directe de Monsieur PERSONNE1.) irrecevable faute d’intérêt à agir dans son chef.
Au motif que :
L’intérêt à agir consiste en l’avantage matériel ou moral, effectif et non théorique, que le demandeur peut retirer de la demande au moment où il la formule ;
il suffit que la partie civile (qu’il faut assimiler, pour les besoins de la cause, au citant direct), lors de l’examen de la recevabilité de l’action civile, ait un intérêt, du moins apparent, à agir, respectivement puisse être lésée par l’infraction (cf en ce sens Manuel de procédure pénale, Ed. Larcier, par M. Franchimont, A. Jacobs, A.
Masset, 4e édit., page 176).
Le dommage, outre l’exigence qu’il doit être direct, personnel, légitime, né et actuel, matériel ou moral, doit, tout d’abord, être pénal, c’est-à-dire qu’il doit prendre sa source dans une infraction, ce qui signifie que le dommage doit être la conséquence de l’infraction à la loi pénale : l’action doit ainsi être fondée sur l’infraction et celle-ci doit être la cause du dommage subi par la victime (cf ibidem op cit, p. 177).
Pour ce qui est des autres caractères du dommage, il est rappelé que le dommage doit être direct, ce qui signifie qu’il doit être la conséquence de l’infraction. L’exigence d’un intérêt personnel requiert par ailleurs que la partie qui se prétend lésée par une infraction doit invoquer un dommage précis et personnel en résultant. Concernant l’exigence que le dommage invoqué doit être né et actuel, respectivement actuel et certain, cela signifie que le dommage doit exister au moment de l’exercice de l’action civile. Si le préjudice invoqué est éventuel et incertain, la partie qui invoque ce préjudice n’est pas recevable à agir en justice étant observé que cette condition de recevabilité entraîne souvent un examen sur le fond du droit avec lequel elle a tendance à se confondre (cf en ce sens ibidem op cit, pages 179, 186) Etant donné qu’il se dégage des développements faits ci-avant que l’avantage matériel ou moral que PERSONNE1.) entend retirer de sa demande est sans substance, ce dommage étant purement théorique, sans être effectif, il en suit que la matérialité d’un préjudice indemnisable en tant que conséquence de l’infraction qui est reprochée à la BANQUE fait défaut, de sorte qu’il faut en déduire, indépendamment de tout autre débat, que la condition ayant trait à l’intérêt à agir n’est pas donnée dans le chef de PERSONNE1.).
4 Alors que :
• Première branche du moyen : la Cour d’appel a analysé la question de l’existence in concreto d’un préjudice dans le chef du citant direct , en lieu et place de se concentrer d’abord sur l’examen de la faute pénale reprochée dans la citation directe comme des préjudices allégués par la partie citante • Deuxième branche du moyen : en faisant complètement abstraction du fait qu’au stade de la recevabilité de la demande, il est uniquement exigé de la partie civile qu’elle puisse se prétendre personnellement lésée par l’infraction pénale objet de l’infraction. ».
Réponse de la Cour La définition de la partie civile donnée par l’article 183-1 du Code de procédure pénale, comme étant « toute personne qui se prétend lésée par l’infraction », inclut l’exigence générale de l’intérêt à agir pour être recevable à saisir la juridiction pénale par voie de citation directe.
La citation directe de la partie civile a pour effet de mettre en mouvement l’action publique ; elle doit, dès lors, émaner d’une partie ayant qualité et intérêt pour exercer l’action civile.
Sur la première branche du moyen Le demandeur fait grief aux juges d'appel d’avoir analysé la question de l’existence in concreto dans son chef d’un préjudice indemnisable, au lieu d’examiner d’abord la question de l’existence de la faute pénale reprochée à la défenderesse en cassation.
La recevabilité de la citation directe requiert l’existence dans le chef du demandeur à l’action d’un intérêt à agir, qui doit être légitime, né et actuel, personnel et direct.
Il ne suffit donc pas que la personne auteur de la citation directe allègue avoir subi un préjudice du fait de l’infraction ; s’il apparaît, dès l’introduction de la citation directe, qu’il n’est pas possible que l’auteur de celle-ci puisse se prétendre lésé par l’infraction, la qualité de victime de l’infraction ne peut lui être reconnue et la citation directe doit être déclarée irrecevable dès le stade de l’examen de sa recevabilité.
Cet examen de la recevabilité de l’action en justice précède nécessairement celui de l’existence de la faute pénale, qui relève de l’examen au fond de la demande.
En retenant, après avoir exposé les principes régissant l’intérêt à agir, « l’avantage matériel ou moral que PERSONNE1.) entend tirer de sa demande est 5 sans substance, ce dommage étant purement théorique, sans être effectif », pour en déduire l’absence d’intérêt à agir dans le chef de PERSONNE1.), les juges d’appel ont fait l’exacte application de la loi sans encourir le reproche formulé au moyen.
Il s’ensuit que le moyen, pris en sa première branche, n’est pas fondé.
Sur la seconde branche du moyen Le demandeur en cassation fait grief aux juges d’appel d’avoir examiné la question de l’intérêt à agir dans son chef sous l’angle d’autres critères que celui du seul caractère personnel de l’intérêt allégué.
La recevabilité de la citation directe requiert l’existence dans le chef du demandeur à l’action d’un intérêt à agir, qui doit être légitime, né et actuel, personnel et direct.
En analysant la recevabilité au regard de l’ensemble de ces critères, les juges d’appel ont fait l’exacte application de la disposition visée au moyen.
Il s’ensuit que le moyen, pris en sa seconde branche, n’est pas fondé.
Sur le troisième moyen de cassation Enoncé du moyen « Tiré de la contravention ou violation de la loi par la Cour d’appel, spécialement de la violation de l’article 89 de la Constitution faisant obligation pour les juges de motiver leur décision.
En ce que l’arrêt entrepris, pour déclarer que Monsieur PERSONNE1.) n’avait pas d’intérêt à agir, la Cour d’appel a dans un premier temps rappelé de manière correcte qu’il suffit, au moment de l’examen de la recevabilité de la citation directe, que le citant direct justifie d’avoir au moins un intérêt à agir en justice, qu’il puisse être lésé par l’infraction reprochée, pour ensuite exiger toujours au stade de l’examen de la recevabilité de la citation directe, que le citant directe démontre la matérialité de ses différents postes de préjudice.
Au motif que :
L’intérêt à agir consiste en l’avantage matériel ou moral, effectif et non théorique, que le demandeur peut retirer de la demande au moment où il la formule ;
il suffit que la partie civile (qu’il faut assimiler, pour les besoins de la cause, au citant direct), lors de l’examen de la recevabilité de l’action civile, ait un intérêt, du moins apparent, à agir, respectivement puisse être lésée par l’infraction (cf en ce sens Manuel de procédure pénale, Ed. Larcier, par M. Franchimont, A. Jacobs, A.
Masset, 4e édit., page 176).
Le dommage, outre l’exigence qu’il doit être direct, personnel, légitime, né et actuel, matériel ou moral, doit, tout d’abord, être pénal, c’est-à-dire qu’il doit 6 prendre sa source dans une infraction, ce qui signifie que le dommage doit être la conséquence de l’infraction à la loi pénale : l’action doit ainsi être fondée sur l’infraction et celle-ci doit être la cause du dommage subi par la victime (cf ibidem op cit, p. 177).
Pour ce qui est des autres caractères du dommage, il est rappelé que le dommage doit être direct, ce qui signifie qu’il doit être la conséquence de l’infraction. L’exigence d’un intérêt personnel requiert par ailleurs que la partie qui se prétend lésée par une infraction doit invoquer un dommage précis et personnel en résultant. Concernant l’exigence que le dommage invoqué doit être né et actuel, respectivement actuel et certain, cela signifie que le dommage doit exister au moment de l’exercice de l’action civile. Si le préjudice invoqué est éventuel et incertain, la partie qui invoque ce préjudice n’est pas recevable à agir en justice étant observé que cette condition de recevabilité entraîne souvent un examen sur le fond du droit avec lequel elle a tendance à se confondre (cf en ce sens ibidem op cit, pages 179, 186) Etant donné qu’il se dégage des développements faits ci-avant que l’avantage matériel ou moral que PERSONNE1.) entend retirer de sa demande est sans substance, ce dommage étant purement théorique, sans être effectif, il en suit que la matérialité d’un préjudice indemnisable en tant que conséquence de l’infraction qui est reprochée à la BANQUE fait défaut, de sorte qu’il faut en déduire, indépendamment de tout autre débat, que la condition ayant trait à l’intérêt à agir n’est pas donnée dans le chef de PERSONNE1.).
Alors que :
• Première branche du moyen : la Cour d’appel a, dans sa décision à quelques paragraphes d’intervalle, exposé des motifs totalement inconciliables et contraires, violant ainsi l’exigence de motivation exigée à l’article 89 de la Constitution La Cour d’appel après avoir rappelé qu’il suffit que le citant direct puisse se prévaloir au moins d’un intérêt apparent au stade de l’examen de la recevabilité de la citation directe, a ensuite examiné .
Ce faisant la Cour d’appel s’est contredite dans ses motifs. ».
Réponse de la Cour Le demandeur en cassation fait grief aux juges d’appel d’avoir exposé des motifs contraires et inconciliables dans leur arrêt, violant ainsi l’article 89 de la Constitution.
A l’article 89 de la Constitution invoqué à l’appui du moyen, il convient de substituer l’article 109 de la Constitution dans sa version applicable depuis le 1er juillet 2023, partant au jour du prononcé de l’arrêt attaqué.
Le grief tiré de la contradiction de motifs, équivalant à un défaut de motifs, ne peut être retenu que si les motifs incriminés sont des motifs de fait. La contradiction entre motifs de droit, ou entre un motif de droit et un motif de fait, ne relève pas du grief de contradiction de motifs.
En opposant deux motifs qui ne sont pas tous deux des motifs de fait, le grief invoqué par le demandeur en cassation est étranger à la disposition visée au moyen.
Il s’ensuit que le moyen est irrecevable.
Sur le quatrième moyen de cassation Enoncé du moyen « Tiré de la violation sinon du refus d’application sinon du défaut d’application, sinon de la fausse application du principe de réparation intégrale du dommage subi par la victime.
En ce que la Cour d’appel pour apprécier de la recevabilité de la citation directe, a écarté les demandes en obtention d’une indemnité de procédure au titre de l’article 194 du Code de procédure pénale et des frais et dépens, indiquant que ces préjudices n’étaient constitutifs que d’accessoires dans le chef du citant direct.
Au motif que :
Concernant l’exigence que le dommage doit exister au moment de l’exercice de l’action civile en tant que conséquence de l’infraction, il est rappelé que l’infraction qui est, en l’espèce, reprochée à la BANQUE est celle qui est prévue à l’article 458 du Code pénal ayant trait au secret professionnel, infraction à travers laquelle PERSONNE1.) estime avoir subi un préjudice matériel (549.367 euros) et moral (100.000 euros), la Cour d’appel notant que l’indemnité de procédure et les frais et dépens ne constituent que des accessoires, de sorte qu’ils n’entrent pas, à ce stade, en ligne de compte.
Alors que :
En vertu du principe de la réparation intégrale du dommage de la victime et des dispositions claires de l’article 194 alinéa 3, cette dernière a droit au remboursement des frais qu’elle a dû supporter notamment pour sa défense en justice afin de voir reconnaitre la violation par la Banque de son secret professionnel.
Qu’en écartant les postes de préjudice relatifs à l’indemnité de procédure et les frais et dépens, c’est-à-dire en les ignorant au stade de l’examen de la recevabilité de la citation directe quant à l’existence de l’intérêt à agir du demandeur en justice la Cour d’appel a violé le principe sus-visé. ».
Réponse de la Cour L’article 194, alinéa 3, du Code de procédure pénale, qui a trait à l’allocation, par le juge, pour des raisons d’équité, d’une indemnité de procédure dans le cadre d’un procès, est étranger au grief se rapportant à « la réparation intégrale » du préjudice subi par une personne des suites d’une infraction commise à son égard.
Il s’ensuit que le moyen est irrecevable.
Sur le cinquième moyen de cassation Enoncé du moyen « Tiré de la violation par la Cour d’appel de l’article 89 de la Constitution faisant obligation pour les juges de motiver leur décision et de l’article 6 paragraphe 1 de la CEDH.
En ce que l’arrêt entrepris, pour déclarer que Monsieur PERSONNE1.) n’avait pas d’intérêt à agir, la Cour d’appel a écarté les postes de préjudice réclamés au titre de l’indemnité de procédure et les frais et dépens sans autrement justifier sa décision.
Au motif que :
du Code pénal ayant trait au secret professionnel, infraction à travers laquelle PERSONNE1.) estime avoir subi un préjudice matériel (549.367 euros) et moral (100.000 euros), la Cour d’appel notant que l’indemnité de procédure et les frais et dépens ne constituent que des accessoires, de sorte qu’ils n’entrent pas, à ce stade, en ligne de compte.
Alors que :
La Cour d’appel a écarté sans expliquer sur quels textes ou raisonnement juridique elle se basait, les préjudices liés aux frais et dépens et indemnité de procédure, de l’examen de la recevabilité de la demande de Monsieur PERSONNE1.) lui déniant ainsi tout intérêt à agir en justice. ».
Réponse de la Cour Le demandeur en cassation fait grief aux juges d’appel d’avoir, en violation de l’article 89 de la Constitution, omis de motiver leur décision de rejet des demandes en allocation d’une indemnité de procédure et en condamnation de la partie citée directe aux frais et dépens de l’instance.
A l’article 89 de la Constitution invoqué à l’appui du moyen, il convient de substituer l’article 109 de la Constitution dans sa version applicable depuis le 1er juillet 2023, partant au jour du prononcé de l’arrêt attaqué.
En retenant « Concernant l’exigence que le dommage doit exister au moment de l’exercice de l’action civile en tant que conséquence de l’infraction, il est rappelé que l’infraction qui est, en l’espèce, reprochée à la BANQUE est celle qui est prévue à l’article 458 du Code pénal ayant trait au secret professionnel, infraction à travers laquelle PERSONNE1.) estime avoir subi un préjudice matériel (549.367 euros) et moral (100.000 euros), la Cour d’appel notant que l’indemnité de procédure et les frais et dépens ne constituent que des accessoires, de sorte qu’ils n’entrent pas, à ce stade, en ligne de compte. », les juges d’appel ont motivé leur décision sur le point considéré.
Il s’ensuit que le moyen n’est pas fondé.
Sur la demande en allocation d’une indemnité de procédure Il serait inéquitable de laisser à charge de la défenderesse en cassation l’intégralité des frais exposés non compris dans les dépens. Il convient de lui allouer une indemnité de procédure de 10.000 euros.
PAR CES MOTIFS, la Cour de cassation rejette le pourvoi ;
condamne le demandeur en cassation à payer à la défenderesse en cassation une indemnité de procédure de 10.000 euros ;
condamne le demandeur en cassation aux frais de l’instance en cassation au pénal, ceux exposés par le Ministère public étant liquidés à 3,25 euros ;
condamne le demandeur en cassation aux frais et dépens de l’instance en cassation au civil.
Ainsi jugé par la Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg en son audience publique du jeudi, dix-sept octobre deux mille vingt-quatre, à la Cité Judiciaire, Bâtiment CR, Plateau du St. Esprit, composée de :
Thierry HOSCHEIT, président de la Cour, Agnès ZAGO, conseiller à la Cour de cassation, Marie-Laure MEYER, conseiller à la Cour de cassation, Monique HENTGEN, conseiller à la Cour de cassation, Jeanne GUILLAUME, conseiller à la Cour de cassation, qui, à l’exception du conseiller Marie-Laure MEYER, qui se trouvait dans l’impossibilité de signer, ont signé le présent arrêt avec le greffier à la Cour Daniel SCHROEDER.
La lecture du présent arrêt a été faite en la susdite audience publique par le président Thierry HOSCHEIT en présence de l’avocat général Bob PIRON et du greffier Daniel SCHROEDER.
11 Conclusions du Parquet général dans l’affaire de cassation PERSONNE1.) contre la société anonyme SOCIETE1.) (Luxembourg) S.A.
(CAS-2023-00188 du registre) Par déclaration faite le 21 décembre 2023 au greffe de la Cour Supérieure de Justice du Grand-Duché de Luxembourg, Maître Lionel SPET, en remplacement de Maître François PRUM, avocats à la Cour, les deux demeurant à Luxembourg, a formé au nom et pour le compte de PERSONNE1.), partie civile constituée, un recours en cassation contre un arrêt rendu contradictoirement le 5 décembre 2023, sous le numéro 419/23 V, par la Cour d’appel, cinquième chambre, siégeant en matière correctionnelle.
Cette déclaration de recours a été suivie le 19 janvier 2024 par le dépôt du mémoire en cassation prévu à l’article 43 de la loi modifiée du 18 février 1885 sur les pourvois et la procédure en cassation, signé par Maître Lionel SPET, en remplacement de Maître François PRUM, avocats à la Cour, au nom et pour le compte de PERSONNE1.), signifié à la partie défenderesse au pourvoi le 16 janvier 2024.
Sur la recevabilité du pourvoi Le pourvoi respecte le délai d’un mois à partir du prononcé de l’arrêt entrepris endéans lequel la déclaration de pourvoi doit, conformément à l’article 41 de la loi précitée du 18 février 1885, intervenir. Il respecte encore le délai d’un mois, prévu par l’article 43 de la loi précitée du 18 février 1885, endéans lequel la déclaration du pourvoi doit être suivie du dépôt du mémoire en cassation. Ledit mémoire a en outre, conformément à l’article 43, été signé par un avocat à la Cour, précise les dispositions attaquées de la décision entreprise, contient des moyens de cassation et a été signifié à la partie défenderesse en cassation antérieurement à son dépôt.
Le pourvoi attaque un arrêt rendu en dernier ressort en matière correctionnelle qui a statué de façon définitive sur l’action publique et l’action civile, donc une décision qui relève de celles qui, au regard de leur objet, peuvent faire l’objet d’un pourvoi en cassation.
Le pourvoi est formé par la partie civile contre un arrêt confirmatif d’irrecevabilité de l’action publique et de l’action civile.
Il y a lieu de relever que la partie civile n’est en principe recevable à se pourvoir que dans les limites de ses intérêts civils. Cette limitation de l’effet dévolutif du pourvoi de la partie civile à ses intérêts civils trouve cependant, conformément à la jurisprudence de Votre Cour ainsi que de la jurisprudence française, exception si la décision attaquée n’a pas statué au fond sur l’action publique.1 Dans le cadre de la motivation de l’arrêt attaqué, les magistrats d’appel ont retenu que, « La citation directe, au pénal, encourt, partant, l’irrecevabilité, le jugement entrepris étant à confirmer à cet égard, ceci ayant comme conséquence, au civil, que la demande civile de PERSONNE1.) subit le même sort, de sorte que le jugement entrepris est encore à confirmer à ce titre, […] ».2 Ce faisant la Cour d’appel n’a pas statué au fond sur l’action publique, en sorte que la décision attaquée par la partie civile relève du cas de figure de l’exception au principe selon lequel le pourvoi de la partie civile n’a d’effet qu’en ce qui concerne ses intérêts civils et ne saurait remettre en cause la décision relative à l’action publique.
Il en suit que le pourvoi est recevable tant en ce qu’il vise les dispositions statuant sur l’action publique que celles statuant sur l’action civile.
La société anonyme ARENDT & MEDERNACH, laquelle est représentée par Maître Philippe DUPONT, avocat à la Cour, aux fins de la présente procédure, a déposé en date du 15 février 2024 un mémoire en réponse au greffe de la Cour, lequel a été signé par Maître Jean-Luc PUTZ, en remplacement de Maître Philippe DUPONT, et signifié le 12 février 2024 à la partie demanderesse en cassation.
Ce mémoire en réponse peut être pris en considération pour avoir été introduit dans les conditions de forme et de délai prévues par la loi modifiée du 18 février 1885.
Faits et rétroactes En date du 3 mars 2020, la partie demanderesse en cassation a fait citer la partie défenderesse en cassation devant le tribunal correctionnel de et à Luxembourg par voie de citation directe, sur la base de l’article 458 du Code pénal et de l’article 41 de la loi modifiée du 5 avril 1993 sur le secteur financier, en lui reprochant d’avoir violé le secret bancaire.
1 Cour de cassation, 10 avril 2008, n°16/2008 pénal ;
Cour de cassation, 15 mai 1997, n° 10/97 ;
Jacques et Louis BORE, La cassation en matière pénale, édition Dalloz, 2018/2019, n°34/77.
2 Voir l’arrêt entrepris, page 10, alinéa 4.
Par jugement numéro n°2540/2022 rendu contradictoirement en date du 10 novembre 2022, le tribunal d’arrondissement de Luxembourg, douzième chambre, siégeant en matière correctionnelle, a déclaré irrecevable la demande de la partie demanderesse en cassation, « sans qu’il n’y ait lieu de procéder à l’examen des éléments constitutifs de l’infraction reprochée » faute par elle « d’avoir allégué un dommage direct, personnel et causal […] ».
Quant au volet civil tendant à la réparation d’un préjudice matériel et moral, les juges de première instance ont jugé qu’il devait suivre le même sort que l’acte de citation directe. Ils ont par conséquent déclaré irrecevable la demande civile formulée par la partie demanderesse en cassation.
Au vu de l’irrecevabilité de la demande civile, le tribunal de première instance a par ailleurs rejeté la demande en obtention d’une indemnité de procédure formulée par la partie demanderesse en cassation et a laissé les frais de sa demande à charge de cette dernière.
En date du 28 novembre 2022, le mandataire de la partie demanderesse en cassation a interjeté appel au pénal et au civil contre le jugement de première instance. Par déclaration datée 29 novembre 2022, le Procureur d’État de Luxembourg a interjeté appel limité à la citante directe, actuelle partie demanderesse en cassation, et le 1er décembre 2022 appel a encore été interjeté au civil par la citée directe, actuelle partie défenderesse en cassation.
La Cour d’appel, cinquième chambre, siégeant en matière correctionnelle, statuant contradictoirement, a rendu le 5 décembre 2023 un arrêt n°419/23 V, dont le dispositif se lit comme suit :
« dit irrecevable l’appel interjeté par PERSONNE1.) au pénal ;
reçoit, pour le surplus les appels en la forme ;
les dit non fondés ;
confirme le jugement entrepris au pénal et au civil ;
laisse les frais de la demande civile en instance d’appel à la charge de PERSONNE1.) PERSONNE1.). ».
Cet arrêt fait l’objet du présent pourvoi.
Quant au premier moyen de cassation Le premier moyen de cassation est tiré de la violation, sinon du refus d’application sinon du défaut d’application, sinon de la fausse application de l’article 183 du Code de procédure pénale aux termes duquel :
« La partie civile fera, par acte de citation, élection de domicile dans la ville où siège le tribunal; la citation énoncera les faits, et tiendra lieu de plainte », en ce que l’arrêt attaqué a confirmé le jugement de première instance et a ainsi déclaré la citation directe de Monsieur PERSONNE1.) irrecevable faute d’intérêt à agir dans son chef.
Au motif que, « Etant donné qu’il se dégage des développements faits ci-avant que l’avantage matériel ou moral que PERSONNE1.) entend retirer de sa demande est sans substance, ce dommage étant purement théorique, sans être effectif, il en suit que la matérialité d’un préjudice indemnisable en tant que conséquence de l’infraction qui est reprochée à la BANQUE fait défaut, de sorte qu’il faut en déduire, indépendamment de tout autre débat, que la condition ayant trait à l’intérêt à agir n’est pas donnée dans le chef de PERSONNE1.).
La citation directe, au pénal, encourt, partant, l’irrecevabilité, le jugement entrepris étant à confirmer à cet égard, ceci ayant comme conséquence, au civil, que la demande civile de PERSONNE1.) subit le même sort, de sorte que le jugement entrepris est encore à confirmer à ce titre, y compris en ce qu’il a été débouté, par voie de conséquence de sa demande en obtention d’une indemnité de procédure. » Alors que, Première branche du moyen : La Cour d’appel a analysé la question de l’existence in concreto d’un préjudice dans le chef du citant direct « la matérialité d’un préjudice indemnisable en tant que conséquence de l’infraction qui est reprochée à la Banque fait défaut, de sorte qu’il faut en déduire, indépendamment de tout autre débat, que la condition ayant trait à l’intérêt à agir n’est pas donnée dans le chef de PERSONNE1.) », en lieu et place de se concentrer d’abord sur l’examen de la faute pénale reprochée dans la citation directe comme « cause » des préjudices allégués par la partie citante.
Deuxième branche du moyen : en faisant complètement abstraction du fait qu’au stade de la recevabilité de la demande, il est uniquement exigé de la partie civile qu’elle puisse se prétendre personnellement lésée par l’infraction pénale objet de l’infraction.
Il y a lieu de rappeler qu’aux termes de l’arrêt attaqué, la Cour d’appel a confirmé le jugement de première instance en ce qu’il a déclaré irrecevable la citation directe de l’actuelle partie demanderesse en cassation, faute d’intérêt à agir dans son chef.
Dans le cadre de la discussion du premier moyen de cassation, qui est commune aux deux branches, la partie demanderesse en cassation reproche en substance aux magistrats d’appel de lui avoir dénié tout intérêt à agir, au motif qu’il n’aurait pas justifié d’un préjudice indemnisable découlant de l’infraction pénale, objet de la citation.
Plus précisément la partie demanderesse en cassation critique-t-elle la Cour d’appel pour ° avoir renversé le raisonnement juridique classique aux termes duquel elle aurait en premier lieu dû examiner les fautes reprochées à la partie défenderesse en cassation, à savoir, en l’occurrence, l’infraction commise par elle, en sa qualité de Banque, consistant en la violation du secret bancaire lui incombant vis-à-vis de son client, avant de se pencher, en second lieu, sur les « conséquences » engendrées par cette infraction consistant en les différents postes de préjudice réclamés par la partie demanderesse en cassation et ° avoir ajouté des conditions non prévues par la loi, -plus particulièrement par la disposition visée au moyen-, à la recevabilité de la citation directe, en ne se limitant pas au constat que pour être recevable à déclencher l’action publique en citant directement devant les juridictions répressives, il faut et il suffit de faire état d’un préjudice personnel, direct, né et actuel possible, résultant de l’infraction.
La partie demanderesse en cassation affirme finalement encore que la jurisprudence admettrait communément que pour avoir intérêt et qualité à agir, il suffirait de faire valoir un intérêt moral, à condition qu’il soit personnel et directement causé par l’infraction.
C’est donc sur base de ces considérations qu'à partir de l’article 183 du Nouveau Code de procédure civile, la partie demanderesse en cassation affirme « qu’en jugeant comme elle l’a fait, au stade de la recevabilité de la citation directe, la cour d’appel a ajouté des conditions à la recevabilité de la citation directe, qui ne sont nullement prévues par les dispositions du Code de procédure pénale à l’article 183 précité ».
A titre principal il y a lieu de relever qu’il découle des termes clairs de l’article 183 du Nouveau Code de procédure civile visé au moyen et selon lequel, « La partie civile fera, par acte de citation, élection de domicile dans la ville où siège le tribunal ; la citation énoncera les faits, et tiendra lieu de plainte », que cet article a trait à certaines des conditions de forme auxquelles est soumise une citation directe. Cette disposition ne conditionne dès lors aucunement la recevabilité de l’action directe au regard de l’intérêt à agir.
La disposition visée au moyen, qui a trait à la présentation formelle d’une citation directe, est dès lors étrangère au grief formulé par la partie demanderesse en cassation consistant dans le reproche adressé à la Cour d’appel d’avoir, au niveau de larecevabilité de la citation directe, dénié tout intérêt à agir à la partie demanderesse en cassation sur le constat de l’absence de préjudice indemnisable dans son chef.
Il en suit que le premier moyen de cassation, pris en ses deux branches, est irrecevable.
A titre subsidiaire on pourrait également considérer que le moyen manque en fait.
Cette analyse se fonde sur le constat que le moyen, lu ensemble avec la discussion qui le complète, consiste à critiquer les magistrats d’appel d’avoir exigé de la citante directe qu’elle établisse, au stade de la recevabilité, la matérialité in concreto de son préjudice, au lieu de s’être limités à admettre que l’intérêt à agir existe dès lors que la citante directe peut se prétendre personnellement lésée par l’infraction objet de la citation directe.
Or, en réalité le raisonnement de la Cour d’appel consiste précisément à relever qu’en l’occurrence la citante directe ne peut se prétendre personnellement lésée par l’infraction dans la mesure où la « matérialité d’un préjudice indemnisable » c’est-à-
dire la réalité d’un dommage effectif « en tant que conséquence de l’infraction » n’est pas donnée dans le chef de la citante directe et que par conséquent il ne saurait être possible pour cette dernière de se prétendre personnellement lésée par l’infraction.
Pour arriver à la conclusion qu’il n’existe, en l’occurrence, aucun préjudice ou dommage causé par l’infraction de violation du secret bancaire, dont pourrait se prévaloir la citante directe, les magistrats d’appel ont transposé au pénal les principes jurisprudentiels dégagés dans le cadre d’affaires commerciales ayant retenu que le paiement d’impôts constitue une dette fiscale légitime de laquelle le contribuable ne saurait se délier, que ce soit par l’invocation d’un dommage matériel ou d’un dommage moral.
La Cour d’appel n’a dès lors, contrairement à ce que semble admettre la partie demanderesse en cassation, pas exigé de la citante directe qu’elle établisse, au stade de la recevabilité, l’existence concrète du préjudice invoqué, mais elle a constaté que le préjudice ou dommage allégué découlant de l’infraction objet de la citation directe, était, dans le cas d’espèce, inconcevable, en sorte que la citante directe ne pouvait se prétendre lésée par l’infraction, objet de la citation.
Le moyen, pris en ses deux branches, procède dès lors d’une mauvaise lecture de l’arrêt entrepris, de sorte qu’il manque en fait.
A titre plus subsidiaire on pourrait encore admettre qu’en vérité, sous couvert du grief tiré de l’article 183 du Code de procédure pénale, le moyen ne tend qu’à remettre en discussion la décision de la Cour d’appel d’avoir, par confirmation du jugement de première instance, déclaré irrecevable la citation directe pour défaut d’intérêt à agir dans le chef de la citante directe, actuelle demanderesse en cassation, décision quirelève pourtant de son pouvoir d’appréciation souverain et échappe au contrôle de la Cour de cassation.
Cette approche semble d’ailleurs rencontrer l’approbation de la partie demanderesse en cassation elle-même, étant donné qu’elle cite, dans le cadre de la discussion de son premier et deuxième moyen de cassation, une décision de la Cour de cassation belge qui retient que, « pour être recevable à citer directement, il faut et il suffit que celui qui agit puisse se prétendre personnellement lésé par l’infraction, objet de l’action publique, c’est-à-dire qu’il justifie avoir pu être victime de l’infraction, circonstance qu’il appartient au juge de fond d’apprécier souverainement en fait » (Cass. Belge 28 janvier 1963, Pas. Bel. 1963, I, 609 ; Cour 19 janvier 1981, P. 25, p.60)3. Cette même décision a d’ailleurs également été citée par le tribunal de première instance dans le cadre de la motivation de son jugement n°2540/2022 du 10 novembre 2022, confirmé par l’arrêt attaqué.
Il en suit que le moyen, pris en ses deux branches, ne saurait être accueilli.
A titre encore plus subsidiaire il peut être relevé qu’il est de doctrine et de jurisprudence constante, et d’ailleurs non contesté par la partie demanderesse en cassation, que pour être recevable à agir, il faut et il suffit qu’un citant direct « puisse se prétendre personnellement lésé par l’infraction objet de l’action publique », c’est-
à-dire qu’il lui suffit de justifier d’un intérêt apparent pour être recevable à exercer une action publique par voie de citation directe.
Aux termes d’une jurisprudence luxembourgeoise bien établie en matière commerciale, citée dans le cadre de la motivation de l’arrêt entrepris, l’action en réparation pour dommage matériel et moral engagée par un contribuable au titre de la violation du secret bancaire, -en tant que violation d’une obligation contractuelle-, du fait qu’une dette fiscale exigible lui a été réclamée par l’administration fiscale suite aux révélations de la banque, n’est pas accueillie par les tribunaux, au motif que le contribuable n'a pas subi de dommage appelant réparation. Les juges civils motivent leurs décisions en retenant que le paiement d’impôts consiste en l’affranchissement d’une dette légitime, qui ne peut être qualifiée de dommage réparable en ce que le paiement d’une dette légitime n’est pas constitutif d’un préjudice dans le chef de celui qui s’en acquitte.
Cette jurisprudence civile invoquée par l’arrêt entrepris se prête en l’occurrence parfaitement à être transposée en matière pénale où elle se traduit par l’irrecevabilité de la citation directe pour violation du secret bancaire, au motif qu’aucun préjudice découlant de l’infraction, objet de la citation directe, c’est-à-dire l’infraction de violation du secret bancaire, n’est concevable.
3 Jugement n°2540/2022 du 10 novembre 2022 confirmé par l’arrêt attaqué, page 4 alinéa 1er.En vérifiant la recevabilité de la citation directe par rapport à l’existence d’un préjudice indemnisable causé par l’infraction, objet de la citation, les juges d’appel n’ont dès lors pas violé la disposition visée au moyen.
Il appert des considérations qui précèdent que la Cour d’appel a en somme, à l’instar des juridictions civiles, justifié à bon droit sa décision à l’aune des adages classiques, « Nemo de improbitate sua consequitur actionem », nul ne doit obtenir une action ayant pour origine un acte d'improbité commis par lui, ou « Nemo ex propria turpitudine commodum capere potest », nul ne peut profiter de son propre tort.
Il en suit que le moyen, pris en ses deux branches, n’est pas fondé.
Quant au second moyen de cassation Le second moyen de cassation est tiré de la violation, sinon du défaut d’application, sinon de la fausse application de l’article 183-1 du Code de procédure pénale aux termes duquel, « Toute personne qui se prétend lésée par l’infraction, peut se constituer partie civile à l’audience et demander l’allocation de dommages-intérêts. La constitution de partie civile se fait par déclaration consignée par le greffier ou par dépôt de conclusions », en ce que l’arrêt attaqué a confirmé le jugement de première instance et a ainsi déclaré la citation directe de Monsieur PERSONNE1.) irrecevable faute d’intérêt à agir dans son chef.
Au motif que, « L’intérêt à agir consiste en l’avantage matériel ou moral, effectif et non théorique, que le demandeur peut retirer de la demande au moment où il la formule ; il suffit que la partie civile (qu’il faut assimiler, pour les besoins de la cause, au citant direct), lors de l’examen de la recevabilité de l’action civile, ait un intérêt, du moins apparent, à agir, respectivement puisse être lésée par l’infraction (cf en ce sens Manuel de procédure pénale, Ed. Larcier, par M. Franchimont, A. Jacobs, A. Masset, 4e édit., page 176).
Le dommage, outre l’exigence qu’il doit être direct, personnel, légitime, né et actuel, matériel ou moral, doit, tout d’abord, être pénal, c’est-à-dire qu’il doit prendre sa source dans une infraction, ce qui signifie que le dommage doit être la conséquence de l’infraction à la loi pénale : l’action doit ainsi être fondée sur l’infraction et celle-
ci doit être la cause du dommage subi par la victime (cf ibidem op cit, p. 177).
Pour ce qui est des autres caractères du dommage, il est rappelé que le dommage doit être direct, ce qui signifie qu’il doit être la conséquence de l’infraction. L’exigence d’un intérêt personnel requiert par ailleurs que la partie qui se prétend lésée par une infraction doit invoquer un dommage précis et personnel en résultant. Concernant l’exigence que le dommage invoqué doit être né et actuel, respectivement actuel et certain, cela signifie que le dommage doit exister au moment de l’exercice de l’action 19 civile. Si le préjudice invoqué est éventuel et incertain, la partie qui invoque ce préjudice n’est pas recevable à agir en justice étant observé que cette condition de recevabilité entraîne souvent un examen sur le fond du droit avec lequel elle a tendance à se confondre (cf en ce sens ibidem op cit, pages 179, 186).
[…] Etant donné qu’il se dégage des développements faits ci-avant que l’avantage matériel ou moral que PERSONNE1.) entend retirer de sa demande est sans substance, ce dommage étant purement théorique, sans être effectif, il en suit que la matérialité d’un préjudice indemnisable en tant que conséquence de l’infraction qui est reprochée à la BANQUE fait défaut, de sorte qu’il faut en déduire, indépendamment de tout autre débat, que la condition ayant trait à l’intérêt à agir n’est pas donnée dans le chef de PERSONNE1.). » Alors que, Première branche du moyen : La Cour d’appel a analysé la question de l’existence in concreto d’un préjudice dans le chef du citant direct « la matérialité d’un préjudice indemnisable en tant que conséquence de l’infraction qui est reprochée à la Banque fait défaut, de sorte qu’il faut en déduire, indépendamment de tout autre débat, que la condition ayant trait à l’intérêt à agir n’est pas donnée dans le chef de PERSONNE1.) », en lieu et place de sa concentrer d’abord sur l’examen de la faute pénale reprochée dans la citation directe comme « cause » des préjudices allégués par la partie citante.
Deuxième branche du moyen : en faisant complètement abstraction du fait qu’au stade de la recevabilité de la demande, il est uniquement exigé de la partie civile qu’elle puisse se prétendre personnellement lésée par l’infraction pénale objet de l’infraction.
Le second moyen de cassation reprend exactement le même grief que celui exposé au premier moyen de cassation, sauf à invoquer une violation de l’article 183-1 du Code de procédure pénale. Les développements présentés dans le cadre de la discussion du second moyen sont également identiques à ceux exposés à l’appui du premier moyen de cassation.
L’article 183-1 du Code de procédure pénale, en ce qu’il dispose que, « Toute personne qui se prétend lésée par l’infraction, peut se constituer partie civile à l’audience et demander l’allocation de dommages-intérêts. La constitution de partie civile se fait par déclaration consignée par le greffier ou par dépôt de conclusions », a trait à la constitution de partie civile à l’audience.
Faute par la partie défenderesse en cassation de justifier concrètement en quoi la disposition visée au moyen aurait été violée, la soussignée ne conçoit pas en quoi l’article 183-1 du Code de procédure pénale pourrait être susceptible de conditionner la recevabilité de l’action directe au regard de l’intérêt à agir.
La disposition visée au moyen est dès lors étrangère au grief formulé.
Il en suit que le second moyen de cassation, pris en ses deux branches, est irrecevable.
La soussignée renvoie pour le surplus à ses développements exposés sous le premier moyen de cassation pour conclure, à titre subsidiaire, que le moyen manque en fait, sinon ne saurait être accueilli pour empiéter sur le pouvoir d’appréciation souverain des juges du fond, sinon n’est pas fondé.
Quant au troisième moyen de cassation Le troisième moyen de cassation est « tiré de la contravention ou violation de la loi par la Cour d’appel, spécialement de la violation de l’article 89 de la Constitution faisant obligation pour les juges de motiver leur décision.
En ce que l’arrêt entrepris, pour déclarer que Monsieur PERSONNE1.) n’avait pas d’intérêt à agir, la Cour d’appel a dans un premier temps rappelé de manière correcte qu’il suffit, au moment de l’examen de la recevabilité de la citation directe, que le citant direct justifie d’avoir au moins un intérêt « apparent » à agir en justice, qu’il puisse être lésé par l’infraction reprochée, pour ensuite exiger toujours au stade de l’examen de la recevabilité de la citation directe, que le citant directe démontre la matérialité de ses différents postes de préjudice.
Au motif que, « L’intérêt à agir consiste en l’avantage matériel ou moral, effectif et non théorique, que le demandeur peut retirer de la demande au moment où il la formule ; il suffit que la partie civile (qu’il faut assimiler, pour les besoins de la cause, au citant direct), lors de l’examen de la recevabilité de l’action civile, ait un intérêt, du moins apparent, à agir, respectivement puisse être lésée par l’infraction (cf en ce sens Manuel de procédure pénale, Ed. Larcier, par M. Franchimont, A. Jacobs, A. Masset, 4e édit., page 176).
Le dommage, outre l’exigence qu’il doit être direct, personnel, légitime, né et actuel, matériel ou moral, doit, tout d’abord, être pénal, c’est-à-dire qu’il doit prendre sa source dans une infraction, ce qui signifie que le dommage doit être la conséquence de l’infraction à la loi pénale : l’action doit ainsi être fondée sur l’infraction et celle-
ci doit être la cause du dommage subi par la victime (cf ibidem op cit, p. 177).
Pour ce qui est des autres caractères du dommage, il est rappelé que le dommage doit être direct, ce qui signifie qu’il doit être la conséquence de l’infraction. L’exigence d’un intérêt personnel requiert par ailleurs que la partie qui se prétend lésée par une infraction doit invoquer un dommage précis et personnel en résultant. Concernant l’exigence que le dommage invoqué doit être né et actuel, respectivement actuel et certain, cela signifie que le dommage doit exister au moment de l’exercice de l’action civile. Si le préjudice invoqué est éventuel et incertain, la partie qui invoque ce 21 préjudice n’est pas recevable à agir en justice étant observé que cette condition de recevabilité entraîne souvent un examen sur le fond du droit avec lequel elle a tendance à se confondre (cf en ce sens ibidem op cit, pages 179, 186).
[…] Etant donné qu’il se dégage des développements faits ci-avant que l’avantage matériel ou moral que PERSONNE1.) entend retirer de sa demande est sans substance, ce dommage étant purement théorique, sans être effectif, il en suit que la matérialité d’un préjudice indemnisable en tant que conséquence de l’infraction qui est reprochée à la BANQUE fait défaut, de sorte qu’il faut en déduire, indépendamment de tout autre débat, que la condition ayant trait à l’intérêt à agir n’est pas donnée dans le chef de PERSONNE1.). » Alors que, la Cour d’appel a, dans sa décision à quelques paragraphes d’intervalle, exposé des motifs totalement inconciliables et contraires, violant ainsi l’exigence de motivation exigée à l’article 89 de la Constitution.
La Cour d’appel après avoir rappelé qu’il suffit que le citant direct puisse se prévaloir au moins d’un intérêt apparent au stade de l’examen de la recevabilité de la citation directe, a ensuite examiné « la matérialité d’un préjudice indemnisable en tant que conséquence de l’infraction qui est reprochée à la Banque fait défaut, de sorte qu’il faut en déduire, indépendamment de tout autre débat, que la condition ayant à l’intérêt à agir n’est pas donnée dans le chef de PERSONNE1.) », Ce faisant la Cour d’appel s’est contredite dans ses motifs.
De prime abord il importe de relever qu’à l’article 89 de la Constitution invoqué à l’appui du troisième moyen de cassation, il y a lieu de substituer l’article 109 de la Constitution dans sa version applicable depuis le 1er janvier 2023.
L’article 109 de la Constitution, tout comme l’ancien article 89 dispose que, « Tout jugement est motivé. Il est prononcé en audience publique. ».
Dans la mesure où la mention à l’article 89 de la Constitution procède, de l’avis de la soussignée, d’une erreur matérielle, en ce que la partie demanderesse en cassation a manifestement entendu invoquer l’article 89 de la Constitution dans son ancienne version, -devenu l’article 109 de la version applicable depuis le 1er janvier 2023-, la soussignée considère que, le moyen n’encourt pas d’irrecevabilité de ce chef.
A l’appui de son troisième moyen, la partie demanderesse en cassation fait grief aux magistrats d’appel de s’être contredits dans leur motivation, en ce qu’ils auraient d’une part retenu que pour être recevable à agir, il suffit de faire valoir un intérêt « apparent », et, d’autre part exigé que le citant directe doive justifier de la « matérialité effective et concrète de son préjudice » pour avoir intérêt à agir.
Dans le cadre de la discussion de son troisième moyen, la partie demanderesse en cassation, après avoir soutenu que la motivation des magistrats d’appel serait contradictoire, ce qui équivaudrait à un défaut de motifs, a ensuite, après avoir sélectionné les motifs de l’arrêt entrepris lui paraissant pertinents, soutenu que, « la Cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision et a violé son obligation de motivation ».4 A titre principal il convient de rappeler qu’aux termes de l’article 10, alinéa 2, de la loi modifiée du 18 février 1885 sur les pourvois et la procédure en cassation, un moyen ou un élément de moyen ne doit, sous peine d’irrecevabilité, mettre en œuvre qu’un seul cas d’ouverture.
Le moyen sous analyse vise d’une part, en tant que tiré de la violation de l’article 109 de la Constitution, le défaut de motifs, qui est un vice de forme, et, d’autre part, l’insuffisance de motifs constitutive d’un défaut de base légale, qui est un vice de fond, partant deux cas d’ouverture distincts.
Il en suit que le troisième moyen est irrecevable.
A titre subsidiaire, peut-on retenir qu’en substance, le troisième moyen de cassation est tiré de la contradiction de motifs.
A bien comprendre, la partie demanderesse en cassation voit cette contradiction affectant la motivation de la Cour d’appel qui déclare irrecevable la citation directe faute d’intérêt à agir, dans le fait que les juges d’appel exposent d’abord que l’allégation de l’apparence d’un dommage suffit pour être recevable à agir, mais retiennent ensuite, que dans le cas d’espèce, la citation directe est cependant irrecevable, faute par la citante directe d’avoir prouvé l’existence concrète de son dommage.
Or, cette analyse procède, de l’avis de la soussignée, d’une mauvaise lecture de la motivation de l’arrêt attaqué Il n’existe, en réalité, aucune contradiction entre les motifs invoqués, dans la mesure où la Cour d’appel, après avoir rappelé le principe général selon lequel il suffit que le dommage allégué puisse exister en apparence pour être recevable à citer directement, n’a, dans la suite de son raisonnement et contrairement à l’affirmation de la partie demanderesse en cassation, pas exigé que la citante directe justifie de la matérialité des différents postes d’un préjudice effectif et concret, mais a constaté, que dans le cas d’espèce l’existence-même d’un préjudice réparable causé par l’infraction, objet de la citation directe, faisait défaut. Autrement exprimé, la Cour d’appel a-t-elle jugé qu’en l’absence d’invocation d’un préjudice constitutif d’un dommage réparable, la citante directe ne justifie pas avoir pu être lésée par l’infraction, 4 Pourvoi en cassation, page 17, alinéa 3 in fine. objet de la citation directe, en sorte qu’elle reste en défaut de justifier de son intérêt, même seulement apparent, à agir.
Les motifs critiqués sont donc le fruit d’un raisonnement parfaitement logique et intelligible, de sorte qu’ils ne satisfont aucunement aux critères de motifs contradictoires susceptibles de vivier l’arrêt, critères qui supposent que des motifs soient contradictoires à un point tel qu’ils se détruisent et s’annihilent réciproquement, aucun ne pouvant être retenu comme fondement de la décision. La contradiction ne peut en effet être retenue que si elle est réelle et profonde, c’est-à-dire s’il existe entre les motifs incriminés une véritable incompatibilité.
Il en suit que, dans la mesure où les motifs de l’arrêt attaqué ne sont même pas d’apparence contradictoires, le moyen manque en fait.
A titre encore plus subsidiaire on pourrait également, sur base des développements ci-
dessus, tout aussi bien considérer qu’en se déterminant par les motifs reproduits au moyen, les juges du fond ne se sont pas contredits, mais ont, au contraire, exposé une motivation exempte de contradiction, en sorte que le moyen n’est pas fondé.
Quant au quatrième moyen de cassation Tiré de la violation sinon du refus d’application, sinon du défaut d’application, sinon de la fausse application du principe de la réparation intégrale du dommage subi par la victime.
En ce que la Cour d’appel pour apprécier la recevabilité de la citation directe, a écarté les demandes en obtention d’une indemnité de procédure au titre de l’article 194 du Code de procédure pénale et des frais et dépens, indiquant que ces préjudices n’étaient constitutifs que d’accessoires dans le chef du citant direct.
Au motif que, « Concernant l’exigence que le dommage doit exister au moment de l’exercice de l’action civile en tant que conséquence de l’infraction, il est rappelé que l’infraction qui est, en l’espèce, reprochée à la BANQUE est celle qui est prévue à l’article 458 du Code pénal ayant trait au secret professionnel, infraction à travers laquelle PERSONNE1.) estime avoir subi un préjudice matériel (549.367 euros) et moral (100.000 euros), la Cour d’appel notant que l’indemnité de procédure et les frais et dépens ne constituent que des accessoires, de sorte qu’ils n’entrent pas, à ce stade, en ligne de compte. » Alors que, en vertu du principe de la réparation intégrale du dommage de la victime et des dispositions claires de l’article 194 alinéa 3, cette dernière a droit au remboursement des frais qu’elle a dû supporter notamment pour sa défense en justice afin de voir reconnaître la violation par la Banque de son secret professionnel.
24 Qu’en écartant les postes de préjudice relatifs à l’indemnité de procédure et les frais et dépens, c’est à dire en les ignorant au stade de l’examen de la recevabilité de la citation directe quant à l’existence de l’intérêt à agir du demandeur en justice la Cour d’appel a violé le principe susvisé.
A titre principal il appert que le quatrième moyen de cassation, en ce qu’il soulève la violation d’un principe de droit, ne constitue, à défaut d’indication d’un texte légal qui le consacre, pas un cas d’ouverture à cassation.5 Il en suit que le moyen est irrecevable.
A titre subsidiaire, il peut être relevé que l’article 194 alinéa 3 du Code de procédure pénale auquel se réfère la partie demanderesse en cassation, dispose que, « Lorsqu’il paraît inéquitable de laisser à la charge d’une partie les sommes exposées par elle et non comprises dans les dépens, le tribunal peut condamner l’autre partie à lui payer le montant qu’il détermine. ».
Il résulte dès lors des termes clairs de cet article que l’allégation de la partie demanderesse en cassation exposée dans le cadre de son moyen et selon laquelle « cette dernière [la victime]a droit au remboursement des frais qu’elle a dû supporter notamment pour sa défense en justice » résulte d’une mauvaise lecture de ladite disposition en ce que cette dernière n’édicte pas un droit au profit de la victime, mais donne aux juridictions pénales la possibilité de condamner une partie au remboursement des frais exposés par elle pour la défense de ses intérêts, à l’instar de ce qui est le cas en matière civile par le biais de l’article 240 du Nouveau Code de procédure civile.
Dès lors, dans la mesure où l’indemnité de procédure relève du pouvoir d’appréciation souverain des juges du fond, elle échappe au contrôle de Votre Cour.
Le moyen ne saurait être accueilli.
A titre plus subsidiaire s’impose le constat que, à l’image des développements exposés plus haut ayant trait à l’absence de préjudice causé par l’infraction de violation du secret bancaire, objet de la citation directe lancée par la partie demanderesse en cassation, tous dommages-intérêts rattachés à la seule mise en œuvre d’une voie de droit, ne sauraient être pris en considération au niveau de la recevabilité de l’action.
Il en suit que le moyen n’est pas fondé.
5 Voir à titre d’illustration, Cour de cassation, 27 octobre 2016, n°82/16Quant au cinquième moyen de cassation Tiré de la violation par la Cour d’appel de l’article 89 de la Constitution faisant obligation pour les juges de motiver leur décision et de l’article 6 paragraphe 1 de la CEDH.
En ce que l’arrêt entrepris, pour déclarer que Monsieur PERSONNE1.) n’avait pas d’intérêt à agir, la Cour d’appel a écarté les postes de préjudice réclamés au titre de l’indemnité de procédure et les frais et dépens sans autrement justifier sa décision.
Au motif que, « Concernant l’exigence que le dommage doit exister au moment de l’exercice de l’action civile en tant que conséquence de l’infraction, il est rappelé que l’infraction qui est, en l’espèce, reprochée à la BANQUE est celle qui est prévue à l’article 458 du Code pénal ayant trait au secret professionnel, infraction à travers laquelle PERSONNE1.) estime avoir subi un préjudice matériel (549.367 euros) et moral (100.000 euros), la Cour d’appel notant que l’indemnité de procédure et les frais et dépens ne constituent que des accessoires, de sorte qu’ils n’entrent pas, à ce stade, en ligne de compte. » Alors que, la Cour d’appel a écarté sans expliquer sur quels textes ou raisonnement juridique elle se basait, les préjudices liés aux frais et dépens et indemnité de procédure, de l’examen de la recevabilité de la demande de Monsieur PERSONNE1.) lui déniant ainsi tout intérêt à agir en justice.
A l’instar des observations présentées au troisième moyen de cassation, la soussignée considère que la référence à l’article 89 de la Constitution relève d’une erreur matérielle et qu’il y a par conséquent lieu de lui substituer l’article 109 de la Constitution dans sa version applicable depuis le 1er janvier 2023.
Le cinquième moyen de cassation, en ce qu’il est tiré de la violation de l’article 109 de la Constitution et, sous ce rapport, de l’article 6, paragraphe 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, vise le défaut de motifs, qui est un vice de forme.
Il est de principe qu’une décision judiciaire est régulière en la forme, dès qu’elle comporte une motivation, expresse ou implicite, même viciée sur le point considéré.
Pour décider que l’indemnité de procédure et les frais et dépens ne sont pas à prendre en considération pour apprécier l’existence d’un dommage au moment de l’action civile en tant que conséquence de l’infraction, l’arrêt attaqué a retenu que, « Concernant l’exigence que le dommage doit exister au moment de l’exercice de l’action civile en tant que conséquence de l’infraction, il est rappelé que l’infraction qui est, en l’espèce, reprochée à la BANQUE est celle qui est prévue à l’article 458 du Code pénal ayant trait au secret professionnel, infraction à travers laquelle PERSONNE1.) estime avoir subi un préjudice matériel (549.367 euros) et moral (100.000 euros), la Cour d’appel notant que l’indemnité de procédure et les frais et 26 dépens ne constituent que des accessoires, de sorte qu’ils n’entrent pas, à ce stade, en ligne de compte. ».
Par cette motivation, la Cour d’appel a, en qualifiant l’indemnité de procédure et les frais et dépens « d’accessoires » motivé sa décision.
Etant donné que l’arrêt attaqué comporte une motivation sur la question litigieuse, le cinquième moyen de cassation n’est pas fondé.
Conclusion Le pourvoi est recevable mais il est à rejeter.
Pour le Procureur général d’Etat, l’avocat général, Anita LECUIT 27