N° 52 / 2025 pénal du 27.03.2025 Not. 16833/14/CD Numéro CAS-2024-00108 du registre La Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg a rendu en son audience publique du jeudi, vingt-sept mars deux mille vingt-cinq, sur le pourvoi de PERSONNE1.), né le DATE1.) à ADRESSE1.), demeurant à ADRESSE2.), prévenu, demandeur en cassation, comparant par Maître Lydie LORANG, avocat à la Cour, en l’étude de laquelle domicile est élu, en présence du Ministère public l’arrêt qui suit :
Vu l’arrêt attaqué rendu le 11 juin 2024 sous le numéro 186/24 V. par la Cour d’appel du Grand-Duché de Luxembourg, cinquième chambre, siégeant en matière correctionnelle ;
Vu le pourvoi en cassation au pénal formé par Maître Elisabeth KOHLL, avocat à la Cour, en remplacement de Maître Lydie LORANG, avocat à la Cour, au nom de PERSONNE1.), suivant déclaration du 10 juillet 2024 au greffe de la Cour supérieure de Justice ;
Vu le mémoire en cassation déposé le 9 août 2024 au greffe de la Cour ;
Sur les conclusions du premier avocat général Sandra KERSCH.
Sur les faits Selon l’arrêt attaqué, le Tribunal d’arrondissement de Luxembourg, siégeant en matière correctionnelle, avait condamné le demandeur en cassation du chef d’infractions de faux, usage de faux, escroquerie et blanchiment-détention, à une peine d’emprisonnement assortie d’un sursis probatoire intégral et à une amende.
La Cour d’appel, par réformation, a acquitté le demandeur en cassation du chef de l’infraction de faux et assorti la peine d’emprisonnement du sursis simple intégral. Pour le surplus, elle a confirmé le jugement au pénal.
Sur le premier moyen de cassation Enoncé du moyen « Tiré de la violation de l’article 6§1 et §3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme, et insuffisance de motivation ;
en ce que l’arrêt attaqué a constaté le caractère déraisonnable de la durée de la procédure, prononcé la recevabilité des poursuites et déclaré Monsieur PERSONNE1.) coupable d’usage de faux, d’escroquerie et de blanchiment-
détention ;
aux motifs que que la période d’inaction des autorités poursuivantes entre l’inculpation du prévenu le 14 juillet 2017 et le 7 octobre 2019 et la cloture de l’instruction le 2 novembre 2020 est anormalement longue, ainsi que la période entre l’ordonnance de renvoi de la chambre du conseil du 3 mars 20°21 et la première citation à l’audience du prévenu le 22 novembre 2021 pour l’audience du 19 janvier 2022, de sorte que le délai raisonnable tel que prévu par l’article 6.1 de la Convention européenne des droits de l’homme est dépassé, ce d’autant plus que les faits datent de 2014.
L’irrecevabilité ne doit cependant être retenue que si l’exercice de l’action publique devant les juridictions de jugement s’avère totalement inconciliable avec un exercice valable des droits de la défense.
Or, en l’espèce, il ne résulte pas dudit dépassement que les droits de la défense soient irrémédiablement compromis, alors que le prévenu, ainsi que ses défenseurs ont été en mesure d’exercer convenablement leurs droits de la défense, suite aux accusations portées contre le prévenu. Il a été présenté au juge d’instruction et a pu exercer tous les recours à sa disposition, comme demander une expertise sur les pièces du dossier ou demander de faire entendre les témoins qu’il jugeait utiles, le prévenu ayant déjà été assisté d’un mandataire pendant l’instruction.
Après les appels du 7 et 8 novembre 2022, l’affaire a été appelée une première fois en audience du 19 mars 2023 où elle a été refixée sur demande de la défense du prévenu, à la date du 26 septembre 2023. A cette date, l’affaire a été reportée en raison du fait que la défense a versé un grand nombre de pièces et une importante 2 note de plaidoirie peu avant l’audience pour être finalement plaidée aux audiences des 19 mars 2024 et 7 mai 2024. Tous ces retards n’étant pas à mettre sur le compte des autorités poursuivantes, aucun délai supplémentaire n’est partant venu se rajouter.
C’est dès lors à bon droit que les juges de première instance n’ont pas prononcé l’irrecevabilité des poursuites, mais ont retenu que le dépassement du délai raisonnable doit se répercuter au niveau de la peine » ;
1) alors que, toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue dans un délai raisonnable ; qu’il appartient aux juridictions répressives d’apprécier le caractère raisonnable de la durée d’une procédure en recherchant, sur la base des éléments concrets de l’espèce, si cette durée ne compromet pas irrémédiablement l’équité du procès et le respect des droits de la défense ; qu’en l’espèce, pour juger que les droits de la défense de Monsieur PERSONNE1.) n’ont pas été irrémédiablement compromis, la Cour d’appel s’est fondée de manière abstraite sur sa présentation à un juge d’instruction, la possibilité d’exercer des recours et l’assistance par un mandataire au cours de cette information judiciaire, sans rechercher concrètement, si le décès de Monsieur PERSONNE2.), l’accusateur de Monsieur PERSONNE1.) et coprévenu, pendant ce laps de temps, ne rendait pas impossible la tenue du procès dans des conditions conformes aux exigences de l’article 6, paragraphes 1 et 3 de la Convention européenne des droits de l’homme, et notamment du droit de faire interroger les témoins à charge, la Cour d’appel a et a violé cet article. » Réponse de la Cour Il ne résulte pas de l’arrêt attaqué que le demandeur en cassation ait fait valoir devant les juges du fond que la durée excessivement longue de la procédure ait compromis l’équité du procès et l’exercice utile des droits de la défense au stade du jugement en raison de l’impossibilité de faire auditionner le coprévenu, décédé avant l’audience de première instance.
Le moyen est dès lors nouveau et, en ce qu’il comporterait un examen des circonstances de fait, mélangé de fait et de droit.
Il s’ensuit que le moyen est irrecevable.
Sur le deuxième moyen de cassation Enoncé du moyen « Tiré d’une violation de l’article 109 de la Constitution, pour défaut de motifs ;
en ce que l’arrêt attaqué a déclaré Monsieur PERSONNE1.) coupable d’usage de faux, d’escroquerie et de blanchiment-détention ;
3 aux motifs que chèque, dès lors qu'il l'a envoyé à la SOCIETE1.) pour encaissement sur le compte de la société SOCIETE2.) S.A Il a ordonné par la suite, par trois transferts, que la presque totalité des montants parvenus sur le compte de la société SOCIETE2.) S.A lui parviennent sur ses comptes privés et sur le compte de la société SOCIETE3.) S.A, de sorte que c'est à juste titre que les juges de première instance ont retenu qu'il en a fait usage.
PERSONNE1.) ne pouvait ignorer le caractère falsifié du chèque alors que PERSONNE2.) lui a demandé de justifier du montant indiqué sur le chèque par une facture qu'il reconnaît avoir lui-même confectionnée pour être ajustée au montant du chèque.
Par ailleurs, il a également fait parvenir le chèque au gestionnaire du compte de la société SOCIETE2.) S.A auprès de la SOCIETE1.), en laissant, au moins dans un premier temps, les autres administrateurs de la société SOCIETE2.) S.A dans l'ignorance de l'arrivée de fonds et surtout de leur transfert vers son compte privé.
L'argent n'a pas été transféré par le prévenu au bénéfice de la société SOCIETE4.), au nom de laquelle la facture justifiant du transfert de fonds a été émise, ni utilisé pour les investissements dont il a fait état dans le cadre de son projet VARS 2000, tel qu'il a voulu le faire croire au gestionnaire du compte, mais a été utilisé en grande partie par le prévenu pour ses besoins personnels (remboursement de prêts etc.). Les fonds provenant du chèque falsifié n'ont partant pas été utilisés tel qu'il a été soutenu par le prévenu pour financer le projet "VARS 2000" et payer des frais dans ce cadre.
Au moment où la SOCIETE1.) a réclamé le retour des fonds obtenus frauduleusement, le prévenu n'a pas rectifié l'erreur de transfert, de sorte qu'il a agi en connaissance de cause et à dessin de nuire.
C'est partant à bon droit que le prévenu a été retenu dans les liens de l'infraction d'usage de faux.
Il y a partant lieu de lire sub 1. du jugement entrepris :
"[. .. ]dans une intention frauduleuse et à dessin de nuire, avoir fait usage d'un faux en écritures de banque, en l'espèce, d'avoir, dans une intention frauduleuse et à dessin de nuire, fait usage d'un chèque falsifié par modification du nom du bénéficiaire et du montant originairement apposé, portant le numéroNUMERO1.) émis le 14 janvier 2014 par la société SOCIETE5.), en le remettant pour encaissement à PERSONNE3.), né le DATE2.), employé auprès de l'agence de la SOCIETE1.), sis à L-ADRESSE3.)." Quant à l'escroquerie L'escroquerie requiert trois éléments constitutifs :
a) l'emploi de faux noms, de fausses qualités ou de manoeuvres frauduleuses, b) la remise ou la délivrance de fonds, meubles, obligations, quittances ou décharges, 4 c) l'intention de s'approprier le bien d'autrui.
La qualification d'escroquerie ne saurait être retenue qu'à condition que l'auteur ait employé un des moyens limitativement énumérés par l'article 496 du Code pénal, soit l'emploi d'un faux nom, soit d'une fausse qualité, soit des manœuvres frauduleuses, revêtant une forme extérieure et déterminant la remise.
En ce qui concerne l'escroquerie par l'emploi de manoeuvres frauduleuses, leur but étant de créer une croyance fausse dans l'esprit de la victime, il est admis qu'il y a lieu d'examiner si, dans l'esprit de l'escroc, elles étaient de nature à surprendre la victime à qui l'escroc s'adressait, voire si elles ont été employées dans l'espoir qu'elles provoqueraient une erreur déterminante (cf. Merle et Vitu, Traité de Droit criminel, Droit pénal spécial, T II n°2336).
On entend par manoeuvres frauduleuses, le recours à une « machination, à des artifices ou à une mise en scène, ayant pour but et pour résultat de tromper autrui afin de s'approprier son bien. Pareilles machinations, artifices ou mises en scène peuvent être constitués par un ensemble de faits dont chacun n'est qu'un élément de la manoeuvre frauduleuse, et ne réunit pourtant pas, à lui seul, tous les caractères de celle-ci ».
En remettant à la SOCIETE1.) un chèque pour encaissement qu'il savait falsifié, le prévenu a usé de manoeuvres frauduleuses pour tromper la confiance de la banque, manoeuvres qui ont été déterminantes pour la remise de fonds et ce dans le but de s'approprier des fonds appartenant à SOCIETE5.), partant dans une intention frauduleuse.
En effet, s'il résulte du dossier qu'il n'est pas exclu que le prévenu ait partagé au moins pour partie l'argent provenant de l'usage du faux chèque avec PERSONNE2.), tel qu'il résulte de messages échangés avec ce dernier pendant les mois de mars et avril 2014 et que même au mois de mai 2014, PERSONNE2.) soit devenu plus pressant (rapport 810, annexe du rapport JDA-SPJ11/2017/36810-28 du 27 novembre 2017 du SPJ, criminalité générale, faux moyens de paiement), il reste que le prévenu a activement participé aux manoeuvres frauduleuses ayant convaincu la SOCIETE1.) de faire encaisser le faux chèque, portant ainsi préjudice à la société SOCIETE5.), qui a perdu, suite à ces manoeuvres presqu'un demi-million d'euros. Il a tenté de faire transiter rapidement les fonds par la société SOCIETE2.) S.A, sans que les autres administrateurs ne soient avertis dans l'immédiat.
Les déclarations du prévenu quant à la justification du transfert de fonds sont restées incongrues ab initio. Il a affirmé recevoir de l'argent pour son projet " Vars 2000 ", alors qu'il a soumis à la SOCIETE1.) une facture au nom de sa société SOCIETE4.) sans vraies précisions sur les prestations fournies, facture qu'il a simplement alignée sur le montant du chèque falsifié.
Il est sans incidence au niveau de la qualification de l'infraction, de savoir si le prévenu a été le bénéficiaire final des fonds ou s'il agissait pour autrui.
En effet, il n'est pas nécessaire, pour que l'infraction soit constituée, que le prévenu ait tiré un profit personnel de l'infraction. L'escroquerie ne suppose pas la 5 caractérisation d'un dol spécial, qui consisterait dans la volonté de tirer un bénéfice de la consommation du délit (Crim.fr. 9 mars 1972, JCP 1973. Il. 17434).
L'infraction d'escroquerie a partant été retenue à juste titre à l'encontre de PERSONNE1.).
- Quant à l'infraction à l'article 506-1 du Code pénal Les juges de première instance sont à confirmer d'avoir retenu le prévenu dans les liens de la prévention de blanchiment-détention pour avoir détenu les fonds provenant des infractions d'usage de faux et de d'escroquerie.
En effet, en ayant reçu sur les comptes de la société dont il est le bénéficiaire économique et sur ses comptes privés les fonds obtenus suite à l'encaissement du chèque falsifié, le prévenu a également détenu des fonds qu'il savait provenir d'une infraction ».
1) alors que, la défense de Monsieur PERSONNE1.) faisait expressément valoir une violation de ses droits de la défense résultant de l’absence de l’original du chèque au dossier de la procédure (Arrêt, p. 16) ; que si la cour d’appel a répondu à cet argument pour acquitter Monsieur PERSONNE1.) du chef de faux, en énonçant que (Arrêt, p. 22), elle s’est totalement abstenue de tenir compte de ce moyen dans son appréciation de l’intention de l’usage de faux, de l’escroquerie et du blanchiment-détention, malgré le fait que les caractéristiques du document original, a fortiori s’il est acquis pour la cour d’appel qu’il n’a pas été établi par le prévenu, constituait un point déterminant pour l’appréciation de ces éléments ; que la décision se trouve donc privée de motifs, en violation de l’article 109 de la Constitution. » Réponse de la Cour Le défaut de réponse à conclusions constitue une forme du défaut de motifs qui est un vice de forme. Une décision judiciaire est régulière en la forme dès qu’elle comporte une motivation, expresse ou implicite, sur le point considéré.
Il résulte de l’arrêt attaqué que le mandataire du demandeur en cassation a soutenu devant les juges d’appel que « dans la mesure où l’original du faux ne se trouve qu’en copie dans le dossier, sa fausseté n’a pas pu être établie avec certitude, de sorte que cette infraction, tout comme l’usage du faux et l’escroquerie ne sont pas donnés ».
En retenant « Le fait que l’original du chèque ne figure pas au dossier ne porte pas à conséquences, alors qu’il n’est pas contestable que le chèque a été encaissé à l’encontre de SOCIETE5.) pour le compte de la société SOCIETE2.) S.A. avec le même numéro que celui envoyé à PERSONNE4.). La qualité de faux ne fait pas de doute et ce même s’il s’agissait d’une parfaite copie d’un autre chèque. Le fait que les banques ont, dans un premier temps, manqué de reconnaître son caractère falsifié 6 ne fait pas preuve de son authenticité, mais ne témoigne, le cas échéant, que de la qualité du faux. » et « PERSONNE1.) a cependant été en possession du faux chèque, dès lors qu’il l’a envoyé à la SOCIETE1.) pour encaissement sur le compte de la société SOCIETE2.) S.A. Il a ordonné par la suite, par trois transferts, que la presque totalité des montants parvenus sur le compte de la société SOCIETE2.) S.A. lui parviennent sur ses comptes privés et sur le compte de la société SOCIETE3.) S.A., de sorte que c’est à juste titre que les juges de première instance ont retenu qu’il en a fait usage.
PERSONNE1.) ne pouvait ignorer le caractère falsifié du chèque alors que PERSONNE2.) lui a demandé de justifier du montant indiqué sur le chèque par une facture qu’il reconnaît avoir lui-même confectionnée pour être ajustée au montant du chèque. », les juges d’appel ont motivé leur décision quant à l’incidence de l’absence de l’original du chèque au dossier et quant à la connaissance par le demandeur en cassation du caractère falsifié du chèque.
Il s’ensuit que le moyen n’est pas fondé.
Sur le troisième moyen de cassation Enoncé du moyen « Tiré de la violation de l’article 6§2 de la Convention européenne des droits de l’homme, insuffisance de motivation dans la caractérisation de l’élément moral exigé par les articles 193, 196 et 197 du Code pénal en méconnaissance de l’article 195 du code de procédure pénale et défaut de base légale ;
en ce que l’arrêt attaqué a confirmé le jugement en ce qu’il a déclaré Monsieur PERSONNE1.) coupable d’usage de faux ;
aux motifs que sous seing privé.
Il convient de rappeler que le chèque émis et argué de faux est, selon les personnes entendues en cause, altéré au niveau du montant et du bénéficiaire en question. Il est constant en cause que le document versé au dossier comporte le même numéro qu’un chèque envoyé à PERSONNE4.) qui a clôturé son compte auprès de la société SOCIETE5.). Le fait que l’original du chèque ne figure pas au dossier ne porte pas à conséquences, alors qu’il n’est pas contestable que le chèque a été encaissé à l’encontre de SOCIETE5.) pour le compte de la société SOCIETE2.) S.A.
avec le même numéro que celui envoyé à PERSONNE4.). La qualité de faux ne fait pas de doute et ce même s’il s’agissait d’une parfaite copie d’un autre chèque. Le fait que les banques ont, dans un premier temps, manqué de reconnaître son 7 caractère falsifié ne fait pas preuve de son authenticité, mais ne témoigne, le cas échéant, que de la qualité du faux.
Ledit écrit était susceptible de causer et a finalement causé un dommage à SOCIETE5.).
Cependant, le simple fait que le prévenu soit imprimeur, à défaut d’autre élément probant, ne permet pas de conclure qu’il ait confectionné l’écrit litigieux, de sorte que c’est à tort qu’il a été retenu dans les liens de l’infraction de faux.
Par réformation de la décision entreprise, PERSONNE1.) est partant à acquitter de l’infraction de faux.
PERSONNE1.) a cependant été en possession du faux chèque, dès lors qu’il l’a envoyé à la SOCIETE1.) pour encaissement sur le compte de la société SOCIETE2.) S.A. Il a ordonné par la suite, par trois transferts, que la presque totalité des montants parvenus sur le compte de la société SOCIETE2.) S.A. lui parviennent sur ses comptes privés et sur le compte de la société SOCIETE3.) S.A., de sorte que c’est à juste titre que les juges de première instance ont retenu qu’il en a fait usage.
PERSONNE1.) ne pouvait ignorer le caractère falsifié du chèque alors que PERSONNE2.) lui a demandé de justifier du montant indiqué sur le chèque par une facture qu’il reconnaît avoir lui-même confectionnée pour être ajustée au montant du chèque.
Par ailleurs, il a également fait parvenir le chèque au gestionnaire du compte de la société SOCIETE2.) S.A. auprès de la SOCIETE1.), en laissant, au moins dans un premier temps, les autres administrateurs de la société SOCIETE2.) S.A. dans l’ignorance de l’arrivée de fonds et surtout de leur transfert vers son compte privé.
L’argent n’a pas été transféré par le prévenu au bénéfice de la société SOCIETE4.), au nom de laquelle la facture justifiant du transfert de fonds a été émise, ni utilisée pour les investissements dont il a fait état dans le cadre de son projet VARS 2000, tel qu’il a voulu le faire croire au gestionnaire du compte, mais a été utilisé en grande partie par le prévenu pour ses besoins personnels (remboursement de prêts etc.). Les fonds provenant du chèque falsifié n’ont partant pas été utilisés tel qu’il a été soutenu par le prévenu pour financer le projet "VARS 2000" et payer des frais dans ce cadre.
Au moment où la SOCIETE1.) a réclamé le retour des fonds obtenus frauduleusement, le prévenu n’a pas rectifié l’erreur de transfert, de sorte qu’il a agi en connaissance de cause et à dessin de nuire.
C’est partant à bon droit que le prévenu a été retenu dans les liens de l’infraction d’usage de faux.
Il y a partant lieu de lire sub I. du jugement entrepris :
" […] dans une intention frauduleuse et à dessin de nuire, avoir fait usage d’un faux en écritures de banque, 8 En l’espèce, d’avoir dans une intention frauduleuse et à dessin de nuire, fait usage d’un chèque falsifié par modification du nom du bénéficiaire et du montant originairement apposé, portant le portant le numéroNUMERO1.) émis le 14 janvier 2014 par la société SOCIETE5.), en le remettant pour encaissement à PERSONNE3.), né le DATE2.), employé auprès de l’agence de la Banque SOCIETE1.) sise à L-ADRESSE3.) " ;» 1) alors que, (première branche), il découle du droit à la présomption d’innocence que la charge de la preuve de la caractérisation de l’élément intentionnel pèse sur l’accusation ; que les infractions de faux et usage de faux sont des infractions intentionnelles, nécessitant la preuve de l’existence de la volonté de commettre l’infraction définie par la loi ; qu’en l’espèce, la Cour d’appel, qui avait constaté que Monsieur PERSONNE1.) n’était pas l’auteur du chèque, et que sa falsification était selon elle d’une qualité telle que la banque avait manqué de reconnaître son caractère falsifié, n’était pas en droit d’affirmer que (Arrêt, p. 23) ; qu’en effet, le fait d’ajuster une facture en fonction du montant d’un paiement n’étant en rien significatif de la connaissance de la provenance illicite de ce paiement, cette motivation revient à renverser la charge de la preuve de l’intention au détriment de Monsieur PERSONNE1.), en violation de l’article 6§2 de la Convention européenne des droits de l’homme, et caractérise un défaut de base légale ;
2) alors que, (deuxième branche), en s’appuyant sur des éléments postérieurs à la présentation du chèque par Monsieur PERSONNE1.) auprès de la SOCIETE1.) tels que les virements subséquents réalisés depuis la société SOCIETE2.) SA sur le compte de laquelle il avait été déposé sans la signature d’autres associés, l’alignement d’une facture établie au nom d’une autre société sur le montant porté sur ledit chèque, l’utilisation qui a été faite de ces fonds, ou encore l’absence de retour des fonds lorsque la SOCIETE1.) l’aurait informé d’une difficulté, circonstances qui, tant prises séparément que dans leur ensemble, relèvent de la gestion postérieure des fonds ainsi crédités, et ne permettent pas d’établir la connaissance du caractère falsifié du chèque reçu de la part de PERSONNE5.), à la confection duquel Monsieur PERSONNE1.) n’a pas participé et dont l’arrêt a constaté qu’il ne pouvait, par ses caractères intrinsèques, alerter quiconque quant à son authenticité, la Cour d’appel s’est prononcée par des motifs insuffisants. » Réponse de la Cour Sur la première branche du moyen Le demandeur en cassation fait grief aux juges d’appel d’avoir porté atteinte à la présomption d’innocence garantie par l’article 6, paragraphe 2, de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, en ayant inversé la charge de la preuve de l’élément intentionnel de l’infraction d’usage de faux.
En retenant « PERSONNE1.) a cependant été en possession du faux chèque, dès lors qu’il l’a envoyé à la SOCIETE1.) pour encaissement sur le compte de la société SOCIETE2.) S.A. Il a ordonné par la suite, par trois transferts, que la presque totalité des montants parvenus sur le compte de la société SOCIETE2.) S.A. lui parviennent sur ses comptes privés et sur le compte de la société SOCIETE3.) S.A., de sorte que c’est à juste titre que les juges de première instance ont retenu qu’il en a fait usage.
PERSONNE1.) ne pouvait ignorer le caractère falsifié du chèque alors que PERSONNE2.) lui a demandé de justifier du montant indiqué sur le chèque par une facture qu’il reconnaît avoir lui-même confectionnée pour être ajustée au montant du chèque.
Par ailleurs, il a également fait parvenir le chèque au gestionnaire du compte de la société SOCIETE2.) S.A. auprès de la SOCIETE1.), en laissant, au moins dans un premier temps, les autres administrateurs de la société SOCIETE2.) S.A. dans l’ignorance de l’arrivée de fonds et surtout de leur transfert vers son compte privé.
L’argent n’a pas été transféré par le prévenu au bénéfice de la société SOCIETE4.), au nom de laquelle la facture justifiant du transfert de fonds a été émise, ni utilisé pour les investissements dont il a fait état dans le cadre de son projet VARS 2000, tel qu’il a voulu le faire croire au gestionnaire du compte, mais a été utilisé en grande partie par le prévenu pour ses besoins personnels (remboursement de prêts etc.). Les fonds provenant du chèque falsifié n’ont partant pas été utilisés tel qu’il a été soutenu par le prévenu pour financer le projet « VARS 2000 » et payer des frais dans ce cadre.
Au moment où la SOCIETE1.) a réclamé le retour des fonds obtenus frauduleusement, le prévenu n’a pas rectifié l’erreur de transfert, de sorte qu’il a agi en connaissance de cause et à dessin de nuire. », les juges d’appel ont pu déduire l’élément intentionnel de l’usage de faux à partir des éléments du dossier sans violer le principe de la présomption d’innocence, ni celui selon lequel la charge de la preuve repose sur l’accusation.
Il s’ensuit que le moyen, pris en sa première branche, n’est pas fondé.
Sur la seconde branche du moyen Le demandeur en cassation fait grief aux juges d’appel de ne pas avoir suffisamment motivé leur décision concernant l’existence de l’élément intentionnel de l’infraction d’usage de faux, en s’étant appuyés notamment sur des éléments postérieurs à la présentation du chèque.
En se prononçant par les motifs énoncés à la réponse donnée à la première branche du moyen, les juges d’appel ont, par une motivation exempte d’insuffisance, caractérisé l’élément moral de l’infraction d’usage de faux retenue dans le chef du demandeur en cassation.
Il s’ensuit que le moyen, pris en sa seconde branche, n’est pas fondé.
Sur le quatrième moyen de cassation Enoncé du moyen « Tiré de l’insuffisance de motivation dans la caractérisation de l’élément moral exigé par l’article 496 du Code pénal en méconnaissance de l’article 195 du code de procédure pénale et défaut de base légale ;
en ce que l’arrêt attaqué a confirmé le jugement en ce qu’il a déclaré Monsieur PERSONNE1.) coupable d’escroquerie ;
aux motifs que l'auteur ait employé un des moyens limitativement énumérés par l'article 496 du Code pénal, soit l'emploi d'un faux nom, soit d'une fausse qualité, soit des manœuvres frauduleuses, revêtant une forme extérieure et déterminant la remise.
En ce qui concerne l'escroquerie par l'emploi de manoeuvres frauduleuses, leur but étant de créer une croyance fausse dans l'esprit de la victime, il est admis qu'il y a lieu d'examiner si, dans l'esprit de l'escroc, elles étaient de nature à surprendre la victime à qui l'escroc s'adressait, voire si elles ont été employées dans l'espoir qu'elles provoqueraient une erreur déterminante (cf. Merle et Vitu, Traité de Droit criminel, Droit pénal spécial, T II n°2336).
On entend par manoeuvres frauduleuses, le recours à une "machination, à des artifices ou à une mise en scène, ayant pour but et pour résultat de tromper autrui afin de s'approprier son bien. Pareilles machinations, artifices ou mises en scène peuvent être constitués par un ensemble de faits dont chacun n'est qu'un élément de la manoeuvre frauduleuse, et ne réunit pourtant pas, à lui seul, tous les caractères de celle-ci".
En remettant à la SOCIETE1.) un chèque pour encaissement qu'il savait falsifié, le prévenu a usé de manoeuvres frauduleuses pour tromper la confiance de la banque, manoeuvres qui ont été déterminantes pour la remise de fonds et ce dans le but de s'approprier des fonds appartenant à SOCIETE5.), partant dans une intention frauduleuse.
En effet, s'il résulte du dossier qu'il n'est pas exclu que le prévenu ait partagé au moins pour partie l'argent provenant de l'usage du faux chèque avec PERSONNE2.), tel qu'il résulte de messages échangés avec ce dernier pendant les 11 mois de mars et avril 2014 et que même au mois de mai 2014, PERSONNE2.) soit devenu plus pressant (rapport 810, annexe du rapport JDA-SPJ11/2017/36810-28 du 27 novembre 2017 du SPJ, criminalité générale, faux moyens de paiement), il reste que le prévenu a activement participé aux manoeuvres frauduleuses ayant convaincu la SOCIETE1.) de faire encaisser le faux chèque, portant ainsi préjudice à la société SOCIETE5.), qui a perdu, suite à ces manoeuvres presqu'un demi-million d'euros. Il a tenté de faire transiter rapidement les fonds par la société SOCIETE2.) S.A, sans que les autres administrateurs ne soient avertis dans l'immédiat.
Les déclarations du prévenu quant à la justification du transfert de fonds sont restées incongrues ab initio. Il a affirmé recevoir de l'argent pour son projet "Vars 2000", alors qu'il a soumis à la SOCIETE1.) une facture au nom de sa société SOCIETE4.) sans vraies précisions sur les prestations fournies, facture qu'il a simplement alignée sur le montant du chèque falsifié.
Il est sans incidence au niveau de la qualification de l'infraction, de savoir si le prévenu a été le bénéficiaire final des fonds ou s'il agissait pour autrui.
En effet, il n'est pas nécessaire, pour que l'infraction soit constituée, que le prévenu ait tiré un profit personnel de l'infraction. L'escroquerie ne suppose pas la caractérisation d'un dol spécial, qui consisterait dans la volonté de tirer un bénéfice de la consommation du délit (Crim.fr. 9 mars 1972, JCP 1973. Il. 17434).
L'infraction d'escroquerie a partant été retenue à juste titre à l'encontre de PERSONNE1.).» 1) alors que l’emploi de manœuvres frauduleuses réprimé au titre de l’article 496 du code de procédure pénale nécessite la conscience de la mise en œuvre d’une fraude ; qu’en se bornant à énoncer qu’ (Arrêt, p. 24), la Cour d’appel n’a pas démontré la connaissance qu’avait Monsieur PERSONNE1.) du caractère falsifié du chèque présenté à la SOCIETE1.), et par voie de conséquence, sa conscience d’utiliser des manœuvres frauduleuses à son égard, de sorte que l’arrêt se trouve privé de base légale. » Réponse de la Cour Le demandeur en cassation fait grief aux juges d’appel de ne pas avoir suffisamment motivé leur décision concernant l’existence de l’élément intentionnel de l’infraction d’escroquerie.
Le défaut de base légale, qui constitue un vice de fond, se définit comme l’insuffisance des constatations de fait qui sont nécessaires à la mise en œuvre de la règle de droit.
En ce qu’il est tiré de la violation de l’article 195 du Code de procédure pénale, le moyen vise le défaut de motivation qui est un vice de forme. Cette dispositionlégale est étrangère au grief invoqué, de sorte que le moyen est irrecevable sous ce rapport.
Par les motifs de l’arrêt reproduits au moyen, les juges d’appel ont, par une motivation exempte d’insuffisance, procédé aux constatations de fait nécessaires pour caractériser l’élément moral de l’infraction d’escroquerie retenue dans le chef du demandeur en cassation.
Il s’ensuit que le moyen n’est pas fondé.
Sur le cinquième moyen de cassation Enoncé du moyen « Tiré de la violation, sinon de la fausse interprétation, sinon de la fausse application de l’article 7§1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme, de l’article 19 de la Constitution entrée en vigueur le 1er juillet 2023, de l’article 2 alinéa 1er du Code pénal, ensemble les article 506-1, 197 et 496 du même code ;
en ce que l’arrêt attaqué a déclaré Monsieur PERSONNE1.) coupable de blanchiment d’escroquerie et d’usage de faux ;
aux motifs que retenu le prévenu dans les liens de la prévention de blanchiment-détention pour avoir détenu les fonds provenant des infractions d’usage de faux et d’escroquerie.
En effet, en ayant reçu sur les comptes de la société dont il est le bénéficiaire économique et sur ses comptes privés les fonds obtenus suite à l’encaissement du chèque falsifié, le prévenu a également détenu des fonds qu’il savait provenir d’une infraction » ;
1) alors que le principe de légalité et son corollaire, le principe de non-
rétroactivité de la loi pénale, impliquent que le comportement répréhensible ait été initié postérieurement à l’entrée en vigueur de la loi portant incrimination ; que ce principe vaut en cas d’extension du champ d’application du blanchiment-détention à une infraction jusqu’alors non prévue comme susceptible de constituer l’infraction d’origine de ce délit de conséquence ; qu’en retenant Monsieur PERSONNE1.) coupable du chef d’un blanchiment portant sur une escroquerie et un usage de faux, lorsqu’à l’époque des faits, ni la première ni la seconde de ces infractions n’entraient dans la liste des infractions sous-jacentes au blanchiment limitativement listées à l’article 506-1 du Code pénal, la Cour d’appel a violé les textes visés au moyen et les principes fondamentaux qui en découlent. » Réponse de la Cour Le demandeur en cassation fait grief aux juges d’appel d’avoir violé le principe de non-rétroactivité de la loi pénale en ayant retenu dans son chef l’infraction à l’article 506-1, paragraphe 3, du Code pénal alors que ni l’escroquerie ni l’usage defaux n’auraient été érigés en infraction primaire servant de base à une condamnation pour blanchiment à l’époque des faits entre le 14 janvier 2014 et le 26 février 2014.
L’article 1 de la loi du 17 juillet 2008 relative à la lutte contre le blanchiment et contre le financement du terrorisme dispose « À l'article 506-1 point 1) du code pénal sont ajoutés les tirets suivants avant la partie de phrase finale libellée :
(…) • d'une infraction aux articles 489 à 496 du code pénal;
(…) • de toute autre infraction punie d'une peine privative de liberté d'un minimum supérieur à 6 mois ».
L’infraction d’escroquerie visée à l’article 496 du Code pénal et l’infraction d’usage de faux, punie d’une peine criminelle, ont constitué au jour de la commission des faits et continuent à constituer des infractions primaires de l’infraction visée à l’article 506-1, paragraphe 3, du Code pénal.
Il s’ensuit que le moyen n’est pas fondé.
Sur le sixième moyen de cassation Enoncé du moyen « Tiré de la violation de l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’homme, du principe du contradictoire et des droits de la défense, ainsi que principe de la saisine in rem ;
en ce que l’arrêt attaqué a déclaré Monsieur PERSONNE1.) coupable de blanchiment-détention d’usage de faux ;
aux motifs que retenu le prévenu dans les liens de la prévention de blanchiment-détention pour avoir détenu les fonds provenant des infractions d’usage de faux et d’escroquerie.
En effet, en ayant reçu sur les comptes de la société dont il est le bénéficiaire économique et sur ses comptes privés les fonds obtenus suite à l’encaissement du chèque falsifié, le prévenu a également détenu des fonds qu’il savait provenir d’une infraction » ;
1) alors que Monsieur PERSONNE1.) était renvoyé devant la juridiction de jugement du chef de blanchiment-détention du produit d’une escroquerie ; qu’en le condamnant pour avoir blanchi le délit d’usage de faux, la cour d’appel a méconnu les limites de sa saisine. » 14 Réponse de la Cour La décision des juges de première instance de retenir le demandeur en cassation dans les liens de l’infraction à l’article 506-1 du Code pénal est motivée comme suit :
« Aux termes de l’article 506-1 3) du Code pénal sont punis d’un emprisonnement d’un à cinq ans et d’une amende de 1.250 euros à 1.250.000 euros, ou de l’une de ces peines seulement ceux qui ont acquis, détenu ou utilisé des biens visés à l’article 31 paragraphe 2, point 1°, formant l’objet ou le produit, direct ou indirect, des infractions énumérées au point 1) de cet article ou constituant un avantage patrimonial quelconque tiré de l’une ou de plusieurs de ces infractions, sachant, au moment où ils les recevaient, qu’ils provenaient de l’une ou de plusieurs des infractions visées au point 1) ou de la participation à l’une ou plusieurs de ces infractions.
L’article 496 du Code pénal est expressément prévu par le législateur comme infraction primaire au blanchiment.
Tel que retenu ci-avant, PERSONNE1.) a frauduleusement obtenu le paiement de la somme de 350.000 euros en infraction aux articles 496 du Code pénal en établissant deux ordres de virements en date du 27 février 2014 et 11 mars 2014 afin de créditer un compte auprès de la SOCIETE6.) ouvert à son propre nom.
La somme de 120.000 euros a été utilisée par PERSONNE1.) dans la mesure où il l’a transférée sur le compte de la société SOCIETE3.) S.A..
PERSONNE1.) est partant à retenir dans les liens de l’infraction à l’article 506-1 du Code pénal. ».
En retenant « Les juges de première instance sont à confirmer d’avoir retenu le prévenu dans les liens de la prévention de blanchiment-détention pour avoir détenu les fonds provenant des infractions d’usage de faux et d’escroquerie.
En effet, en ayant reçu sur les comptes de la société dont il est le bénéficiaire économique et sur ses comptes privés les fonds obtenus suite à l’encaissement du chèque falsifié, le prévenu a également détenu des fonds qu’il savait provenir d’une infraction. », les juges d’appel ont confirmé la décision des juges de première instance de retenir le demandeur en cassation dans les liens de l’infraction à l’article 506-1 du Code pénal pour avoir détenu les fonds provenant d’une escroquerie. Le constat que les fonds détenus provenaient également d’une infraction d’usage de faux est surabondant et non déterminant pour justifier la décision sur le point considéré.
Il s’ensuit que le moyen est inopérant.
15 Sur le septième moyen de cassation Enoncé du moyen « Tiré de la violation de l’article 109 de la Constitution, pour une contradiction entre les motifs eux-mêmes et le dispositif, valant absence de motifs ;
en ce que l’arrêt attaqué a déclaré Monsieur PERSONNE1.) coupable de blanchiment-détention d’usage de faux ;
aux motifs que retenu le prévenu dans les liens de la prévention de blanchiment-détention pour avoir détenu les fonds provenant des infractions d’usage de faux et d’escroquerie.
En effet, en ayant reçu sur les comptes de la société dont il est le bénéficiaire économique et sur ses comptes privés les fonds obtenus suite à l’encaissement du chèque falsifié, le prévenu a également détenu des fonds qu’il savait provenir d’une infraction » ;
1) alors que la contradiction entre les motifs eux-mêmes ou entre les motifs et le dispositif équivalent à un défaut de motifs ; est entaché d’un tel vice l’arrêt attaqué, par lequel les juges ont à la fois confirmé, dans leurs motifs et leur dispositif, le jugement ayant condamné Monsieur PERSONNE1.) du chef de blanchiment-
détention d’escroquerie, tout en retenant dans leurs motifs sa culpabilité du chef de blanchiment-détention d’usage de faux et d’escroquerie. » Réponse de la Cour Le grief tiré de la contradiction de motifs, équivalant à un défaut de motifs, ne peut être retenu que si les motifs incriminés sont contradictoires à un point tel qu’ils se détruisent et s’annihilent réciproquement, aucun ne pouvant être retenu comme fondement de la décision.
Il résulte de la réponse donnée au sixième moyen que les juges d’appel ont pu, sans se contredire, confirmer le jugement de première instance quant à la culpabilité du demandeur en cassation du chef d’infraction à l’article 506-1, paragraphe 3, du Code pénal.
Il s’ensuit que le moyen n’est pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour de cassation rejette le pourvoi ;
condamne le demandeur en cassation aux frais de l’instance en cassation, ceux exposés par le Ministère public étant liquidés à 7,50 euros.
Ainsi jugé par la Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg en son audience publique du jeudi, vingt-sept mars deux mille vingt-cinq, à la Cité judiciaire, Bâtiment CR, Plateau du St. Esprit, composée de :
Thierry HOSCHEIT, président de la Cour, Agnès ZAGO, conseiller à la Cour de cassation, Monique HENTGEN, conseiller à la Cour de cassation, Jeanne GUILLAUME, conseiller à la Cour de cassation, Gilles HERRMANN, conseiller à la Cour de cassation, qui, à l’exception du conseiller Monique HENTGEN, qui se trouvait dans l’impossibilité de signer, ont signé le présent arrêt avec le greffier à la Cour Daniel SCHROEDER.
La lecture du présent arrêt a été faite en la susdite audience publique par le président Thierry HOSCHEIT en présence de l’avocat général Anita LECUIT et du greffier Daniel SCHROEDER.
Conclusions du Parquet général dans l’affaire de cassation Ministère public contre PERSONNE1.) (Affaire CAS-2024-00108 du registre) Par déclaration faite le 10 juillet 2024 au greffe de la Cour supérieure de justice, Maître Elisabeth KOHLL, en remplacement de Maître Lydie LORANG, avocats à la Cour, demeurant à Luxembourg, forma au nom et pour le compte de PERSONNE1.), un recours en cassation au pénal contre un arrêt numéro 186/24 V du 11 juin 2024, rendu par la Cour d’appel du Grand-
Duché de Luxembourg, cinquième chambre, siégeant en matière correctionnelle.
Cette déclaration de recours a été suivie en date du 9 août 2024 du dépôt d’un mémoire en cassation, signé par Maître Elisabeth KOHLL, en remplacement de Maître Lydie LORANG, avocat à la Cour, demeurant à Luxembourg.
Sur la recevabilité du pourvoi Le pourvoi respecte les conditions de recevabilité définies par les articles 41 et 43 de la loi modifiée du 18 février 1885 sur les pourvois et la procédure en cassation1.
Il en suit qu’il est recevable.
Sur les faits Par jugement du 14 octobre 2022, le tribunal d’arrondissement de Luxembourg a constaté que PERSONNE2.) est décédé le 29 décembre 2019, partant a déclaré l’action publique éteinte contre PERSONNE2.), a condamné PERSONNE1.) à une peine d’emprisonnement de quinze mois, assortie intégralement d’un sursis probatoire avec obligation pour PERSONNE1.) de rembourser le montant de 470.052,55 euros, avec les intérêts au taux légal à partir du 23 septembre 2022 jusqu’à solde, à la société SOCIETE7.) S.A., ainsi qu’à une amende de 5.000 euros, pour avoir commis les infractions de faux et usage de faux, escroquerie et blanchiment-
détention.
1 Le délai du pourvoi, d’un mois, prévu par l’article 41 de la loi précitée de 1885 a été respecté, la déclaration du pourvoi, le 10 juillet 2024, contre un arrêt contradictoire prononcé 11 juin 2024, ayant eu lieu moins d’un mois après la date du prononcé de l’arrêt attaqué. Le délai du dépôt du mémoire, d’un mois, prévu par l’article 43, alinéa 1, de la même loi a de même été respecté, le mémoire ayant été déposé le 9 août 2024, donc moins d’un mois après la date de la déclaration de pourvoi. Le mémoire a été, conformément à l’article 43, alinéa 1, précité, signé par un avocat à la Cour, il précise les dispositions attaquées et contient les moyens de cassation.La restitution de la somme de 10.661,17 euros à la société SOCIETE7.) S.A. a été ordonnée par le même jugement.
Par déclaration au greffe du tribunal d’arrondissement de Luxembourg en date du 7 novembre 2022 PERSONNE1.) a fait relever appel au pénal et au civil du jugement correctionnel numéro 2361/2022, rendu contradictoirement à son égard, le 14 octobre 2022.
Par déclaration déposée au greffe du tribunal d’arrondissement de Luxembourg en date du 8 novembre 2022, le procureur d’État a, à son tour, relevé appel au pénal limité à PERSONNE1.) contre le jugement précité.
Par arrêt numéro° 186/24 V, rendu le 11 juin 2024, la Cour d’appel, cinquième chambre, siégeant en matière correctionnelle, statuant contradictoirement, a déclaré les appels recevables.
Au pénal2, la juridiction d’appel a déclaré l’appel de PERSONNE1.) partiellement fondé et l’appel du procureur d’État non fondé. Par réformation, PERSONNE1.) a été acquitté de l’infraction de faux non retenue à sa charge et la peine d’emprisonnement a été assortie du sursis intégral.
La restitution du montant de 10.661,17 euros a été ordonnée. Le jugement a été confirmé pour le surplus au pénal et PERSONNE1.) a été condamné aux frais de sa poursuite en instance d’appel.
Le pourvoi sous examen est formé contre l’arrêt précité n° 186/24 V du 11 juin 2024.
PREMIER MOYEN DE CASSATION Le premier moyen est tiré « de la violation de l’article 6§1 et §3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme, et insuffisance de motivation en ce que l’arrêt attaqué a constaté le caractère déraisonnable de la durée de la procédure, prononcé la recevabilité des poursuites et déclaré Monsieur PERSONNE1.) coupable d’usage de faux, d’escroquerie et de blanchiment-détention » alors que, « toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue dans un délai raisonnable ; qu’il appartient aux juridictions répressives d’apprécier le caractère raisonnable de la durée d’une procédure en recherchant, sur la base des éléments concrets de l’espèce, si cette durée ne compromet pas irrémédiablement l’équité du procès et le respect des droits de la défense ; qu’en l’espèce, pour juger que les droits de la défense de Monsieur PERSONNE1.) n’ont pas été irrémédiablement compromis, la Cour d’appel s’est fondée de manière abstraite sur sa présentation à un juge d’instruction, la possibilité d’exercer des recours et l’assistance par un mandataire au cours de cette information judiciaire, sans rechercher concrètement, si le décès de Monsieur PERSONNE2.), l’accusateur de Monsieur PERSONNE1.) et coprévenu, pendant ce laps de temps, ne rendait pas impossible la tenue du procès dans des conditions conformes aux exigences de l’article 6, paragraphes 1 et 3 de la Convention européenne des droits de l’homme, et notamment du droit de faire interroger les témoins à charge, la Cour d’appel a et a violé cet article. » 2 Étant donné que le pourvoi en cassation porte uniquement sur le volet pénal de l’arrêt, il est fait abstraction du volet civil de la décision, qui est sans pertinence pour l’analyse du pourvoi.Il ressort de la lecture de l’arrêt dont pourvoi qu’en instance d’appel, l’actuel demandeur en cassation a conclu « à la confirmation du jugement entrepris en ce qu’il a retenu que le délai raisonnable pour être entendu est dépassé, mais demande de constater qu’il y a, au vu de l’ancienneté de l’affaire, des difficultés dans l’administration de la preuve dans la mesure où, notamment une expertise concernant l’original du chèque argué de faux, ne serait plus possible »3.
Les juges d’appel ont répondu au moyen comme suit : « La Cour considère à l’instar des juges de première instance que la période d’inaction des autorités poursuivantes entre l’inculpation du prévenu le 14 juillet 2017 et le 7 octobre 2019 et la clôture de l’instruction le 2 novembre 2020 est anormalement longue, ainsi que la période entre l’ordonnance de renvoi de la chambre du conseil du 3 mars 2021 et la première citation à l’audience du prévenu le 22 novembre 2021 pour l’audience du 19 janvier 2022, de sorte que le délai raisonnable tel que prévu par l’article 6.1 de la Convention européenne des droits de l’homme est dépassé, ce d’autant plus que les faits datent de 2014.
L’irrecevabilité ne doit cependant être retenue que si l’exercice de l’action publique devant les juridictions de jugement s’avère totalement inconciliable avec un exercice valable des droits de la défense Or, en l’espèce, il ne résulte pas dudit dépassement que les droits de la défense soient irrémédiablement compromis, alors que le prévenu, ainsi que ses défenseurs ont été en mesure d’exercer convenablement leurs droits de la défense, suite aux accusations portées contre le prévenu. Il a été présenté au juge d’instruction et a pu exercer tous les recours à sa disposition, comme demander une expertise sur les pièces du dossier ou demander de faire entendre les témoins qu’il jugeait utiles, le prévenu ayant déjà été assisté d’un mandataire pendant l’instruction.
Après les appels du 7 et 8 novembre 2022, l’affaire a été appelée une première fois en audience du 19 mars 2023 où elle a été refixée sur demande de la défense du prévenu, à la date du 26 septembre 2023. À cette date, l’affaire a été reportée en raison du fait que la défense a versé un grand nombre de pièces et une importante note de plaidoirie peu avant l’audience pour être finalement plaidée aux audiences des 19 mars 2024 et 7 mai 2024. Tous ces retards n’étant pas à mettre sur le compte des autorités poursuivantes, aucun délai supplémentaire n’est partant venu se rajouter.
C’est dès lors à bon droit que les juges de première instance n’ont pas prononcé l’irrecevabilité des poursuites, mais ont retenu que le dépassement du délai raisonnable doit se répercuter au niveau de la peine. » Le demandeur en cassation reproche à la Cour de « s`être abstenue de contrôler l’équité de la procédure et l’exercice utile des droits de la défense au stade crucial du jugement. » (…) « alors qu’il lui appartenait d’apprécier la procédure dans son ensemble et in concreto, un élément central a été totalement ignoré : le décès de Monsieur PERSONNE2.), co-prévenu visé dans l’ordonnance de renvoi du 23 mai 2021, et seul véritable témoin à charge à travers plusieurs auditions figurant au dossier. » 3 Page16 de l’arrêt dont pourvoi.Il ne ressort cependant pas des éléments du dossier que la défense de PERSONNE1.) ait fait valoir en première instance ou en instance d’appel que la durée excessivement longue de la procédure aurait mis la défense dans l’impossibilité de faire auditionner certains témoins.
Le moyen dans sa formulation actuelle encourt dès lors la critique de la nouveauté étant donné que son analyse entraîne nécessairement une analyse factuelle de l’affaire. Il ne suffit en effet pas d’alléguer l’impossibilité de faire entendre une quelconque personne comme témoin, encore faut-il que l’audition de la personne en question puisse, au regard des éléments du dossier, avoir une quelconque pertinence sur l’issue de la procédure. S’y ajoute qu’il n’est en réalité pas fait état de l’audition d’un témoin sous la foi du serment, mais de la possibilité de questionner un co-prévenu.
Le moyen étant mélangé de fait et de droit et doit dès lors être déclaré irrecevable.
À titre subsidiaire, Le moyen ne saurait être accueilli, en ce que sous le couvert du grief de la violation des dispositions légales visées au moyen, celui-ci ne tend qu'à remettre en discussion l'appréciation, par les juges du fond, des conséquences à tirer de la constatation d'un dépassement du délai raisonnable sur la recevabilité des poursuites, appréciation qui relève de leur pouvoir souverain et qui échappe au contrôle de Votre Cour4.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION Le deuxième moyen est tiré d’une violation de l’article 109 de la Constitution, pour défaut de motifs en ce que l’arrêt attaqué a déclaré PERSONNE1.) coupable d’usage de faux, d’escroquerie et de blanchiment-détention « alors que, la défense de Monsieur PERSONNE1.) faisait expressément valoir une violation de ses droits de la défense résultant de l’absence de l’original du chèque au dossier de la procédure (Arrêt, p. 16) ; que si la cour d’appel a répondu à cet argument pour acquitter Monsieur PERSONNE1.) du chef de faux, en énonçant que « le fait que l’original du chèque ne figure pas au dossier ne porte pas à conséquence » (Arrêt, p.
22), elle s’est totalement abstenue de tenir compte de ce moyen dans son appréciation de l’intention de l’usage de faux, de l’escroquerie et du blanchiment-détention, malgré le fait que les caractéristiques du document original, a fortiori s’il est acquis pour la cour d’appel qu’il n’a pas été établi par le prévenu, constituait un point déterminant pour l’appréciation de ces éléments ; que la décision se trouve donc privée de motifs, en violation de l’article 109 de la Constitution.5 » Le défaut de réponse à conclusions constitue un défaut de motifs, qui est un vice de forme. Une décision est régulière en la forme, dès qu’elle comporte une motivation, expresse ou implicite, sur le point considéré et ce sans qu’il faille s’attacher sur la pertinence ou non de la motivation retenue.
4 Cass. 30 avril 2020, n° 60/2020 pénal, n° CAS-2019-00068 du registre; Cass. 10 mars 2022, n° 39/2022 pénal, n° CAS-2021-00017 du registre ; Cass. 09 mars 2023, n° 23/2023 pénal, n° CAS-2022-00071 du registre, réponse au quatrième moyen de cassation, Cass. 15 juin 2023, n° CAS-2022-00088 du registre réponse au troisième moyen de cassation.
5 Page 13 du pourvoi sous examen Tel que repris par l’arrêt dont pourvoi, la défense de Monsieur PERSONNE1.) a fait valoir que « dans la mesure où l’original du faux ne se trouve qu’en copie dans le dossier, sa fausseté n’a pas pu être établie avec certitude, de sorte que cette infraction, tout comme l’usage du faux et l’escroquerie ne sont pas donnés. »6 La Cour d’appel a répondu à ce moyen comme suit :
« Le faux peut être matériel ou intellectuel dans les actes sous seing privé.
Il convient de rappeler que le chèque émis et argué de faux est, selon les personnes entendues en cause, altéré au niveau du montant et du bénéficiaire en question. Il est constant en cause que le document versé au dossier comporte le même numéro qu’un chèque envoyé à PERSONNE4.) qui a clôturé son compte auprès de la société SOCIETE5.). Le fait que l’original du chèque ne figure pas au dossier ne porte pas à conséquences, alors qu’il n’est pas contestable que le chèque a été encaissé à l’encontre de SOCIETE5.) pour le compte de la société SOCIETE2.) S.A. avec le même numéro que celui envoyé à PERSONNE4.). La qualité de faux ne fait pas de doute et ce même s’il s’agissait d’une parfaite copie d’un autre chèque.
Le fait que les banques ont, dans un premier temps, manqué de reconnaître son caractère falsifié ne fait pas preuve de son authenticité, mais ne témoigne, le cas échéant, que de la qualité du faux.
Ledit écrit était susceptible de causer et a finalement causé un dommage à SOCIETE5.).
Cependant, le simple fait que le prévenu soit imprimeur, à défaut d’autre élément probant, ne permet pas de conclure qu’il ait confectionné l’écrit litigieux, de sorte que c’est à tort qu’il a été retenu dans les liens de l’infraction de faux.
Par réformation de la décision entreprise, PERSONNE1.) est partant à acquitter de l’infraction de faux.
PERSONNE1.) a cependant été en possession du faux chèque, dès lors qu’il l’a envoyé à la SOCIETE1.) pour encaissement sur le compte de la société SOCIETE2.) S.A. Il a ordonné par la suite, par trois transferts, que la presque totalité des montants parvenus sur le compte de la société SOCIETE2.) S.A. lui parviennent sur ses comptes privés et sur le compte de la société SOCIETE3.) S.A., de sorte que c’est à juste titre que les juges de première instance ont retenu qu’il en a fait usage.
PERSONNE1.) ne pouvait ignorer le caractère falsifié du chèque alors que PERSONNE2.) lui a demandé de justifier du montant indiqué sur le chèque par une facture qu’il reconnaît avoir lui-même confectionnée pour être ajustée au montant du chèque.
Par ailleurs, il a également fait parvenir le chèque au gestionnaire du compte de la société SOCIETE2.) S.A. auprès de la SOCIETE1.), en laissant, au moins dans un premier temps, les autres administrateurs de la société SOCIETE2.) S.A. dans l’ignorance de l’arrivée de fonds et surtout de leur transfert vers son compte privé.
6 Page 16 de l’arrêt dont pourvoiL’argent n’a pas été transféré par le prévenu au bénéfice de la société SOCIETE4.), au nom de laquelle la facture justifiant du transfert de fonds a été émise, ni utilisé pour les investissements dont il a fait état dans le cadre de son projet VARS 2000, tel qu’il a voulu le faire croire au gestionnaire du compte, mais a été utilisé en grande partie par le prévenu pour ses besoins personnels (remboursement de prêts etc.). Les fonds provenant du chèque falsifié n’ont partant pas été utilisés tel qu’il a été soutenu par le prévenu pour financer le projet « VARS 2000 » et payer des frais dans ce cadre.
Au moment où la SOCIETE1.) a réclamé le retour des fonds obtenus frauduleusement, le prévenu n’a pas rectifié l’erreur de transfert, de sorte qu’il a agi en connaissance de cause et à dessin de nuire.
C’est partant à bon droit que le prévenu a été retenu dans les liens de l’infraction d’usage de faux.
Il y a partant lieu de lire sub I. du jugement entrepris :
« […] dans une intention frauduleuse et à dessin de nuire, avoir fait usage d’un faux en écritures de banque, en l’espèce, d’avoir, dans une intention frauduleuse et à dessin de nuire, fait usage d’un chèque falsifié par modification du nom du bénéficiaire et du montant originairement apposé, portant le numéroNUMERO1.) émis le 14 janvier 2014 par la société SOCIETE5.), en le remettant pour encaissement à PERSONNE3.), né le DATE2.), employé auprès de l’agence de la SOCIETE1.), sis à L-ADRESSE3.). » Il ressort de l’extrait de la motivation de l’arrêt, cité ci-dessus, que selon la Cour d’appel, la preuve que le prévenu était le faussaire du chèque litigieux n’a pas pu être rapportée, mais il est cependant établi sur base des éléments du dossier que ledit chèque était un document falsifié, utilisé en connaissance de cause par PERSONNE1.). Les juges d’appel ont conclu que le fait que l’original du chèque ne figure pas au dossier était sans incidence sur le raisonnement mené en cause.
Au vu des développements qui précèdent, les juges d’appel ont motivé leur décision sur le point considéré et il s’ensuit que le moyen n’est pas fondé.
TROISIÈME MOYEN DE CASSATION Le troisième moyen est « tiré de la violation de l’article 6§2 de la Convention européenne des droits de l’homme, insuffisance de motivation dans la caractérisation de l’élément moral exigé par les articles 193, 196 et 197 du Code pénal en méconnaissance de l’article 195 du code de procédure pénale et défaut de base légale en ce que l’arrêt attaqué a confirmé le jugement en ce qu’il a déclaré Monsieur PERSONNE1.) coupable d’usage de faux » Le moyen est scindé en deux branches.
Dans le cadre de la première branche du moyen, le demandeur en cassation fait grief à la Cour d’appel d’avoir procédé à un renversement de la charge de la preuve au niveau de la preuve del’élément intentionnel de l’infraction d’usage de faux et d’avoir ainsi violé l’article 6§2 de la Convention européenne des droits de l’homme.
À la lecture de la branche du moyen, on ne peut se défaire de l’idée que sous le couvert du grief, tiré de la violation de la disposition visée au moyen, celui-ci ne tend qu’à remettre en discussion l’appréciation, par les juges du fond, des charges résultant du dossier quant à l’existence de l’élément intentionnel de l’infraction d’usage de faux, appréciation qui relève de leur pouvoir souverain et échappe au contrôle de la Cour de cassation. La branche du moyen sous examen ne saurait dès lors être accueillie.
À titre subsidiaire :
Si la défense de PERSONNE1.) cite un certain nombre de jurisprudences de la Cour européenne des droits de l’homme pour énoncer les principes dégagés en matière de charge de la preuve à la lumière de 6§2 de la Convention européenne des droits de l’homme, on voit mal en quoi ces principes n’auraient pas été respectés dans la présente affaire.
Il ressort de la lecture l’extrait de l’arrêt cité au moyen que les juges d’appel ne se sont pas limités d’affirmer que « le prévenu ne pouvait ignorer » le caractère illicite de son agissement pour le retenir dans les liens de la prévention d’usage de faux, mais qu’ils ont démontré la connaissance par le prévenu du caractère falsifié du document par une analyse détaillée des éléments factuels, qui ont entouré l’usage du document.
La branche du moyen sous examen est dès lors à déclarer non fondée.
Afin d’être complet, on note qu’aussi bien dans l’énoncé que dans la discussion de la première branche du moyen, le demandeur en cassation fait également état d’un défaut de base légale, sans pour autant développer ce grief.
Le défaut de base légale constitue un moyen de fond, qui doit être rattaché à une disposition prétendument violée du fait que la décision attaquée ne constate pas tous les faits nécessaires à la mise en œuvre de cette règle de droit. Même si l’énoncé du moyen énumère certains textes de loi, le demandeur en cassation reste en défaut d’indiquer la disposition légale prétendument visée, de sorte que la branche du moyen est irrecevable à cet égard.
Dans le cadre de la deuxième branche du moyen, le demandeur en cassation fait grief à la Cour d’appel d’avoir caractérisé de manière insuffisante l’élément intentionnel de l’infraction d’usage de faux, critique à comprendre à la lecture de la discussion du moyen, dans le sens du reproche d’un défaut de base légale.7 L’élément moral de l’usage de faux est constitué par la preuve de la connaissance de la fausseté du document employé.
Comme développé dans le cadre de la première branche, les juges d’appel ont tiré la connaissance par le prévenu du caractère falsifié du document de l’analyse détaillée des 7 En retenant le défaut de base légale comme cas d’ouverture visé par le moyen, l’article 195 du Code de procédure pénale, qui a trait au défaut de motivation, est à considérer comme étranger au grief formulé.
éléments factuels, qui ont entouré l’usage du document. Ils ont ainsi caractérisé à suffisance l’élément moral au titre d’élément constitutif de l’infraction d’usage de faux.
La branche du moyen sous examen est dès lors à déclarer non fondée.
QUATRIÈME MOYEN DE CASSATION Ce moyen est tiré « de l’insuffisance de motivation dans la caractérisation de l’élément moral exigé par l’article 496 du Code pénal en méconnaissance de l’article 195 du Code de procédure pénale et défaut de base légale en ce que l’arrêt attaqué a confirmé le jugement en ce qu’il a déclaré Monsieur PERSONNE1.) coupable d’escroquerie », « alors que l’emploi de manœuvres frauduleuses réprimé au titre de l’article 496 du Code pénal nécessite la conscience de la mise en œuvre d’une fraude ; qu’en se bornant à énoncer qu’« en remettant à la SOCIETE1.) un chèque pour encaissement qu’il savait falsifié, le prévenu a usé de manœuvres frauduleuses pour tromper la confiance de la banque, manœuvres qui ont été déterminantes pour la remise de fonds et ce dans le but de s’approprier des fonds appartenant à SOCIETE5.), partant dans une intention frauduleuse » (Arrêt, p. 24), la Cour d’appel n’a pas démontré la connaissance qu’avait Monsieur PERSONNE1.) du caractère falsifié du chèque présenté à la SOCIETE1.), et par voie de conséquence, sa conscience d’utiliser des manœuvres frauduleuses à son égard, de sorte que l’arrêt se trouve privé de base légale.8 » Tout comme pour le troisième moyen, la partie défenderesse en cassation invoque un vice de motivation de l’arrêt entrepris, encore qu’il ne résulte pas clairement de l’énoncé du moyen de quel vice de motivation il s’agit. Il est effet fait référence à la fois à l’absence de motifs dans la mesure où la violation de l’article 195 du Code de procédure pénale est invoquée, et à l’insuffisance de motifs constitutive d’un défaut de base légale, qui est un vice de fond.
La lecture de la discussion du moyen montre cependant que la défense de PERSONNE1.) entend critiquer l’insuffisance de la motivation de l’arrêt dont pourvoi, de sorte que l’article 195 du Code de procédure pénale est étranger au grief formulé.
PERSONNE1.) reproche à la Cour d’appel d’avoir omis de démontrer la connaissance qu’avait Monsieur PERSONNE1.) du caractère falsifié du chèque présenté à la SOCIETE1.), et par voie de conséquence, de sa conscience d’utiliser des manœuvres frauduleuses à son égard.
Étant donné que les juges d’appel étaient, dans le cadre de l’analyse de l’usage de faux, arrivés à la conclusion que le prévenu avait présenté en connaissance de cause un chèque falsifié à l’encaissement auprès de la SOCIETE1.), et que l’usage dudit chèque falsifié était retenu comme étant constitutif des manœuvres frauduleuses, il était devenu superfétatoire pour les juges d’analyser une deuxième fois, dans le cadre de l’analyse des éléments constitutifs de l’infraction d’escroquerie la connaissance du caractère falsifié du chèque.
En retenant : « Il convient de rappeler que le chèque émis et argué de faux est, selon les personnes entendues en cause, altéré au niveau du montant et du bénéficiaire en question. Il est constant en cause que le document versé au dossier comporte le même numéro qu’un chèque 8 Page 24 du pourvoienvoyé à PERSONNE4.) qui a clôturé son compte auprès de la société SOCIETE5.). Le fait que l’original du chèque ne figure pas au dossier ne porte pas à conséquences, alors qu’il n’est pas contestable que le chèque a été encaissé à l’encontre de SOCIETE5.) pour le compte de la société SOCIETE2.) S.A. avec le même numéro que celui envoyé à PERSONNE4.). La qualité de faux ne fait pas de doute et ce même s’il s’agissait d’une parfaite copie d’un autre chèque.
Le fait que les banques ont, dans un premier temps, manqué de reconnaître son caractère falsifié ne fait pas preuve de son authenticité, mais ne témoigne, le cas échéant, que de la qualité du faux.
Ledit écrit était susceptible de causer et a finalement causé un dommage à SOCIETE5.).
Cependant, le simple fait que le prévenu soit imprimeur, à défaut d’autre élément probant, ne permet pas de conclure qu’il ait confectionné l’écrit litigieux, de sorte que c’est à tort qu’il a été retenu dans les liens de l’infraction de faux.
Par réformation de la décision entreprise, PERSONNE1.) est partant à acquitter de l’infraction de faux.
PERSONNE1.) a cependant été en possession du faux chèque, dès lors qu’il l’a envoyé à la SOCIETE1.) pour encaissement sur le compte de la société SOCIETE2.) S.A. Il a ordonné par la suite, par trois transferts, que la presque totalité des montants parvenus sur le compte de la société SOCIETE2.) S.A. lui parviennent sur ses comptes privés et sur le compte de la société SOCIETE3.) S.A., de sorte que c’est à juste titre que les juges de première instance ont retenu qu’il en a fait usage.
PERSONNE1.) ne pouvait ignorer le caractère falsifié du chèque alors que PERSONNE2.) lui a demandé de justifier du montant indiqué sur le chèque par une facture qu’il reconnaît avoir lui-même confectionnée pour être ajustée au montant du chèque.
Par ailleurs, il a également fait parvenir le chèque au gestionnaire du compte de la société SOCIETE2.) S.A. auprès de la SOCIETE1.), en laissant, au moins dans un premier temps, les autres administrateurs de la société SOCIETE2.) S.A. dans l’ignorance de l’arrivée de fonds et surtout de leur transfert vers son compte privé.
L’argent n’a pas été transféré par le prévenu au bénéfice de la société SOCIETE4.), au nom de laquelle la facture justifiant du transfert de fonds a été émise, ni utilisé pour les investissements dont il a fait état dans le cadre de son projet VARS 2000, tel qu’il a voulu le faire croire au gestionnaire du compte, mais a été utilisé en grande partie par le prévenu pour ses besoins personnels (remboursement de prêts etc.). Les fonds provenant du chèque falsifié n’ont partant pas été utilisés tel qu’il a été soutenu par le prévenu pour financer le projet « VARS 2000 » et payer des frais dans ce cadre.
Au moment où la SOCIETE1.) a réclamé le retour des fonds obtenus frauduleusement, le prévenu n’a pas rectifié l’erreur de transfert, de sorte qu’il a agi en connaissance de cause et à dessin de nuire.
C’est partant à bon droit que le prévenu a été retenu dans les liens de l’infraction d’usage de faux.
Il y a partant lieu de lire sub I. du jugement entrepris :
26 « […] dans une intention frauduleuse et à dessin de nuire, avoir fait usage d’un faux en écritures de banque, en l’espèce, d’avoir, dans une intention frauduleuse et à dessin de nuire, fait usage d’un chèque falsifié par modification du nom du bénéficiaire et du montant originairement apposé, portant le numéroNUMERO1.) émis le 14 janvier 2014 par la société SOCIETE5.), en le remettant pour encaissement à PERSONNE3.), né le DATE2.), employé auprès de l’agence de la SOCIETE1.), sis à L-ADRESSE3.). » * Quant à l’escroquerie L’escroquerie requiert trois éléments constitutifs :
a) l’emploi de faux noms, de fausses qualités ou de manœuvres frauduleuses, b) la remise ou la délivrance de fonds, meubles, obligations, quittances ou décharges, c) l’intention de s’approprier le bien d’autrui.
La qualification d’escroquerie ne saurait être retenue qu’à condition que l’auteur ait employé un des moyens limitativement énumérés par l’article 496 du Code pénal, soit l’emploi d’un faux nom, soit d’une fausse qualité, soit des manœuvres frauduleuses, revêtant une forme extérieure et déterminant la remise.
En ce qui concerne l’escroquerie par l’emploi de manœuvres frauduleuses, leur but étant de créer une croyance fausse dans l’esprit de la victime, il est admis qu’il y a lieu d’examiner si, dans l’esprit de l’escroc, elles étaient de nature à surprendre la victime à qui l’escroc s’adressait, voire si elles ont été employées dans l’espoir qu’elles provoqueraient une erreur déterminante (cf. Merle et Vitu, Traité de Droit criminel, Droit pénal spécial, T II n°2336).
On entend par manœuvres frauduleuses, le recours à une « machination, à des artifices ou à une mise en scène, ayant pour but et pour résultat de tromper autrui afin de s’approprier son bien. Pareilles machinations, artifices ou mises en scène peuvent être constitués par un ensemble de faits dont chacun n’est qu’un élément de la manœuvre frauduleuse, et ne réunit pourtant pas, à lui seul, tous les caractères de celle-ci ».
En remettant à la SOCIETE1.) un chèque pour encaissement qu’il savait falsifié, le prévenu a usé de manœuvres frauduleuses pour tromper la confiance de la banque, manœuvres qui ont été déterminantes pour la remise de fonds et ce dans le but de s’approprier des fonds appartenant à SOCIETE5.), partant dans une intention frauduleuse.
En effet, s’il résulte du dossier qu’il n’est pas exclu que le prévenu ait partagé au moins pour partie l’argent provenant de l’usage du faux chèque avec PERSONNE2.), tel qu’il résulte de messages échangés avec ce dernier pendant les mois de mars et avril 2014 et que même au mois de mai 2014, PERSONNE2.) soit devenu plus pressant (rapport B10, annexe du rapport JDA-SPJ11/2017/36810-28 du 27 novembre 2017 du SPJ, criminalité générale, faux moyens de paiement), il reste que le prévenu a activement participé aux manœuvres frauduleuses ayant convaincu la SOCIETE1.) de faire encaisser le faux chèque, portant ainsi préjudice à la société SOCIETE5.), qui a perdu, suite à ces manœuvres presque un demi-million d’euros. Il a tenté 27 de faire transiter rapidement les fonds par la société SOCIETE2.) S.A., sans que les autres administrateurs ne soient avertis dans l’immédiat.
Les déclarations du prévenu quant à la justification du transfert de fonds sont restées incongrues ab initio. Il a affirmé recevoir de l’argent pour son projet « Vars 2000 », alors qu’il a soumis à la SOCIETE1.) une facture au nom de sa société SOCIETE8.) sans vraies précisions sur les prestations fournies, facture qu’il a simplement alignée sur le montant du chèque falsifié.
Il est sans incidence au niveau de la qualification de l’infraction, de savoir si le prévenu a été le bénéficiaire final des fonds ou s’il agissait pour autrui.
En effet, il n'est pas nécessaire, pour que l'infraction soit constituée, que le prévenu ait tiré un profit personnel de l'infraction. L'escroquerie ne suppose pas la caractérisation d'un dol spécial, qui consisterait dans la volonté de tirer un bénéfice de la consommation du délit (Crim.fr. 9 mars 1972, JCP 1973. II. 17434).
L’infraction d’escroquerie a partant été retenue à juste titre à l’encontre de PERSONNE1.). 9» les juges d’appel ont procédé aux constatations nécessaires pour pouvoir retenir l’infraction d’escroquerie à l’encontre de PERSONNE1.).
Il s’ensuit que le quatrième moyen n’est pas fondé.
CINQUIEME MOYEN DE CASSATION Le cinquième moyen est «tiré de la violation, sinon de la fausse interprétation, sinon de la fausse application de l’article 7§1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme, de l’article 19 de la Constitution entrée en vigueur le 1er juillet 2023, de l’article 2 alinéa 1er du Code pénal, ensemble les article 506-1, 197 et 496 du même code » « en ce que l’arrêt attaqué a déclaré Monsieur PERSONNE1.) coupable de blanchiment d’escroquerie et d’usage de faux » « alors que le principe de légalité et son corollaire, le principe de non-
rétroactivité de la loi pénale, impliquent que le comportement répréhensible ait été initié postérieurement à l’entrée en vigueur de la loi portant incrimination ; que ce principe vaut en cas d’extension du champ d’application du blanchiment-détention à une infraction jusqu’alors non prévue comme susceptible de constituer l’infraction d’origine de ce délit de conséquence ;
qu’en retenant Monsieur PERSONNE1.) coupable du chef d’un blanchiment portant sur une escroquerie et un usage de faux, lorsqu’à l’époque des faits, ni la première ni la seconde de ces infractions n’entraient dans la liste des infractions sous-jacentes au blanchiment limitativement listées à l’article 506-1 du Code pénal, la Cour d’appel a violé les textes visés au moyen et les principes fondamentaux qui en découlent. » Le demandeur en cassation part de la prémisse erronée que pendant la période infractionnelle du 14 janvier 2014 au 26 février 2014, les infractions d’escroquerie et d’usage de faux ne constituaient pas des infractions primaires à l’infraction de blanchiment.
9 Pages 22-25 de l’arrêt dont pourvoiL’article 1er de la loi du 17 juillet 200810 a modifié l’article 506-1 point 1) du Code pénal comme suit :
« À l'article 506-1 point 1) du code pénal sont ajoutés les tirets suivants avant la partie de phrase finale libellée « ou constituant un avantage patrimonial quelconque tiré de l'une ou de plusieurs de ces infractions.»:
« d'une infraction aux articles 184, 187, 187-1, 191 et 309 du code pénal;
• d'une infraction aux articles 463 et 464 du code pénal;
• d'une infraction aux articles 489 à 496 du code pénal;
• d'une infraction à l'article 10 de la loi du 21 mars 1966 concernant a) les fouilles d'intérêt historique, préhistorique, paléontologique ou autrement scientifique;
b) la sauvegarde du patrimoine culturel mobilier;
• d'une infraction à l'article 5 de la loi du 11 janvier 1989 réglant la commercialisation des substances chimiques à activité thérapeutique;
• d'une infraction à l'article 18 de la loi du 25 novembre 1982 réglant le prélèvement de substances d'origine humaine;
• d'une infraction à l'article 33 de la loi modifiée du 28 mars 1972 concernant:
1° l'entrée et le séjour des étrangers;
2° le contrôle médical des étrangers;
3° l'emploi de la main-d'œuvre étrangère;
• d'une infraction aux articles 82 à 85 de la loi du 18 avril 2001 sur le droit d'auteur;
• d'une infraction à l'article 64 de la loi modifiée du 19 janvier 2004 concernant la protection de la nature et des ressources naturelles;
• d'une infraction à l'article 9 de la loi modifiée du 21 juin 1976 relative à la lutte contre la pollution de l'atmosphère;
• d'une infraction à l'article 25 de la loi modifiée du 10 juin 1999 relative aux établissements classés;
• d'une infraction à l'article 26 de la loi du 29 juillet 1993 concernant la protection et la gestion de l'eau;
• d'une infraction à l'article 35 de la loi modifiée du 17 juin 1994 relative à la prévention et à la gestion des déchets;
• d'une infraction aux articles 220 et 231 de la loi générale sur les douanes et accises;
• d'une infraction à l'article 32 de la loi du 9 mai 2006 relative aux abus de marché;
• de toute autre infraction punie d'une peine privative de liberté d'un minimum supérieur à 6 mois » Même si l’article 506-1 du Code pénal a encore été modifié par la loi du 27 octobre 2010 portant renforcement du cadre légal en matière de lutte contre le blanchiment et contre le financement du terrorisme11, cette modification législative n’a eu pour effet que d’étendre la liste des infractions primaires à la base de l’infraction de blanchiment. Les infractions d’escroquerie et de blanchiment constituaient donc au jour de la commission des faits et constituent encore à ce jour des infractions primaires de l’infraction visée à l’article 506-1 du Code pénal.
La Cour d’appel a dès lors pu retenir, sans violer les textes visés au moyen, le prévenu dans les liens de la prévention de blanchiment-détention.
10 Loi du 17 juillet 2008 relative à la lutte contre le blanchiment et contre le financement du terrorisme, Mém. A / n° 106 du 23 juillet 2008, p. 1507 11 Loi du 27 octobre 2010 portant renforcement du cadre légal en matière de lutte contre le blanchiment et contre le financement du terrorisme, Mém. A / n° 193 du 3 novembre 2010, p. 3172 Le moyen est dès lors à déclarer non fondé.
SIXIÈME MOYEN DE CASSATION Le sixième moyen est tiré « de la violation de l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’homme, du principe du contradictoire et des droits de la défense, ainsi que principe de la saisine in rem » « en ce que l’arrêt attaqué a déclaré Monsieur PERSONNE1.) coupable de blanchiment-détention d’usage de faux » aux motifs que « les juges de première instance sont à confirmer d’avoir retenu le prévenu dans les liens de la prévention de blanchiment-détention pour avoir détenu les fonds provenant des infractions d’usage de faux et d’escroquerie. » Concernant l’infraction à l’article 506-1 du Code pénal, les juges d’appel ont retenu que « Les juges de première instance sont à confirmer d’avoir retenu le prévenu dans les liens de la prévention de blanchiment-détention pour avoir détenu les fonds provenant des infractions d’usage de faux et d’escroquerie.
En effet, en ayant reçu sur les comptes de la société dont il est le bénéficiaire économique et sur ses comptes privés les fonds obtenus suite à l’encaissement du chèque falsifié, le prévenu a également détenu des fonds qu’il savait provenir d’une infraction. » Aux termes de l’article 506-1 3) du Code pénal sont punis d’un emprisonnement d’un à cinq ans et d’une amende de 1.250 euros à 1.250.000 euros, ou de l’une de ces peines seulement ceux qui ont acquis, détenu ou utilisé des biens visés à l’article 32-1, alinéa premier, sous 1), formant l’objet ou le produit, direct ou indirect, des infractions énumérées au point 1) de cet article ou constituant un avantage patrimonial quelconque tiré de l’une ou de plusieurs de ces infractions, sachant, au moment où ils les recevaient, qu’ils provenaient de l’une ou de plusieurs des infractions visées au point 1) ou de la participation à l’une ou plusieurs de ces infractions.
Les premiers juges ont caractérisé l’élément matériel de l’infraction de blanchiment-détention comme suit :
« Tel que retenu ci-avant, PERSONNE1.) a frauduleusement obtenu le paiement de la somme de 350.000 euros en infraction aux articles 496 du Code pénal en établissant deux ordres de virements en date du 27 février 2014 et 11 mars 2014 afin de créditer un compte auprès de la SOCIETE6.) ouvert à son propre nom.
La somme de 120.000 euros a été utilisée par PERSONNE1.) dans la mesure où il l’a transférée sur le compte de la société SOCIETE3.) S.A.. » En retenant que « Les juges de première instance sont à confirmer d’avoir retenu le prévenu dans les liens de la prévention de blanchiment-détention pour avoir détenu les fonds provenant des infractions d’usage de faux et d’escroquerie. », les juges d’appel ont, par mention surabondante, retenu que les fonds détenus par PERSONNE1.) provenaient également de l’usage de faux. Étant donné que l’origine illicite des fonds était identifiée et établie, le constat que les fonds détenus proviennent également d’une infraction d’usage de faux est certes factuellement exacte, mais est sans incidence sur la solution du litige.
Le moyen est dès lors inopérant.
SEPTIÈME MOYEN DE CASSATION Le dernier moyen fait état d’une violation de l’article 109 de la Constitution, pour une contradiction entre les motifs eux-mêmes et le dispositif, valant absence de motifs, en ce que l’arrêt attaqué a déclaré Monsieur PERSONNE1.) coupable de blanchiment-détention d’usage de faux et en retenant que « les juges de première instance sont à confirmer d’avoir retenu le prévenu dans les liens de la prévention de blanchiment-détention pour avoir détenu les fonds provenant des infractions d’usage de faux et d’escroquerie. » Au vu de la réponse donnée au sixième moyen, les juges d’appel ont pu confirmer, sans que leur décision ne soit entachée d’une contradiction, la décision des premiers juges quant à la culpabilité du prévenu du chef d’infraction à l’article 506-1 (3) du Code pénal.
Le moyen est dès lors à déclarer non fondé.
Conclusion :
Le pourvoi est recevable, mais il est à rejeter.
Pour le Procureur général d’État le premier avocat général Sandra KERSCH 31