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19/06/2025 | LUXEMBOURG | N°52651C

Luxembourg | Luxembourg, Cour administrative, 19 juin 2025, 52651C


GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle : 52651C ECLI:LU:CADM:2025:52651 Inscrit le 4 avril 2025 Audience publique du 19 juin 2025 Appel formé par Monsieur (A1) et consort, …, contre un jugement du tribunal administratif du 3 mars 2025 (n° 48762 du rôle) en matière de protection internationale Vu l’acte d'appel, inscrit sous le numéro 52651C du rôle et déposé au greffe de la Cour administrative le 4 avril 2025 par Maître Max LENERS, avocat à la Cour, assisté de Maître Parina MASKEEN, avocat, les deux inscrits au tableau de l’Ordre des avocats à Lu

xembourg, au nom de Monsieur (A1), né le … à … (Pakistan), et de son...

GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle : 52651C ECLI:LU:CADM:2025:52651 Inscrit le 4 avril 2025 Audience publique du 19 juin 2025 Appel formé par Monsieur (A1) et consort, …, contre un jugement du tribunal administratif du 3 mars 2025 (n° 48762 du rôle) en matière de protection internationale Vu l’acte d'appel, inscrit sous le numéro 52651C du rôle et déposé au greffe de la Cour administrative le 4 avril 2025 par Maître Max LENERS, avocat à la Cour, assisté de Maître Parina MASKEEN, avocat, les deux inscrits au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur (A1), né le … à … (Pakistan), et de son frère Monsieur (A2), né le … à …, tous les deux de nationalité pakistanaise et demeurant à L-…, dirigé contre le jugement rendu par le tribunal administratif du Grand-Duché de Luxembourg le 3 mars 2025 (n° 48762 du rôle) par lequel ils ont été déboutés de leur recours tendant à la réformation, sinon à l’annulation de la décision du ministre de l’Immigration et de l’Asile du 28 février 2023 portant refus de faire droit à leur demande en obtention d’une protection internationale, ainsi que de l’ordre de quitter le territoire contenu dans le même acte ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe de la Cour administrative le 24 avril 2025 ;

Vu l’accord des mandataires des parties de voir prendre l’affaire en délibéré sur base des mémoires produits en cause et sans autres formalités ;

Vu les pièces versées au dossier et notamment le jugement entrepris ;

Sur le rapport du magistrat rapporteur, l’affaire a été prise en délibéré sans autres formalités à l’audience publique du 20 mai 2025.

Le 24 septembre 2020, Monsieur (A1) introduisit pour son propre compte, ainsi qu’au nom et pour le compte de son frère mineur, Monsieur (A2), auprès du service compétent du ministère des Affaires étrangères et européennes, direction de l’Immigration, ci-après désigné par « le ministère », une demande de protection internationale au sens de la loi modifiée du 118 décembre 2015 relative à la protection internationale et à la protection temporaire, ci-après désignée par « la loi du 18 décembre 2015 ».

Les déclarations des deux frères, ci-après désignés par « les consorts (A) », sur leur identité et sur l’itinéraire suivi pour venir au Luxembourg furent actées par un agent de la police grand ducale, service criminalité organisée – police des étrangers, dans un rapport du même jour.

En dates des 17 août, 20 septembre et 21 septembre 2021, Monsieur (A1) fut entendu par un agent du ministère sur sa situation et sur les motifs gisant à la base de sa demande de protection internationale.

En date du 21 septembre 2021, Monsieur (A2), devenu entre-temps majeur, fut entendu à son tour par un agent du ministère.

Par décision du 28 février 2023, le ministre de l’Immigration et de l’Asile, ci-après désigné par « le ministre », informa les consorts (A) que leurs demandes de protection internationale avaient été refusées comme non fondées, tout en leur ordonnant de quitter le territoire dans un délai de trente jours, ladite décision étant libellée comme suit :

« (…) J’ai l’honneur de me référer à vos demandes en obtention d’une protection internationale que vous avez introduites le 24 septembre 2020 sur base de la loi modifiée du 18 décembre 2015 relative à la protection internationale et à la protection temporaire (ci-après dénommée « la Loi de 2015 »).

Avant tout autre développement, il convient de noter que vous, Monsieur (A1), êtes arrivé au Luxembourg accompagné de votre frère, (A2), âgé de … ans, et pour lequel vous avez introduit une demande de protection internationale en son nom et pour son compte, alors qu’il était encore mineur d’âge.

Je suis malheureusement dans l’obligation de porter à votre connaissance que je ne suis pas en mesure de réserver une suite favorable à vos demandes pour les raisons énoncées ci-après.

1. Quant à vos déclarations En mains, votre fiche des motifs établi[e] au moment de l’introduction de votre demande, le rapport du Service de Police Judiciaire du 24 septembre 2020, les rapports d’entretien de l’agent du Ministère des Affaires étrangères et européennes des 17 août, 20 et 21 septembre 2021 sur les motifs sous-tendant vos demandes de protection internationale ainsi que les documents versés à l’appui de vos demandes de protection internationale.

▪ Monsieur (A1) Lors de l’introduction de votre demande de protection internationale vous avez indiqué être né le … à … dans le district de …, qui se situe dans la province de …, être de nationalité pakistanaise, célibataire et de confession … Vous expliquez avoir vécu la majorité de votre vie avec votre famille à …, mais vous précisez avoir dernièrement vécu à …, qui se situe dans la ville de ….

2 Vous expliquez avoir introduit une demande de protection internationale en raison de votre adhérence au groupe politique (AA) lors de la campagne électorale de 2018, rival du parti politique (BB) (ci-après « (BB) »). En effet, vous avancez que les membres de ce parti politique rival vous auraient mis la pression afin que vous rejoigniez leurs rangs, plutôt que de soutenir les idéologies du parti de (AA) (p.5 et 6 du rapport d’entretien de Monsieur (A1)).

A cet égard, vous expliquez que pour éviter "a big clash with them" (p.5 du rapport d’entretien de Monsieur (A1)), vos parents auraient décidé de vous envoyer en Australie pour finir vos études. Pour ce faire, vous auriez été contraint de rassembler une grosse somme d’argent, afin d’obtenir une bonne assurance santé et de payer les frais de scolarité élevés.

Vous avancez ensuite avoir reçu des menaces téléphoniques (p.7 et 8 du rapport d’entretien de Monsieur (A1)) de la part de personnes que vous supposez appartenir au (BB), alors que ces derniers auraient découvert que vous seriez en possession d’une telle somme. Ces menaces téléphoniques se seraient arrêtées lorsque vous auriez changé de numéro de téléphone.

En mars 2019 vous vous seriez rendu à … pour des démarches administratives supplémentaires pour votre visa étudiant australien. Vous y seriez tombé sur des individus que vous supposez à nouveau être des supporteurs du (BB), leur but ayant été de vous soutirer la grosse somme d’argent que vous auriez rassemblé pour payer les frais de scolarité de l’université (p.5 du rapport d’entretien de Monsieur (A1)). Ces derniers vous auraient alors kidnappé, puis agressé, ce qui vous aurait conduit à rester quelques temps à l’hôpital en raison de vos blessures (p.9 et 10 du rapport d’entretien de Monsieur (A1)).

En raison de votre hospitalisation, vous n’auriez pas pu vous présenter à votre entretien à l’ambassade (p.11 du rapport d’entretien de Monsieur (A1)), de sorte que le visa australien vous aurait été refusé. Votre conseiller administratif vous aurait alors proposé une alternative, qui aurait été d’obtenir un visa étudiant pour le Luxembourg, proposition que vous auriez refusée, alors que l’échéance du visa en question aurait été trop longue et que vous n’auriez pas souhaité attendre aussi longtemps étant donné que votre vie aurait été en danger (p.11 et 12 du rapport d’entretien de Monsieur (A1)).

En septembre 2019, vous auriez finalement quitté, ensemble avec votre frère, votre pays d’origine (p.6 du rapport d’entretien de Monsieur (A1)).

Vous expliquez encore que votre but initial aurait été de rejoindre le Luxembourg et d’y introduire votre demande de protection internationale car "There are too many Pakistanis in [other european] countries and my goal was to get a tuition in the University of Luxembourg" (p.4 et 5 du rapport d’entretien de Monsieur (A1)).

A l’appui de votre demande de protection internationale, vous présentez plusieurs documents, notamment :

− Une photo de votre passeport ;

− l’original de votre carte d’identité ;

− l’original d’un acte de naissance ;

− l’original d’un certificat de résidence ;

− l’original d’un Child Registration Certificate, B-form ;

3− une copie d’un certificat de famille ;

− une copie d’un certificat de police ;

− des documents relatifs à votre cursus universitaire.

Votre carte d’identité et votre certificat de naissance ont été déclarés comme étant des documents authentiques par l’Unité de Police de l’Aéroport en date du 4 mars 2022.

▪ Monsieur (A2) Vous avez indiqué être né le … à … dans le district de … qui se situe dans la province de …, être de nationalité pakistanaise, célibataire et de confession …. Vous expliquez avoir vécu la majorité de votre vie avec votre famille à …, mais vous précisez avoir dernièrement vécu à …, qui se situe aux alentours de la ville de ….

Vous confirmez les propos de votre frère et expliquez avoir introduit une demande de protection internationale en raison des problèmes que ce dernier aurait eus avec un "very well know[n] politicien of our region, (B) [who] was competing for (BB)" (p.5 du rapport d’entretien de Monsieur (A2)). En effet, vous précisez que des étudiants, originaires d’…", fief du (BB), vous auraient harcelé afin d’obtenir des informations à propos de votre frère et qu’ils vous auraient agressé et blessé en décembre 2018 (p.6 du rapport d’entretien de Monsieur (A2)), alors que vous n’auriez pas pu leur livrer des informations concluantes au sujet de votre frère.

En janvier 2019, après vous être remis de vos blessures, vous auriez alors quitté votre ville natale pour aller vivre auprès de votre tante maternelle à …. Cependant, le harcèlement à votre encontre en raison des problèmes de votre frère n’aurait pas cessé (p.6 du rapport d’entretien de Monsieur (A2)).

Vous faites ensuite volte-face et expliquez que vous ne seriez pas concrètement au courant des problèmes de votre frère en précisant "1 don’t know the exact problem. He [my brother] refuses to tell me what the actuel problem is" (p.6 du rapport d’entretien de Monsieur (A2)).

Finalement, vous avancez que vous auriez pris la décision de quitter votre pays d’origine en mai 2019 étant donné que votre vie aurait été en "danger" et à "risk" et que "It was not possible for my carrier and future to study" (p.7 du rapport d’entretien de Monsieur (A2)). A cet égard, vous précisez avoir choisi d’introduire votre demande de protection internationale au Luxembourg, d’une part, étant donné qu’il y aurait trop de Pakistanais dans les autres pays européens (p.5 du rapport d’entretien de Monsieur (A2)) et, d’autre part, pour avoir une meilleure opportunité au niveau des études (p.7 du rapport d’entretien de Monsieur (A2)).

A l’appui de votre demande de protection internationale, vous présentez plusieurs documents, notamment :

- Une photo de votre passeport;

- l’original de votre carte d’identité ;

- l’original d’un acte de naissance ;

- l’original d’un certificat de résidence ;

- l’original d’un Child Registration Certificate, B-form ;

- une copie d’un certificat de famille.

4Votre carte d’identité et votre certificat de naissance ont été déclarés comme étant des documents authentiques par l’Unité de Police de l’Aéroport en date des 4 mars et 9 novembre 2022.

2. Quant à la motivation du refus de vos demandes de protection internationale • Quant à la crédibilité de vos récits Il y a lieu de rappeler qu’il incombe à un demandeur de protection internationale de rapporter, dans toute la mesure du possible, la preuve des faits, craintes et persécutions par lui alléguées, sur base d’un récit crédible et cohérent et en soumettant aux autorités compétentes le cas échéant les documents, rapports, écrits et attestations nécessaires afin de soutenir ses affirmations. Il appartient donc à un demandeur de protection internationale de mettre l’administration en mesure de saisir l’intégralité de sa situation personnelle.

Il y a lieu de préciser dans ce contexte que l’analyse d’une demande de protection internationale ne se limite pas à la pertinence des faits allégués par un demandeur de protection internationale, mais il s’agit également d’apprécier la valeur des éléments de preuve et la crédibilité des déclarations, la crédibilité du récit constituant en effet un élément d’évaluation fondamental dans l’appréciation du bien-fondé d’une demande de protection internationale, et plus particulièrement lorsque des éléments de preuve matériels font défaut.

Or, la question de crédibilité se pose avec acuité dans vos cas alors qu’il y a lieu de constater que vous ne faites pas état de manière crédible qu’il existerait des raisons sérieuses de croire que vous encourriez, en cas de retour dans votre pays d’origine, un risque réel et avéré de subir des persécutions ou des atteintes graves au sens de la Loi de 2015.

En effet et avant tout autre développement, il y a lieu de soulever qu’il se dégage de la lecture de vos entretiens que vous dites tout et son contraire et que vos réponses sont de manière générale très incohérentes, de sorte qu’il est difficilement compréhensible de se faire une idée concrète de vos vécus.

▪ Monsieur (A1) Il convient premièrement de relever que vos motifs de fuite sont changeants, alors que vous expliquez, d’abord, lors de l’introduction de votre demande de protection internationale au Service de Police Judiciaire que vous seriez menacé par la mafia pakistanaise (p.2 du rapport du Service de Police Judiciaire), alors que lors de votre entretien individuel vous expliquez avoir été persécuté, kidnappé et agressé par des membres que vous supposez appartenir au parti politique du (BB) en raison de votre adhérence au parti politique rival (AA) (p.5 du rapport d’entretien de Monsieur (A1)). Finalement, vous changez encore de version en expliquant que vous auriez été kidnappé et agressé par des individus qui auraient souhaité vous soutirer la grosse somme d’argent que vous auriez rassemblée pour pouvoir payer les frais de scolarité de l’université en Australie (p.5 et 7 du rapport d’entretien de Monsieur (A1)). Force est donc de constater que d’ores et déjà vous n’êtes pas unanime en ce qui concerne vos motifs de fuites et que vous adoptez la version qui convient le mieux, de sorte qu’on peut valablement remettre en cause la crédibilité de votre récit et plus particulièrement votre réelle intention de venir au Luxembourg.

5Deuxièmement, il convient d’émettre des doutes quant à la vérité de votre adhérence au parti politique (AA), alors que vous affirmez être un supporteur des idéologies de ce parti depuis 2013, mais que vous y auriez adhéré uniquement en 2018 (p.6 du rapport d’entretien de Monsieur (A1)). De plus, lorsque l’agent ministériel vous confronte à des questions plus précises concernant votre activisme au sein du parti, vos réponses commencent à être confuses, alors que vous expliquez, d’une part, que vous auriez été un simple membre sans "high profile" (p.6 du rapport d’entretien de Monsieur (A1)), mais que, d’autre part, vous auriez été le responsable pour organiser et gérer les rassemblements dudit parti.

Toujours dans cette même lignée, vous dites que vous auriez été un membre actif durant la campagne des élections de 2018 (p.6 du rapport d’entretien de Monsieur (A1)), mais vous êtes incapable de donner une réponse claire et concrète lorsque l’agent du ministère vous interroge sur la date des élections de 2018, alors que vous répondez "I think on the 25th June 2018" (p.7 du rapport d’entretien de Monsieur (A1)). Or, une personne dont l’engagement est telle que vous le laissez entendre, qui est instruite et intelligente comme vous l’êtes en ayant un cursus universitaire confirmé et qui aurait été active pendant toute la période de campagne des élections, devrait être à même de connaître la date exacte de la tenue des élections de 2018, contrairement à vous, Monsieur, qui supposez uniquement qu’elles aient eu lieu le 25 juin 2018, alors qu’il s’agit manifestement d’une fausse date, étant donné que les élections se sont déroulées le 25 juillet 2018.

Ces constats sont d’autant plus appuyés alors que vous ne remettez aucun document probant, aucune carte de membre, aucune attestation ou encore des photos permettant de démonter votre activisme au sein du parti (p.6 du rapport d’entretien de Monsieur (A1)) et permettant de corroborer cette partie de votre récit. Or, il est plus que justifié de s’interroger quant à l’absence de tels documents, alors qu’il est parfaitement loisible d’attendre de votre part que vous remettiez de telles preuves ou du moins que vous vous les procuriez et ce d’autant plus que vous n’avancez également aucune explication convaincante par rapport à l’absence de ces preuves. Au même titre, cette interrogation est également justifiée alors que vous vous êtes efforcé de remettre de nombreux autres documents pour corroborer et prouver la sincérité de vos dires, notamment en ce qui concerne, d’une part, votre identité et, d’autre part, votre parcours universitaire et demande de visa étudiant pour l’Australie.

Force est donc de constater que vous n’avez manifestement jamais été un membre du parti politique respectivement que vous n’auriez manifestement jamais eu une position hiérarchique à ce point importante qui justifierait que des opposants dudit parti aient été à votre recherche.

Troisièmement, en ce qui concerne les prétendues menaces téléphoniques que vous auriez reçues, il convient de soulever que vos explications à cet égard sont également très vagues et lacunaires. Ce constat est d’autant plus véridique, alors que vous expliquez avoir changé de numéro de téléphone uniquement au bout d’un mois et demi (p.9 du rapport d’entretien de Monsieur (A1)), chose que vous auriez manifestement faite plus tôt si vous aviez réellement fait l’objet de ces menaces téléphoniques et que vous auriez considéré que celles-ci constitueraient un réel danger pour votre vie. Pareillement, vous n’évoquez aucun fait concret qui vous serait arrivé à la suite de ces prétendues menaces téléphoniques, au contraire, vous expliquez que celles-ci auraient tout simplement cessé après que vous auriez changé de numéro de téléphone. Or, une telle explication est à nouveau dénuée de tout sens, alors que si ces prétendues menaces avaient réellement été proférées à votre encontre, celles-ci n’auraient définitivement pas pris fin aussi facilement, si les auteurs desdites menaces en auraient eu après 6vous et ce uniquement parce que vous auriez changé votre numéro de téléphone. En effet, lesdites menaces auraient logiquement continué sur votre nouveau numéro, alors que les auteurs n’auraient sans nul doute réussi à retrouver votre nouveau numéro de téléphone, comme ils l’avaient d’ailleurs déjà fait avec votre numéro précédent. Ainsi, il convient de soulever que vous n’apportez aucune raison convaincante permettant de confirmer que vous auriez réellement été la cible desdits appels menaçants.

Quatrièmement, il convient encore d’émettre des doutes en ce qui concerne votre supposé kidnapping à … et votre supposée agression ayant suivie votre kidnapping. En effet, il convient de s’interroger comment les personnes que vous supposez appartenir au (BB) auraient su que vous vous trouviez dans ladite ville pour des démarches administratives, et vous y auraient attendu pour vous tendre un piège, alors que peu de temps avant votre déplacement à … vous vous seriez rendu volontairement à … pour récupérer un certificat, village qui constitue le fief du (BB) selon vos dires. Ainsi, lesdites personnes auraient manifestement pu vous agresser à …, s’ils en avaient réellement eu l’intention. Or, vous précisez qu’il ne vous serait jamais rien arrivé de particulier à … (p.8 du rapport d’entretien de Monsieur (A1)).

Toujours en ce qui concerne votre supposé kidnapping et votre supposée agression, il convient également de pointer du doigt que vous faites uniquement état de simples suppositions en ce qui concerne vos agresseurs, sans jamais apporter un élément concret qui permettrait de corroborer l’identité de ces individus et qui permettrait ainsi de prouver que vous auriez personnellement été la cible de ces individus. En effet, vous avancez à plusieurs reprises avoir été importuné par "someone" (p.1 de votre fiche des motifs établi au moment de l’introduction de votre demande de protection internationale) en parlant continuellement de "they" (p.1 de votre fiche des motifs établi au moment de l’introduction de votre demande de protection internationale), et en donnant ensuite uniquement vaguement une description de ces individus (p.9 du rapport d’entretien de Monsieur (A1)). Or, vous n’apportez aucune précision quelconque sur l’identité de vos agresseurs en vous bornant sans cesse de dire que vous seriez persuadé qu’il s’agirait des membres du (BB).

A cet égard, il convient une nouvelle fois de constater que vous ne remettez pas de documents qui permettraient de prouver que vous dites la vérité concernant cette partie de votre récit, alors qu’on pourrait attendre de votre part que vous remettiez une quelconque preuve, une quelconque photo et/ou un quelconque rapport médical, qui confirmerait que vous auriez été victime de cette supposée agression et de ce supposé séjour hospitalier qui en aurait suivi (p.10 du rapport d’entretien de Monsieur (A1)).

Le manque de crédibilité à cet égard est conforté par le fait que vous expliquez que vos motifs de fuite auraient eu lieu en mars 2019, mais que vous avez uniquement jugé nécessaire de quitter votre pays d’origine en septembre 2019 (p.9 du rapport d’entretien de Monsieur (A1)), soit approximativement plus de six mois après. Or, ce comportement ne correspond vraisemblablement pas au comportement qu’aurait adopté une personne dont la vie aurait sérieusement été en danger comme vous le laissez entendre aux autorités luxembourgeoises, alors qu’une telle personne aurait manifestement pris la fuite immédiatement, voire le plus rapidement possible. Ce constat est d’autant plus avéré, alors que vous avez refusé la proposition de votre conseiller administratif pour l’obtention d’un visa étudiant au Luxembourg au motif que les délais d’obtention étaient trop long et que vous ne pourriez plus rester aussi longtemps dans votre pays d’origine car votre vie y serait sérieusement en danger (p.11 et 12 du rapport d’entretien de Monsieur (A1)). Or, vous ne quittez finalement votre pays d’origine qu’en septembre 2019, à savoir six mois après la 7proposition de votre conseiller. Toujours dans cette même lignée, la crédibilité de vos dires est encore totalement mise à mal, alors que vous expliquez que vous auriez déjà pris la décision de quitter votre pays d’origine juste après les élections de 2018, soit après le mois de juillet de l’année 2018 et donc bien avant la survenance de ces supposés faits en mars 2019 (p.12 du rapport d’entretien de Monsieur (A1)), de sorte qu’il est évident que vous aviez déjà pris votre décision de quitter le Pakistan antérieurement aux supposés faits. Force est une énième fois de constater que vous ne semblez clairement pas savoir quelle serait la meilleure version à adopter pour justifier votre départ tardif du Pakistan, alors qu’il convient de relever que vos déclarations par rapport à vos intentions de départ ne concordent pas avec celles de votre frère, qui lors de son propre entretien individuel, a affirmé que tous les deux vous auriez pris la décision de quitter votre pays d’origine en mai 2019.

Force est donc de conclure que vos déclarations par rapport au kidnapping, à l’agression et l’hospitalisation, sont une pure invention de votre part dans le but unique d’aggraver votre situation et d’augmenter vos chances d’obtenir une protection internationale.

Le fait que lesdites parties de votre récit sont inventées de toutes pièces est également corroboré par les propos hilarants que votre frère a tenus fors de son propre entretien individuel, alors que ce dernier a d’abord exposé en long et en large les mêmes problèmes que vous relatez pour ensuite affirmer que jusqu’à aujourd’hui il ne serait pas au courant de vos problèmes exacts (p.6 du rapport d’entretien de Monsieur (A2)), tout en demandant à l’agent ministériel à la fin de son entretien individuel si l’agent pouvait concrètement lui expliquer vos problèmes. Or, ceci démontre que vous vous êtes concerté avec votre frère en lui expliquant quoi dire lors de son entretien, chose qui semble malencontreusement ne pas avoir fonctionné.

A toutes fins utiles, il convient de souligner que vous justifiez avoir choisi d’introduire votre demande de protection internationale au Luxembourg alors que "there are too many Pakistanis in those countries" en parlant des autres pays européens traversés avant le Luxembourg et que de toute façon votre but aurait été d’obtenir a "tuition in the University of Luxembourg" (p.5 du rapport d’entretien de Monsieur (A1)). Votre frère, explique également clairement que : "first we came because there are less Pakistanis and secondly for the good opportunity to study" (p.7 du rapport d’entretien de Monsieur (A2)). Or, le fait que vous n’ayez pas jugé nécessaire d’introduire une demande de protection internationale dans le premier pays sûr traversé ne constitue manifestement pas une coïncidence, alors que vous étiez pertinemment au courant des conditions d’études au Luxembourg, renseignements que votre conseiller administratif vous avait donné quand vous étiez encore au Pakistan.

Force est donc de constater que votre opportunisme est indéniable, alors que les problèmes dans votre pays d’origine ne correspondent manifestement pas à ceux que vous prétendez avoir, mais au contraire, qu’il s’agit de raisons de pure convenance personnelle, voire des raisons purement économiques qui vous ont poussé à quitter votre pays pour venir au Luxembourg.

Partant, votre récit n’étant pas crédible, aucune protection internationale ne vous est accordée.

▪ Monsieur (A2) 8Force est de constater que vos motifs de fuite découlent formellement des prétendus problèmes qu’auraient eus votre frère dans votre pays d’origine, alors que vous expliquez que vous auriez été victime des problèmes de votre frère par ricochet.

Or, et eu égard aux développements ci-dessus, la crédibilité des déclarations de votre frère dans votre pays d’origine étant remises en question, aucune crédibilité ne saurait être accordée à vos propres problèmes avancés, alors que ceux-ci ne sont que la conséquence directe des prétendus problèmes de votre frère.

Partant, votre récit n’étant également pas crédible, aucune protection internationale ne vous est accordée.

Quand bien même le récit de votre frère et par conséquent également le vôtre seraient crédibles, quod non, il s’avère que vous ne remplissez pas les conditions pour l’octroi du statut de réfugié, respectivement pour l’octroi du statut conféré par la protection subsidiaire.

• Quant au refus du statut de réfugié Les conditions d’octroi du statut de réfugié sont définies par la Convention du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés (ci-après dénommée « la Convention de Genève ») et par la Loi de 2015.

Aux termes de l’article 2 point f) de la Loi de 2015, qui reprend l’article 1A paragraphe 2 de la Convention de Genève, pourra être qualifié de réfugié : « tout ressortissant d’un pays tiers ou apatride qui, parce qu’il craint avec raison d’être persécuté du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de ses opinions politiques ou de son appartenance à un certain groupe social, se trouve hors du pays dont il a Ici nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays ou tout apatride qui, se trouvant pour les raisons susmentionnées hors du pays dans lequel il avait sa résidence habituelle, ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut y retourner et qui n’entre pas dans le champ d’application de l’article 45 ».

L’octroi du statut de réfugié est soumis à la triple condition que les actes invoqués soient motivés par un des critères de fond définis à l’article 2 point f) de la Loi de 2015, que ces actes soient d’une gravité suffisante au sens de l’article 42 paragraphe 1 de la prédite loi, et qu’ils émanent de personnes qualifiées comme acteurs aux termes de l’article 39 de la loi susmentionnée.

▪ Monsieur (A1) Vous déclarez que votre vie serait en danger depuis votre adhérence au parti politique (AA) depuis la campagne des élections de 2018, alors que des supporteurs d’un parti politique rival auraient eu connaissance de la grosse somme d’argent que vous auriez rassemblé pour pouvoir payer vos études en Australie. Ces individus vous auraient alors menacé par téléphone, kidnappé et agressé dans l’unique but de vous soutirer cette grosse somme d’argent dont vous auriez été en possession.

Force est de constater que tous les faits que vous avancez ne sont aucunement en lien avec l’un des cinq motifs de fond de la Convention de Genève et de la Loi de 2015.

9En effet, en ce qui concerne les menaces téléphoniques que vous auriez reçues, il est évident que la finalité desdites menaces, qui provenaient d’un numéro anonyme et de personnes non autrement identifiées, auraient uniquement été de vous extorquer et soutirer la grosse somme d’argent que vous auriez rassemblée pour aller étudier en Australie. Constat que vous confirmez d’ailleurs par vos propres dires en expliquant que " (..) my rivals came to know that I am in possession of 7 to 8 million rupees. Then they started giving us telephone calls from different numbers, asking to pay extortion, and threatened that if we do not pay them there will be consequences" (p.5 et 9 du rapport d’entretien de Monsieur (A1)).

Pareil constat s’impose en ce qui concerne votre kidnapping et votre agression, alors que la finalité de ces évènements auraient à nouveau été la grosse somme d’argent que ces individus auraient souhaité vous soutirer, ce qui ressort de votre entretien individual : "I was in … one day at the bus stop, three persons came to me, they pointed a gun at me (…) they remind me of the money, they told me that, if I wanted to be freed, I had to give them the money" (p. 5 et 9 du rapport d’entretien de Monsieur (A1)).

Ainsi, force est de conclure que les faits dont vous faites état sont dénués de tout lien avec les critères énumérés dans le champ d’application de la Convention de Genève et de la Loi de 2015, à savoir votre race, votre religion, votre nationalité, vos opinions politiques ou votre appartenance à un certain groupe social, alors que vous auriez été menacé et agressé dans un seul but de lucre.

Par ailleurs, force est encore de constater que les problèmes respectivement les faits que vous avancez ne revêtent manifestement pas un degré de gravité suffisant tels qu’ils puissent être assimilés à un acte de persécution ou une crainte fondée de persécution au sens des dispositions précitées de la Convention de Genève et de la Loi de 2015.

En effet, en ce qui concerne les menaces téléphoniques que vous auriez reçues, il convient de constater que de telles actions non suivies d’un quelconque fait concret ne revêtent pas un degré de gravité tel à pouvoir être considérées comme des actes de persécutions au sens des textes précités. Ce constat est encore renforcé par le fait que les menaces provenaient d’un numéro anonyme et de personnes non autrement identifiées que vous supposez uniquement être des membres du groupe politique du (BB), mais sans ne jamais avancez (sic) aucune preuve concrète de l’identité des auteurs de ces menaces. De plus, les menaces auraient cessé lorsque vous auriez changé votre numéro de téléphone et ce bien avant votre départ définitif de votre pays d’origine. Vous auriez donc vous-même estimé que votre situation ne serait pas tellement grave à rendre votre vie dans votre pays d’origine intolérable et à rendre une fuite indispensable.

En ce qui concerne ensuite votre kidnapping et votre agression à …, il convient de souligner que ces incidents constituent des faits isolés, qui seraient arrivés une seule fois lors d’une journée de mars 2019 et qu’il ne vous serait plus jamais rien arrivé de grave par la suite (p.12 du rapport d’entretien de Monsieur (A1)), de sorte qu’on peut à nouveau valablement conclure que ces évènements ne revêtent pas un degré de gravité suffisant pour pouvoir être assimilés à une crainte fondée de persécution.

Force est à nouveau de constater que vous avez uniquement jugé nécessaire de quitter votre pays d’origine en septembre 2019, c’est-à-dire plus de six mois après votre kidnapping-agression, de sorte que vous avez définitivement estimé que votre situation dans votre pays d’origine ne serait pas d’une telle gravité pour y rendre votre vie intolérable pendant 10tout ce lapse de temps. En effet, le fait que vous ayez attendu approximativement six mois avant de quitter votre pays d’origine ne saurait être convaincant pour ancrer la gravité de votre situation, étant donné que si les individus avaient réellement souhaité vous nuire, ces derniers auraient manifestement eu la possibilité de le faire pendant tout ce laps de temps.

Même à supposer que vos différents problèmes, à savoir les menaces téléphoniques, le kidnapping et l’agression seraient à qualifier d’actes de persécution motivés par un des cinq motifs de fond de la Convention de Genève et de la Loi de 2015, il convient de constater que s’agissant d’actes émanant de personnes privées, ceux-ci peuvent être considérés comme fondant une crainte légitime uniquement en cas de défaut de protection de la part des autorités pakistanaises.

Or, force est de souligner, que vous n’avez pas jugé nécessaire de porter plainte contre les auteurs des menaces téléphoniques ou encore contre vos kidnappeurs-agresseurs (p.12 du rapport d’entretien de Monsieur (A1)). Vous n’avez pas non plus jugé nécessaire de solliciter une quelconque forme d’aide auprès des autorités de votre pays, ce que vous justifiez en avançant que "my ennemies have a hold on the police station of …. They were influential people" (p.12 du rapport d’entretien de Monsieur (A1)). Cependant, cette justification de votre part ne saurait emporter aucune conviction, alors que vous vous seriez déjà rendu au commissariat de police de … pour vous faire octroyer un certificat pour vos études et qu’il ne vous serait rien arrivé selon vos propres dires (p.8 du rapport d’entretien de Monsieur (A1)).

Ainsi, vous ne sauriez vous retrancher derrière votre inaction pour reprocher une quelconque défaillance, respectivement, absence d’action aux autorités pakistanaises compétentes.

A toutes fins utiles, et eu égard aux arguments développés dans la partie relatif (sic) à la crédibilité de votre récit, il ressort très clairement de votre dossier administratif que l’unique raison qui vous a motivé à introduire une demande de protection internationale au Luxembourg est de nature purement personnelle voire économique, alors qu’il apert que vous auriez souhaité faire des études au Luxembourg et que les autres pays européens auraient déjà été trop peuplés de pakistanais à votre goût (p.5 du rapport d’entretien de Monsieur (A1)). Ce constat est également renforcé et consolidé par les propos de votre frère avec lequel vous êtes arrivé au Luxembourg, alors que ce dernier affirme ouvertement "first we came because there are less Pakistanis and secondly for the good opportunity to study" (p.7 du rapport d’entretien de Monsieur (A2)). Votre opportunisme est donc indéniable.

Cet opportunisme est d’ailleurs flagrant, alors que vous expliquez en long et en large ne pas avoir obtenu votre visa pour vos études en Australie et avoir obtenu des informations concernant la possibilité d’obtenir un visa étudiant au Luxembourg.

Partant, le statut de réfugié ne vous est pas accordé.

▪ Monsieur (A2) Vous déclarez que votre vie serait en danger en raison des problèmes qu’auraient eus votre frère dans votre pays d’origine, étant donné que les personnes qui en auraient eu après lui s’en seraient également pris à vous et vous aurait harcelé et agressé.

Force est de constater que les problèmes, respectivement, les craintes de votre frère, ne justifient pas l’octroi du statut de réfugié. Par conséquent, vos craintes, respectivement, vos 11problèmes, qui découlent directement des problèmes de votre frère ne sauraient pas non plus justifier l’octroi du statut de réfugié dans votre chef.

En effet, il convient de relever que vos craintes n’ont aucun lien avec l’un des cinq motifs de fond définis par la Convention de Genève et la Loi de 2015, à savoir votre race, votre nationalité, votre religion, vos opinions politiques ou votre appartenance à un groupe social, alors que les craintes que vous relatez se basent uniquement sur les craintes, respectivement, les problèmes qu’auraient éprouvés votre frère dans votre pays d’origine, de sorte que vous auriez uniquement été une victime par ricochet dans l’unique but de faire pression sur votre frère.

Ce constat est d’autant plus véridique, alors que vous expliquez jusqu’à aujourd’hui ne pas être au courant des problèmes exacts de votre frère avec ces individus (p.6 du rapport d’entretien de Monsieur (A2)) étant donné que vous avez demandé à l’agent du Ministère si ce dernier pouvait vous expliquer ce que votre frère aurait raconté lors de son propre entretien individuel (p.8 du rapport d’entretien de Monsieur (A2)).

Par ailleurs, force est de constater que les problèmes, respectivement, les faits que vous décrivez en tant que victime par ricochet ne revêtent manifestement pas un degré de gravité suffisant tels qu’ils puissent être assimilés à un acte de persécution au sens des textes précités.

En effet, premièrement, vous expliquez avoir subi à plusieurs reprises des harcèlements de la part d’individus d’… village (p.7 du rapport d’entretien de Monsieur (A2)), qui auraient souhaité vous soutirer des informations à propos de votre frère, informations que vous n’auriez pas été en mesure de leur donner. Or, de simples harcèlements non suivis d’un quelconque fait concret ne revêtent pas un degré de gravité tel à pouvoir être considérées (sic) comme des actes de persécutions au sens de la Convention de Genève et de la Loi de 2015.

Deuxièmement, il apert en ce qui concerne votre agression, que celle-ci constitue un fait isolé et qu’il ne vous ait plus jamais rien arrivé de grave par la suite. Ce constat est d’autant plus renforcé, alors que cette agression unique aurait eu lieu en décembre 2018 (p.6 du rapport d’entretien de Monsieur (A2)), mais que vous avez jugé nécessaire de quitter votre pays d’origine uniquement en septembre 2019 (p.5 du rapport d’entretien de Monsieur (A2)), soit presque un an après les évènements que vous relatez, de sorte que vos craintes ne sont manifestement pas d’une gravité telle à rendre votre vie intolérable dans votre pays d’origine.

En effet, si lesdits individus en auraient réellement eu après vous, ces derniers auraient manifestement eu la possibilité de vous nuire pendant tout ce laps de temps, et ne vous auraient très certainement pas laissé tranquille pendant presque une année complète. Ainsi, il est évident et flagrant que vous n’avez personnellement jamais été dans le collimateur de ces individus.

Force est encore de s’interroger sérieusement comment ces personnes auraient su que vous étiez de la même famille que votre frère aîné, (A1), alors que vous ne portez pas le même nom de famille, que vous ne vous ressemblez pas physiquement et que vous n’habitiez pas dans la même ville.

Toujours dans cette lignée, il convient de relever que vous n’avez remis aucun document, aucune photo, aucun rapport médical, aucune attestation ou autre preuve, qui permettrait de prouver ladite agression que vous auriez subie. Or, il est plus que justifié d’attendre une quelconque pièce probante de votre part, étant donné vous avez mentionnez être en possession de "documents and x-ray pictures", mais que, comme par hasard, vous les auriez 12laissés au Pakistan (p.7 du rapport d’entretien de Monsieur (A2)) et que vous n’auriez pas entrepris la moindre démarche pour vous les procurer.

Ainsi, force est de constater que les problèmes, respectivement les craintes que vous décrivez ne revêtent manifestement pas un degré de gravité suffisant tels qu’ils puissent être assimilés à un acte de persécution ou une crainte fondée de persécution au sens des textes précités.

Même à supposer que vos problèmes seraient à qualifier d’actes de persécution motivés par un des cinq motifs de fond de la Convention de Genève et de la Loi de 2015, il convient de constater que s’agissant d’actes émanant de personnes privées, ceux-ci peuvent être considérés comme fondant une crainte légitime uniquement en cas de défaut de protection de la part des autorités pakistanaises.

Or, vous n’avez pas jugé nécessaire de porter plainte contre vos agresseurs. Vous n’avez pas non plus jugé nécessaire de solliciter une quelconque forme d’aide auprès des autorités de votre pays, ce que vous justifiez en disant que vos amis vous en auraient dissuadé en expliquant que ces individus seraient "strong and influential" (p.7 du rapport d’entretien de Monsieur (A2)). Cependant, votre justification ne saurait emporter conviction, alors que vous auriez été innocent et qu’il s’agissait de dénoncer des infractions de droit commun répressibles selon la loi pakistanaise. Ainsi vous ne sauriez vous retrancher derrière votre inaction pour reprocher une quelconque défaillance, respectivement, absence d’action aux autorités pakistanaises compétentes.

De plus, force est de constater qu’une personne qui aurait réellement été en danger dans son pays d’origine aurait introduit une demande de protection internationale dans le premier pays sûr dans lequel elle serait arrivée, contrairement à vous et votre frère, qui avez coûte que coûte rejoint le Luxembourg pour y introduire votre demande de protection, alors que vous avez séjourné pendant plusieurs mois en Grèce et pendant deux mois en Bosnie.

Toujours à cet égard, vous précisez d’ailleurs clairement que vous n’auriez pas souhaité introduire une demande de protection internationale dans un autre pays européen alors que "study care is very good here" en parlant du Luxembourg (p.5 du rapport d’entretien de Monsieur (A2)). Ainsi, un tel comportement ne traduit clairement pas le comportement d’une personne qui aurait réellement été en danger et qui aurait été reconnaissante d’obtenir une forme de protection quelconque dans un quelconque pays.

A toutes fins utiles, il ressort des éléments de votre dossier et comme déjà prédit que vous avez choisi le Luxembourg pour y introduire votre demande de protection internationale, alors que vous dites ouvertement que "first we came because there are less Pakistanis and secondly for the good opportunity to study" (p.7 du rapport d’entretien de Monsieur (A2)). Or, ceci accentue le fait, que vous n’avez aucun problème particulier et individuel dans votre pays d’origine, mais au contraire, qu’il s’agit de raisons purement personnelles et opportunistes qui vous ont poussé à quitter votre pays d’origine, raisons qui ne sauraient aucunement justifier l’octroi du statut de réfugié.

Partant, le statut de réfugié ne vous est pas accordé.

13• Quant au refus du statut conféré par la protection subsidiaire Aux termes de l’article 2 point g) de la Loi de 2015 « tout ressortissant d’un pays tiers ou tout apatride qui ne peut être considéré comme un réfugié, mais pour lequel il y a des motifs sérieux et avérés de croire que la personne concernée, si elle était renvoyée dans son pays d’origine ou, dans le cas d’un apatride, dans le pays dans lequel il avait sa résidence habituelle, courrait un risque réel de subir les atteintes graves définies à l’article 48, l’article 50, paragraphes 1 et 2, n’étant pas applicable à cette personne, et cette personne ne pouvant pas ou, compte tenu de ce risque, n’étant pas disposée ä se prévaloir de la protection de ce pays » pourra obtenir le statut conféré par la protection subsidiaire.

L’article 48 définit en tant qu’atteinte grave « la peine de mort ou l’exécution », « la torture ou des traitements ou sanctions inhumains ou dégradants infligés à un demandeur dans son pays d’origine » et « des menaces graves et individuelles contre la vie ou la personne d’un civil en raison d’une violence aveugle en cas de conflit armé interne ou international ».

L’octroi de la protection subsidiaire est soumis à la double condition que les actes invoqués soient qualifiés d’atteintes graves au sens de l’article 48 de la Loi de 2015 et que les auteurs de ces actes puissent être qualifiés comme acteurs au sens de l’article 39 de cette même loi. Or, en l’espèce, force est de constater que ces conditions ne sont pas remplies cumulativement.

Monsieur (A1), il ressort en l’espèce à suffisance de votre dossier administratif que vous fondez votre demande en octroi du statut conféré par la protection subsidiaire sur les mêmes motifs que ceux exposés à la base de votre demande en reconnaissance du statut de réfugié.

Pareille conclusion s’impose pour vous, Monsieur (A2).

Or, et tout en renvoyant aux arguments développés précédemment, il apert que, tous les deux, vous n’apportez aucun élément de nature à établir qu’il existerait de sérieuses raisons de croire que vous encouriez, en cas de retour dans votre pays d’origine, un risque réel et avéré de subir des atteintes graves au sens de l’article 48 précité, respectivement, que les autorités pakistanaises seraient dans l’impossibilité de vous offrir une protection.

Partant, le statut conféré par la protection subsidiaire ne vous est pas accordé.

Vos demandes en obtention d’une protection internationale sont dès lors refusées comme non fondées.

Suivant les dispositions de l’article 34 de la Loi de 2015, vous êtes dans l’obligation de quitter le territoire endéans un délai de 30 jours à compter du jour où la présente décision sera coulée en force de chose décidée respectivement en force de chose jugée, à destination de la République islamique du Pakistan, ou de tout autre pays dans lequel vous êtes autorisé à séjourner. (…) ».

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 31 mars 2023, les consorts (A) firent introduire un recours tendant à la réformation, sinon à l’annulation de la décision ministérielle du 28 février 2023 portant refus de faire droit à leurs demandes de protection internationale et de l’ordre de quitter le territoire contenu dans le même acte.

14Par jugement du 3 mars 2025, le tribunal administratif, tout en disant qu’il n’y avait pas lieu de statuer sur le recours subsidiaire en annulation, rejeta le recours principal en réformation pour défaut d’intérêt à agir.

Pour arriver à cette conclusion, le tribunal, informé le 24 novembre 2024 par courriel du mandataire des consorts (A) que ceux-ci lui avaient retiré le mandat, avait soulevé d’office, à l’audience des plaidoiries du 22 janvier 2025, la question du maintien de l’intérêt à agir des demandeurs, ceux-ci ayant été en vain invités par le tribunal administratif, par courriers recommandés avec accusé de réception des 21 novembre 2024 et 9 janvier 2025, à charger un nouvel avocat de la défense de leurs intérêts, ces deux courriers ayant été retournés au greffe du tribunal avec la mention « non réclamé ».

Sur ce, le tribunal constata qu’il n’y avait pas eu ni reprise de mandat, ni constitution de nouvel avocat de la part des consorts (A), qui avaient également omis de communiquer à leur ancien mandataire, au ministre ainsi qu’au tribunal leurs nouvelles coordonnées, de manière à rendre impossible toute communication ou notification en relation avec la procédure contentieuse qu’ils avaient intentée contre la décision litigieuse du 28 février 2023.

Le tribunal en conclut que les consorts (A) n’avaient témoigné aucun intérêt pour le déroulement et le maintien de l’instance qu’ils avaient introduite par leur requête du 31 mars 2023 et qu’il convenait partant de rejeter leur recours pour défaut d’intérêt à agir.

Par requête déposée au greffe de la Cour administrative le 4 avril 2025, les consorts (A) ont régulièrement relevé appel de ce jugement.

A l’appui de leur appel, ils déclarent être de nationalité pakistanaise, musulmans de confession … et d’ethnie … Ils expliquent avoir quitté le Pakistan en 2019, en passant par l’Iran, la Turquie et la Grèce, avant de prendre la route des Balkans.

Ils exposent que Monsieur (A1) aurait été partisan d’une « petite organisation » dénommée (AA) avant les élections législatives de 2018 et qu’il aurait été approché par une autre « organisation » (BB) pour qu’il rejoigne celle-ci. Le fondateur du (BB) aurait, à l’issue des élections, été nommé premier ministre du Pakistan. Monsieur (A1) déclare s’être trouvé en difficultés vis-à-vis des partisans du (BB) et sa famille aurait alors décidé de l’envoyer étudier en Australie. Pour financer ses études en Australie, sa famille aurait dû vendre des biens et emprunter pour réunir les fonds nécessaires. Des individus, ayant eu vent de l’existence de cette importante somme d’argent, les auraient menacés à plusieurs reprises pour leur soutirer cet argent. Il se serait même fait agresser par trois personnes, lorsqu’il se serait trouvé à …, qui l’auraient enlevé et torturé pour qu’il leur donne l’argent et aurait fini à l’hôpital où il serait resté une semaine. A cause de son hospitalisation, il aurait raté son entrevue en vue de l’obtention de son visa australien, qui lui aurait alors été refusé. Les appelants concluent que comme leur vie aurait été en danger, ils auraient décidé de quitter le Pakistan.

En droit, en ce qui concerne leur intérêt à agir, les appelants précisent qu’après avoir mandaté successivement Maître Michel KARP, Maître Sarah MOINEAUX et Maître Elena FROLOVA, cette dernière aurait déposé le 20 novembre 2024 son mandat. Ils affirment que la partie étatique aurait été informée par un courrier de Maître FROLOVA du 20 février 2024 de leur changement d’adresse. Ils auraient changé d’adresse le 13 mai 2024 et auraient effectué les démarches afférentes auprès de la Ville de Luxembourg. Ils auraient également donné leur nouvelle adresse au ministère.

15Les appelants en concluent qu’aucun désintérêt ne saurait leur être reproché, dès lors qu’ils auraient mandaté plusieurs avocats de la défense de leurs intérêts. Dans ce contexte, ils se prévalent du principe d’estoppel, auquel la partie étatique aurait failli en sollicitant l’irrecevabilité de leur recours initial, alors que celle-ci aurait pourtant bien été au courant qu’ils ne résidaient plus dans les foyers d’accueil pour demandeurs d’asile et qu’elle avait eu connaissance de leur nouvelle adresse située à Esch-sur-Alzette. Ils auraient en plus mis en place le transfert de leur courrier de cette adresse vers celle à Luxembourg-Ville. Ils estiment que le fait pour la partie étatique d’avoir eu cette adresse et de ne pas l’avoir communiquée à la « Cour » reviendrait à méconnaître leur droit à un procès équitable.

Quant au rejet de la demande du statut de réfugié, les appelants soutiennent que le ministre aurait méconnu l’article 37, paragraphe (3), sous a), de la loi du 18 décembre 2015, au motif qu’il aurait fait une mauvaise analyse de la situation actuelle prévalant dans leur pays d'origine, où les droits de l’homme seraient constamment bafoués.

Les appelants disent ensuite craindre d’être exposés à des persécutions, en cas de retour dans leur pays d'origine, dès lors qu’ils auraient déjà fait l’objet de nombreuses menaces, d’enlèvements et d’actes de violence. Il n’y aurait aucune bonne raison de penser que ces persécutions ne se reproduiront pas, puisque les mêmes autorités seraient toujours au pouvoir au Pakistan où il règnerait un climat de terreur et où ils ne pourraient pas compter sur la protection des autorités pakistanaises.

Ils se prévalent ensuite de l’application en l’espèce de la présomption légale établie par l’article 37, paragraphe (4), de la loi du 18 décembre 2015.

Sur ce, ils sollicitent la reconnaissance du statut de réfugié dans leur chef, estimant en remplir les conditions d’octroi.

En ordre subsidiaire, ils sollicitent l’octroi du statut conféré par la protection subsidiaire, en insistant sur le fait qu’ils ne pourraient pas rentrer au Pakistan « car il a été condamné à 5 ans de prison ferme », tout en dénonçant les conditions de détention dans les prisons pakistanaises.

Ils réfutent encore toute possibilité de fuite interne, affirmant n’être nulle part en sécurité dans leur pays d'origine.

Concernant l’ordre de quitter le territoire, les appelants sollicitent sa réformation comme conséquence de l’octroi d’une protection internationale.

En ordre subsidiaire, ils soutiennent que ledit ordre serait contraire à l’article 129 de la loi modifiée du 29 août 2008 sur la libre circulation des personnes et l’immigration, dans la mesure où un retour au Pakistan serait suivi dans leur chef de persécutions ou d’atteintes graves.

L’Etat, pour sa part, conclut à la confirmation du jugement dont appel, tout en insistant encore sur le défaut de crédibilité du récit des appelants.

En ce qui concerne tout d’abord la question de l’intérêt à agir des appelants, c’est à bon droit que les premiers juges ont rappelé que l’intérêt à agir est à apprécier au moment de l’introduction du recours, alors que la question distincte de son maintien au cours de l’instance, ou plus précisément la question de l’intérêt à poursuivre une action, doit être examinée au jour 16du jugement. Si la volonté du justiciable de poursuivre son action vient à disparaître en cours de procès, il y a lieu de conclure que l’intérêt requis en droit a disparu et que le recours n’a plus objet et est partant à rejeter.

En l’espèce, il est vrai que le mandataire des consorts (A), ayant introduit le recours initial, a déposé son mandat avant la première audience des plaidoiries du 20 novembre 2024 et que ceux-ci n’ont pas chargé un nouvel avocat, malgré le fait d’y avoir été invités à deux reprises par le tribunal administratif, de sorte que les premiers juges ont pu à bon droit retenir que les consorts (A) n’ont en toute apparence plus fait preuve du moindre intérêt pour le maintien du recours qu’ils avaient fait introduire et qu’ils l’ont donc rejeté pour manquer d’objet.

Cela étant dit, par le fait d’avoir interjeté appel contre ce jugement, ils témoignent de ce que l’apparence qu’ils avaient laissé transpercer n’était pas la leur et qu’ils gardent un intérêt à agir à poursuivre leur action, leur recours devant dès lors, au regard de cette rectification être considéré comme gardant un objet.

Il convient dès lors d’examiner le bien-fondé du rejet du ministre des demandes de protection internationale des consorts (A), examen auquel les premiers juges n’ont pas procédé.

La notion de « réfugié » est définie par l’article 2 sub f), de la loi du 18 décembre 2015 comme étant « tout ressortissant d’un pays tiers ou apatride qui, parce qu’il craint avec raison d’être persécuté du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de ses opinions politiques ou de son appartenance à un certain groupe social, se trouve hors du pays dont il a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays ou tout apatride qui, se trouvant pour les raisons susmentionnées hors du pays dans lequel il avait sa résidence habituelle, ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut y retourner (…) ».

Il se dégage de la lecture combinée des articles 2 sub h), 2, sub f), 39, 40 et 42, paragraphe (1), de la loi du 18 décembre 2015 que l’octroi du statut de réfugié est notamment soumis aux conditions que les actes invoqués sont motivés par un des critères de fond y définis, à savoir la race, la religion, la nationalité, les opinions politiques ou l’appartenance à un certain groupe social, que ces actes sont d’une gravité suffisante au sens de l’article 42, paragraphe (1), de la loi du 18 décembre 2015 et qu’ils émanent de personnes qualifiées comme acteurs aux termes des articles 39 et 40, étant entendu qu’au cas où les auteurs des actes sont des personnes privées, elles sont à qualifier comme acteurs seulement dans le cas où les acteurs visés aux points a) et b) de l’article 39 ne peuvent ou ne veulent pas accorder une protection contre les persécutions et, enfin, que le demandeur ne peut ou ne veut pas se réclamer de la protection de son La loi du 18 décembre 2015 définit la personne pouvant bénéficier de la protection subsidiaire comme étant celle qui avance « des motifs sérieux et avérés de croire que », si elle était renvoyée dans son pays d'origine, elle « courrait un risque réel de subir des atteintes graves définies à l'article 48 », ledit article 48 loi énumérant en tant qu’atteintes graves, sous ses points a), b) et c), « la peine de mort ou l’exécution; la torture ou des traitements ou sanctions inhumains ou dégradants infligés à un demandeur dans son pays d’origine; des menaces graves et individuelles contre la vie ou la personne d’un civil en raison d’une violence aveugle en cas de conflit armé interne ou international ». L'octroi de la protection subsidiaire est notamment soumis à la double condition que les actes invoqués par le demandeur, de par leur nature, répondent aux hypothèses envisagées aux points a), b) et c) de l'article 48 de la loi 17du 18 décembre 2015, et que les auteurs de ces actes puissent être qualifiés comme acteurs au sens des articles 39 et 40 de cette même loi, étant relevé que les conditions de la qualification d'acteur sont communes au statut de réfugié et à celui conféré par la protection subsidiaire.

Dans la mesure où les conditions sus-énoncées doivent être réunies cumulativement, le fait que l’une d’entre elles ne soit pas valablement remplie est suffisant pour conclure que le demandeur de protection internationale ne saurait bénéficier du statut de réfugié ou de celui conféré par la protection subsidiaire.

Par ailleurs, l’octroi d’une protection internationale n’est pas uniquement conditionné par la situation générale existant dans le pays d’origine d’un demandeur de protection internationale, mais aussi et surtout par la situation particulière de l’intéressé qui doit établir, concrètement, que sa situation subjective spécifique a été telle qu’elle laissait supposer un danger sérieux pour sa personne.

Dans le cadre de l’examen au fond d’une demande de protection internationale, l’évaluation de la situation personnelle d’un demandeur d’asile ne se limite pas à la pertinence des faits allégués, mais elle implique un examen et une appréciation de la valeur des éléments de preuve et de la crédibilité des déclarations du demandeur d’asile. La crédibilité du récit de ce dernier constitue en effet un élément d’appréciation fondamental dans l’examen du bien-fondé de sa demande de protection internationale, et plus particulièrement lorsque des éléments de preuve matériels font défaut.

Ceci étant rappelé, la Cour note que le ministre a remis en question la crédibilité du récit des appelants pour différentes raisons.

Ainsi, le ministre reproche à Monsieur (A1) notamment (i) d’avoir présenté successivement différents motifs de fuite, (ii) d’avoir des connaissances lacunaires sur le parti politique (AA) dont il se dit être un adhérent, (iii) d’avoir été vague et lacunaire dans son récit relatif aux prétendues menaces téléphoniques qu’il aurait reçues, (iv) de ne pas avoir pu identifier ses agresseurs, ni avoir fourni un quelconque élément de preuve en rapport avec cette agression et (v) le temps qu’il aurait mis à quitter le Pakistan malgré le danger pesant sur lui.

S’agissant de Monsieur (A2), le ministre a conclu au défaut de crédibilité de son récit, dès lors qu’il affirmait être une victime par ricochet des problèmes de son frère aîné.

La Cour considère que les motifs de la décision ministérielle, qu’elle fait siens, sont suffisants pour justifier le rejet de la demande de protection internationale des appelants, dès lors que les incohérences soulevées par le ministre dans le récit des appelants auxquelles il est renvoyé, permettent de conclure au défaut de crédibilité de leur récit dans sa globalité qui empêche de conclure à l’existence, dans leur chef, d’une crainte fondée de persécution ou d’un risque réel d’atteintes graves à raison des faits allégués.

En effet, la Cour est, à son tour, amenée à constater que Monsieur (A1) a présenté des versions différentes sur les motifs de fuite à l’appui de sa demande de protection internationale lors de ses déclarations successives, étant donné qu’il a affirmé auprès du service de Police judiciaire être menacé par la mafia pakistanaise, tandis lors de son entretien avec l’agent du ministère, il a déclaré avoir été kidnappé et agressé par des membres supposés du parti politique (BB) en raison de son adhérence au parti politique rival (AA), pour finalement encore changer de version en affirmant avoir été kidnappé et agressé par des individus intéressés par l’argent réuni pour payer les frais de scolarité de l’université en Australie.

18Quant au récit de son frère, Monsieur (A2), il convient de relever que celui-ci dit craindre d’être exposé à des persécutions sinon des atteintes graves en raison des problèmes que son frère aurait eus avec le parti (BB).

Or, dans la mesure où la Cour partage la conclusion du ministre quant au défaut de crédibilité du récit de Monsieur (A1), les problèmes invoqués par Monsieur (A2) ne sauraient pas non plus être retenus comme crédibles.

Il convient par ailleurs de relever que les appelants n’avancent dans leur requête d’appel aucune explication ou argument qui permettrait d’invalider le constat du ministre quant au manque de crédibilité de leur récit, ceux-ci se limitant à maintenir leur récit et affirmer des généralités.

En outre, ils n’ont produit en appel, pas plus qu’en première instance, un quelconque élément de preuve pour appuyer leurs déclarations.

Ainsi, comme le ministre l’a relevé à bon escient, ils n’ont versé aucun élément de preuve pour étayer l’adhérence de Monsieur (A1) au parti politique (AA), tel par exemple, une carte de membre, de même qu’ils n’ont versé aucune pièce de nature à démontrer l’agression dont celui-ci aurait été victime, et notamment un certificat médical ou un rapport de son hospitalisation, ni en ce qui concerne d’ailleurs l’agression dont Monsieur (A2) aurait été victime. S’il est certes vrai qu’il ne peut pas être attendu d’un demandeur de protection internationale de produire des preuves documentaires de son vécu, il convient toutefois de relever qu’en l’espèce, les appelants ont su fournir des preuves quant à leur identité et au cursus universitaire de Monsieur (A1), mais non pas au sujet de leur vécu, alors qu’ils ont eu le temps de rassembler ces autres preuves et qu’ils se sont même fait envoyer au Luxembourg des documents.

En définitive, les appelants ne fournissent aucun élément d’appréciation nouveau pour convaincre la Cour de la crédibilité de leur récit invoqué à l’appui de leurs demandes de protection internationale.

En effet, ils se contentent, en appel, de renvoyer à la situation sécuritaire prévalant dans leur pays d'origine, en se référant à différences sources d’informations internationales.

Or, la Cour rappelle que la simple invocation de rapports faisant état, de manière générale, de violations des droits de l’homme dans un pays, ne suffit pas à établir que tout ressortissant de ce pays encourt un risque d’être soumis à la torture ou à des traitements inhumains ou dégradants. Il incombe au demandeur d’asile de démontrer, in concreto, qu’il a personnellement des raisons de craindre d’être persécuté au regard des informations disponibles sur son pays.

En l’espèce, si des sources fiables font certes état de violations des droits fondamentaux de l’homme au Pakistan, ces informations générales ne permettent pas de retenir une appréciation différente du bien-fondé des craintes des appelants, celles-ci n’étant pas considérées comme crédibles.

Le reproche adressé par les appelants au ministre de ne pas avoir procédé à une évaluation individuelle de leurs demandes en tenant compte de tous les faits pertinents concernant leur pays d'origine, et ainsi d’avoir méconnu l’article 37, paragraphe (3), sous a), de 19la loi du 18 décembre 2015, ne saurait valoir, dès lors que la décision litigieuse indique de manière détaillée les raisons ayant amené le ministre à refuser la demande de protection internationale de ceux-ci du fait de l’absence de crédibilité de leur récit et qu’il ne se dégage d’aucun élément du dossier que le ministre n’avait pas procédé à une évaluation individuelle de cette demande, le seul fait que la demande ait été rejetée pour défaut de crédibilité ne permettant pas, à défaut d’autres éléments, de soutenir que l’article 37, paragraphe (3), de la loi du 18 décembre 2015 n’avait pas été respecté en l’espèce.

Par ailleurs, dès lors que la Cour considère que les appelants n’établissent ni la réalité, ni le bien-fondé des persécutions ou atteintes graves qu’ils allèguent, la question de l’application en l’espèce, telle que sollicitée par les appelants, de la présomption légale établie par l’article 37, paragraphe (4), de la loi du 18 décembre 2015, selon lequel « le fait qu’un demandeur a déjà été persécuté ou a déjà subi des atteintes graves ou a déjà fait l’objet de menaces directes d’une telle persécution ou de telles atteintes est un indice sérieux de la crainte fondée du demandeur d’être persécuté ou du risque réel de subir des atteintes graves, sauf s’il existe de bonnes raisons de penser que cette persécution ou ces atteintes graves ne se reproduiront pas », ne se pose nullement et manque de toute pertinence.

La Cour rejoint encore le ministre qu’il ne peut être exclu, au vu des déclarations des appelants en relation avec leur volonté de faire des études au Luxembourg, qu’ils ont déposé leurs demandes de protection internationale uniquement pour des raisons de convenance personnelle.

Ainsi, au vu de tous ces éléments, la Cour arrive à la conclusion que c’est à juste titre que le ministre a remis en cause la crédibilité du récit des appelants et qu’il a, en conséquence, pu retenir l’absence dans leur chef de craintes fondées de persécution, sinon de risque réel de subir des atteintes graves visées à l’article 48, points a) et b), de la loi du 18 décembre 2015, en cas de retour dans leur pays d’origine.

Enfin, la Cour constate qu’il n’est pas soutenu, et il ne ressort pas non plus des pièces du dossier, que la situation dans le pays d’origine des appelants correspondrait actuellement à un contexte de violence aveugle dans le cadre d’un conflit armé interne ou international au sens de l’article 48, point c), de la loi du 18 décembre 2015, ceux-ci n’ayant, par ailleurs, pas apporté de manière crédible d’éléments qui permettraient de retenir qu’ils seraient personnellement exposés, en raison d’éléments propres à leur situation personnelle, à un risque réel découlant d’une violence aveugle au point qu’il faille admettre qu’en cas de retour au Pakistan, ils courraient un risque réel de menace grave pour leur vie ou leur personne.

Partant, il découle des considérations qui précèdent que c’est à bon droit que le ministre a rejeté la demande en obtention d’une protection internationale, prise sous son double volet.

Enfin, concernant l’ordre de quitter le territoire, l’article 34, paragraphe (2), de la loi du 18 décembre 2015 dispose qu’« une décision du ministre vaut décision de retour. (…) » et en vertu de l’article 2 sub q) de la loi du 18 décembre 2015, la notion de « décision de retour » se définit comme « la décision négative du ministre déclarant illégal le séjour et imposant l’ordre de quitter le territoire », de sorte que l’ordre de quitter est à considérer comme constituant la conséquence automatique du refus de protection internationale, avec comme conséquence pour le cas d’espèce, où le rejet ministériel de la demande de protection internationale vient d’être déclaré justifié, dans ses deux volets, que l’ordre de quitter n’est pas sérieusement critiquable, ni critiqué.

20En ce qui concerne le moyen fondé sur l’article 129 de la loi précitée du 29 août 2008, la Cour relève qu’au regard de ce qui vient d’être retenu par rapport au caractère non crédible des craintes des appelants, le moyen afférent est encore à rejeter comme non fondé.

L’appel n’étant dès lors pas justifié, il y a lieu d’en débouter les appelants et de confirmer le jugement entrepris, quoique pour d’autres motifs.

Par ces motifs, la Cour administrative, statuant à l’égard de toutes les parties en cause;

reçoit l’appel en la forme;

au fond, le déclare non justifié et en déboute;

partant, confirme le jugement entrepris du 3 mars 2025;

condamne les appelants aux dépens de l’instance d’appel.

Ainsi délibéré et jugé par:

Serge SCHROEDER, premier conseiller, Martine GILLARDIN, conseiller, Annick BRAUN, conseiller, et lu par le premier conseiller en l’audience publique à Luxembourg au local ordinaire des audiences de la Cour à la date indiquée en tête, en présence de la greffière assumée à la Cour Carla SANTOS.

s. SANTOS s. SCHROEDER Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 19 juin 2025 Le greffier de la Cour administrative 21


Synthèse
Numéro d'arrêt : 52651C
Date de la décision : 19/06/2025

Origine de la décision
Date de l'import : 25/06/2025
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;cour.administrative;arret;2025-06-19;52651c ?

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