N° 36 / 2024 du 29.02.2024 Numéro CAS-2023-00047 du registre Audience publique de la Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg du jeudi, vingt-neuf février deux mille vingt-quatre.
Composition:
Agnès ZAGO, conseiller à la Cour de cassation, président, Marie-Laure MEYER, conseiller à la Cour de cassation, Monique HENTGEN, conseiller à la Cour de cassation, Jeanne GUILLAUME, conseiller à la Cour de cassation, Carine FLAMMANG, conseiller à la Cour de cassation, Daniel SCHROEDER, greffier à la Cour.
Entre la société anonyme SOCIETE1.), établie et ayant son siège social à L-
ADRESSE1.), représentée par le conseil d’administration, inscrite au registre de commerce et des sociétés sous le numéro NUMERO1.), demanderesse en cassation, comparant par Maître Jean-Philippe LAHORGUE, avocat à la Cour, en l’étude duquel domicile est élu, et l’ADMINISTRATION DE L’ENREGISTREMENT, DES DOMAINES ET DE LA TVA, représentée par le Directeur, ayant ses bureaux à L-1651 Luxembourg, 1-3, avenue Guillaume, défenderesse en cassation, comparant par la société en commandite simple BONN STEICHEN & PARTNERS, inscrite à la liste V du tableau de l’Ordre des avocats du barreau de Luxembourg, en l’étude de laquelle domicile est élu, représentée aux fins de la présente procédure par Maître Pol MELLINA, avocat à la Cour.
___________________________________________________________________
Vu l’arrêt attaqué, numéro 11/23 - IX - CIV, rendu le 26 janvier 2023 sous le numéro CAL-2019-00921 du rôle par la Cour d’appel du Grand-Duché de Luxembourg, neuvième chambre, siégeant en matière civile ;
Vu le mémoire en cassation signifié le 6 avril 2023 par la société anonyme SOCIETE1.) (ci-après « la société SOCIETE1.) ») à l’ADMINISTRATION DE L’ENREGISTREMENT, DES DOMAINES ET DE LA TVA (ci-après « l’AEDT »), déposé le 11 avril 2023 au greffe de la Cour supérieure de Justice ;
Vu le mémoire en réponse signifié le 5 juin 2023 par l’AEDT à la société SOCIETE1.), déposé le 6 juin 2023 au greffe de la Cour ;
Sur les conclusions du premier avocat général Marie-Jeanne KAPPWEILER.
Sur les faits Selon l’arrêt attaqué, le Tribunal d’arrondissement de Luxembourg, siégeant en matière civile, après avoir rappelé les principes applicables au régime de la TVA sur la marge bénéficiaire pour la revente de véhicules d’occasion, avait dit non fondée la demande de la société SOCIETE1.) en rectification des bulletins de taxation d’office émis à son encontre. La Cour a décidé qu’il n’y avait pas lieu de poser les questions préjudicielles, formulées par la demanderesse en cassation, à la Cour de Justice de l’Union Européenne (ci-après « la CJUE »), et a confirmé le jugement.
Sur les premier et second moyens de cassation réunis Enoncé des moyens le premier, « tiré de la violation de l’article 314 de la directive 2006/112/CE du Conseil, du 28 novembre 2006, relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée La société SOCIETE1.) fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir dit l'appel non fondé et confirmé le jugement du 6 février 2019 du tribunal d'arrondissement de Luxembourg ayant dit non fondée la demande de la société anonyme SOCIETE1.) tendant à ce que soit, d’une part, réformée la décision du directeur de l'AEDT du 21 avril 2017, d’autre part, prononcée la décharge du surplus d'imposition mis à sa charge pour les années 2013 à 2016 pour un montant de 315 388,54 euros et, de 2troisième part, renvoyé le dossier auprès de l'AEDT en vue de l'émission de bulletins de taxation d'office rectifiés ;
Aux motifs propres que la Cour constate, à l'instar du tribunal avant elle, que la qualité d'assujetti-vendeur telle que définie à l'article 56 ter, alinéa 1, point 5, de la loi TVA modifiée n'est pas déniée à SOCIETE1.) par l'AEDT et que le procès-
verbal de vérification du 6 juillet 2016 admet d'ailleurs explicitement qu'un certain nombre d'acquisitions et de reventes de voitures ont pu être traitées sous le régime de la TVA sur la marge ; que les débats entre parties portent essentiellement sur la question de savoir si SOCIETE1.) était habilitée ou non à appliquer le régime de la TVA sur marge pour 10 voitures acquises en 2014 (ventes SOCIETE7.)), pour 51 voitures acquises en 2015 (ventes SOCIETE4.), SOCIETE5.), SOCIETE2.), SOCIETE3.) et SOCIETE6.)) et pour 10 voitures acquises au cours du ter trimestre de 2016 (ventes SOCIETE2.) et SOCIETE4.)) auprès d'assujettis-revendeurs établis dans d'autres États membres de l'Union européenne ; que, dans la mesure où l'intégralité des transactions actuellement contestées par l'AEDT ont fait l'objet de l'émission de factures de la part d'assujettis-revendeurs à charge de SOCIETE1.) qui font état de l'application dans le chef desdits assujettis-revendeurs du régime de la TVA sur la marge, l'application du régime dérogatoire est en principe de droit dans le chef de SOCIETE1.) ; que l'AEDT refuse néanmoins à SOCIETE1.) l'application du régime dérogatoire pour mauvaise foi et défaut de précautions suffisantes dans le chef de SOCIETE1.) en renvoyant à la jurisprudence de la Cour de Justice de l'Union européenne (ci-après CJUE) ; que c'est encore à bon droit et pour des motifs que la Cour fait siens que le tribunal a, pour trancher cette problématique, fait fi de la jurisprudence du Conseil d'Etat français invoqué par SOCIETE1.) pour lui préférer la jurisprudence de la CJUE en son arrêt du 18 mai 2017 (affaire n° C -624/15, Litdana UAB) ce dernier ayant parfaitement analysé la question actuellement débattue par les parties ; que dans son arrêt précité, la CJUE a retenu ce qui suit : ; que la Cour approuve dès lors le tribunal d'avoir retenu sur base de cette jurisprudence et contrairement au soutènement de SOCIETE1.) que la seule production de factures d'acquisition faisant application du régime de la TVA sur la marge n'implique pas sans exception possible dans le chef de l'acquéreur, l'application du même régime et que l'AEDT est en droit de renverser cette solution et d'exclure SOCIETE1.) du régime dérogatoire en démontrant soit que cette dernière n'a pas agi de bonne foi, c'est-à-dire en d'autres termes qu'elle savait ou qu'elle devait raisonnablement savoir que son fournisseur affirmait à tort que la transaction était soumise au régime de la TVA sur la marge, soit qu'elle n'a 3pas pris toutes les mesures raisonnables en son pouvoir pour s'assurer que l'opération effectuée ne la conduise pas à participer à une fraude fiscale ; que c'est donc à bon droit que les juges de première instance ont poursuivi leur examen et contrôlé si l'AEDT apportait en l'espèce les éléments de conviction suffisants pour retenir que l'une ou l'autre, voire les deux, de ces hypothèses conduisant à écarter le régime dérogatoire en présence de factures d'acquisition faisant état de l'application de ce régime dans le chef de SOCIETE1.) était remplie ; que tel que relevé à juste titre par les juges de première instance, la Cour retient ensuite, et ce contrairement à l'argumentation de SOCIETE1.), que tant l'AEDT que le tribunal était en droit pour ce faire de vérifier si les transactions mises en cause avaient été facturées à bon droit par le fournisseur établi à l'étranger comme relevant du régime de la TVA sur la marge ; que c'est encore par une saine appréciation, que la Cour fait sienne, que le tribunal a rappelé qu'il n'est pas nécessaire de caractériser la fraude, que ce soit dans le chef du fournisseur étranger ou dans celui de l'assujetti luxembourgeois, mais qu'il suffit de constater que la transaction a été soumise à tort au régime de la TVA sur la marge, et ce, comme le souligne le tribunal, peu importe qu'il en ait été ainsi intentionnellement ou non, et peu importe qu'il en ait été ainsi le cas échéant dans une intention frauduleuse ou non ; que les juges de première instance ont ainsi correctement considéré que le seul élément de subjectivité dans ce cadre consiste à vérifier si l'inapplicabilité du régime de la TVA sur la marge était à la connaissance de l'assujetti luxembourgeois, respectivement si on peut raisonnablement attendre de sa part qu'il ait eu connaissance de cette inapplicabilité ; que les vérifications poussées de l'AEDT (décrites en détail pages 4 à 14 du procès-verbal du 6 juillet 2016) ont révélé que 73 véhicules fournis à SOCIETE1.) ont été immatriculés avant aux noms d'assujettis à la TVA ne remplissant pas les conditions pour se voir appliquer le régime de la marge bénéficiaire ; qu’elles ont encore amené le vérificateur à retenir que l'associé et gérant unique de SOCIETE1.), à savoir, PERSONNE1.), a accepté d'acheter des véhicules sous le régime de la marge bénéficiaire en pleine connaissance du fait que son application n'était pas justifiée ; que ce sont ces mêmes éléments qui ont conduit le tribunal à retenir non seulement la probabilité, mais aussi la vraisemblable que les entreprises clientes des fournisseurs de SOCIETE1.) ne relevaient pas d'une des catégories limitativement énumérées à l'article 314 de la directive 2006/112/CE, respectivement à l'article 56ter de la loi TVA, justifiant l'application du régime de la TVA à la marge lorsque les voitures ont été acquises auprès d'elles ; que la Cour rejoint encore le tribunal dans son raisonnement l'ayant conduit à décider que ce constat pouvait déjà être fait au moment de l'acquisition par SOCIETE1.) de ces voitures auprès de ses fournisseurs sur base des éléments d'appréciation alors en sa possession et présentés à l'AEDT ; que l'analyse faite à cet égard par les juges du premier degré et leur solution reste aussi, en l'absence de tout élément nouveau permettant d'énerver lesdites conclusions, correcte en appel ;
Et aux motifs adoptés que tel que relevé ci-dessus, en présence d'une transaction faisant l'objet d'une facture mentionnant expressément qu'elle a lieu sous le régime de la TVA sur la marge, il appartient à l'AEDT de démontrer positivement qu'un des cas d'exclusion de ce régime est établi, et il suffit qu'un des deux cas identifiés par la jurisprudence de la CJUE soit établi ; qu’il importe partant de rechercher soit si la société anonyme SOCIETE1.) a agi de mauvaise foi, c'est-à-
dire en d'autres termes qu'elle savait ou qu'elle devait raisonnablement savoir que son fournisseur affirmait à tort que la transaction était soumise au régime de la TVA 4sur la marge, soit si la société anonyme SOCIETE1.) n'a pas pris toutes les mesures raisonnables en son pouvoir pour s'assurer que les opérations qu'elle effectuait ne la conduisaient pas à participer à une fraude fiscale ; que le tribunal estime que le premier cas d'exclusion est donné en l'espèce ; qud dans le cadre de son analyse, le tribunal retient en premier lieu que l'AEDT et dans sa suite le tribunal sont en droit de vérifier si la transaction a à bon droit été facturée par le fournisseur établi à l'étranger comme relevant du régime de la TVA sur la marge ; que la compétence pour ce faire incombe certes à l'autorité fiscale dont relève le fournisseur en question pour autant qu'il s'agit de l'imposition dont fait l'objet ce dernier. Mais dans le cadre de la vérification de l'imposition dont fait l'objet la société anonyme SOCIETE1.) en tant qu'opérateur luxembourgeois, cette vérification peut se faire par les autorités luxembourgeoises ; que dans ce cadre, le tribunal retient en second lieu qu'il n'est pas nécessaire de caractériser la fraude, ni dans le chef du fournisseur étranger, ni dans le chef de l'assujetti luxembourgeois. Il faut, mais il suffit, de constater que la transaction a été soumise à tort au régime de la TVA sur la marge, peu importe qu'il en ait été ainsi intentionnellement ou non, et peu importe qu'il en ait été ainsi le cas échéant dans une intention frauduleuse ou non ; que l'application du régime de la TVA à la marge relève en effet de considérations purement objectives tenant au cycle de vie, de commercialisation, de consommation et de vente du produit faisant l'objet de la transaction litigieuse en ce qu'il s'agit de vérifier si celle-ci entre dans le cadre de la définition fournie par l'article 314 de la directive 2006/112/CE, respectivement l'article 56ter de la loi modifiée du 12 février 1979 concernant la taxe sur la valeur ajoutée ; que le seul élément de subjectivité dans ce cadre consiste à vérifier si l'inapplicabilité du régime de la TVA sur la marge était à la connaissance de l'assujetti luxembourgeois, respectivement si on peut raisonnablement attendre de sa part qu'il ait eu connaissance de cette inapplicabilité ; que le tribunal retient ensuite en troisième lieu que c'est à tort que la société anonyme SOCIETE1.) soutient (dans le cadre de son raisonnement basant sur l'application des articles 67 et 74 de la loi TVA que le tribunal prend en considération à ce stade) que le régime de la TVA sur la marge ne saurait être remis en cause que sous les 3 conditions cumulatives que le régime de la TVA sur marge ne serait pas applicable dans la chaine de transactions en discussion, que l'Etat luxembourgeois serait l'Etat de l'assujetti débiteur et que l'assujetti serait de mauvaise foi en ce sens qu'il savait ou ne pouvait ignorer que la chaine de transactions en cause n'appliquait pas à bon droit le régime de la TVA sur marge ;
que la soustraction d'une opération au régime de la TVA sur la marge relève des seules hypothèses énoncées ci-dessus dégagées de la jurisprudence de la CJUE ; que le tribunal retient enfin qu'il n'est pas seulement probable, mais aussi vraisemblable sur base des éléments mis en avant par l'AEDT que les véhicules acquis par les fournisseurs de la société anonyme SOCIETE1.) l'ont été auprès d'entreprises ayant la qualité d'assujettis à la TVA en Allemagne qui ont pu opérer une déduction pleine et entière de la TVA acquittée par elles en amont au moment de l'acquisition de ces voitures ; qu’à cet égard, il faut d'abord constater que la société anonyme SOCIETE1.) n'a pas mis en cause la qualité d'assujettis à la TVA des entreprises qui ont livré les voitures en discussion à ses propres fournisseurs. Il en résulte que le point 1 de l'article 314 de la directive 2006/112/CE, respectivement à l'article 56ter de la loi modifiée du 12 février 1979 () n'est pas rempli ; qu’il résulte par ailleurs de ce constat que, le régime de la TVA étant d'application uniforme et universelle, sauf exonérations et régimes spécifiques, et les points 2 à 4 de l'article 314 de la directive 2006/112/CE, 5respectivement de l'article 56ter de la loi modifiée du 12 février 1979, étant constitutifs de telles exonérations (b) un autre assujetti, dans la mesure où la livraison du bien par cet autre assujetti est exonérée conformément à l'article 136) et régimes spécifiques (c) un autre assujetti, dans la mesure où la livraison du bien par cet autre assujetti bénéficie de la franchise pour les petites entreprises prévue aux articles 282 à 292 et porte sur un bien d'investissement ; d) un autre assujetti-
revendeur, dans la mesure où la livraison du bien par cet autre assujetti-revendeur a été soumise à la TVA conformément au présent régime particulier), il y a lieu de présumer que les activités économiques des entreprises qui ont livré les voitures étaient pleinement imposées à la TVA de nature à donner lieu à déduction intégrale dans leur chef de la TVA payée en amont, et qu'il appartient à la société anonyme SOCIETE1.) lorsqu'elle prétend le contraire d'en rapporter la preuve contraire ; que cette preuve doit être rapportée de façon concrète par rapport aux entreprises prises individuellement ; qu’il ne suffit pas à cet égard pour la société anonyme SOCIETE1.) d'invoquer de façon générale l'interdiction faite à une société leasing de déduire la TVA payée en amont ou la possibilité que les véhicules aient été acquis auprès d'un loueur ayant la qualité d'assujetti-revendeur admis à facturer sous le régime de la TVA sur marge sans démontrer quelle(e) entreprise(e) relèverai(en)t de telle ou telle hypothèse ; qu’il faut partant constater que la société anonyme SOCIETE1.) ne démontre pas que les entreprises clientes de ses fournisseurs aient relevé d'une des catégories limitativement énumérées à l'article 314 de la directive 2006/112/CE, respectivement à l'article 56ter de la loi modifiée du 12 février 1979 concernant la taxe sur la valeur ajoutée, justifiant l'application du régime de la TVA à la marge lorsque les voitures ont été acquises auprès d'elles ; que ce constat pouvait déjà être fait au moment de l'acquisition par la société anonyme SOCIETE1.) de ces voitures auprès de ses fournisseurs sur base des éléments d'appréciation alors en sa possession, consistant en l'identité de ces entreprises clientes auxquelles elle pouvait aisément associer leurs domaines d'activité économique, respectivement en l'information que les voitures avaient été immatriculées pour la première fois au nom de ses propres fournisseurs ; qu’il est dès lors établi que la société anonyme SOCIETE1.) savait, ou du moins ne pouvait raisonnablement ignorer, que les livraisons faites à elle étaient erronément soumises par ses fournisseurs au régime de la TVA sur marge ; que c'est dès lors à bon droit que l'AEDT a procédé aux rectifications et impositions d'office qui en résultaient ;
Alors que l’article 314 de la directive 2006/112/CE du Conseil, du 28 novembre 2006, relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée, telle que modifiée par la directive 2010/45/UE du Conseil, du 13 juillet 2010, s’oppose à ce que les autorités compétentes d’un État membre refusent à un assujetti qui a reçu une facture sur laquelle figurent des mentions relatives au régime de la marge bénéficiaire le droit d’appliquer le régime de la marge bénéficiaire, même s’il résulte d’un contrôle postérieur effectué par lesdites autorités que l’assujetti-
revendeur ayant fourni les biens d’occasion n’avait pas effectivement appliqué ce régime à la livraison de ces biens, à moins qu’il ne soit établi par les autorités compétentes que l’assujetti n’a pas agi de bonne foi ou qu’il n’a pas pris toutes les mesures raisonnables en son pouvoir pour s’assurer que l’opération qu’il effectue ne le conduit pas à participer à une fraude fiscale ; qu’en se fondant, pour refuser à la société SOCIETE1.) le droit d’appliquer le régime de la marge bénéficiaire sur la circonstance qu’il était vraisemblable sur base des éléments mis en avant par l'AEDT que les véhicules acquis par les fournisseurs de la société 6anonyme SOCIETE1.) l'ont été auprès d'entreprises ayant la qualité d'assujettis à la TVA en Allemagne qui ont pu opérer une déduction pleine et entière de la TVA acquittée par elles en amont au moment de l'acquisition de ces voitures, sans constater qu’il était certain que les véhicules litigieux n’avaient pu être vendus à l’exposante sous le régime de la marge bénéficiaire, la cour d'appel a violé 314 de la directive 2006/112/CE du Conseil, du 28 novembre 2006, relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée ;
Et alors que l’article 314 de la directive 2006/112/CE du Conseil, du 28 novembre 2006, relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée, telle que modifiée par la directive 2010/45/UE du Conseil, du 13 juillet 2010, s’oppose à ce que les autorités compétentes d’un État membre refusent à un assujetti qui a reçu une facture sur laquelle figurent des mentions relatives au régime de la marge bénéficiaire le droit d’appliquer le régime de la marge bénéficiaire, même s’il résulte d’un contrôle postérieur effectué par lesdites autorités que l’assujetti-
revendeur ayant fourni les biens d’occasion n’avait pas effectivement appliqué ce régime à la livraison de ces biens, à moins qu’il ne soit établi par les autorités compétentes que l’assujetti n’a pas agi de bonne foi ou qu’il n’a pas pris toutes les mesures raisonnables en son pouvoir pour s’assurer que l’opération qu’il effectue ne le conduit pas à participer à une fraude fiscale ; qu’il appartient à l’administration de rapporter la double preuve, d’une part, de ce que le régime de la marge bénéficiaire était en réalité inapplicable, d’autre part, de la mauvaise foi ou de l’absence de mesures raisonnables prises par l’assujetti revendeur pour s’assurer que l’opération qu’il effectue ne le conduit pas à participer à une fraude fiscale ; qu’en retenant que la société SOCIETE1.) n'avait pas mis en cause la qualité d'assujettis à la TVA des entreprises qui ont livré les voitures en discussion à ses propres fournisseurs, qu’il y avait lieu de présumer que les activités économiques des entreprises qui avaient livré les voitures étaient pleinement imposées à la TVA de nature à donner lieu à déduction intégrale dans leur chef de la TVA payée en amont, et qu'il appartenait à la société anonyme SOCIETE1.) lorsqu'elle prétendait le contraire d'en rapporter la preuve contraire et que la société anonyme SOCIETE1.) ne démontrait pas que les entreprises clientes de ses fournisseurs aient relevé d'une des catégories limitativement énumérées à l'article 314 de la directive 2006/112/CE, respectivement à l'article 56ter de la loi modifiée du 12 février 1979 concernant la taxe sur la valeur ajoutée, justifiant l'application du régime de la TVA à la marge lorsque les voitures ont été acquises auprès d'elles, la cour d'appel a violé le l’article 314 de la directive 2006/112/CE du Conseil, du 28 novembre 2006, relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée ;
Et alors que les dispositions du régime particulier d'imposition de la marge bénéficiaire sont applicables aux livraisons de biens d'occasion, d'objets d'art, de collection ou d'antiquité effectuées par un assujetti-revendeur, lorsque ces biens lui sont livrés à l'intérieur de la Communauté par une personne non assujettie, par un autre assujetti, dans la mesure où la livraison du bien par cet autre assujetti est exonérée de la TVA, lorsque ce bien n'a pas fait l'objet d'un droit à déduction lors de l'achat, de l'acquisition intracommunautaire ou de l'importation, par un autre assujetti, dans la mesure où la livraison par cet autre assujetti bénéficie de la franchise des petites entreprises et porte sur un bien d'investissement ou par un autre assujetti-revendeur, dans la mesure où la livraison du bien par cet autre assujetti-
7revendeur a été soumise à la TVA conformément au régime particulier d'imposition de la marge bénéficiaire ; que la circonstance que le fournisseur du vendeur de l’assujetti revendeur soit une entreprise assujettie à la TVA ne permet pas de présumer que l’opération ne pouvait être soumise à la TVA sur la marge ; qu’en décidant le contraire, la cour d'appel a violé l’article 314 de la directive 2006/112/CE du Conseil, du 28 novembre 2006, relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée ;
Et alors que l’article 314 de la directive 2006/112/CE du Conseil, du 28 novembre 2006, relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée, telle que modifiée par la directive 2010/45/UE du Conseil, du 13 juillet 2010 s’oppose à ce que les autorités compétentes d’un État membre refusent à un assujetti qui a reçu une facture sur laquelle figurent des mentions relatives au régime de la marge bénéficiaire le droit d’appliquer le régime de la marge bénéficiaire, même s’il résulte d’un contrôle postérieur effectué par lesdites autorités que l’assujetti-
revendeur ayant fourni les biens d’occasion n’avait pas effectivement appliqué ce régime à la livraison de ces biens, à moins qu’il ne soit établi par les autorités compétentes que l’assujetti n’a pas agi de bonne foi ou qu’il n’a pas pris toutes les mesures raisonnables en son pouvoir pour s’assurer que l’opération qu’il effectue ne le conduit pas à participer à une fraude fiscale ; que la circonstance que l’examen des certificats d’immatriculation ait fait apparaître que les véhicules avaient été immatriculés initialement aux noms d'assujettis à la TVA n’était pas de nature à établir que la société SOCIETE1.) avait connaissance que le régime de la marge était inapplicable ; qu’en décidant le contraire, la cour d'appel a violé l’article 314 de la directive 2006/112/CE du Conseil, du 28 novembre 2006, relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée. » et le second, « tiré du défaut de base légale au visa de l’article 314 de la directive 2006/112/CE du Conseil, du 28 novembre 2006, relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée.
La société SOCIETE1.) fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir dit l'appel non fondé et confirmé le jugement du 6 février 2019 du tribunal d'arrondissement de Luxembourg ayant dit non fondée la demande de la société anonyme SOCIETE1.) tendant à ce que soit, d’une part, réformée la décision du directeur de l'AEDT du 21 avril 2017, d’autre part, prononcée la décharge du surplus d'imposition mis à sa charge pour les années 2013 à 2016 pour un montant de 315 388,54 euros et, de troisième part, renvoyé le dossier auprès de l'AEDT en vue de l'émission de bulletins de taxation d'office rectifiés ;
Aux motifs propres que la Cour constate, à l'instar du tribunal avant elle, que la qualité d'assujetti-vendeur telle que définie à l'article 56 ter, alinéa 1, point 5, de la loi TVA modifiée n'est pas déniée à SOCIETE1.) par l'AEDT et que le procès-
verbal de vérification du 6 juillet 2016 admet d'ailleurs explicitement qu'un certain nombre d'acquisitions et de reventes de voitures ont pu être traitées sous le régime de la TVA sur la marge ; que les débats entre parties portent essentiellement sur la question de savoir si SOCIETE1.) était habilitée ou non à appliquer le régime de la TVA sur marge pour 10 voitures acquises en 2014 (ventes Sia Dynamic Consult), 8pour 51 voitures acquises en 2015 (ventes SOCIETE4.), SOCIETE5.), SOCIETE2.), SOCIETE3.) et SOCIETE6.)) et pour 10 voitures acquises au cours du ter trimestre de 2016 (ventes SOCIETE2.) et SOCIETE4.)) auprès d'assujettis-revendeurs établis dans d'autres États membres de l'Union européenne ; que, dans la mesure où l'intégralité des transactions actuellement contestées par l'AEDT ont fait l'objet de l'émission de factures de la part d'assujettis-revendeurs à charge de SOCIETE1.) qui font état de l'application dans le chef desdits assujettis-revendeurs du régime de la TVA sur la marge, l'application du régime dérogatoire est en principe de droit dans le chef de SOCIETE1.) ; que l'AEDT refuse néanmoins à SOCIETE1.) l'application du régime dérogatoire pour mauvaise foi et défaut de précautions suffisantes dans le chef de SOCIETE1.) en renvoyant à la jurisprudence de la Cour de Justice de l'Union européenne (ci-après CJUE) ; que c'est encore à bon droit et pour des motifs que la Cour fait siens que le tribunal a, pour trancher cette problématique, fait fi de la jurisprudence du Conseil d'Etat français invoqué par SOCIETE1.) pour lui préférer la jurisprudence de la CJUE en son arrêt du 18 mai 2017 (affaire n° C -624/15, Litdana UAB) ce dernier ayant parfaitement analysé la question actuellement débattue par les parties ; que dans son arrêt précité, la CJUE a retenu ce qui suit : ; que la Cour approuve dès lors le tribunal d'avoir retenu sur base de cette jurisprudence et contrairement au soutènement de SOCIETE1.) que la seule production de factures d'acquisition faisant application du régime de la TVA sur la marge n'implique pas sans exception possible dans le chef de l'acquéreur, l'application du même régime et que l'AEDT est en droit de renverser cette solution et d'exclure SOCIETE1.) du régime dérogatoire en démontrant soit que cette dernière n'a pas agi de bonne foi, c'est-à-dire en d'autres termes qu'elle savait ou qu'elle devait raisonnablement savoir que son fournisseur affirmait à tort que la transaction était soumise au régime de la TVA sur la marge, soit qu'elle n'a pas pris toutes les mesures raisonnables en son pouvoir pour s'assurer que l'opération effectuée ne la conduise pas à participer à une fraude fiscale ; que c'est donc à bon droit que les juges de première instance ont poursuivi leur examen et contrôlé si l'AEDT apportait en l'espèce les éléments de conviction suffisants pour retenir que l'une ou l'autre, voire les deux, de ces hypothèses conduisant à écarter le régime dérogatoire en présence de factures d'acquisition faisant état de l'application de ce régime dans le chef de SOCIETE1.) était remplie ; que tel que relevé à juste titre par les juges de première instance, la Cour retient ensuite, et ce contrairement à l'argumentation de SOCIETE1.), que tant l'AEDT que le tribunal était en droit pour ce faire de vérifier si les transactions mises en cause avaient été facturées à bon droit par le fournisseur établi à l'étranger comme relevant du régime 9de la TVA sur la marge ; que c'est encore par une saine appréciation, que la Cour fait sienne, que le tribunal a rappelé qu'il n'est pas nécessaire de caractériser la fraude, que ce soit dans le chef du fournisseur étranger ou dans celui de l'assujetti luxembourgeois, mais qu'il suffit de constater que la transaction a été soumise à tort au régime de la TVA sur la marge, et ce, comme le souligne le tribunal, peu importe qu'il en ait été ainsi intentionnellement ou non, et peu importe qu'il en ait été ainsi le cas échéant dans une intention frauduleuse ou non ; que les juges de première instance ont ainsi correctement considéré que le seul élément de subjectivité dans ce cadre consiste à vérifier si l'inapplicabilité du régime de la TVA sur la marge était à la connaissance de l'assujetti luxembourgeois, respectivement si on peut raisonnablement attendre de sa part qu'il ait eu connaissance de cette inapplicabilité ; que les vérifications poussées de l'AEDT (décrites en détail pages 4 à 14 du procès-verbal du 6 juillet 2016) ont révélé que 73 véhicules fournis à SOCIETE1.) ont été immatriculés avant aux noms d'assujettis à la TVA ne remplissant pas les conditions pour se voir appliquer le régime de la marge bénéficiaire ; qu’elles ont encore amené le vérificateur à retenir que l'associé et gérant unique de SOCIETE1.), à savoir, PERSONNE1.), a accepté d'acheter des véhicules sous le régime de la marge bénéficiaire en pleine connaissance du fait que son application n'était pas justifiée ; que ce sont ces mêmes éléments qui ont conduit le tribunal à retenir non seulement la probabilité, mais aussi la vraisemblable que les entreprises clientes des fournisseurs de SOCIETE1.) ne relevaient pas d'une des catégories limitativement énumérées à l'article 314 de la directive 2006/112/CE, respectivement à l'article 56ter de la loi TVA, justifiant l'application du régime de la TVA à la marge lorsque les voitures ont été acquises auprès d'elles ; que la Cour rejoint encore le tribunal dans son raisonnement l'ayant conduit à décider que ce constat pouvait déjà être fait au moment de l'acquisition par SOCIETE1.) de ces voitures auprès de ses fournisseurs sur base des éléments d'appréciation alors en sa possession et présentés à l'AEDT ; que l'analyse faite à cet égard par les juges du premier degré et leur solution reste aussi, en l'absence de tout élément nouveau permettant d'énerver lesdites conclusions, correcte en appel ;
Et aux motifs adoptés que tel que relevé ci-dessus, en présence d'une transaction faisant l'objet d'une facture mentionnant expressément qu'elle a lieu sous le régime de la TVA sur la marge, il appartient à l'AEDT de démontrer positivement qu'un des cas d'exclusion de ce régime est établi, et il suffit qu'un des deux cas identifiés par la jurisprudence de la CJUE soit établi ; qu’il importe partant de rechercher soit si la société anonyme SOCIETE1.) a agi de mauvaise foi, c'est-à-
dire en d'autres termes qu'elle savait ou qu'elle devait raisonnablement savoir que son fournisseur affirmait à tort que la transaction était soumise au régime de la TVA sur la marge, soit si la société anonyme SOCIETE1.) n'a pas pris toutes les mesures raisonnables en son pouvoir pour s'assurer que les opérations qu'elle effectuait ne la conduisaient pas à participer à une fraude fiscale ; que le tribunal estime que le premier cas d'exclusion est donné en l'espèce ; qud dans le cadre de son analyse, le tribunal retient en premier lieu que l'AEDT et dans sa suite le tribunal sont en droit de vérifier si la transaction a à bon droit été facturée par le fournisseur établi à l'étranger comme relevant du régime de la TVA sur la marge ; que la compétence pour ce faire incombe certes à l'autorité fiscale dont relève le fournisseur en question pour autant qu'il s'agit de l'imposition dont fait l'objet ce dernier. Mais dans le cadre de la vérification de l'imposition dont fait l'objet la société anonyme SOCIETE1.) en tant qu'opérateur luxembourgeois, cette vérification peut 10se faire par les autorités luxembourgeoises ; que dans ce cadre, le tribunal retient en second lieu qu'il n'est pas nécessaire de caractériser la fraude, ni dans le chef du fournisseur étranger, ni dans le chef de l'assujetti luxembourgeois. Il faut, mais il suffit, de constater que la transaction a été soumise à tort au régime de la TVA sur la marge, peu importe qu'il en ait été ainsi intentionnellement ou non, et peu importe qu'il en ait été ainsi le cas échéant dans une intention frauduleuse ou non ; que l'application du régime de la TVA à la marge relève en effet de considérations purement objectives tenant au cycle de vie, de commercialisation, de consommation et de vente du produit faisant l'objet de la transaction litigieuse en ce qu'il s'agit de vérifier si celle-ci entre dans le cadre de la définition fournie par l'article 314 de la directive 2006/112/CE, respectivement l'article 56ter de la loi modifiée du 12 février 1979 concernant la taxe sur la valeur ajoutée ; que le seul élément de subjectivité dans ce cadre consiste à vérifier si l'inapplicabilité du régime de la TVA sur la marge était à la connaissance de l'assujetti luxembourgeois, respectivement si on peut raisonnablement attendre de sa part qu'il ait eu connaissance de cette inapplicabilité ; que le tribunal retient ensuite en troisième lieu que c'est à tort que la société anonyme SOCIETE1.) soutient (dans le cadre de son raisonnement basant sur l'application des articles 67 et 74 de la loi TVA que le tribunal prend en considération à ce stade) que le régime de la TVA sur la marge ne saurait être remis en cause que sous les 3 conditions cumulatives que le régime de la TVA sur marge ne serait pas applicable dans la chaine de transactions en discussion, que l'Etat luxembourgeois serait l'Etat de l'assujetti débiteur et que l'assujetti serait de mauvaise foi en ce sens qu'il savait ou ne pouvait ignorer que la chaine de transactions en cause n'appliquait pas à bon droit le régime de la TVA sur marge ;
que la soustraction d'une opération au régime de la TVA sur la marge relève des seules hypothèses énoncées ci-dessus dégagées de la jurisprudence de la CJUE ; que le tribunal retient enfin qu'il n'est pas seulement probable, mais aussi vraisemblable sur base des éléments mis en avant par l'AEDT que les véhicules acquis par les fournisseurs de la société anonyme SOCIETE1.) l'ont été auprès d'entreprises ayant la qualité d'assujettis à la TVA en Allemagne qui ont pu opérer une déduction pleine et entière de la TVA acquittée par elles en amont au moment de l'acquisition de ces voitures ; qu’à cet égard, il faut d'abord constater que la société anonyme SOCIETE1.) n'a pas mis en cause la qualité d'assujettis à la TVA des entreprises qui ont livré les voitures en discussion à ses propres fournisseurs. Il en résulte que le point 1 de l'article 314 de la directive 2006/112/CE, respectivement à l'article 56ter de la loi modifiée du 12 février 1979 () n'est pas rempli ; qu’il résulte par ailleurs de ce constat que, le régime de la TVA étant d'application uniforme et universelle, sauf exonérations et régimes spécifiques, et les points 2 à 4 de l'article 314 de la directive 2006/112/CE, respectivement de l'article 56ter de la loi modifiée du 12 février 1979, étant constitutifs de telles exonérations (b) un autre assujetti, dans la mesure où la livraison du bien par cet autre assujetti est exonérée conformément à l'article 136) et régimes spécifiques (c) un autre assujetti, dans la mesure où la livraison du bien par cet autre assujetti bénéficie de la franchise pour les petites entreprises prévue aux articles 282 à 292 et porte sur un bien d'investissement ; d) un autre assujetti-
revendeur, dans la mesure où la livraison du bien par cet autre assujetti-revendeur a été soumise à la TVA conformément au présent régime particulier), il y a lieu de présumer que les activités économiques des entreprises qui ont livré les voitures étaient pleinement imposées à la TVA de nature à donner lieu à déduction intégrale dans leur chef de la TVA payée en amont, et qu'il appartient à la société 11anonyme SOCIETE1.) lorsqu'elle prétend le contraire d'en rapporter la preuve contraire ; que cette preuve doit être rapportée de façon concrète par rapport aux entreprises prises individuellement ; qu’il ne suffit pas à cet égard pour la société anonyme SOCIETE1.) d'invoquer de façon générale l'interdiction faite à une société leasing de déduire la TVA payée en amont ou la possibilité que les véhicules aient été acquis auprès d'un loueur ayant la qualité d'assujetti-revendeur admis à facturer sous le régime de la TVA sur marge sans démontrer quelle(e) entreprise(e) relèverai(en)t de telle ou telle hypothèse ; qu’il faut partant constater que la société anonyme SOCIETE1.) ne démontre pas que les entreprises clientes de ses fournisseurs aient relevé d'une des catégories limitativement énumérées à l'article 314 de la directive 2006/112/CE, respectivement à l'article 56ter de la loi modifiée du 12 février 1979 concernant la taxe sur la valeur ajoutée, justifiant l'application du régime de la TVA à la marge lorsque les voitures ont été acquises auprès d'elles ; que ce constat pouvait déjà être fait au moment de l'acquisition par la société anonyme SOCIETE1.) de ces voitures auprès de ses fournisseurs sur base des éléments d'appréciation alors en sa possession, consistant en l'identité de ces entreprises clientes auxquelles elle pouvait aisément associer leurs domaines d'activité économique, respectivement en l'information que les voitures avaient été immatriculées pour la première fois au nom de ses propres fournisseurs ; qu’il est dès lors établi que la société anonyme SOCIETE1.) savait, ou du moins ne pouvait raisonnablement ignorer, que les livraisons faites à elle étaient erronément soumises par ses fournisseurs au régime de la TVA sur marge ; que c'est dès lors à bon droit que l'AEDT a procédé aux rectifications et impositions d'office qui en résultaient ;
Alors que l’article 314 de la directive 2006/112/CE du Conseil, du 28 novembre 2006, relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée, telle que modifiée par la directive 2010/45/UE du Conseil, du 13 juillet 2010 s’oppose à ce que les autorités compétentes d’un État membre refusent à un assujetti qui a reçu une facture sur laquelle figurent des mentions relatives au régime de la marge bénéficiaire le droit d’appliquer le régime de la marge bénéficiaire, même s’il résulte d’un contrôle postérieur effectué par lesdites autorités que l’assujetti-
revendeur ayant fourni les biens d’occasion n’avait pas effectivement appliqué ce régime à la livraison de ces biens, à moins qu’il ne soit établi par les autorités compétentes que l’assujetti n’a pas agi de bonne foi ou qu’il n’a pas pris toutes les mesures raisonnables en son pouvoir pour s’assurer que l’opération qu’il effectue ne le conduit pas à participer à une fraude fiscale ; que, pour retenir la mauvaise foi de la société SOCIETE1.), l’arrêt retient que les vérifications poussées de l'AEDT ont révélé que 73 véhicules fournis à SOCIETE1.) ont été immatriculés avant aux noms d'assujettis à la TVA ne remplissant pas les conditions pour se voir appliquer le régime de la marge bénéficiaire et amené le vérificateur à retenir que l'associé et gérant unique de SOCIETE1.) avait accepté d'acheter des véhicules sous le régime de la marge bénéficiaire en pleine connaissance du fait que son application n'était pas justifiée ; qu’en se fondant sur de telles considérations, sans préciser en quoi les vérifications de l’AEDT permettaient de retenir que la société SOCIETE1.) aurait procédé aux acquisitions litigieuses en sachant que le régime de la TVA sur la marge n’était pas applicable, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 314 de la directive 2006/112/CE du Conseil, du 28 novembre 2006, relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée ;
La cassation s’impose derechef. ».
12 Réponse de la Cour Les moyens sont exclusivement basés sur l’article 314 de la directive 2006/112/CE du Conseil du 28 novembre 2006 relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée. La demanderesse en cassation ne conteste pas que cette directive a été correctement transposée en droit luxembourgeois et que la disposition visée aux moyens a été reprise à l’article 56ter-1, paragraphe 1, de la loi modifiée du 12 février 1979 concernant la taxe sur la valeur ajoutée.
Conformément à la jurisprudence de la CJUE relative à l’effet des directives en général, « dans tous les cas où une directive est correctement mise en œuvre, ses effets atteignent les particuliers par l’intermédiaire des mesures d’application prises par l’Etat membre concerné » (arrêt du 19 janvier 1982, affaire 8/81) et « il découle de l’article 189, alinéa 3, [du Traité CEE] que l’exécution des directives communautaires doit être assurée par des mesures d’application appropriées, prises par les Etats membres. Ce n’est que dans des circonstances particulières, notamment dans les cas où un Etat membre aurait omis de prendre les mesures d’exécution requises, ou adopté des mesures non conformes à une directive, que la Cour a reconnu le droit, pour les justiciables, d’invoquer en justice une directive à l’encontre d’un Etat membre défaillant » (arrêt du 6 mai 1980, affaire 102/79).
La demanderesse en cassation ne peut, par conséquent, pas invoquer devant la Cour de cassation la violation d’une directive correctement transposée en droit national.
Il s’ensuit que les deux moyens, basés sur le seul article 314 de la directive 2006/112/CE du Conseil du 28 novembre 2006 et non sur le droit national, sont irrecevables.
Sur la demande en allocation d’une indemnité de procédure La demanderesse en cassation étant à condamner aux dépens de l’instance en cassation, sa demande en allocation d’une indemnité de procédure est à rejeter.
PAR CES MOTIFS, la Cour de cassation rejette le pourvoi ;
rejette la demande de la demanderesse en cassation en allocation d’une indemnité de procédure ;
la condamne aux frais et dépens de l’instance en cassation.
13La lecture du présent arrêt a été faite en la susdite audience publique par le conseiller Agnès ZAGO en présence du premier avocat général Marc SCHILTZ et du greffier Daniel SCHROEDER.
14Conclusions du Parquet Général dans l’affaire de cassation société anonyme SOCIETE1.) S.A.
contre Administration de l’Enregistrement, des Domaines et de la TVA (CAS-2023-00047) Le pourvoi en cassation, introduit par la société anonyme SOCIETE1.) S.A. (ci-après SOCIETE1.)) par un mémoire en cassation signifié le 6 avril 2023 à la partie défenderesse en cassation et déposé au greffe de la Cour Supérieure de Justice le 11 avril 2023, est dirigé contre un arrêt n°11/23 rendu par la Cour d’appel, neuvième chambre, siégeant en matière civile, statuant contradictoirement, en date du 26 janvier 2023 (n° CAL-2019-00921 du rôle). Cet arrêt a été signifié à la partie demanderesse en cassation en date du 9 février 2023.
Le pourvoi en cassation a dès lors été interjeté dans les forme et délai prévus aux articles 7 et 10 de la loi modifiée du 18 février 1885 sur les pourvois et la procédure en cassation.
La partie défenderesse en cassation Administration de l’Enregistrement, des Domaines et de la TVA (ci-après l’AEDT) a signifié un mémoire en réponse le 5 juin 2023 et elle l’a déposé au greffe de la Cour le 6 juin 2023.
Ayant été signifié et déposé au greffe de la Cour dans le délai de deux mois à compter du jour de la signification du mémoire en cassation, conformément aux articles 15 et 16 de la loi précitée du 18 février 1885, ce mémoire est à considérer.
Sur les faits et antécédents :
SOCIETE1.) est une entreprise spécialisée dans l’achat et la vente de véhicules d’occasion qu’elle acquiert auprès de fournisseurs européens et revend, principalement en France.
Au cours de l’année 2016, l’AEDT a effectué un contrôle approfondi concernant la situation TVA de SOCIETE1.) pour les années 2013 à 2015 et le premier trimestre 2016. Suite à ce contrôle, l’AEDT a remis en cause l’application du régime de la TVA sur marge pour les véhicules revendus en France sur la période concernée et a émis un bulletin de rectification pour l’année 2013 et des bulletins de taxation d’office pour les années 2014, 2015 et pour le 1er trimestre 2016.
Contre ces bulletins, SOCIETE1.) a introduit une réclamation le 9 novembre 2016.
En date du 18 novembre 2016, l’AEDT a déclaré cette réclamation recevable, mais elle l’a rejetée comme non fondée par courrier du 26 avril 2017.
15 Par exploit d’huissier du 8 juin 2017, SOCIETE1.) a fait donner assignation à l’AEDT à comparaître devant le tribunal de Luxembourg pour voir réformer la décision du directeur de l’AEDT du 21 avril 2017, pour se voir décharger du surplus d’imposition mis à sa charge pour les années 2013 à 2016 pour un montant de 315.388,54.- euros et pour voir renvoyer le dossier auprès de l’AEDT en vue de l’émission de bulletins de taxation d’office rectifiés.
Par jugement n° 2019TALCH1/00034 du 6 février 2019, le tribunal, siégeant en matière civile, statuant contradictoirement, a dit non fondée la demande de SOCIETE1.); a dit recevable, mais non fondée la demande de SOCIETE1.) en paiement d’une indemnité de procédure; a condamné SOCIETE1.) à payer à l’AEDT une indemnité de procédure de 2.000.- euros et a condamné SOCIETE1.) aux frais et dépens.
Par exploit du 11 juillet 2019, SOCIETE1.) a relevé appel du jugement précité.
Par arrêt n°11/23 rendu en date du 9 février 2023, la Cour d’appel a reçu l’appel en la forme, a dit qu’il n’y avait pas lieu de poser des questions préjudicielles à la Cour de Justice de l’Union Européenne ; a dit l’appel non fondé et a confirmé la décision entreprise; a débouté SOCIETE1.) de sa demande en allocation d’une indemnité de procédure pour l’instance d’appel; a condamné SOCIETE1.) à payer à l’AEDT une indemnité de procédure de 2.500.-
euros pour l’instance d’appel; et a condamné SOCIETE1.) aux frais et dépens.
Cet arrêt fait l’objet du présent pourvoi.
Sur les deux moyens de cassation réunis:
Le premier moyen est tiré de la violation de l’article 314 de la directive 2006/112/CE du Conseil, du 28 novembre 2006 relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée (ci-
après la Directive TVA) Le moyen s’articule en quatre branches qui sont toutes exclusivement tirées de la violation du prédit article de la Directive TVA.
Le second moyen est tiré du défaut de base légale au visa de l’article 314 de la Directive TVA.
La Directive TVA a été intégralement transposée en droit luxembourgeois. Plus particulièrement le chapitre 4 de la Directive TVA relatif aux « régimes particuliers applicables dans le domaine des biens d’occasion, des objets d’art, de collection ou d’antiquité » (articles 311 à 343) a été quasi textuellement transposé dans le cadre du Chapitre VIII de la LTVA relatif aux régimes particuliers, précisément dans la section 3 relative au « Régime particulier d’imposition de la marge bénéficiaire dans le domaine des biens d’occasion, des objets d’art, de collection ou d’antiquité » (articles 56 ter à 56 ter-3).
L’article 314 de la Directive TVA énumère quatre conditions d’application du régime dérogatoire de la marge bénéficiaire, qui sont alternatives :
16« Le régime de la marge bénéficiaire s'applique aux livraisons de biens d'occasion, d'objets d'art, de collection ou d'antiquité, effectuées par un assujetti-revendeur, lorsque ces biens lui sont livrés dans la Communauté par une des personnes suivantes:
a) une personne non assujettie;
b) un autre assujetti, dans la mesure où la livraison du bien par cet autre assujetti est exonérée conformément à l'article 136;
c) un autre assujetti, dans la mesure où la livraison du bien par cet autre assujetti bénéficie de la franchise pour les petites entreprises prévue aux articles 282 à 292, et porte sur un bien d'investissement;
d) un autre assujetti-revendeur, dans la mesure où la livraison du bien par cet autre assujetti-revendeur a été soumise à la TVA conformément au présent régime particulier. » Cet article a été transposé dans l’article 56 ter-1, 1er paragraphe, de la LTVA :
1. « Les dispositions du régime particulier d’imposition de la marge bénéficiaire prévues au présent article, qui dérogent pour autant que de besoin à celles de la présente loi, sont applicables aux livraisons de biens d’occasion, d’objets d’art, de collection ou d’antiquité effectuées par un assujetti-revendeur, lorsque ces biens lui sont livrés à l’intérieur de la Communauté :
- par une personne non assujettie ;
- par un autre assujetti, dans la mesure où la livraison du bien par cet autre assujetti est exonérée de la TVA, lorsque ce bien n’a pas fait l’objet d’un droit à déduction lors de l’achat, de l’acquisition intracommunautaire ou de l’importation ;
- par un autre assujetti, dans la mesure où la livraison par cet autre assujetti bénéficie de la franchise des petites entreprises et porte sur un bien d’investissement ;
- par un autre assujetti-revendeur, dans la mesure où la livraison du bien par cet autre assujetti-revendeur a été soumise à la TVA conformément au régime particulier d’imposition de la marge bénéficiaire. » L’article 314 de la Directive TVA a partant été transposé en droit luxembourgeois de manière correcte et complète.
L’article 288 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne énonce que la directive est contraignante pour les États membres qui sont ses destinataires quant au résultat à atteindre, tout en laissant aux autorités nationales la compétence quant à la forme et aux moyens pour y parvenir.
« Le législateur national doit transposer l’idée, et non la lettre de la directive. Il n’est pas obligé de transposer mot à mot le texte de la directive, ce qui est de nature à lui conférer 17une latitude d’appréciation et d’interprétation non négligeables. Mais il doit cependant s’inscrire dans la logique de la directive qui est éminemment variable selon qu’il s’agit d’une harmonisation minimale ou d’une harmonisation dite “complète”. Le problème est souvent de débusquer, dans une directive, ce qui ressortit à l’harmonisation minimale, et qui laisse donc aux États une certaine liberté de transposer, comme d’aller plus loin dans une protection, ou ce qui est, au contraire, de l’harmonisation complète (ou totale) et qui impose en réalité aux États un comportement figé dans lequel ils ne peuvent plus avoir de liberté.
L’État conserve le choix des moyens sous cette réserve que la mesure qui va servir à la transposition doit garantir une certaine sécurité juridique pour les justiciables. Un arrêt de la Cour de justice du 16 novembre 20001 rappelle que le paysage juridique doit être suffisamment lisible pour que l’on sache s’il est en définitive conforme aux objectifs de la directive. L’État ne sera pas obligé d’agir positivement. Il peut très bien ne pas agir, laisser sa législation telle quelle, considérant par avance qu’elle est conforme aux objectifs de la directive. »2 En principe, une directive n'est pas d'effet direct. Cela résulte de sa nature même qui est d'être un acte de législation indirecte, appelant un acte national de mise en oeuvre. Seul celui- ci entraîne en principe une modification de la situation juridique des particuliers. Les Etats destinataires se voient toutefois imposer l’obligation de transposer la directive endéans le délai imparti. Afin d’éviter qu’un Etat ayant manqué à cette obligation ne puisse tirer profit de son manquement et afin de garantir que les particuliers ne pâtissent pas de l’absence de transposition ou des retards dans la transposition, la jurisprudence européenne permet à un particulier de se prévaloir d’une directive devant une juridiction nationale, lorsque certaines conditions sont réunies.
Dans un souci de garantir l’effectivité des directives européennes, la Cour de Justice des Communautés Européennes (ci-après CJCE) reconnaît ainsi depuis longtemps aux justiciables le droit de se prévaloir devant les juridictions nationales des dispositions inconditionnelles et précises d’une directive qui n’a pas été transposée dans les délais :
« que, particulièrement dans les cas où les autorités communautaires auraient, par directive, obligé les États membres à adopter un comportement déterminé, l'effet utile d'un tel acte se trouverait affaibli si les justiciables étaient empêchés de s'en prévaloir en justice et les juridictions nationales empêchées de la prendre en considération en tant qu'élément du droit communautaire ».3 1 par exemple, CJCE arrêt du 16 novembre 2000, Commission c/ Grèce, aff. C-214/98: « la transposition en droit interne peut se satisfaire d’un contexte juridique général, dès lors que celui-ci assure effectivement la pleine application de la directive d’une façon suffisamment claire et précise ».
2 La transposition des directives en droit interne: l'exemple du droit d'auteur, Valérie-Laure Benabou, dans LEGICOM 2004/1 (N° 30), pages 23 à 36, § 19-20 3 CJCE Arrêt Van Duyn du 4 décembre 1974, aff. 41/74, point 12 18D’après une jurisprudence constante de la CJUE, « dans tous les cas où les dispositions d’une directive apparaissent, du point de vue de leur contenu, inconditionnelles et suffisamment précises, les particuliers sont fondés à les invoquer devant les juridictions nationales à l’encontre de l’Etat, soit lorsque celui-ci s’est abstenu de transposer dans les délais la directive en droit national, soit lorsqu’il en a fait une transposition incorrecte».4 Votre Cour a suivi cette jurisprudence de la CJUE dans plusieurs affaires où ont été déclarés recevables des moyens invoquant la violation d’une directive à l’encontre de textes luxembourgeois considérés comme non conformes aux dispositions de la directive, ou invoquant une transposition insuffisante d’une directive.5 Votre Cour a également jugé qu’un texte législatif ou réglementaire luxembourgeois qui transpose une directive européenne doit être interprété conformément à la directive dont il assure la transposition6.
La CJCE a toutefois jugé que « dans tous les cas où une directive est correctement mise en œuvre, ses effets atteignent les particuliers par l’intermédiaire des mesures d’application prises par l’Etat membre concerné ».7 Etant donné que, même dans les domaines faisant l’objet d’une harmonisation totale, les Etats ne sont pas obligés de recopier à la lettre le texte de la directive, c’est in fine l’acte national, qui a correctement transposé la directive, qui régit la situation juridique des particuliers.
En cas de transposition correcte de la directive, celle-ci est privée de l’effet direct qui ne lui est reconnu qu’à titre exceptionnel pour pallier à l’absence de transposition dans les délais.
4 CJCE arrêt Becker du 19 janvier 1982, aff. 8/81, points 24 et 25 ; arrêt Frankovich du 19 novembre 1991, aff. jointes 6/90 et 9/90, points 11 et 12 ; arrêt Marks & Spencer du 11 juillet 2002, aff. C-62/00, point 25; arrêt Pfeiffer du 5 octobre 2004, aff. C-397/01, point 103 ;
dans le même sens : arrêt Cobelfret NV du 12 février 2009, aff. C-138/07 (transposition incorrecte) ; arrêt Flughafen Köln/Bonn GmbH du 17 juillet 2008, aff. C-226/07 (défaut de transposition de la directive dans les délais) 5 Cass. n° 11/13 du 7.2.2013, n° 3101 du registre (sur la question de la transposition insuffisante ou incorrecte) ; Cass. n°33/2020 du 27.02.2020, n° CAS-2019-00020 du registre sur la question de la transposition correcte); Cass. n°35/11 du 19.5.2011, n° 2834 du registre (sur la question de la transposition incorrecte) : « qu’en vertu de la primauté du droit européen, la norme européenne s’oppose à l’application d’une norme nationale contraire ;
que l’article 7 de la directive 2004/38 relatif au droit de séjour de plus de trois mois et l’article 10 de cette directive relatif à la délivrance de la carte de séjour sont clairs, précis et inconditionnels, et dès lors d’effet direct. » ;
Cass. n°14/16 du 28.1.2016, n° 3584 du registre (sur la question de la transposition incorrecte) 6 Cass. n°67/15 du 2.7.2105, n° 3509 du registre ; Cass. n° 90 / 2017 du 07.12.2017, n° 3859 du registre 7 arrêt CJCE Commission /Belgique du 6 mai 1980, aff. 102/79 ; arrêt Becker du 19 janvier 1982, aff. 8/81, point 19 19Dans la jurisprudence de la Cour de cassation française et de la Cour de cassation belge, vous rechercherez d’ailleurs en vain une affaire où un effet direct aurait été reconnu à une directive correctement transposée en droit national.
Un particulier ne saurait dès lors invoquer devant une juridiction nationale la violation d’une directive sans invoquer la violation du texte législatif ou réglementaire qui a correctement transposé cette directive en droit national.
En l’espèce, la demanderesse en cassation n’invoque ni un défaut de transposition de la Directive TVA ni une transposition incomplète ou incorrecte. Elle ne saurait dès lors invoquer une violation de l’article 314 de la Directive TVA au lieu d’invoquer une violation de « la mesure d’application prise par l’Etat concerné », à savoir l’article 56 ter-1, 1er paragraphe, de la LTVA.
Il ressort de l’arrêt dont pourvoi qu’en instance d’appel «SOCIETE1.) s’est référée à l'article 56ter-1, alinéa 1 et 2 de la loi TVA dont elle estime remplir les conditions. Le refus d'application du régime de taxation sur la marge bénéficiaire par l’AEDT pour la revente des véhicules concernés ne serait pas justifié»8 et que la Cour d’appel a retenu que «le litige est à trancher à la lumière des différents articles de la loi TVA et de la directive 2006/112/CE du Conseil du 28 novembre 2006 repris ci-avant»9.
Les deux moyens, qui sont exclusivement tirés d’une violation de l’article 314 de la Directive TVA, sont irrecevables.
Conclusion Le pourvoi est recevable, mais non fondé.
Pour le Procureur Général d’Etat, Le premier avocat général Marie-Jeanne Kappweiler 8 arrêt du 26 janvier2023, page 8, 4e paragraphe 9 ibidem, page 10, 2e paragraphe 20