La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

21/03/2024 | LUXEMBOURG | N°44/24

Luxembourg | Luxembourg, Cour de cassation, 21 mars 2024, 44/24


N° 44 / 2024 pénal du 21.03.2024 Not. 40381/22/CD Numéro CAS-2023-00098 du registre La Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg a rendu en son audience publique du jeudi, vingt-et-un mars deux mille vingt-quatre, sur le pourvoi de PERSONNE1.), demeurant à ADRESSE1.), demandeur en cassation, demandeur au civil, comparant par Maître Marie BENA, avocat à la Cour, en l’étude de laquelle domicile est élu, en présence du Ministère public, l’arrêt qui suit :

Vu l’arrêt attaqué, rendu le 10 mai 2023 sous le numéro 436/23 Ch.c.C. par la chambre du conseil de la Cour dâ

۪appel du Grand-Duch̩ de Luxembourg ;

Vu le pourvoi en cassation formé par...

N° 44 / 2024 pénal du 21.03.2024 Not. 40381/22/CD Numéro CAS-2023-00098 du registre La Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg a rendu en son audience publique du jeudi, vingt-et-un mars deux mille vingt-quatre, sur le pourvoi de PERSONNE1.), demeurant à ADRESSE1.), demandeur en cassation, demandeur au civil, comparant par Maître Marie BENA, avocat à la Cour, en l’étude de laquelle domicile est élu, en présence du Ministère public, l’arrêt qui suit :

Vu l’arrêt attaqué, rendu le 10 mai 2023 sous le numéro 436/23 Ch.c.C. par la chambre du conseil de la Cour d’appel du Grand-Duché de Luxembourg ;

Vu le pourvoi en cassation formé par Maître Gladys GIUDICI, avocat à la Cour, en remplacement de Maître Marie BENA, avocat à la Cour, les deux demeurant à Luxembourg, au nom de PERSONNE1.), suivant déclaration du 31 mai 2023 au greffe de la Cour supérieure de Justice ;

Vu le mémoire en cassation déposé le 29 juin 2023 au greffe de la Cour ;

Sur les conclusions du premier avocat général Serge WAGNER.

Sur les faits Selon l’arrêt attaqué, un juge d’instruction du Tribunal d’arrondissement de Luxembourg avait rendu en date du 27 janvier 2023 une ordonnance de non-informer, suite à la plainte avec constitution de partie civile du demandeur en cassation. La chambre du conseil de la Cour d’appel a déclaré l’appel irrecevable pour avoir été formé par Maître Soledad Pascual, en nom personnel, en remplacement de Maître Catherine Belfast, qui ne sont ni inculpées, ni parties civiles, ni représentantes du Ministère public, en retenant que la substitution en cours d’instance du nom du mandant n’est pas admissible.

Sur le premier moyen de cassation Enoncé du moyen « Tiré de la contradiction de motif valant absence de motif au sens de l’article 89 de la Constitution En ce que l’Arrêt Attaqué a déclaré l’appel irrecevable au motif que le nom de la partie appelante ne figurait pas dans la déclaration d’appel de sorte que l’identité de l’appelant serait inconnue ;

alors qu’il est expressément mentionné dans l’Arrêt Attaqué relevé de cette ordonnance le 31 janvier 2023 par déclaration reçue au greffe du tribunal d’arrondissement d et à Luxembourg par le mandataire de PERSONNE1.), né le DATE1.) à ADRESSE2.) demeurant à ADRESSE1.), partie civile » (branche unique) ;

de sorte que l’identité de la partie appelante était parfaitement connue de la Chambre du conseil de la Cour d’appel et du Parquet. ».

Réponse de la Cour Le grief tiré de la contradiction de motifs suppose une contradiction entre deux motifs d’une même décision.

En ce que le moyen se fonde sur une contradiction entre un motif de l’arrêt attaqué et les qualités de ce même arrêt, il ne met pas en cause une contradiction entre deux motifs.

Il s’ensuit que le moyen n’est pas fondé.

Sur le deuxième moyen de cassation Enoncé du moyen « Tiré de la violation de l’article 89 de la Constitution pour défaut de réponse à conclusions valant insuffisance de motifs et partant absence de motifs et pour violation de l’article 6 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme, en ce que l’Arrêt Attaqué n’a aucunement répondu au passage suivant du mémoire déposé par Me Baflast au nom de PERSONNE1.) en date du 17 avril 2023 et dans lequel il répond au moyen tiré de l’application du principe selon lequel en ces termes :

du mandat est à sanctionner pour une nullité pour vice de forme soumise au régime de l’article 264 du Code de procédure civile.

En vertu des dispositions en question, la nullité ne peut être prononcée que si l’inobservation de la nullité a pour effet de porter atteinte aux intérêts de la partie adverse.

Est-ce que le Ministère public peut être qualifié de partie adverse par rapport à la partie appelante, PERSONNE1.) ? En effet, le Ministère public est l’autorité chargée de défendre l’intérêt de la collectivité et la sauvegarde de l’ordre public.

Les prétentions de PERSONNE1.) ne sont pas dirigées contre le Ministère public ou la collectivité, mais contre les personnes visées par la plainte qui n’ont pas encore, à ce stade de la procédure, la qualité de " partie ".

Il faut également, pour que la nullité soit prononcée, que la partie qui s’en prévaut justifie d’un préjudice.

Il ne suffit pas d'invoquer l'existence d'un préjudice, mais il faut au contraire le qualifier précisément et en rapporter la preuve.

Or, en l’espèce, le Parquet ne fait absolument pas mention d’un préjudice quelconque qui lui serait accru en raison de l’absence de mention expresse de l’identité de la partie appelante.

Dès lors, conformément à ce qui a été affirmé par la jurisprudence en l’absence de justification quant à l’existence d’un préjudice du fait de l’absence du nom de la partie civile sur la déclaration d’appel, le moyen de nullité est à déclarer non-fondé.

L’appel du 31 janvier 2023 doit donc être déclaré recevable.» La Chambre du conseil de la Cour d’appel a omis de répondre à ce moyen. ».

Réponse de la Cour En retenant « La Cour note tout d’abord que le moyen d’irrecevabilité tiré de la règle a été soulevé par le Ministère Public de sorte qu’elle est amenée à l’analyser sans que sa qualification de règle d’ordre public ou privée ne soit pertinente.

Par ailleurs, les dispositions réglant les modalités de saisine des juridictions et notamment celles relatives à l’exercice des voies de recours constituent des règles de procédure d’ordre public en ce qu’elles tiennent à l’organisation judiciaire et leur inobservation est sanctionnée par l’irrecevabilité du recours (cf. Cass. 24 janvier 2019, n°17/2019). », les juges d’appel ont motivé leur décision sur le point considéré.

Il s’ensuit que le moyen n’est pas fondé.

Sur les troisième, quatrième et cinquième moyens de cassation réunis Enoncé des moyens le troisième, « Tiré de la violation, sinon de la fausse application, sinon du refus d'application, sinon de la fausse interprétation du principe en ce que l’Arrêt Attaqué a déclaré l’appel interjeté le 31 janvier 2023 irrecevable en application du principe selon lequel , au motif que l’acte d’appel ne mentionne pas que le comparant, en l’espèce Maître Soledad Pascal en remplacement de Me Catherine Baflast, ait agi au nom et pour le compte d’une autre personne, alors que le principe selon lequel nul ne plaide par procureur est d’une portée relativement restreinte ou limitée, qui vise à s’assurer de l’identité de l’auteur de l’action dans les cas où il existe un doute quant à cette dernière (première branche), alors que le principe selon lequel impose seulement au mandataire de faire faire figurer l’identité de son mandant dans l’acte introductif d’instance, ou, à défaut, dans ses dernières écritures (deuxième Branche), alors que, sauf si un texte l’impose formellement, l’exigence selon laquelle le nom du mandant devrait figurer dans la totalité des actes de procédure est redondante et excessive et que la doctrine suggère que le nom du mandant soit désigné une fois pour toutes, au début de l’instance, dans la demande (troisième branche), la chambre du Conseil de la Cour d’appel aurait dû déclarer l’appel recevable et statuer sur le fond de la demande. », 4 le quatrième, « Tiré de la violation, sinon de la fausse application, sinon du refus d'application, sinon de la fausse interprétation de l’article 133 du Code de procédure pénale et de l’article 1253 du Nouveau Code de procédure civile En ce que la décision attaquée déclare l’appel irrecevable au motif que l’article 133 du Code de procédure pénale imposerait que le nom de la partie pour le compte duquel l’appel est interjeté soit dévoilé ;

Alors qu’il n’est pas prévu par l’article 133 du Code de procédure pénale que le nom de la partie appelante figure expressis verbis dans la déclaration d’appel sous peine de nullité de sorte qu’il y aurait lieu de faire application de la règle prévue par l’article 1253 du Nouveau Code de procédure civile selon laquelle il n’y a pas de nullité sans texte (branche unique). » et le cinquième, (subsidiaire par rapport au quatrième moyen de cassation), « Tiré de la violation, sinon de la fausse application, sinon du refus d'application, sinon de la fausse interprétation de l’article 133 du Code de procédure pénale et de l’article 264 du Nouveau Code de procédure civile En ce que la décision attaquée déclare l’appel irrecevable au motif que l’article 133 du Code de procédure pénale imposerait que le nom de la partie pour le compte duquel l’appel est interjeté soit dévoilé ;

Alors que, à supposer que l’absence d’indication du nom du mandant puisse constituer une nullité et aboutir à une irrecevabilité, quod non, celle-ci ne peut être prononcée que si elle a causé un préjudice dans le chef du demandeur en nullité (branche unique). ».

Réponse de la Cour Il résulte de la réponse donnée au deuxième moyen que les dispositions réglant les modalités de saisine des juridictions et notamment celles relatives à l’exercice des voies de recours constituent des règles de procédure d’ordre public.

La désignation dans la déclaration d’appel de la personne exerçant le recours constitue une mention essentielle de sa recevabilité.

En retenant que toute déclaration d’appel doit, pour être valable, indiquer le nom de la personne exerçant le recours et que « L’acte d’appel ne mentionne cependant pas que le comparant ait agi au nom et pour compte d’une autre personne », les juges d’appel n’ont pas violé les dispositions visées aux moyens.

Il s’ensuit que les moyens ne sont pas fondés.

5 PAR CES MOTIFS, la Cour de cassation rejette le pourvoi ;

condamne le demandeur en cassation aux dépens de l’instance en cassation, ceux exposés par le Ministère public étant liquidés à 1,75 euro.

Ainsi jugé par la Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg en son audience publique du jeudi, vingt-et-un mars deux mille vingt-quatre, à la Cité Judiciaire, Bâtiment CR, Plateau du St. Esprit, composée de :

Thierry HOSCHEIT, président de la Cour, Marie-Laure MEYER, conseiller à la Cour de cassation, Monique HENTGEN, conseiller à la Cour de cassation, Jeanne GUILLAUME, conseiller à la Cour de cassation, Carine FLAMMANG, conseiller à la Cour de cassation, qui ont signé le présent arrêt avec le greffier à la Cour Daniel SCHROEDER.

La lecture du présent arrêt a été faite en la susdite audience publique par le président Thierry HOSCHEIT en présence du procureur général d’Etat adjoint John PETRY et du greffier Daniel SCHROEDER.

Conclusions du Parquet Général dans l’affaire de cassation PERSONNE1.) en présence du Ministère public (N° CAS-2023-00098 du registre) Par déclaration faite le 31 mai 2023 au greffe de la Cour Supérieure de Justice du Grand-Duché de Luxembourg, Maître Gladys GIUDICI, avocat à la Cour, en remplacement de Maître Marie BENA, avocat à la Cour, a formé pour au nom et pour compte de PERSONNE1.) un recours en cassation contre un arrêt No 436/23 rendu le 10 mai 2023 par la chambre du conseil de la Cour d’appel.

Cette déclaration de recours a été suivie en date du 29 juin 2023 du dépôt d’un mémoire en cassation.

Le pourvoi a été déclaré dans les forme et délais de la loi. De même le mémoire en cassation prévu à l’article 43 de la loi modifiée du 18 février 1885 sur les pourvois et la procédure en cassation a été déposé dans les formes et délais y imposés.

Faits et rétroactes En date du 5 décembre 2022, Maître Catherine BAFLAST, avocat à la Cour, a déposé au nom et pour compte de PERSONNE1.) plainte avec constitution de partie civile contre PERSONNE2.) et la société SOCIETE1.) S.à r.l. du chef de tentative d’extorsion et de tentative de chantage.

En date du 27 janvier 2023 Madame le juge d’instruction a pris une ordonnance de non-informer contre PERSONNE2.) et la société SOCIETE1.) S.à r.l. du chef de tentative d’extorsion et de tentative de chantage.

Par déclaration du 31 janvier 2023 au greffe du tribunal d’arrondissement de et à Luxembourg, Maître Soledad PASCUAL, avocat à la Cour, en remplacement de Maître Catherine BAFLAST, avocat à la Cour, a relevé appel contre cette ordonnance de non-informer.

7 La chambre du conseil de la Cour d’appel a, par arrêt No 436/23 du 10 mai 2023, déclaré cet appel irrecevable au motif que l’acte d’appel ne mentionne pas que le comparant ait agi au nom et pour le compte d’une autre personne.

Le pourvoi est dirigé contre cet arrêt.

Quant au premier moyen de cassation « Tiré de la contradiction de motif valant absence de motif au sens de l’article 89 de la Constitution En ce que l’Arrêt Attaqué a déclaré l’appel irrecevable au motif que le nom de la partie appelante ne figurait pas dans la déclaration d’appel de sorte que l’identité de l’appelant serait inconnue ;

alors qu’il est expressément mentionné dans l’Arrêt Attaqué « vu l’appel relevé de cette ordonnance le 31 janvier 2023 par déclaration reçue au greffe du tribunal d’arrondissement d et à Luxembourg par le mandataire de PERSONNE1.)1, né le DATE1.) à ADRESSE2.) demeurant à ADRESSE3.), ADRESSE4.), partie civile » (branche unique) ;

de sorte que l’identité de la partie appelante était parfaitement connue de la Chambre du conseil de la Cour d’appel et du Parquet ; » A titre principal Le moyen est tiré de la violation de l’article 89 de la Constitution pour contradiction de motifs valant absence de motifs. L’article 89 de la Constitution sanctionne l’absence de motifs qui est un vice de forme.2 Ce vice de forme peut revêtir la forme d’un défaut total de motifs, d’une contradiction de motifs, d’un motif dubitatif ou hypothétique ou d’un défaut de réponse à conclusions.

Le moyen vise le vice de forme de la contradiction de motifs.3 La Cour de cassation française retient trois types de contradiction de motifs : la contradiction réelle entre motifs de droit qui affecte le raisonnement du juge, la contradiction entre les motifs et le dispositif et la contradiction entre motifs de 1 Souligné et surligné par le demandeur en cassation 2 Cass. N° 1/01 du 4 janvier 2001 3 J. et L. Boré, La cassation en matière civile,2015-2016, nos 77.81 et ss.fait.4 Selon une formule consacrée de la Cour de cassation française « la contradiction de motifs équivaut à un défaut de motifs » dès lors que les motifs contradictoires se détruisent ou s’annihilent réciproquement, aucun d’entre eux ne pouvant alors être retenu comme fondement de la décision. La contradiction de motifs ne vicie la décision entreprise que si elle est réelle et profonde c’est-à-

dire s’il existe entre les deux motifs incriminés une véritable incompatibilité.

Il n’y a manifestement pas contradiction de motifs.

Il y a tout au plus contradiction entre un motif contenu dans l’arrêt et les qualités de ce même arrêt.

Selon la jurisprudence de votre Cour :

« Le grief tiré de la contradiction de motifs suppose une contradiction entre deux motifs d’une même décision.

En ce que le moyen se fonde sur une contradiction entre un motif de l’arrêt attaqué et les qualités de ce même arrêt, il ne met pas en cause une contradiction entre deux motifs de l’arrêt d’appel.

Il s’ensuit que le moyen n’est pas fondé. »5 Le moyen tiré de la violation de l’article 89 de la Constitution pour contradiction de motifs valant absence de motifs n’est donc pas fondé.

A titre subsidiaire La Cour de cassation ne retient le grief que si la contradiction reprochée affecte la pensée même du juge, et n’est pas le résultat d’une simple erreur de plume ou de langage. Ainsi elle écarte le moyen si la contradiction est le fruit d’une pure erreur matérielle, d’une faute de temps ou de terminologie.6 Il résulte de la simple lecture de l’arrêt qu’il s’agit tout au plus d’une erreur matérielle ou de terminologie qui n’affecte pas la pensée même du juge.

Il s’ensuit que le moyen dans la mesure où il est tiré de la violation de l’article 89 de la Constitution n’est pas fondé et doit partant être rejeté.

4 Boré, ouvrage précité, nos 77.91 et ss.

5 Cass. 26 octobre 2023, N° 109/2023 pénal, n° CAS-2023-00021 du registre 6 Boré, ouvrage précité, No 77.91Quant au deuxième moyen de cassation « Tiré de la violation de l’article 89 de la Constitution pour défaut de réponse à conclusions valant insuffisance de motifs et partant absence de motifs et pour violation de l’article 6 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme, en ce que l’Arrêt Attaqué n’a aucunement répondu au passage suivant du mémoire déposé par Me Baflast au nom de PERSONNE1.) en date du 17 avril 2023 et dans lequel il répond au moyen tiré de l’application du principe selon lequel « nul ne plaide par procureur » en ces termes :

« D’après la jurisprudence, l’irrégularité consistant en l’absence du nom du mandat est à sanctionner pour une nullité pour vice de forme soumise au régime de l’article 264 du Code de procédure civile.

En vertu des dispositions en question, la nullité ne peut être prononcée que si l’inobservation de la nullité a pour effet de porter atteinte aux intérêts de la partie adverse7.

Est-ce que le Ministère public peut être qualifié de partie adverse par rapport à la partie appelante, PERSONNE1.) ? En effet, le Ministère public est l’autorité chargée de défendre l’intérêt de la collectivité et la sauvegarde de l’ordre public.

Les prétentions de PERSONNE1.) ne sont pas dirigées contre le Ministère public ou la collectivité, mais contre les personnes visées par la plainte qui n’ont pas encore, à ce stade de la procédure, la qualité de « partie ».

Il faut également, pour que la nullité soit prononcée, que la partie qui s’en prévaut justifie d’un préjudice.

Il ne suffit pas d'invoquer l'existence d'un préjudice8, mais il faut au contraire le qualifier précisément et en rapporter la preuve.9 Or, en l’espèce, le Parquet ne fait absolument pas mention d’un préjudice quelconque qui lui serait accru en raison de l’absence de mention expresse de l’identité de la partie appelante.

Dès lors, conformément à ce qui a été affirmé par la jurisprudence en l’absence de justification quant à l’existence d’un préjudice du fait de l’absence du nom 7 Souligné par le demandeur en cassation 8 Cour d'appel 4 juillet 2001, N• 23231 du rôle, Cour de cassation 25 octobre 2001, N• 50/01, Cour de cassation 7 mars 2002, N• 16/02 ou encore Cour d'appel 12 mars 2003, N• 26158 du rôle.

9 Cour d'appel 26 juin 2002, N• 25704 du rôle, BIJ 2/2003, page 28. Voir dans le même sens Cour de cassation française, deuxième chambre civile, 12 juillet 2001, Dalloz 2001-IR-page 2456, JCP 2001-IV-2681.de la partie civile sur la déclaration d’appel, le moyen de nullité est à déclarer non-fondé10.

L’appel du 31 janvier 2023 doit donc être déclaré recevable. » La Chambre du Conseil de la Cour d’appel a omis de répondre à ce moyen. » La violation invoquée des articles 89 de la Constitution et 195 du Code de procédure pénale vise le défaut de motifs, qui est un vice de forme. Une décision est régulière en la forme dès qu’elle comporte une motivation, expresse ou implicite, sur le point considéré11.

La Cour d’appel a répondu de la manière suivante à ce moyen :

« La Cour note tout d’abord que le moyen d’irrecevabilité tiré de la règle « nul ne plaide par procureur » a été soulevé par le Ministère Public de sorte qu’elle est amenée à l’analyser sans que sa qualification de règle d’ordre public ou privée ne soit pertinente.

Par ailleurs, les dispositions réglant les modalités de saisine des juridictions et notamment celles relatives à l’exercice des voies de recours constituent des règles de procédure d’ordre public en ce qu’elles tiennent à l’organisation judiciaire et leur inobservation est sanctionnée par l’irrecevabilité du recours (cf. Cass. 24 janvier 2019, n°17/2019).

Ni Maître Soledad PASCUAL ni Maître Catherine BAFLAST ne sont inculpées ou parties civiles dans le dossier référencié not. 40381/22/CD. Elles n’ont dès lors pas qualité pour interjeter appel contre l’ordonnance du juge d’instruction en leur nom personnel.

L’acte d’appel ne mentionne cependant pas que le comparant ait agi au nom et pour compte d’une autre personne.

Pour qu’un acte de procédure soit régulier, il faut que le mandataire indique le nom du requérant et non son seul nom, respectivement celui de l’avocat qui le remplace.

C’est donc le nom du véritable appelant qui doit figurer dans l’acte d’appel en tant que partie appelante, étant précisé qu’une référence fortuite dans la reprise du libellé de l’acte attaqué est insuffisante et qu’il n’appartient pas à la juridiction saisie de deviner, par référence au contexte de l’affaire, l’identité de la partie appelante.

10 Cour d’appel arrêt de la 9eme chambre du 16 décembre 2004.

11 Voir, à titre d’illustration : Cass, 5 mai 2022, N° 62/2022 pénal, numéro CAS-2021-00081 du registre (réponse au premier moyen) ; idem, 17 novembre 2022, n° 133/2022 pénal, numéro CAS-2022-00012 du registre (réponse au premier moyen).Il s'agit de la simple application de la maxime "Nul ne plaide par procureur", qui n’interdit pas de plaider par mandataire, mais qui impose que toutes les pièces de la procédure révèlent le nom du mandant. Quiconque n’agit pas en son nom propre, mais pour le compte d’autrui, doit révéler dans les actes du procès le ou les noms de celui ou de ceux qu’il représente.

L’article 133 du Code de procédure pénale, soulevé par Maître Catherine BAFLAST, énonce limitativement les parties ayant qualité pour relever appel d’une ordonnance du juge d’instruction ou de la chambre de conseil. Il en suit naturellement que l’identité de la partie au nom et pour le compte de laquelle appel est interjeté doit être dévoilée dans l’acte d’appel et le moyen aux termes duquel cet article n’exigerait pas explicitement la mention de l’appelant est à écarter.

En effet, la désignation de la personne exacte exerçant le recours dans l’acte d’appel constitue une mention essentielle de cet acte, dès lors que l’identification de l’appelant participe à la recevabilité du recours et à la délimitation de la saisine de la juridiction d’appel en matière répressive.

Une substitution de l’appelant désigné à l’acte d’appel par une personne y non mentionnée n’est pas admissible et une erreur à ce sujet ne peut être qualifiée de purement matérielle.

Il s’ensuit que le défaut d’indication, dans l’acte d’appel, du mandant entraîne l’irrecevabilité du recours.

Il résulte de ce qui précède que l’arrêt entrepris est motivé sur le point concerné.

Le deuxième moyen de cassation n’est donc pas fondé.

Quant au troisième, quatrième et cinquième moyens de cassation réunis Quant au troisième moyen de cassation « Tiré de la violation, sinon de la fausse application, sinon du refus d'application, sinon de la fausse interprétation du principe « nul ne plaide par procureur » en ce que l’Arrêt Attaqué a déclaré l’appel interjeté le 31 janvier 2023 irrecevable en application du principe selon lequel « nul ne plaide par procureur », 12 au motif que l’acte d’appel ne mentionne pas que le comparant, en l’espèce Maître Soledad Pascual en remplacement de Me Catherine Baflast, ait agi au nom et pour le compte d’une autre personne, alors que le principe selon lequel nul ne plaide par procureur est d’une portée relativement restreinte ou limitée, qui vise à s’assurer de l’identité de l’auteur de l’action dans les cas où il existe un doute quant à cette dernière (première branche), alors que le principe selon lequel « nul ne plaide par procureur » impose seulement au mandataire de faire faire figurer l’identité de son mandant dans l’acte introductif d’instance, ou, à défaut, dans ses dernières écritures (deuxième Branche), alors que, sauf si un texte l’impose formellement, l’exigence selon laquelle le nom du mandant devrait figurer dans la totalité des actes de procédure est redondante et excessive et que la doctrine suggère que le nom du mandant soit désigné une fois pour toutes, au début de l’instance, dans la demande12 (troisième branche), la chambre du Conseil de la Cour d’appel aurait dû déclarer l’appel recevable et statuer sur le fond de la demande. » Quant au quatrième moyen de cassation « Tiré de la violation, sinon de la fausse application, sinon du refus d'application, sinon de la fausse interprétation de l’article 133 du Code de procédure pénale et de l’article 1253 du Nouveau Code de procédure civile En ce que la décision attaquée déclare l’appel irrecevable au motif que l’article 133 du Code de procédure pénale imposerait que le nom de la partie pour le compte duquel l’appel est interjeté soit dévoilé ;

Alors qu’il n’est pas prévu par l’article 133 du Code de procédure pénale que le nom de la partie appelante figure expressis verbis dans la déclaration d’appel sous peine de nullité de sorte qu’il y aurait lieu de faire application de la règle prévue par l’article 1253 du Nouveau Code de procédure civile selon laquelle il n’y a pas de nullité sans texte (branche unique), » 12 H. SOLUS ET R. PERROT, Droit judiciaire privé, t.3 : Sirey, 1991 p. 36.Quant au cinquième moyen de cassation « Tiré de la violation, sinon de la fausse application, sinon du refus d'application, sinon de la fausse interprétation de l’article 133 du Code de procédure pénale et de l’article 264 du Nouveau Code de procédure civile En ce que la décision attaquée déclare l’appel irrecevable au motif que l’article 133 du Code de procédure pénale imposerait que le nom de la partie pour le compte duquel l’appel est interjeté soit dévoilé ;

Alors que, à supposer que l’absence d’indication du nom du mandant puisse constituer une nullité et aboutir à une irrecevabilité, quod non, celle-ci ne peut être prononcée que si elle a causé un préjudice dans le chef du demandeur en nullité (branche unique) ; » Il n’est pas nécessaire de répondre en détail à l’argumentation contenue dans les troisième, quatrième et cinquième moyens de cassation réunis.

Il suffit en effet de renvoyer à la jurisprudence de votre Cour selon laquelle :

« La désignation dans l’acte d’appel de la personne exerçant le recours constitue une mention essentielle de sa recevabilité.13 Il est fait grief aux juges d’appel d’avoir violé l’article 10bis de la Constitution, (énoncé erronément dans le pourvoi comme étant l’article 11 de la Constitution) en traitant différemment le justiciable qui forme appel par voie de courrier électronique sur base de l’article 6 de la loi du 20 juin 2020 portant adaptation temporaire de certaines modalités procédurales en matière pénale et celui qui procède à une déclaration d’appel au greffe en application de l’article 133 du Code de procédure pénale.

Toute déclaration d’appel doit, pour être valable, indiquer le nom de la personne exerçant le recours,14 de sorte qu’il n’existe aucune différence de traitement entre les deux catégories de personnes visées au moyen.

Il s’ensuit que le moyen n’est pas fondé. »15 Les troisième, quatrième et cinquième moyens de cassation ne sont donc pas fondés.

13 Souligné par le soussigné 14 Souligné par le soussigné 15 Cass. 2 mars 2023, N° 20/2023 pénal, n° CAS-2022-00072 du registre Conclusion Le pourvoi est recevable mais non fondé.

Pour le Procureur général d’Etat, Le premier avocat général, Serge WAGNER 15


Synthèse
Numéro d'arrêt : 44/24
Date de la décision : 21/03/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;cour.cassation;arret;2024-03-21;44.24 ?

Source

Voir la source

Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award