N° 113 / 2024 du 04.07.2024 Numéro CAS-2023-00150 du registre Audience publique de la Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg du jeudi, quatre juillet deux mille vingt-quatre.
Composition:
Agnès ZAGO, conseiller à la Cour de cassation, président, Monique HENTGEN, conseiller à la Cour de cassation, Jeanne GUILLAUME, conseiller à la Cour de cassation, Carine FLAMMANG, conseiller à la Cour de cassation, Marie-Anne MEYERS, conseiller à la Cour d’appel, Daniel SCHROEDER, greffier à la Cour.
Entre l’ETAT DU GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG, représenté par le ministre d’Etat, ayant ses bureaux à L-1341 Luxembourg, 2, Place de Clairefontaine, demandeur en cassation, comparant par la société à responsabilité limitée RODESCH Avocats à la Cour, inscrite à la liste V du tableau de l’Ordre des avocats du barreau de Luxembourg, en l’étude de laquelle domicile est élu, représentée aux fins de la présente procédure par Maître Virginie VERDANET, avocat à la Cour, et la société à responsabilité limitée SOCIETE1.), établie et ayant son siège social à L-ADRESSE1.), représentée par le gérant, inscrite au registre de commerce et des sociétés sous le numéro NUMERO1.), défenderesse en cassation, comparant par Maître Annamaria RANIERI, avocat à la Cour, en l’étude de laquelle domicile est élu.
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Vu l’arrêt attaqué rendu le 3 juillet 2023 sous le numéro 2023/0156 (No. du reg.: ADEM 2023/0018) par le Conseil supérieur de la sécurité sociale ;
Vu le mémoire en cassation signifié le 8 septembre 2023 par l’ETAT DU GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG à la société à responsabilité limitée SOCIETE1.), déposé le 12 septembre 2023 au greffe de la Cour supérieure de Justice ;
Vu le mémoire en réponse signifié le 7 novembre 2023 par la société SOCIETE1.) à l’ETAT DU GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG, déposé le 8 novembre 2023 au greffe de la Cour ;
Sur les conclusions du premier avocat général Monique SCHMITZ.
Sur les faits Selon l’arrêt attaqué, la directrice de l’Agence pour le développement de l’emploi (ci-après « l’ADEM ») avait rejeté la demande de la défenderesse en cassation en obtention de la prime consécutive à un stage de professionnalisation prévue par l’article L. 524-1, paragraphe 6, du Code du travail au motif que le salarié n’avait pas été embauché dès la fin du stage, le 28 mars 2021, mais seulement suivant contrat du 31 mars 2021 avec effet au 1er avril 2021. Ce refus avait été confirmé par la Commission spéciale de réexamen. Le Conseil arbitral de la sécurité sociale avait rejeté le recours de la défenderesse en cassation.
Le Conseil supérieur de la sécurité sociale a, par réformation, dit que la Commission spéciale de réexamen avait refusé à tort la demande de la défenderesse en cassation.
Sur les deux premiers moyens de cassation réunis Enoncé des moyens le premier, « tiré de la violation légale, voire d'une application erronée, voire d'une fausse interprétation in specie de l’article L.524-1 paragraphe (6) du Code du travail, dans sa teneur actuelle, issu de la loi du 18 décembre 2015 portant modification du Code du travail, en ce que le CSSS a retenu qu’ stage et l’engagement à durée indéterminée ne saurait être considéré comme étant trop éloigné pour faire obstacle à l’obtention des avantages financiers par la société SOCIETE1.) sarl », première branche :
alors qu’il est prévu à cette disposition légale qu’ demandeur d’emploi dès la fin du stage l’employeur peut demander d’obtenir les aides prévues à l’article L. 441-1. […] », et que ce texte ne prête à aucune interprétation au vu de sa clarté, de sorte que le Conseil supérieur de la Sécurité sociale aurait dû appliquer purement et simplement le texte sans chercher à l’interpréter en retenant que l’embauche devait bien être effective au terme du stage.
deuxième branche :
Alors que même si la disposition légale précitée demandeur d’emploi dès la fin du stage l’employeur peut demander d’obtenir les aides prévues à l’article L. 441-1. […] » était obscure, l’interprétation donnée au texte ne saurait ouvrir la voie à une inégalité de traitement des administrés mettant ainsi en péril les principes de sécurité juridique et de confiance légitime, de sorte que le Conseil supérieur de la Sécurité sociale a ainsi faussement interprété le texte, alors qu’il aurait dû retenir le terme ferme de la fin de stage pour assurer une telle égalité de traitement et une interprétation stricte et conforme du texte de loi. ».
et le deuxième, « tiré de la violation légale, voire d'une application erronée, voire d'une fausse interprétation in specie de l’article L.524-1 paragraphe (6) du Code du travail, dans sa teneur actuelle, issu de la loi du 18 décembre 2015 portant modification du Code du travail, en ce que le CSSS a retenu qu’ Code du travail ne prévoit pas que le contrat de travail doit être conclu consécutivement à la convention de stage, à savoir le jour qui suit la fin du stage, mais "dès la fin" du stage, c’est-à-dire après que la convention de stage ait pris fin. » de sorte que le Conseil supérieur de la sécurité sociale a fait une mauvaise application et une mauvaise interprétation de l’article L.524-1 paragraphe (6) du Code du travail.
Il est renvoyé aux arguments développés dans le premier moyen, lesquels valent également au titre d’arguments de ce deuxième moyen.
Le deuxième moyen est à déclarer recevable et fondé. ».
Réponse de la Cour Il résulte de l’arrêt attaqué qu’un contrat de travail à durée indéterminée a été conclu entre le demandeur d’emploi et la défenderesse en cassation à la suite immédiate du stage de professionnalisation, sans que le salarié ait été engagé par un autre employeur ou se soit réinscrit auprès de l’ADEM.
Les juges du fond, qui apprécient souverainement, compte tenu des éléments de fait qui leur sont soumis, si la conclusion du contrat de travail s’est faite dès la fin du stage de professionnalisation, ont pu, sans violer la disposition visée au moyen, retenir que la défenderesse en cassation remplissait les conditions d’obtention de la prime.
Il s’ensuit que le moyen n’est pas fondé.
Sur le troisième moyen de cassation Enoncé du moyen « tiré de la violation légale, voire d'une application erronée, voire d'une fausse interprétation in specie de l’article L.524-1 paragraphe (6) du Code du travail, dans sa teneur actuelle, issu de la loi du 18 décembre 2015 portant modification du Code du travail, en ce que le CSSS a retenu qu’ par des raisons administratives ou d’organisation interne de la société SOCIETE1.) sarl pour l’établissement des documents nécessaires pour l’engagement de PERSONNE1.), ce qui a pu prendre plus longtemps en période COVID. » de sorte que le Conseil supérieur de la Sécurité sociale a fait une mauvaise application et une mauvaise interprétation de l’article L.524-1 paragraphe (6) du Code du travail.
Il y a lieu de préciser que la période de confinement suite à la propagation du virus COVID-19 a débuté le 12 avril 2021.
Il est encore ajouté que pour la période de stage, la documentation nécessaire à une éventuelle embauche avait déjà été fournie par Monsieur PERSONNE1.).
En outre, le texte de loi ne prévoit aucune dérogation au texte. Or par cette interprétation, le Conseil supérieur de la Sécurité sociale a ajouté au texte une dérogation en retenant qu’un délai de trois jours peut s’expliquer pour des raisons administratives, et justifier dès lors un tel retard.
Pour le surplus, il est également renvoyé aux arguments développés dans le premier moyen, lesquels valent également au titre d’arguments de ce troisième moyen alors que le Conseil supérieur a interprété de manière extensive le texte litigieux.
Le troisième moyen est dès lors à déclarer recevable et fondé. ».
Réponse de la Cour Sous le couvert du grief tiré de la violation de la disposition visée au moyen, celui-ci ne tend qu’à remettre en discussion l’appréciation, par les juges du fond, des éléments de fait qui les ont amenés à retenir que la conclusion du contrat de travail s’est faite dès la fin du stage de professionnalisation, appréciation qui relève de leur pouvoir souverain et échappe au contrôle de la Cour de cassation.
Il s’ensuit que le moyen ne saurait être accueilli.
Sur la demande en allocation d’une indemnité de procédure Il serait inéquitable de laisser à charge de la défenderesse en cassation l’intégralité des frais exposés non compris dans les dépens. Il convient de lui allouer une indemnité de procédure de 2.500 euros.
PAR CES MOTIFS, la Cour de cassation rejette le pourvoi ;
condamne le demandeur en cassation à payer à la défenderesse en cassation une indemnité de procédure de 2.500 euros ;
le condamne aux frais et dépens de l’instance en cassation.
La lecture du présent arrêt a été faite en la susdite audience publique par le conseiller Agnès ZAGO en présence de l’avocat général Anita LECUIT et du greffier Daniel SCHROEDER.
Conclusions du Parquet Général dans l’affaire de cassation ETAT DU GRAND-DUCHÉ DE LUXEMBOURG c/ SOCIETE1.) SARL (affaire n° CAS-2023-00150 du registre) Le pourvoi du demandeur en cassation, par dépôt au greffe de la Cour supérieure de justice en date du 12 septembre 2023 d’un mémoire en cassation, signifié le 8 septembre 2023 à la défenderesse en cassation, est dirigé contre un arrêt n° 2023/00018 rendu contradictoirement le 3 juillet 2023 par le Conseil supérieur de la sécurité sociale dans la cause inscrite sous le numéro ADEM 2023/0018 du registre.
Le pourvoi est dirigé contre un arrêt du Conseil supérieur de la sécurité sociale, contre lequel un pourvoi en cassation peut être formé sur base de l’article 455, alinéa 4, du Code de la sécurité sociale.
L’arrêt dont pourvoi a fait l’objet d’une notification en date du 14 juillet 2023.
Le pourvoi est recevable au regard des exigences de délai et de forme prévues aux articles 7 et 10 de la loi modifiée du 18 février 1885 sur les pourvois et la procédure en cassation.
Par dépôt au greffe de la Cour supérieure de justice en date du 8 novembre 2023, la défenderesse en cassation a introduit un mémoire en réponse, signifié antérieurement au demandeur en cassation. Il est recevable pour avoir été introduit dans le forme et délais prévus par les articles 15 et 16 de la prédite loi du 18 février 1885 et peut dès lors être prise en considération.
Sur les faits et rétroactes :
PERSONNE1.), occupé par un stage de professionnalisation auprès de la société SOCIETE1.) SARL pendant la période allant du lundi 15 février 2021 au dimanche 28 mars 2021, les parties ont signé le mercredi 31 mars 2021 un contrat de travail à durée indéterminée, avec effet au jeudi 1er avril 2021.
L’employeur ayant introduit auprès de l’ADEM une demande en vue de de l’obtention de la prime prévue à l’article L.524-1, paragraphe (6), alinéa 2, du Code du travail1, c’est par décision directoriale de l’ADEM que droit n’a pas été fait à sa demande, motifs pris que PERSONNE1.) n’aurait pas été engagé dès la fin du stage, tel qu’exigé par l’article L.524-1 du Code du travail.
Suite à la demande de réexamen par la commission spéciale de réexamen (CSR), la prédite décision directoriale fut confirmée. L’employeur ayant introduit un recours contre la décision de la CSR auprès le Conseil arbitral de la sécurité sociale, ce dernier, par jugement du 25 novembre 2022, a confirmé la décision de la CSR.
1 cf. pièces n° 7 et 8 de la farde de pièce versée par Me RODESCH ;
Sur requête d’appel introduite par l’employeur contre le prédit jugement, le Conseil supérieur de la Sécurité sociale, ci-après dénommé CSSS, dans son arrêt du 3 juillet 2023, a, par réformation du jugement entrepris, dit que « c’est à tort que la Commission spéciale de réexamen a refusé la demande de la société SOCIETE1.) sàrl en obtention de la prime après un stage de professionnalisation prévue par l’article L.524-1 (6) du code du travail. » C’est contre cet arrêt que le pourvoi est dirigé.
Les 1er et 2ème moyens de cassation pris ensemble :
Le 1er moyen est tiré de la violation légale, voire d'une application erronée, voire d'une fausse interprétation in specie de l’article L.524-1 paragraphe (6) du Code du travail, dans sa teneur actuelle, issu de la loi du 18 décembre 2015 portant modification du Code du travail, en ce que le CSSS a retenu qu’ « un tel délai de trois jours entre la fin du stage et l’engagement à durée indéterminée ne saurait être considéré comme étant trop éloigné pour faire obstacle à l’obtention des avantages financiers par la société SOCIETE1.) sarl », alors que, première branche, il est prévu à cette disposition légale qu’ « en cas d’embauche du demandeur d’emploi dès la fin du stage l’employeur peut demander d’obtenir les aides prévues à l’article L. 441-1.
[…] », et que ce texte ne prête à aucune interprétation au vu de sa clarté, de sorte que le CSSS aurait dû appliquer purement et simplement le texte sans chercher à l’interpréter en retenant que l’embauche devait bien être effective au terme du stage, et alors que, deuxième branche, même si la disposition légale précitée « en cas d’embauche du demandeur d’emploi dès la fin du stage l’employeur peut demander d’obtenir les aides prévues à l’article L. 441-1. […] » était obscure, l’interprétation donnée au texte ne saurait ouvrir la voie à une inégalité de traitement des administrés mettant ainsi en péril les principes de sécurité juridique et de confiance légitime, de sorte que le Conseil supérieur de la Sécurité sociale a faussement interprété le texte.
Le 2ème moyen est tiré de la violation légale, voire d'une application erronée, voire d'une fausse interprétation in specie de l’article L.524-1 paragraphe (6) du Code du travail, dans sa teneur actuelle, issu de la loi du 18 décembre 2015 portant modification du Code du travail, en ce que le CSSS a retenu qu’ « Il s’y ajoute que l’article L. 524-1 (6) du Code du travail ne prévoit pas que le contrat de travail doit être conclu consécutivement à la convention de stage, à savoir le jour qui suit la fin du stage, mais « dès la fin » du stage, c’est-à-dire après que la convention de stage ait pris fin. », de sorte que le CSSS a fait une mauvaise application et une mauvaise interprétation de l’article L.524-1 paragraphe (6) du Code du travail.
Les deux moyens sous examen visant chacun la question du délai endéans lequel l’employeur peut demander les aides prévues au paragraphe (6) de l’article L.524-1 du Code du travail, et le demandeur en cassation renvoyant sous son 2ème moyen de cassation aux arguments développés sous son 1ier moyen, la soussignée propose de les examiner ensemble.
Le cadre juridique visé en l’espèce est l’article L.524-1 du Code du travail, dont la teneur est la suivante :
« Art. L.524-1 « (1) (L. 20 juillet 2017) Un stage de professionnalisation peut être proposé par l’Agence pour le développement de l’emploi aux demandeurs d’emploi âgés de trente ans au moins ou en reclassement externe au sens des articles L.551-1 et suivants ou ayant la qualité de salarié handicapé au sens des articles L.561-1 et suivants et inscrits auprès des bureaux de placement de l’Agence pour le développement de l’emploi depuis un mois au moins.
Ce stage est réservé aux promoteurs qui peuvent offrir aux demandeurs d’emploi visés à l’alinéa qui précède une réelle perspective d’emploi à la fin du stage de professionnalisation ou du contrat de réinsertion-emploi subséquent.
(2) Ce stage est non rémunéré et ne peut excéder la durée de six semaines. Si le demandeur d’emploi visé ci-dessus est considéré comme hautement qualifié la durée peut être portée à neuf semaines sur proposition de l’Agence pour le développement de l’emploi.
Est considéré comme hautement qualifié un demandeur d’emploi qui peut se prévaloir au moins de trois années d’études supérieures réussies.
Le stage est soumis à l’assurance contre les accidents de travail et donne lieu au payement des cotisations afférentes prises en charge par le Fonds pour l’emploi.
(3) En cas de placement en stage le chômeur indemnisé garde le bénéfice de son indemnité de chômage complet augmentée d’une indemnité complémentaire fixée à 323 euros à l’indice 775,17 et bénéficie de deux jours de congé par mois.
(L. 8 avril 2018) De même, le demandeur d’emploi bénéficiant d’une indemnité d’attente, d’une indemnité professionnelle d’attente, d’une rente professionnelle d’attente, ou du revenu pour personnes gravement handicapées en garde le bénéfice augmenté d’une indemnité complémentaire fixée à quarante-et-un euros et soixante-
sept cents à l’indice 100 et bénéficie de deux jours de congé par mois.
(4) En cas de placement en stage le chômeur non indemnisé touche une indemnité fixée à 323 euros à l’indice 775,17 et bénéficie de deux jours de congé par mois.
(5) (L. 20 juillet 2017) À la fin du stage l’entreprise utilisatrice informera par écrit l’Agence pour le développement de l’emploi sur les possibilités d’insertion du demandeur d’emploi à l’intérieur de l’entreprise.
Si le demandeur d’emploi n’est pas embauché par l’entreprise à la fin du stage, celle-ci renseignera l’Agence pour le développement de l’emploi sur les compétences acquises par le demandeur d’emploi durant le stage ainsi que sur les éventuelles déficiences constatées.
Dans ce cas, le droit à l’indemnité de chômage complet est allongé d’une période égale à la durée effective du stage de professionnalisation.
(6) En cas d’embauche du demandeur d’emploi dès la fin du stage l’employeur peut demander d’obtenir les aides prévues à l’article L.541-1.
(L. 8 avril 2018) Si l’embauche du demandeur d’emploi âgé de 45 ans au moins au moment de la conclusion du stage de professionnalisation ou en reclassement externe au sens des articles L.551-1 et suivants ou ayant la qualité de salarié handicapé au sens des articles L.561-1 et suivants est faite moyennant un contrat de travail à durée indéterminée, le Fonds pour l’emploi rembourse à l’employeur, sur demande adressée à l’Agence pour le développement de l’emploi, cinquante pour cent du salaire social minimum pour salariés non qualifiés pour douze mois.
Le remboursement n’est dû et versé que douze mois après l’engagement à condition que le contrat de travail soit toujours en vigueur au moment de la demande et que la durée du stage de professionnalisation ait été expressément déduite d’une éventuelle période d’essai légale, conventionnelle ou contractuelle. »2 Le paragraphe (6) de l’article L.524-1 du Code du travail vise les aides lesquelles l’employeur peut se voir allouer en cas d’embauchage du demandeur d’emploi ayant accompli auprès de lui un stage de professionnalisation.
Le 1er alinéa du paragraphe (6) vise la part patronale, telle que définie à l’article l.541-1 du Code du travail, à laquelle l’employeur peut prétendre.
Les alinéas 2 et 3 du paragraphe (6) visent la prime équivalente à 12 fois 50% du salaire social minimum pour salarié non qualifié, dont le remboursement n’est dû et versé que douze mois après la conclusion du contrat de travail à durée indéterminée et soumis aux conditions que le contrat de travail soit toujours en vigueur au moment de la demande et que la durée du stage de professionnalisation ait été expressément déduite d’une éventuelle période d’essai légale, conventionnelle ou contractuelle.
Quant à l’origine législative de la disposition légale visée aux moyens sous examen, dans sa rédaction initiale L.524-1 du Code du travail il était libellé comme suit :
« Un stage de réinsertion professionnelle, comprenant des périodes alternées de formation pratique et de formation théorique, peut être proposé par l’Administration de l’emploi aux demandeurs d’emploi âgés de plus de trente ans accomplis et inscrits auprès des bureaux de placement de l’Administration de l’emploi depuis trois mois au moins.
L’Administration de l’emploi peut faire bénéficier le demandeur d’emploi de l’établissement d’un bilan de compétences. Ce dernier peut être établi, dans le respect de la législation concernant la protection des données personnelles, par un organisme tiers, sur la base d’un accord par écrit de la personne concernée, énumérant limitativement les données nominatives que l’Administration de l’emploi est autorisée à transmettre à l’organisme tiers en vue d’établir le prédit bilan de compétences. » 2 mis en exergue par la soussignée ;
La loi du 18 décembre 20153, portant modification du Code de travail et de plusieurs lois ayant modifié certaines dispositions du Code du travail, a, entre autres, réformé le stage, ainsi que le contrat de réinsertion-emploi.
« Concernant certaines mesures en faveur de l’emploi, le Code du travail prévoit actuellement au Titre II du Livre V un Chapitre IV portant sur le stage de réinsertion professionnelle au profit des demandeurs d’emploi indemnisés ou non indemnisés.
Il y a lieu de constater que ce stage qui s’adresse à tous les demandeurs d’emploi, indemnisés ou non, âgés de plus de 30 ans ne produit pas les résultats escomptés en termes de réintégration sur le marché du travail.
Ainsi, uniquement 26% des personnes dont le stage s’est terminé en 2015 ont été engagées par l’entreprise où elles ont effectué ce stage.
De plus, les demandeurs d’emploi en question ne bénéficient pas toujours d’un encadrement intensif de la part des promoteurs pour augmenter leur employabilité.
Enfin, comme la mesure ne cible pas de groupes spécifiques mais est actuellement ouverte à toutes les catégories de demandeurs d’emploi à partir de 30 ans, les demandeurs d’emploi les plus fragiles en profitent peu.
En effet, uniquement 30% des personnes actuellement en stage de réinsertion professionnelle ont 45 ans ou plus alors que le chômage frappe particulièrement la catégorie des personnes plus âgés.
En résumé les expériences pratiques avec cette mesure et la situation actuelle du marché de l’emploi soulignent la nécessité pressante de développer un nouveau dispositif pour cibler les populations les plus fragiles, à savoir les demandeurs d’emploi d’au moins 45 ans, les salariés à capacité de travail réduite et les salariés handicapés.
En ce qui concerne cette population il y a lieu de noter qu’actuellement 7.174 demandeurs d’emploi âgés de plus de 45 ans sont inscrits à l’Agence pour le développement de l’emploi, dont 2.790 chômeurs indemnisés. Par ailleurs 5.006 personnes disponibles ont le statut de salariés reclassés (dont 467 ont également le statut de salariés handicapés) et 1.373 personnes disponibles ont le statut de salariés handicapés sans être reclassés.
Dès lors le présent projet propose de remplacer l’actuel stage de réinsertion professionnelle par un nouveau Chapitre IV contenant un stage de professionnalisation de courte durée et un contrat de réinsertion-emploi plus long réservés à la population cible. (…)4. » Ainsi le Chapitre IV du Titre II du Livre V du Code du travail a pris la teneur suivante :
3 projet de loi n° 6904 ;
4 cf. travaux parlementaires n° 6904, exposé des motifs p. 2 et 3 ; cf. également Jean-Luc PUTZ, Comprendre et appliquer le droit du travail, 4ième édition, 157 ; ou encore Jean-Luc PUTZ, Le Travail flexible et atypique, Promoculture, 242 ;
« Chapitre IV.- Stage de professionnalisation et contrat de réinsertion-emploi Art. L.524-1 (1) Un stage de professionnalisation peut être proposé par l’Agence pour le développement de l’emploi aux demandeurs d’emploi âgés de 45 ans au moins ou en reclassement externe au sens des articles L.551-1 et suivants ou ayant la qualité de salarié handicapé au sens des articles L.561-1 et suivants et inscrits auprès des bureaux de placement de l’Agence pour le développement de l’emploi depuis un mois au moins.
Ce stage est réservé aux promoteurs qui peuvent offrir aux demandeurs d’emploi visés à l’alinéa qui précède une réelle perspective d’emploi à la fin du stage de professionnalisation ou du contrat de réinsertion-emploi subséquent.
(2) Ce stage est non rémunéré et ne peut excéder la durée de six semaines. Si le demandeur d’emploi visé ci-dessus est considéré comme hautement qualifié la durée peut être portée à neuf semaines sur proposition de l’Agence pour le développement de l’emploi.
Est considéré comme hautement qualifié un demandeur d’emploi qui peut se prévaloir au moins de trois années d’études supérieures réussies.
Le stage est soumis à l’assurance contre les accidents de travail et donne lieu au payement des cotisations afférentes prises en charge par le Fonds pour l’emploi.
(3) En cas de placement en stage le chômeur indemnisé garde le bénéfice de son indemnité de chômage complet augmentée d’une indemnité complémentaire fixée à 323 euros à l’indice 775,17 et bénéficie de deux jours de congé par mois.
De même le demandeur d’emploi bénéficiant d’une indemnité d’attente, d’une indemnité professionnelle d’attente ou du revenu pour personnes gravement handicapées en garde le bénéfice augmenté d’une indemnité complémentaire fixée à 323 euros à l’indice 775,17 et bénéficie de deux jours de congé par mois.
(4) En cas de placement en stage le chômeur non indemnisé touche une indemnité fixée à 323 euros à l’indice 775,17 et bénéficie de deux jours de congé par mois.
(5) A la fin du stage l’entreprise utilisatrice informera par écrit l’Agence pour le développement de l’emploi sur les possibilités d’insertion du demandeur d’emploi à l’intérieur de l’entreprise. Si le demandeur d’emploi n’est pas embauché par l’entreprise à la fin du stage, celle-ci renseignera l’Agence pour le développement de l’emploi sur les compétences acquises par le demandeur d’emploi durant le stage ainsi que sur les éventuelles déficiences constatées.
(6) En cas d’embauche du demandeur d’emploi dès la fin du stage l’employeur peut demander d’obtenir les aides prévues à l’article L.541-1.
Si l’embauche est faite moyennant un contrat de travail à durée indéterminée, le Fonds pour l’emploi rembourse à l’employeur, sur demande adressée à l’Agence pour le développement de l’emploi, cinquante pour cent du salaire social minimum pour salariés non qualifiés pour douze mois.
Le remboursement n’est dû et versé que douze mois après l’engagement à condition que le contrat de travail soit toujours en vigueur au moment de la demande et que la durée du stage de professionnalisation ait été expressément déduite d’une éventuelle période d’essai légale, conventionnelle ou contractuelle.5» La loi du 20 juillet 20176, portant modification du Code du travail en vue de l’introduction d’un nouveau dispositif de lutte contre le chômage de longue durée, a modifié l’article L.524-1 en ce qu’au paragraphe (1) les termes « demandeurs d'emploi âgés de quarante-cinq ans au moins » furent remplacés par les termes « demandeurs d'emploi âgés de trente ans au moins » et qu’au paragraphe 5 fut rajouté un alinéa final, libellé comme suit : « Dans ce cas, le droit à l'indemnité de chômage complet est allongé d'une période égale à la durée effective du stage de professionnalisation. », visant donc l’hypothèse du non-engagement du demandeur d’emploi.
La loi du 8 avril 20187, portant modification du Code de travail et de plusieurs lois ayant modifié certaines dispositions du Code du travail, a modifié l’alinéa 2 du paragraphe (6) dans sa rédaction telle qu’issue de la loi prémentionnée du 18 décembre 2015 comme suit :
« Si l’embauche du demandeur d’emploi âgé de 45 ans au moins au moment de la conclusion du stage de professionnalisation ou en reclassement externe au sens des articles L.551-1 et suivants ou ayant la qualité de salarié handicapé au sens des articles L.561-1 et suivants est faite moyennant un contrat de travail à durée indéterminée, le Fonds pour l’emploi rembourse à l’employeur, sur demande adressée à l’Agence pour le développement de l’emploi, cinquante pour cent du salaire social minimum pour salariés non qualifiés pour douze mois. »8 Ladite modification a été proposée par la Commission du Travail, de l’Emploi et de la Sécurité sociale: « Par cet amendement, il est visé de limiter le remboursement de 12 x 50% du Salaire social minimum (SSM) à l’employeur qui embauche moyennant un contrat de travail à durée indéterminée (CDI) un demandeur d’emploi âgé de 45 ans au moins ou reclassé ou handicapé à l’issu d’un stage de professionnalisation. La loi du 20 juillet 2017 portant modification du Code du travail en vue de l’introduction d’un nouveau dispositif de lutte contre le chômage de longue durée a en effet élargi le bénéfice du stage de professionnalisation aux demandeurs d’emploi entre 30 et 45 ans mais il n’a pas été dans l’intention du législateur de faire bénéficier les employeurs des demandeurs d’emploi de cette catégorie d’âge de l’aide financière en cas d’embauche suivant un tel stage. » Dans son avis complémentaire du 16 janvier 2018, le Conseil d’Etat souligne que :
5 mis en exergue par la soussignée ;
6 projet de loi n° 7149 ;
7 projet de loi n° 7086 ;
8 passages modifiés par la loi du 8 avril 2018 mis en exergue par la soussignée ;
« L’amendement 4 vise à insérer un nouveau point 18 au projet de loi afin de procéder à une modification de l’article L.524-1 du Code du travail, tel que le libellé de cet article résulte de la loi du 20 juillet 2017 portant modification du Code du travail en vue de l’introduction d’un nouveau dispositif de lutte contre le chômage de longue durée. Cette dernière loi avait élargi, à l’endroit de l’article L.524-1, la possibilité de faire bénéficier les employeurs des demandeurs d’emploi âgés entre trente et quarante-cinq ans de l’aide financière en cas d’embauche suivant un stage de professionnalisation. Selon les auteurs, le libellé de l’article L. 524-1 précité reposerait toutefois sur une erreur, puisqu’il n’aurait « pas été dans l’intention du législateur de faire bénéficier les employeurs des demandeurs d’emploi de cette catégorie d’âge de l’aide financière en cas d’embauche suivant un tel stage ». Le Conseil d’État prend acte de cette motivation et n’a pas d’observation par rapport au fond de la disposition sous avis. » 9 Il se dégage de ce qui précède qu’en application de l’alinéa 1 du paragraphe (6), l’employeur peut demander l’allocation des parts patronales pour les demandeurs d’emploi énumérés au paragraphe (1), à savoir pour les demandeurs d’emploi âgés de trente ans au moins ou en reclassement externe au sens des articles L.551-1 et suivants ou ayant la qualité de salarié handicapé au sens des articles L.561-1 et suivants, tandis qu’en application de l’alinéa 2 du paragraphe (6) le remboursement y prévu exclut dorénavant les demandeurs d’emploi âgés entre 30 et 45 ans.
En l’occurrence, les juges du fond, étant partis de la prémisse que le remboursement prévu aux alinéas 2 et 3 du paragraphe (6) présuppose que l’embauchage du demandeur d’emploi se soit fait dès la fin du stage, tel que prévu à l’alinéa précédent et visant les seules allocation des parts patronales, ont examiné le sens et la portée de la terminologie employée en se déterminant par la motivation suivante :
« un tel délai de trois jours entre la fin du stage et l’engagement à durée indéterminée ne saurait être considéré comme étant trop éloigné pour faire obstacle à l’obtention des avantages financiers par la société SOCIETE1.) sarl. En effet, le contrat de travail signé suit dans un délai plus que rapproché la terminaison de la convention de stage. Il s’y ajoute que l’article L.524-1 (6) du code du travail ne prévoit pas que le contrat de travail doit être conclu consécutivement à la convention de stage, à savoir le jour qui suit la fin du stage, mais « dès la fin » du stage, c’est-à-dire après que la convention de stage ait pris fin. Un bref délai de 3 jours peut s’expliquer par des raisons administratives ou d’organisation interne de la société SOCIETE1.) sarl pour l’établissement des documents nécessaires pour l’engagement de PERSONNE1.), ce qui a pu prendre plus longtemps en période COVID. En tout état de cause, le contrat de travail à durée indéterminée de PERSONNE1.) suit immédiatement sa convention de stage, sans que le salarié n’ait été engagé par une autre entreprise et remplit partant l’objectif fixé par la loi du 18 décembre 2015 visant à promouvoir l’embauche des demandeurs d’emploi les plus 9 cf. travaux parlementaires du projet de loi n° 7086 ;
fragiles, comme en l’espèce l’engagement d’un chômeur ayant 62 ans, dont les chances de retrouver un emploi sont considérablement diminuées.
Contrairement à ce qui a été retenu par le juge de première instance, il y a lieu de considérer, compte tenu des éléments spécifiques de la cause, que la société SOCIETE1.) sarl remplit les conditions d’obtention de la prime après stage de professionnalisation prévues par l’article L.524-1 (6) du code du travail par l’engagement de PERSONNE1.) après le stage de professionnalisation »10.
Le 1ier alinéa du paragraphe (6) ne renferme pas la clarté lui attribué par la partie demanderesse en cassation. Rien que la seule formulation « dès la fin du stage » est susceptible de se comprendre dans plusieurs sens, si ce n’est - l’exigence que la période de stage soit révolue dans son entièreté et que l’embauchage ne puisse pas se faire en cours de stage, ou - que le début du contrat de travail se situe dans un laps de temps rapproché de la fin du stage, ce dans le sens que le statut du demandeur n’ait pas rencontre de changements, càd qu’il n’ait pas été employé par d’autres employeurs, qu’il n’ait pas obtenu une rente de pension, d’invalidité ou autres, etc.
Est d’autant moins claire la terminologie employée en ce qu’une lecture conjointe des trois alinéas du paragraphe (6) pourrait mener à la déduction que - lorsqu’il s’agit de la prime équivalente à 50 % du salaire de douze mois (alinéas 2 et 3), ledit remboursement se fait sous les seules conditions (1) que la personne embauché ait auparavant fait le stage de professionnalisation auprès de l’employeur demandeur du remboursement, (2) que le contrat de travail ait perduré au moins 12 mois et soit toujours en vigueur au moment de la demande, (3) que la durée du stage de professionnalisation ait été expressément déduite d’une éventuelle période d’essai légale, conventionnelle ou contractuelle, et que ladite demande de remboursement n’exige pas que la conclusion du contrat de travail à durée indéterminée se greffe immédiatement sur la fin du stage, et - que l’exigence que l’embauchage du demandeur d’emploi se fasse dès la fin du stage ne vise que la seule obtention de la part patronale, prévue au 1ier alinéa.
Ce n’est donc pas en violation d’une règle claire que les juges du fond se sont adonnés à l’interprétation de l’article L.524-1 en son paragraphe 6.
Quelle fut donc l’intention du législateur ? L’on puise des travaux parlementaires du projet de loi n° 6904 ce qui suit :
10 cf. p. 3 et 4 de l’arrêt dont pourvoi ;
Le nouvel article L.524-1 vise à faciliter la rencontre entre les employeurs et les demandeurs d’emploi les plus fragiles en créant la possibilité de „stages de professionnalisation“ d’une durée limitée dans le temps. Ces stages doivent permettre aux demandeurs d’emploi de montrer concrètement aux employeurs leurs compétences et aptitudes et de dépasser ainsi les préjugés auxquels ils doivent actuellement faire face.
Dans ce contexte sont à considérer comme demandeurs les plus fragiles les demandeurs d’emploi d’au moins 45 ans, les demandeurs d’emploi en reclassement externe et les personnes ayant la qualité de salariés handicapés.
La durée du stage est en principe limitée à 6 semaines mais l’ADEM peut prendre l’initiative de prolonger la mesure à 9 semaines pour les demandeurs d’emploi qui peuvent se prévaloir au moins de trois années d’études postsecondaires réussies pour permettre à cette catégorie de demandeurs de prouver leurs aptitudes à des tâches qui peuvent être d’une plus grande complexité.
Ces stages ne seront proposés qu’aux promoteurs pouvant offrir une réelle perspective d’emploi puisque le but principal de cette mesure est d’intégrer définitivement les demandeurs les plus vulnérables dans le marché de l’emploi.
C’est ainsi que le texte vise également à créer un incitatif fort pour favoriser l’embauche dès la fin du stage en remboursant à l’employeur 50% du salaire social minimum pour salariés non qualifiés pendant 12 mois à condition que le stage soit immédiatement suivi d’un contrat de travail à durée indéterminée. (…). »11 Certes le terme « immédiatement » peut se comprendre dans le sens des définitions lui conféré par le dictionnaire Larousse, à savoir : « Sans intermédiaire, de quelque ordre que ce soit (synonyme : directement) ; Sans intervalle dans l’espace ou dans le temps (synonyme : tout de suite). A l’instant même, sans délai, sur-le-champ ».
Or, nonobstant la terminologie employée, il ne faut pas perdre de vue l’ultime finalité recherchée par le législateur, soit la promotion et la réintégration sur le marché de travail de demandeurs d’emploi fragiles, dont ceux âgés de plus de 45 ans, cas de figure de l’espèce. La mise en œuvre du but législatif a requis la motivation du potentiel employeur de s’engager sur cette voie, ce par le biais d’aides à lui accorder, une fois le demandeur d’emploi embauché.
C’est cette considération d’encouragement qui a poussé le législateur à légiférer dans le sens du paragraphe (6).
Si par contre l’employeur qui, après avoir accepté l’admission du demandeur d’emploi dans le stage de professionnalisation, s’est effectivement engagé dans ce sens et a conclu, tel qu’en l’espèce, un contrat de travail à durée indéterminé tenant compte de la durée du stage par rapport à la période d’essai, se voit évincé de l’obtention des aides par la lecture stricte du paragraphe 11 cf. travaux parlementaires du projet de loi n° 6904, sous le commentaires des articles, p.7-8 ;
(6) telle que faite par l’Administration et telle que soutenue par la demanderesse en cassation, l’esprit de la loi ne s’avère pas respecté et le but législatif n’est pas atteint. Pour rappel, en l’occurrence l’employeur s’est vu refuser l’allocation de la prime, au motif que le contrat à durée indéterminée n’a pas été conclu « dès la fin du stage », mais trois jours après sa fin.
C’est le constat de la conclusion effective d’un contrat de travail à durée indéterminée à la suite d’un stage de professionnalisation qui autorise une appréciation in concreto de la demande d’obtention des aides prévues à l’article L.524-1, paragraphe (6), alinéa 2, et la recherche si la relation de travail est conclue dans un esprit de prolongation et de continuité auprès de l’employeur-demandeur des aides.
La motivation ci-avant reproduite du CSSS, en ce qu’elle est conforme à l’esprit de la loi, résiste dès lors aux arguments du demandeur en cassation.
Pour le surplus, et même si aux termes des travaux parlementaires l’on devait parvenir à la conclusion que le législateur ait voulu soumettre l’allocation des aides visées au paragraphe (6) à la condition de la conclusion d’un contrat de travail à durée indéterminé le lendemain de la fin du stage de professionnalisation, s’impose la réflexion suivante : soumettre l’obtention des aides à un embauchage se situant dans la continuation directe et sans interruption dudit stage, équivaut à sanctionner l’employeur par la déchéance du droit auxdites aides en cas de non-
respect de cette exigence.
Or, la sévérité d’une telle approche aurait requis le législateur, non seulement de clarifier par le choix de termes clairs et non ambigus que le contrat d’embauche doit prendre effet le lendemain de la fin du stage, mais également de prévoir et ancrer dans le texte de loi la sanction de la déchéance/forclusion de son droit en cas de non-respect. C’est seulement ainsi que l’employeur-
demandeur d’aides aurait été averti des conséquences à encourir en cas de non-obtempération aux exigences légales.
Il s’en dégage que le demandeur en obtention d’aides formulée à la suite d’un stage de professionnalisation et dans le respect des conditions prévues au paragraphe (6) alinéas 2 et 3 de l’article L.524-1 du Code du travail, même s’il n’a pas obtempéré à la conclusion du contrat de travail immédiatement dès la fin du stage, ne saurait être « puni » par la déchéance de son droit en l’absence de sanction prévue par la loi.
Si Votre Cour ne devait pas partager l’approche ci-avant esquissée, mais se rallier à la lecture stricte de la disposition légale telle que faite par le demandeur en cassation, les moyens sous examen seraient à déclarer fondés.
Le 3ème moyen de cassation :
Le troisième moyen est tiré de la violation légale, voire d'une application erronée, voire d'une fausse interprétation in specie de l’article L.524-1 paragraphe (6) du Code du travail, dans sa teneur actuelle, issu de la loi du 18 décembre 2015 portant modification du Code du travail, en ce que le CSSS a retenu qu’ « Un bref délai de 3 jours peut s’expliquer par des raisons administratives ou d’organisation interne de la société SOCIETE1.) sarl pour l’établissement des documents nécessaires pour l’engagement de PERSONNE1.), ce qui a pu prendre plus longtemps en période COVID. », de sorte que le CSSS a fait une mauvaise application et une mauvaise interprétation de l’article L.524-1 paragraphe (6) du Code du travail.
Sous le couvert de la violation de la disposition légale visée au moyen, celui-ci ne tend in fine qu’à remettre en discussion l’appréciation par les juges du fond des éléments factuels de la cause qui les ont conduits à dire que la conclusion du contrat de travail s’est faite dans un temps rapproché de la fin du stage, partant dès la fin du stage. Cette appréciation relevant de leur pouvoir souverain et échappant au contrôle de la Cour de cassation, le moyen ne saurait être accueilli.
Pour le surplus, il est renvoyé aux développements faits sous les 1er et 2ème moyens.
Conclusion :
Le pourvoi est recevable, mais à rejeter pour le surplus.
Luxembourg, le 30 mai 2024 Pour le Procureur général d’État le 1er avocat général Monique SCHMITZ 17