Tribunal administratif Numéro 52637 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2025:52637 Inscrit le 3 avril 2025 Le 9 avril 2025, Alexandra BOCHET, vice-président au tribunal administratif, siégeant en remplacement des président et magistrats plus anciens en rang, légitiment empêchés, assistée de Paulo ANICETO, greffier, a rendu le
JUGEMENT
sur la régularité d’une décision de prolongation de rétention administrative qui suit, au vu du dossier lui soumis :
Vu la requête du ministre des Affaires intérieures réceptionnée par le greffe du tribunal administratif le 3 avril 2025 et enrôlée sous le numéro 52637, tendant à la vérification de la régularité d’un arrêté du 26 mars 2025 ordonnant la prorogation du placement en rétention administrative de :
Monsieur (A), né le … à … (Algérie), de nationalité algérienne, avisé par télécopie ;
Maître Benoît MATHONNET, avocat, en remplacement de Maître Philippe STROESSER, avocat à la Cour, inscrits au tableau de l’ordre des avocats à Luxembourg, le dernier s’étant constitué et ayant déclaré occuper pour Monsieur (A), ainsi que Monsieur le délégué du gouvernement Jean-Paul REITER entendus en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 9 avril 2025.
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Vu les articles 120 (3) et 123 (6) de la loi modifiée du 29 août 2008 portant sur la libre circulation des personnes et l’immigration ;
Vu la décision de refus de protection internationale du 2 juillet 2024, prise par le ministre des Affaires intérieures, ci-après désigné par « le ministre », dans le cadre d’une procédure accélérée à l’encontre de Monsieur (A), et lui enjoignant de quitter le territoire dans un délai de trente jours ;
Vu l’arrêté du ministre du 28 novembre 2024, pris à l’encontre de Monsieur (A), lui interdisant l’entrée sur le territoire pour une durée de cinq ans, à partir de la sortie de l’Espace Schengen ;
Vu l’arrêté du ministre du 28 novembre 2024 ordonnant le placement en rétention de Monsieur (A) au Centre de rétention pour une durée d’un mois à partir de la notification de la décision ;
Vu l’arrêté du ministre du 23 décembre 2024 ordonnant la prorogation du placement en rétention de Monsieur (A) au Centre de rétention pour une durée supplémentaire d’un mois avec effet au 29 décembre 2024 ;
1Vu le jugement du tribunal administratif du 24 décembre 2024, inscrit sous le numéro 52117 du rôle, rejetant le recours contentieux introduit par Monsieur (A) contre la prédite décision ministérielle de rétention du 28 novembre 2024 ;
Vu le jugement du tribunal administratif du 21 janvier 2025, inscrit sous le numéro 52213 du rôle, rejetant le recours contentieux introduit par Monsieur (A) contre la prédite décision ministérielle de rétention du 23 décembre 2024 ;
Vu l’arrêté du ministre 27 janvier 2025 ordonnant la prorogation du placement en rétention de Monsieur (A) au Centre de rétention pour une durée supplémentaire d’un mois à partir de la notification ;
Vu le jugement du tribunal administratif du 19 février 2025, inscrit sous le numéro 52358 du rôle, rejetant le recours contentieux introduit par Monsieur (A) contre la prédite décision ministérielle de rétention du 27 janvier 2025 ;
Vu l’arrêté du ministre du 27 février 2025 ordonnant la prorogation du placement en rétention de Monsieur (A) au Centre de rétention pour une durée supplémentaire d’un mois à partir de la notification de la décision ;
Vu le jugement du tribunal administratif du 11 mars 2025, inscrit sous le numéro 52470 du rôle, rejetant le recours contentieux introduit par Monsieur (A) contre la prédite décision ministérielle du 27 février 2025 ;
Vu l’arrêté du ministre du 26 mars 2025 ordonnant la prorogation du placement en rétention de Monsieur (A) au Centre de rétention pour une durée supplémentaire d’un mois à partir de la notification de la décision ;
Vu la requête du ministre tendant à la vérification de la régularité du prédit arrêté du 26 mars 2025 ordonnant la prorogation du placement en rétention, réceptionnée par le greffe du tribunal administratif le 3 avril 2025, enrôlée sous le numéro 52637 ;
Vu le dossier administratif ;
Vu la convocation émise par le greffe du tribunal administratif le 3 avril 2025 convoquant les parties à l’audience publique du 9 avril 2025, notifiée en mains propres à Monsieur (A) en date du même jour.
Quant à la recevabilité de la requête :
Par requête déposée au greffe du tribunal administratif en date du 3 avril 2025 et enrôlée sous le numéro 52637, le ministre a saisi le président du tribunal administratif d’une demande tendant à la vérification de la régularité d’un arrêté ordonnant la 4ème prorogation du placement en rétention de Monsieur (A) au Centre de rétention pour une durée supplémentaire d’un mois à partir de la notification de la décision.
Conformément à l’article 123 (6) de la loi modifiée du 29 août 2008 sur la libre circulation des personnes et l’immigration, ci-après « la loi du 29 août 2008 », « Lorsque le ministre décide de prolonger la durée de rétention en vertu de l’article 120, paragraphe (3), 2alinéa 2, il doit saisir d’office, par requête introduite dans les cinq jours ouvrables de la notification de la décision, le président du Tribunal administratif qui statue d’urgence comme juge du fond et en tout cas dans les dix jours du dépôt de la requête, la personne retenue dûment convoquée par les soins du greffe ».
Il ressort du dossier administratif et des pièces versées en cause que Monsieur (A) s’est vu notifier en date du 28 mars 2025 un arrêté du ministre daté du 26 mars 2025 ordonnant la prorogation de son placement en rétention pour une durée supplémentaire d’un mois à partir de la notification de la décision.
La requête, introduite le 3 avril 2025 est partant à déclarer recevable pour avoir été introduite endéans cinq jours ouvrables conformément aux dispositions de l’article 123 (6) de la loi du 29 août 2008.
Quant à la procédure :
Conformément à l’article 121 (1) de la loi du 29 août 2008, « La notification des décisions visées à l’article 120 est effectuée par un membre de la Police grand-ducale qui a la qualité d’officier de police judiciaire. La notification est faite par écrit et contre récépissé, dans la langue dont il est raisonnable de supposer que l’étranger la comprend, sauf les cas d’impossibilité matérielle dûment constatés », ladite notification devant faire l’objet, conformément au paragraphe (2) de cette même disposition, d’un procès-verbal dressé par l’officier de police judiciaire qui y a procédé, mentionnant la date de la notification de la décision, la déclaration de la personne retenue qu’elle a été informée de ses droits mentionnés, ainsi que toute autre déclaration qu’elle désire faire acter, la langue dans laquelle la personne retenue fait ses déclarations, ledit procès-verbal devant soit être signé par la personne retenue, soit, en cas de refus de signature, devant mentionner le refus et les motifs du refus.
Conformément à l’article 122 (2) et (3) de la loi du 29 août 2008, « (2) La personne retenue est immédiatement informée, par écrit et contre récépissé, dans une langue dont il est raisonnable de supposer qu’elle la comprend, sauf les cas d’impossibilité matérielle dûment constatés, de son droit de prévenir sa famille ou toute personne de son choix. Un téléphone est mis à sa disposition à titre gratuit à cet effet. (3) La personne retenue est immédiatement informée, par écrit et contre récépissé, dans une langue dont il est raisonnable de supposer qu’elle la comprend, sauf les cas d’impossibilité matérielle dûment constatés, de son droit de se faire examiner dans les vingt-quatre heures de son placement en rétention, par un médecin et de choisir un avocat à la Cour d’un des barreaux établis au Grand-Duché de Luxembourg ou de se faire désigner un avocat par le bâtonnier de l’ordre des avocats de Luxembourg. Le mineur non accompagné d’un représentant légal se voit désigner, dans les meilleurs délais, un administrateur ad hoc ».
Il ressort du dossier administratif et des pièces versées en cause que la notification opérée en date du 28 mars 2025 l’a été conformément aux prescriptions légales, il se dégage encore du dossier administratif que la personne s’est régulièrement vu rappeler les droits qui lui sont reconnus pendant la période de rétention.
L’article 123 (6) de la loi du 29 août 2008 prévoit que le président s’assure que la personne retenue a été touchée par la convocation.
3Il résulte à cet égard des pièces versées en cause que Monsieur (A) s’est bien vu notifier en mains propres la convocation du 3 avril 2025 pour l’audience publique du 9 avril 2025.
Quant au fond :
L’article 120 (1) de la loi du 29 août 2008 prévoit ce qui suit : « Afin de préparer l’éloignement en application des articles 27, 30, 100, 111, 116 à 118, […] l’étranger peut, sur décision du ministre, être placé en rétention dans une structure fermée, à moins que d’autres mesures moins coercitives telles que prévues à l’article 125, paragraphe (1), ne puissent être efficacement appliquées.
Une décision de placement en rétention est prise contre l’étranger en particulier s’il existe un risque de fuite ou si la personne concernée évite ou empêche la préparation du retour ou de la procédure d’éloignement. […] ».
Par ailleurs, en vertu de l’article 120 (3) de la même loi : « La durée de la rétention est fixée à un mois. La rétention ne peut être maintenue qu’aussi longtemps que le dispositif d’éloignement est en cours et exécuté avec toute la diligence requise. Elle peut être reconduite par le ministre à trois reprises, chaque fois pour la durée d’un mois si les conditions énoncées au paragraphe (1) qui précède sont réunies et qu’il est nécessaire de garantir que l’éloignement puisse être mené à bien.
Si, malgré les efforts employés, il est probable que l’opération d’éloignement dure plus longtemps en raison du manque de coopération de l’étranger ou des retards subis pour obtenir de pays tiers les documents nécessaires, la durée de rétention peut être prolongée à deux reprises, à chaque fois pour un mois supplémentaire. ».
L’article 120 (1) de la loi du 29 août 2008 permet ainsi au ministre, afin de préparer l’exécution d’une mesure d’éloignement, de placer l’étranger concerné en rétention dans une structure fermée pour une durée maximale d’un mois, ceci plus particulièrement s’il existe un risque de fuite ou si la personne concernée évite ou empêche la préparation du retour ou de la procédure d’éloignement. En effet, la préparation de l’exécution d’une mesure d’éloignement nécessite notamment la mise à disposition de documents de voyage valables, lorsque l’intéressé ne dispose pas des documents requis pour permettre son éloignement et que des démarches doivent être entamées auprès d’autorités étrangères notamment en vue de l’obtention d’un accord de reprise en charge ou de réadmission de l’intéressé. Elle nécessite encore l’organisation matérielle du retour, en ce sens qu’un moyen de transport doit être choisi et que, le cas échéant, une escorte doit être organisée. C’est précisément afin de permettre à l’autorité compétente d’accomplir ces formalités que le législateur a prévu la possibilité de placer un étranger en situation irrégulière en rétention pour une durée maximale d’un mois, mesure qui peut être prorogée par la suite.
En vertu de l’article 120 (3) de la même loi, le maintien de la rétention est cependant conditionné par le fait que le dispositif d’éloignement soit en cours et soit exécuté avec toute la diligence requise, impliquant plus particulièrement que le ministre est dans l’obligation d’entreprendre toutes les démarches requises pour exécuter l’éloignement dans les meilleurs délais.
4Une mesure de placement peut être reconduite à trois reprises, chaque fois pour une durée d’un mois, si les conditions énoncées au paragraphe (1) de l’article 120, précité, sont réunies et s’il est nécessaire de garantir que l’éloignement puisse être mené à bien.
Une décision de prorogation d’un placement en rétention est partant en principe soumise à la réunion de trois conditions, à savoir que les conditions ayant justifié la décision de rétention initiale soient encore données, que le dispositif d’éloignement soit toujours en cours et que celui-ci soit toujours poursuivi avec la diligence requise.
Conformément à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’Homme1, il faut que l’éloignement de la personne retenue soit une perspective réaliste.
Enfin, en vertu de l’article 120 (3), in fine, de la même loi, si, malgré les efforts employés, il est probable que l’opération d’éloignement dure plus longtemps en raison du manque de coopération de l’étranger ou des retards subis pour obtenir de pays tiers les documents nécessaires, la durée de la rétention peut encore être prolongée à deux reprises, à chaque fois pour un mois supplémentaire.
En l’espèce, il résulte des éléments de la cause que la personne retenue se trouve toujours actuellement en séjour irrégulier sur le territoire luxembourgeois.
En effet, comme indiqué ci-avant, par décision du 2 juillet 2024, le ministre a rejeté la demande de protection internationale de la personne retenue dans le cadre d’une procédure accélérée et lui a ordonné de quitter le territoire luxembourgeois dans un délai de trente jours.
Il est constant en cause que cette décision n’a à ce jour pas été énervée et qu’elle doit être considérée comme coulée en autorité de chose décidée.
Ensuite, par un arrêté du 28 novembre 2024, le ministre a encore prononcé à l’encontre de Monsieur (A) une interdiction d’entrée sur le territoire luxembourgeois d’une durée de cinq ans, décision entretemps coulée en autorité de chose décidée.
Il est encore constant en cause que la personne retenue ne disposait, à la date de la prise de l’arrêté actuellement déféré, toujours pas d’autorisation de séjour valable pour une durée supérieure à trois mois, ni d’une autorisation de travail, de sorte qu’elle ne remplit pas les conditions énoncées à l’article 34 de la loi du 29 août 2008.
Il en résulte l’existence dans le chef de la personne retenue d’un risque de fuite, légalement présumé par l’article 111 (3), point c), numéro 1. de la loi du 29 août 2008, si l’étranger ne remplit pas ou plus les conditions de l’article 34 de la même loi, respectivement par le paragraphe (2), point 3. de la même disposition légale, si celui-ci fait l’objet d’une interdiction d’entrée sur le territoire, tel que cela est le cas de Monsieur (A).
Il s’ensuit que les conditions initiales ayant justifié que le ministre ait placé l’intéressé en rétention afin d’organiser son éloignement perdurent actuellement.
Cette conclusion n’est pas ébranlée par la simple affirmation du litismandataire de Monsieur (A) à l’audience des plaidoiries selon laquelle son mandant aurait toujours coopéré 1 CourEDH, 25 juin 2019, Al Husin c. Bosnie-Herzégovine (n° 2), req. n° 10112/16.
5avec les autorités ministérielles et qu’il n’aurait à aucun moment empêché la procédure d’éloignement, étant, en effet, relevé qu’un tel comportement n’est pas per se de nature à renverser la présomption de risque de fuite dans le chef de la personne retenue. Au contraire, l’affirmation du litismandataire de Monsieur (A) à l’audience des plaidoiries selon laquelle son mandant souhaiterait retourner volontairement en Allemagne est de nature à renforcer le constat fait ci-avant de l’existence d’un risque de fuite qui est présumé dans le chef de Monsieur (A), dans la mesure où le risque de fuite se définit comme le risque de se soustraire à sa mesure d’éloignement.
En ce qui concerne ensuite les diligences effectuées en vue de l’éloignement de la personne retenue, la soussignée relève, tout d’abord, qu’elle est uniquement saisie d’une requête tendant au contrôle d’office de la décision du ministre de proroger une 4ème fois la mesure de rétention de Monsieur (A), de sorte qu’elle lui appartient seulement d’examiner le bien-fondé de ladite décision en s’assurant qu’à l’heure actuelle le dispositif d’éloignement est toujours en cours et poursuivi avec la diligence nécessaire et que les conditions spécifiques à une telle 4ème prorogation, à savoir qu’il est probable que l’opération d’éloignement dure plus longtemps en raison du manque de coopération de l’étranger ou des retards subis pour obtenir de pays tiers les documents nécessaires, sont données, le tribunal étant appelé toutefois, le cas échéant, à relever d’office, sur la base des éléments du dossier portés à sa connaissance, tels que complétés ou éclairés lors de la procédure contradictoire devant lui, l’éventuel non-respect d’une condition de légalité qui n’a pas été invoquée par la personne concernée2.
À cette fin, l’autorité judiciaire statuant sur une demande de prolongation de rétention doit être en mesure de prendre en considération tant les éléments de fait et les preuves invoqués par l’autorité administrative ayant ordonné la rétention initiale que toute observation éventuelle du ressortissant concerné d’un pays tiers. En outre, elle doit être en mesure de rechercher tout autre élément pertinent pour sa décision au cas où elle le jugerait nécessaire. Il s’ensuit que les pouvoirs détenus par l’autorité judiciaire dans le cadre d’un contrôle ne peuvent, en aucun cas, être circonscrits aux seuls éléments présentés par l’autorité administrative concernée3.
Les dispositions de l’article 120 de la loi du 29 août 2008, citées ci-avant, sont à entrevoir, notamment, à l’aune de l’article 15 (4) de la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier, ci-après désignée par « la directive 2008/115 », aux termes duquel « Lorsqu’il apparaît qu’il n’existe plus de perspective raisonnable d’éloignement pour des considérations d’ordre juridique ou autres […] la personne concernée est immédiatement remise en liberté ».
Selon la Cour de Justice de l’Union européenne4, l’article 15 (4) de la directive 2008/115 doit être interprété en ce sens que seule une réelle perspective que l’éloignement puisse être mené à bien eu égard aux délais fixés aux paragraphes (5) et (6) de ce même article correspond à une perspective raisonnable d’éloignement et que cette dernière n’existe pas lorsqu’il paraît peu probable que l’intéressé soit accueilli dans un pays tiers eu égard auxdits délais. Afin de constater que l’État membre concerné a entrepris les efforts raisonnables pour réaliser l’opération d’éloignement et qu’il existe un manque de coopération de la part du 2 CJUE, grande chambre, 8 novembre 2022, Staatssecretaris van Justitie en Veiligheid contre C. et X., C-704/20 et C-39/21.
3 CJUE 5 juin 2014, Bashir Mohamed Ali Mahd, C-146/14 PPU, points 62 et 64.
4 CJUE, grande chambre, 30 novembre 2009, Said Shamilovich Kadzoev (Huchbarov), C-357/09 PPU.
6ressortissant concerné d’un pays tiers, un examen détaillé des éléments factuels relatifs à l’ensemble de la période de rétention initiale est nécessaire.
Il échet de prime abord de constater que dans le cadre des jugements précité des 24 décembre 2024, 21 janvier, 19 février et 11 mars 2025, le tribunal administratif a retenu que les démarches accomplies par les autorités luxembourgeoises à ces dates devaient être considérées comme étant suffisantes au regard des exigences de l’article 120 de la loi du 29 août 2008.
Quant aux diligences accomplies depuis lors, il résulte des pièces versées en cause que suite à un courrier du 28 février 2025, par lequel l’Unité de Garde et d’Appui Opérationnel (« UGAO ») fut chargée par le ministre d’organiser le départ de Monsieur (A) vers l’Algérie, un plan de vol pour le retour de celui vers ledit pays, et plus précisément vers Alger, a été établi par l’UGAO en date du 12 mars 2025, prévoyant son départ pour le 6 mai 2025, les autorités consulaires algériennes ayant auparavant, à savoir en date du 20 février 2025, informé le ministre qu’elles étaient disposées à délivrer un laissez-passer dans le chef de Monsieur (A), dûment identifié comme étant de nationalité algérienne.
Au vu de l’ensemble de ces éléments, la soussignée est amenée à conclure que les diligences ainsi déployées par l’autorité ministérielle luxembourgeoise doivent être considérées, dans les circonstances de l’espèce, comme suffisantes, de manière que dans ces conditions la nécessité requise au sens de l’article 120, paragraphe (3), de la loi du 29 août 2008 pour la prolongation de la mesure de rétention est vérifiée en l’espèce.
Dès lors, il convient, en l’état actuel du dossier, de retenir qu’à ce jour, l’éloignement du retenu demeure non seulement une perspective raisonnable au vu de la coopération des autorités algériennes, mais encore une perspective concrète au vu de la date visée du 6 mai 2025, tandis qu’il n’existe à l’heure actuelle pas d’élément permettant de conclure que l’éloignement vers l’Algérie ne puisse pas être mené à bien, la possibilité de retenir l’intéressé dans le cadre d’une mesure de placement expirant en tout état de cause seulement définitivement le 28 mai 2025.
Concernant finalement la possibilité d’application de mesures moins coercitives, les dispositions des articles 120 et 125 de la loi du 29 août 2008 sont à interpréter en ce sens qu’en vue de la préparation de l’exécution d’une mesure d’éloignement, les trois mesures moins coercitives énumérées à l’article 125 (1), à savoir l’obligation pour l’étranger de se présenter régulièrement auprès des services ministériels après remise de l’original du passeport et de tout document justificatif de son identité, l’assignation à résidence pour une durée maximale de six mois dans les lieux fixés par le ministre ou encore l’obligation pour l’étranger de déposer une garantie financière d’un montant de cinq mille euros, sont à considérer comme mesures proportionnées bénéficiant d’une priorité par rapport à une rétention pour autant qu’il soit satisfait aux deux exigences posées par ledit article 125 (1) pour considérer ces autres mesures moins coercitives comme suffisantes et que la rétention ne répond à l’exigence de proportionnalité et de subsidiarité que si aucune des autres mesures moins coercitives n’entre en compte au vu des circonstances du cas particulier.
L’article 125 (1) de la loi du 29 août 2008 prévoit plus particulièrement que le ministre peut prendre la décision d’appliquer, soit conjointement, soit séparément, les trois mesures moins coercitives y énumérées à l’égard d’un étranger pour lequel l’exécution de l’obligation de quitter le territoire, tout en demeurant une perspective raisonnable, est reportée pour des 7motifs techniques, à condition que l’intéressé présente des garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque de fuite tel que prévu à l’article 111 (3), de la même loi, tout en relevant qu’il s’agit d’une simple prérogative pour le ministre et qu’au vu de la présomption légale d’un risque de fuite dans le chef du concerné, celui-ci doit la renverser en justifiant notamment des garanties de représentation suffisantes propres à prévenir le risque de fuite.
En l’espèce, il se dégage du dossier administratif que les raisons avancées par la partie étatique pour justifier le recours à la mesure de rétention plus particulièrement en raison d’un risque de fuite dans le chef de Monsieur (A) résident dans l’absence dans son chef de tout document d’identité et de voyage valables et dans le défaut de celui-ci de pouvoir justifier d’une adresse légale au Luxembourg.
Or, en l’espèce, Monsieur (A) ne possède toujours aucun document d’identité et de voyage valables, propres à être remis aux services ministériels, tout comme il ne justifie toujours pas d’une adresse fixe et stable à laquelle il pourrait être considéré comme étant à la disposition des autorités luxembourgeoises pour les besoins de son éloignement et il n’a pas non plus présenté un quelconque autre élément permettant de retenir l’existence, dans son chef, de garanties de représentation suffisantes, au sens de l’article 125 (1) de la loi du 29 août 2008, nécessaires pour que le recours aux mesures moins contraignantes s’impose, de sorte qu’il ne remplit pas les conditions préalables afin de bénéficier d’une mesure moins coercitive.
Il suit de l’ensemble des considérations qui précèdent que l’arrêté ministériel du 26 mars 2025 ordonnant la prorogation de la mesure de placement en rétention de Monsieur (A) est à confirmer.
Par ces motifs, la soussignée, vice-président au tribunal administratif, statuant contradictoirement et en audience publique ;
déclare recevable la requête du ministre des Affaires intérieures tendant à la vérification de la régularité de la décision de prolongation de la rétention administrative ;
quant au fond, confirme l’arrêté ministériel du 26 mars 2025 ordonnant la prorogation de la mesure de placement en rétention de Monsieur (A).
Ainsi jugé et prononcé au tribunal administratif, date qu’en tête.
s. Paulo ANICETO s. Alexandra BOCHET 8