COUR D'APPEL D'ANGERS Chambre Sociale Numéro d'inscription au répertoire général : 10/ 00001.
Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire d'ANGERS, décision attaquée en date du 28 Novembre 2008 enregistrée sous le no 06/ 00592
ARRÊT DU 14 Décembre 2010
APPELANTE :
L'E. U. R. L. KLV CONSTRUCTIONS LE CHEILLON 49170 SAINT GEORGES SUR LOIRE
prise en la personne de M. lassine X... gérant, comparant en personne assisté de Maître RABUT, substituant Maître Gérard SULTAN, avocats au barreau d'ANGERS
INTIME :
Monsieur Idrissa X... ... 49220 PRUILLE
comparant en personne, assisté de Maître Joachim ESNAULT, avocat au barreau de NANTES
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 12 Octobre 2010, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Marie-Bernard BRETON, conseiller chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Marie-Bernard BRETON, président Madame Brigitte ARNAUD-PETIT, conseiller Madame Anne DUFAU, conseiller
Greffier, lors des débats : Madame LE GALL,
ARRÊT :
prononcé le 14 Décembre 2010, contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame BRETON, président, et par Madame LE GALL, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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EXPOSE DU LITIGE
Monsieur Idrissa X... a été embauché en qualité de technico commercial par l'EURL KLV constructions à compter du 15 mai 2006 sans qu'un contrat de travail ne soit signé entre eux ; par lettre du 20 septembre 2006, Idrissa X... a notifié sa démission à l'EURL KLV constructions en se déclarant disponible pour l'exécution du préavis.
Monsieur Idrissa X... a saisi le conseil de prud'hommes d'Angers d'une demande tendant à voir juger que sa prise d'acte de rupture du contrat de travail est justifiée et produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, condamner l'EURL KLV constructions à lui payer des rappels de salaires, une allocation spécifique pour privation partielle d'emploi, une indemnité de préavis, une indemnité pour licenciement irrégulier et des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Par jugement du 28 novembre 2008 le conseil de prud'hommes d'Angers a jugé que la démission de monsieur Idrissa X... s'analyse comme une prise d'acte de la rupture du contrat de travail produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, condamné l'EURL KLV constructions à payer à monsieur Idrissa X... les rappels de salaires sur juillet et septembre 2006 outre congés payés y afférents, une allocation spécifique de privation partielle d'emploi, une indemnité pour non respect de la procédure de licenciement et des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ainsi qu'une indemnité compensatrice de préavis, cela avec intérêts au taux légal à compter du 30 décembre 2006 sauf pour les dommages et intérêts dont les intérêts au taux légal courent à compter de la décision, condamné l'EURL KLV constructions à payer à monsieur Idrissa X... 1 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
L'EURL KLV constructions a formé appel contre ce jugement.
MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES
Par conclusions oralement soutenues à l'audience l'EURL KLV constructions demande à la cour, infirmant le jugement, de débouter monsieur Idrissa X... de ses demandes, de le condamner à lui rembourser 5 000 euros qu'elle lui avait prêtés, à lui payer 2 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
Elle souligne que la démission ne peut s'analyser comme une prise d'acte et produire les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse que s'il est démontré que la volonté du salarié de rompre était équivoque et fait valoir que la démission de monsieur Idrissa X... est faite sans réserves et sans qu'il soit justifié de réclamations ou revendications légitimes antérieures auxquelles son employeur n'aurait pas satisfait.
Par conclusions reprises oralement à l'audience monsieur Idrissa X... demande la confirmation du jugement sauf à porter le montant de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à 5 000 euros et l'indemnité pour non respect de la procédure à 1 616, 80 euros ; il demande à la cour de condamner l'EURL KLV constructions à lui remettre sous astreinte les bulletins de salaires, attestations ASSEDIC et certificat de travail régularisés et à lui payer 2 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
Il prétend que la prise d'acte de la rupture est fondée sur les manquements de l'employeur qui n'a jamais rédigé de contrat de travail, l'a prévenu début août que l'entreprise était fermée le 28 juillet, a exercé sur lui des pressions morales constitutives de harcèlement à la suite de son arrêt de maladie en août et ne lui a pas versé son salaire intégral en juillet 2006.
MOTIFS DE LA DECISION
Aucun contrat de travail n'ayant été régularisé par l'employeur, le conseil de prud'hommes d'Angers a relevé, à juste titre, que la relation de travail s'inscrivait dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée.
Il ressort des bulletins de salaires versés aux débats que le salaire prévu était de 1 217, 91 euros lors de l'embauche et a été porté à 1 616, 80 euros à compter de juillet 2006 ; l'attestation de madame C... n'établit pas l'intervention de monsieur Idrissa X... dans la rédaction du projet de contrat de travail dès lors qu'elle prétend avoir été abusée au téléphone par monsieur Idrissa X... qui se serait fait passer pour Lassiné X..., gérant de l'EURL KLV constructions, sans expliquer comment elle a pu se convaincre, par téléphone que son interlocuteur était le frère du gérant ; l'EURL KLV constructions ne peut sérieusement prétendre que le défaut de rédaction d'un contrat de travail est imputable au salarié.
Le montant du salaire à la somme de 1 616, 80 euros, contesté par l'EURL KLV constructions, comme n'étant que la conséquence de la supercherie de monsieur Idrissa X... auprès de la rédactrice du projet de contrat de travail, est démontré par la lettre du 28 juillet 2006 par laquelle l'EURL KLV constructions fait connaître à son salarié qu'elle ferme le jour même pour ne réouvrir que le 21 août et lui verse, par chèque, une somme de 1 500 euros en lui précisant que le solde de son salaire sera versé lors de la signature du contrat de travail ; il s'en déduit que l'employeur, maintenait monsieur Idrissa X... dans une situation de précarité au regard de la signature de son contrat de travail, de la perception de son salaire, de l'effectivité de son emploi, sans qu'il bénéficie d'aucun délai de prévenance, provoquant chez celui-ci une instabilité psychologique source d'un syndrome dépressif relevé par le certificat médical du 17 août 2006.
En l'état de ces circonstances, antérieures à la lettre par laquelle monsieur Idrissa X... notifie sa démission, la volonté de démissionner de monsieur Idrissa X... n'apparaît pas être la manifestation claire et non équivoque de sa volonté de mettre fin au contrat de travail mais être la manifestation d'impuissance face à l'absence de prise en compte de ses demandes par son employeur ; c'est donc à bon droit que le conseil de prud'hommes d'Angers l'a analysée comme une prise d'acte de la rupture du contrat de travail et lui a fait produire les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Sur le rappel de salaires, il ressort du bulletin de salaire du mois de juillet 2006 que la rémunération mensuelle de monsieur Idrissa X... était de 1 828, 34 euros ; le jugement du Conseil de Prud'hommes doit être confirmé en ce qu'il a fait droit à la demande de rappel de salaires et des congés payés y afférents.
La demande relative à l'allocation spécifique de privation partielle d'emploi n'est pas contestée.
En ce qui concerne l'indemnité compensatrice de préavis il apparaît que monsieur Idrissa X..., s'est présenté dans l'entreprise pour effectuer son préavis, que sans contester ce fait, l'EURL KLV constructions se borne à prétendre qu'elle ne lui a pas interdit l'accès dans l'entreprise par écrit, ce qui autorise à considérer qu'elle lui en a interdit l'accès oralement ainsi qu'il est indiqué par monsieur Idrissa X... ; ce travail doit être rémunéré.
Les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ont été justement estimés par le Conseil de Prud'hommes s'agissant d'un contrat de travail de quelques semaines.
L'indemnité pour inobservation de la procédure de licenciement prévue par l ‘ article L 1235-2 du code du travail a été justement appréciée par le conseil de prud'hommes.
Les raisons de la remise de la somme de 5 000 euros par l'EURL KLV constructions au profit de Sylvie E... et monsieur Idrissa X... ne sont pas établies par l'attestation de monsieur F... qui n'a pas été témoin de cette remise, ni par les documents bancaires versés aux débats ; il n'est pas démontré qu'elle a été remise dans le cadre de l'exécution du
contrat de travail, madame E... n'étant pas salariée de l'EURL KLV constructions ; c'est donc à bon droit que le Conseil de Prud'hommes a débouté l'EURL KLV constructions de sa demande reconventionnelle en remboursement de cette somme.
Il n'y a pas lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
L'EURL KLV constructions supportera les dépens d'appel.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Statuant publiquement, par arrêt contradictoire,
CONFIRME le jugement en toutes ses dispositions,
DIT n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNE l'EURL KLV constructions aux dépens d'appel.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
Sylvie LE GALLMarie-Bernard BRETON