Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du
2 mai 2019 par lequel le préfet du Morbihan a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être reconduite d'office.
Par un jugement n° 1905183 du 27 décembre 2019, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 1er février 2020 Mme A..., représentée par Me D..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 27 décembre 2019 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Morbihan du 2 mai 2019 ;
3°) d'enjoindre au préfet du Morbihan de lui délivrer un titre de séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'arrêté contesté n'est pas suffisamment motivé ;
- dès lors que ses enfants et petits-enfants vivent en France, cet arrêté porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, protégé par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le préfet du Morbihan a méconnu les dispositions des 6°, 7° et 11° de l'article
L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, les stipulations des articles 3-1 et 9 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant et celles de l'article 11 de la convention franco-congolaise du 31 juillet 1993 relative à la circulation et au séjour des personnes ;
- il a entaché l'arrêté contesté d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;
- l'obligation de quitter le territoire français est privée de base légale en raison de l'illégalité du refus de délivrance d'un titre de séjour.
Par un mémoire en défense enregistré le 31 juillet 2020 le préfet du Morbihan conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par Mme A... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- la convention franco-congolaise relative à la circulation et au séjour des personnes, signée le 31 juillet 1993 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. C... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme A..., ressortissante congolaise (République du Congo), née le 19 mai 1958, est entrée régulièrement en France le 24 décembre 2015. Elle a obtenu un titre de séjour provisoire en raison de son état de santé, valable du 28 février au 27 août 2017, qui n'a pas été renouvelé. Elle a demandé en 2018 un nouveau titre de séjour en qualité d'étranger malade. Par un arrêté du 2 mai 2019 le préfet du Morbihan a rejeté sa demande, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être renvoyée d'office. Mme A... relève appel du jugement du 27 décembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté son recours tendant à l'annulation de cet arrêté.
2. En premier lieu, il convient d'écarter le moyen tiré de l'insuffisante motivation de l'arrêté contesté par adoption des motifs retenus par les premiers juges.
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. (...) La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. ".
4. Le préfet du Morbihan a pris l'arrêté contesté en s'appuyant sur un avis du collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) du
9 avril 2018 selon lequel l'état de santé de Mme A... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, mais qu'elle peut effectivement bénéficier d'un traitement approprié en République du Congo et est en état de voyager vers ce pays. Mme A... ne produisant aucun document susceptible d'infirmer la pertinence de cet avis, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions rappelées au point précédent doit être écarté.
5. En troisième lieu, Mme A..., ne peut utilement se prévaloir des dispositions du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui prévoient la délivrance de plein droit d'une carte de séjour temporaire aux parents d'un enfant français mineur, dès lors qu'elle n'a pas demandé de titre de séjour sur ce fondement et que le préfet du Morbihan n'a pas examiné son éventuel droit au séjour à ce titre. Au surplus, et en tout état de cause, elle n'est pas la mère d'un enfant français mineur.
6. En quatrième lieu, aux termes de l'article 11 de la convention franco-congolaise du 31 juillet 1993 relative à la circulation et au séjour des personnes : " Après trois années de résidence régulière et non interrompue, les ressortissants de chacune des Parties contractantes établis sur le territoire de l'autre Partie peuvent obtenir un titre de séjour de longue durée, dans les conditions prévues par la législation de l'État d'accueil. Ce titre de séjour est renouvelable de plein droit. ".
7. Mme A... n'ayant, depuis son entrée en France, obtenu qu'un seul titre de séjour d'une durée de six mois, elle n'est pas fondée à soulever le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées.
8. En cinquième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ; (...) ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
9. Il ressort des pièces du dossier que Mme A... a en France un fils majeur qui possède la nationalité française et une fille congolaise en situation régulière, chez laquelle elle réside, ainsi que plusieurs petits-enfants. Toutefois, si elle affirme, sans d'ailleurs le justifier, que son mari est décédé en 2012, elle ne produit aucun document permettant d'établir qu'elle n'a pas d'autres attaches familiales et privées en République du Congo, pays où elle a vécu jusqu'à l'âge de 57 ans. En outre, elle ne résidait en France que depuis trois ans environ à la date de l'arrêté contesté et ne justifie d'aucun effort d'intégration particulier dans ce pays. Dans ces conditions, et alors que rien ne s'oppose à ce que sa famille résidant en France continue de lui apporter en République du Congo l'aide matérielle dont elle soutient avoir besoin, l'arrêté contesté n'a pas porté à son droit au respect de la vie privée et familiale une atteinte disproportionnée, contraire aux dispositions et aux stipulations rappelées au point précédent.
10. En sixième lieu, aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions concernant les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.
11. Mme A... ne produit aucun élément de nature à établir que l'arrêté contesté porterait une quelconque atteinte à l'intérêt supérieur de ses petits-enfants mineurs. Elle n'est donc pas fondée à invoquer la violation des stipulations précitées.
12. En septième lieu, Mme A... ne peut utilement soulever la méconnaissance des stipulations de l'article 9 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, qui ne s'appliquent pas aux grands-parents.
13. En huitième lieu, pour les raisons exposées aux points précédents, l'arrêté contesté n'est pas entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de Mme A....
14. En dernier lieu, le refus de délivrance d'un titre de séjour opposé à Mme A... n'étant pas illégal, le moyen tiré de ce que la mesure d'éloignement contestée serait privée de base légale ne peut qu'être écarté.
15. Il résulte de ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et au ministre de l'intérieur.
Copie sera adressée au préfet du Morbihan.
Délibéré après l'audience du 5 novembre 2020, à laquelle siégeaient :
- Mme Brisson, président-assesseur,
- M. C..., premier conseiller,
- Mme Le Barbier, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 20 novembre 2020.
Le rapporteur
E. C...Le président
C. Brisson
Le greffier
R. Mageau
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N°20NT00359