LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu selon l'arrêt attaqué, rendu sur renvoi après cassation (2ème Civ. 17 octobre 2013, n° 12-23.074), qu'un jugement rendu par un tribunal de commerce a condamné, d'une part, la société ITT, à verser une certaine somme à la société Atral et à la compagie AXA France IARD, et d'autre part, la société Haftpflichtverband der Deutschen Industrie Versicherungsverein auf gegenseitigkeit (la société HDI) à garantir la société ITT des condamnations prononcées à son encontre ; que la société Micronas Gmbh venant aux droits de la société ITT a saisi un juge de l'exécution afin qu'il constate le caractère non avenu de ce jugement ;
Sur le premier moyen, pris en sa première branche, du pourvoi principal et le moyen unique, pris en sa première branche, du pourvoi incident :
Vu l'article L. 213-6 du code de l'organisation judiciaire ;
Attendu qu'il résulte de ce texte que le juge de l'exécution n'a pas le pouvoir de prononcer l'annulation d'une décision de justice ;
Attendu que pour prononcer l'annulation du jugement du tribunal de commerce, l'arrêt retient que certaines des parties n'ont pas été valablement citées devant cette juridiction ;
Qu'en statuant ainsi, alors que, saisie du recours formé à l'encontre du jugement d'un juge de l'exécution, elle n'avait pas le pouvoir de réformer ou d'annuler une autre décision de justice, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Et sur le premier moyen, pris en sa deuxième branche, du pourvoi principal et le moyen unique, pris en sa deuxième branche, du pourvoi incident :
Vu l'article 5 du code de procédure civile ;
Attendu selon ce texte, que le juge doit se prononcer sur tout ce qui est demandé et seulement sur ce qui est demandé ;
Attendu que pour prononcer l'annulation du jugement du tribunal de commerce, l'arrêt retient qu'à défaut de saisine régulière de ce tribunal, le jugement qui en est résulté ne l'est pas davantage, de sorte que la qualification de cette décision n'est plus le coeur du litige ;
Qu'en statuant ainsi alors qu'elle était uniquement saisie d'une demande tendant à voir constater le caractère non avenu du jugement d'un tribunal de commerce, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi principal et du pourvoi incident :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 8 septembre 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Chambéry ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Grenoble ;
Condamne les sociétés Micronas GmbH et HDI aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes des sociétés Micronas GmbH et HDI ; condamne les sociétés Micronas GmbH et HDI à payer une somme globale de 3 000 euros aux sociétés Hager Security et Atral System, ainsi qu'une somme globale de 1 500 euros à la société Axa France IARD ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit septembre deux mille dix-sept.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits au pourvoi principal par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils, pour les sociétés Hager Security et la société Atral system
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir annulé le jugement du tribunal de commerce de Grenoble du 7 décembre 2007, condamné la société Hager Security à rembourser à HDI les sommes de 213 227,36 € et 9 070,51 € avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision et condamné la même société à indemniser la société HDI de la somme de 6 139,57 € au titre des frais avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision,
AUX MOTIFS QUE selon l'article 478 du code de procédure civile, le jugement rendu par défaut ou le jugement réputé contradictoire, au seul motif qu'il est susceptible d'appel est non avenu s'il n'a pas été notifié dans les six mois de sa date ; qu'en l'espèce, le jugement du tribunal de commerce de Grenoble en date du 7 décembre 2007, modifié le 1er août 2008, cela n'est pas contesté, n'a été notifié que par acte du 4 mars 2009, soit au-delà du délai de six mois ; qu'une erreur dans la qualification d'une décision de justice ne doit pas priver le justiciable de son recours, qu'il lui appartient donc de la vérifier, d'exercer toute voie de recours adaptée et l'on ne peut lui opposer l'autorité de chose jugée car, précisément, cette qualification n'en est pas assortie, ce, afin de lui permettre de faire valoir ses droits dans un procès auquel il a été défaillant sans être personnellement informé de l'existence du procès ; que la même vigilance doit exister quant à la validité de la convocation ; qu' à ce titre, l'arrêt avant dire droit du 2 juin 2015 a invité les parties à présenter leurs observations sur certains documents en langue allemande et sur les conséquences juridiques à tirer d'une convocation par voie postale ; qu'il est démontré que la citation à la société ITT n'a pas été diligentée et que seul un avis de réception postal, en date du 10 juillet 2000, a été produit, qui fait suite à un courrier adressé par la SCP X... Y..., huissier de justice à Crolles, directement à la société ITT sur lequel figure la signature d'un représentant de cette société, élément qui n'a pas été remis en cause dans son authenticité ; que la société Micronas affirme sur le plan textuel que le traité de ratification allemand en date du 21 juin 1979 n'autorisait pas cette voie de citation ; qu'il est exact, selon la Convention de la Haye en date du 15 novembre 1965 dont l'application est revendiquée par la société Micronas, convention destinée à améliorer et simplifier la transmission à l'étranger d'actes judiciaires et extra judiciaires, que des modalités de signification par agent consulaire ou diplomatique ou par voie postale pouvaient être envisagées sauf si l'Etat de destination déclarait s'y opposer ; qu'or, tel a été le cas de l'Allemagne, laquelle dans l'article 4 de sa déclaration d'adhésion en date du 21 juin 1979, s'est opposée, sur le fondement de l'article 21 de la convention de La Haye, à la signification par voie postale ; que, dès lors, la saisine judiciaire n'est pas valide et le jugement qui en résulte ne l'est pas davantage, de sorte que la qualification de la décision du tribunal de commerce n'est plus le coeur du litige, pour conduire la cour à constater la nullité du jugement prononcé par le tribunal de commerce ; que l'autorité de chose jugée ne peut lier une partie non valablement citée ;
1) ALORS QU'excède ses pouvoirs le juge de l'exécution qui prononce la nullité du jugement qui lui est soumis ; qu'en annulant le jugement du tribunal de commerce de Grenoble du 7 décembre 2007 et, en conséquence, les condamnations qu'il avait prononcées, la cour d'appel, saisie de la seule décision du juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Grenoble, a excédé ses pouvoirs, en violation de l'article L 213-6 du code de l'organisation judiciaire, ensemble l'article 12 du code de procédure civile ;
2) ALORS QUE dans leurs conclusions, les sociétés Micronas Gmbh et Haftplichtverband der deutschen Industrie Versicherungsverein auf Gegenseitigkeit ont demandé à la cour d'appel, non pas de prononcer la nullité du jugement du tribunal de commerce de Grenoble en date du 7 décembre 2007, mais, « sur le fondement de l'article 478 du code de procédure civile », de « dire que le jugement du tribunal de commerce de Grenoble du 7 décembre 2007 et donc les condamnations qu'il a prononcées, est caduc, car il n'a pas été signifié dans les six mois de son prononcé » ; qu'en annulant cependant ledit jugement et, en conséquence, les condamnations qu'il avait prononcées, la cour d'appel a statué sur une demande qui ne lui était pas soumise, en violation de l'article 5 du code de procédure civile ;
3) ALORS QUE le juge ne peut fonder sa décision sur les moyens de droit qu'il a soulevé d'office sans avoir préalablement invité les parties à présenter leurs observations ; qu'en se fondant, pour annuler le jugement du tribunal de commerce de Grenoble du 7 décembre 2007 et, en conséquence, les condamnations qu'il avait prononcées, sur le moyen relevé d'office de ce que l'absence de convocation valable du défendeur avait pour conséquence l'absence de validité de la saisine judiciaire et du jugement qui en résultait, la cour d'appel a, en tout état de cause, violé l'article 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l'homme, ensemble l'article 16 du code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
, (subsidiaire)Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir annulé le jugement du tribunal de commerce de Grenoble du 7 décembre 2007 et donc les condamnations qu'il a prononcées, condamné la société Hager Security à rembourser au HDI les sommes de 213 227,36 € et 9 070,51 € avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision et condamné la même société à indemniser le HDI de la somme de 6 139,57 € au titre des frais avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision,
AUX MOTIFS QUE la société Micronas GmbH et la HDI Haftplichtverband der Deutschen Industrie Versicherungsverein auf Gegenseitigkeit ont conclu devant la cour pour que soient tirées les conséquences du paiement non fondé des sommes allouées par le tribunal de commerce ; que cette prétention au fond permet de faire jouer l'effet dévolutif devant la cour d'appel ; que ces sommes, 213 227,36 € payées le 30 août 2008 et 9 070,51 € ont été versées spontanément sous la menace de plus en plus pressante d'une mesure d'exécution ; que le bien-fondé de la demande en restitution ne résultant que de la présente procédure, dès lors, les intérêts sur les sommes à restituer ne seront alloués qu'à partir de la présente décision qui consacre le bien-fondé de la réclamation et ouvre droit à restitution ; que la société HDI invoque également le dommage qu'elle a subi à cause de l'exécution de cette décision, en ajoutant des frais de tribunal et des frais d'avocat pour un montant de 9 070,51 € acquittée le 5 mars 2013 ; qu'il sera fait droit de ce chef ;
1) ALORS QUE la cour d'appel a constaté que le tribunal de commerce de Grenoble, avait, par jugement du 7 décembre 2007, condamné la société ITT, aujourd'hui société Micronas GmbH, à payer à la société Atral, devenue Hager Security, les sommes de 139 720€ et 11 474 € et condamné la compagnie HDI à garantir la société ITT de toutes les condamnations prononcées à son encontre ; qu'en se bornant, pour condamner la société Hager Securityà « rembourser » au HDI les sommes, en principal, de 213 227,36 € et 9 070,51 €, à affirmer, sans autre motivation, que « ces sommes, 213 227,36 € payées le 30 août 2008 et 9 070,51 € ont été versées spontanément sous la menace de plus en plus pressante d'une mesure d'exécution », quand le jugement annulé, visant, de surcroît, des montants différents, n'emportait pas condamnation de la société HDI au bénéfice de la société Hager Security, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article L 213-6 du code de l'organisation judiciaire ;
2) ALORS QUE le juge de l'exécution n'est compétent pour connaître que les contestations qui s'élèvent à l'occasion de l'exécution forcée d'un titre exécutoire ; que la cour d'appel a constaté que la société HDI, qui n'avait fait l'objet d'aucune condamnation au profit de la société Hager Security, avait « spontanément », sous la menace de plus en plus pressante d'une mesure d'exécution en Allemagne, versé à cette dernière les sommes de 213 227,36 € et 9 070,51 € ; qu'en condamnant néanmoins la société Hager Security à « rembourser » au HDI les sommes, en principal, de 213 227,36 € et 9 070,51 €, outre la somme de 6 139,57 € au titre des frais, la cour d'appel n'a pas déduit les conséquences légales de ses constatations, en violation de l'article L 213-6 du code de l'organisation judiciaire.
Moyen produit au pourvoi incident par la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat aux Conseils, pour la société Axa France IARD
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir annulé le jugement du tribunal de commerce de Grenoble du 7 décembre 2007 qui avait notamment condamné la société ITT, aux droits de laquelle vient la société MICRONAS, garantie par la compagnie HDI, à verser à la compagnie AXA la somme de 2.500 € de dommages-intérêts pour résistance abusive et celle de 15.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;
AUX MOTIFS QUE « selon l'article 478 du code de procédure civile, le jugement rendu par défaut ou le jugement réputé contradictoire, au seul motif qu'il est susceptible d'appel est non avenu s'il n'a pas été notifié dans les six mois de sa date ; qu'en l'espèce, le jugement du tribunal de commerce de Grenoble en date du 7 décembre 2007, modifié le 1er août 2008, cela n'est pas contesté, n'a été notifié que par acte du 4 mars 2009, soit au-delà du délai de six mois ; qu'une erreur dans la qualification d'une décision de justice ne doit pas priver le justiciable de son recours, qu'il lui appartient donc de la vérifier, d'exercer toute voie de recours adaptée et l'on ne peut lui opposer l'autorité de chose jugée car, précisément, cette qualification n'en est pas assortie, ce, afin de lui permettre de faire valoir ses droits dans un procès auquel il a été défaillant sans être personnellement informé de l'existence du procès ; que la même vigilance doit exister quant à la validité de la convocation ; qu' à ce titre, l'arrêt avant dire droit du 2 juin 2015 a invité les parties à présenter leurs observations sur certains documents en langue allemande et sur les conséquences juridiques à tirer d'une convocation par voie postale ; qu'il est démontré que la citation à la société ITT n'a pas été diligentée et que seul un avis de réception postal, en date du 10 juillet 2000, a été produit, qui fait suite à un courrier adressé par la SCP X... Y..., huissier de justice à Crolles, directement à la société ITT sur lequel figure la signature d'un représentant de cette société, élément qui n'a pas été remis en cause dans son authenticité ; que la société Micronas affirme sur le plan textuel que le traité de ratification allemand en date du 21 juin 1979 n'autorisait pas cette voie de citation ; qu'il est exact, selon la Convention de la Haye en date du 15 novembre 1965 dont l'application est revendiquée par la société Micronas, convention destinée à améliorer et simplifier la transmission à l'étranger d'actes judiciaires et extra judiciaires, que des modalités de signification par agent consulaire ou diplomatique ou par voie postale pouvaient être envisagées sauf si l'Etat de destination déclarait s'y opposer ; qu'or, tel a été le cas de l'Allemagne, laquelle dans l'article 4 de sa déclaration d'adhésion en date du 21 juin 1979, s'est opposée, sur le fondement de l'article 21 de la convention de La Haye, à la signification par voie postale ; que, dès lors, la saisine judiciaire n'est pas valide et le jugement qui en résulte ne l'est pas davantage, de sorte que la qualification de la décision du tribunal de commerce n'est plus le coeur du litige, pour conduire la cour à constater la nullité du jugement prononcé par le tribunal de commerce ; que l'autorité de chose jugée ne peut lier une partie non valablement citée » ;
ALORS, D'UNE PART, QU' excède ses pouvoirs le juge de l'exécution qui prononce la nullité du jugement qui lui est soumis ; qu'en annulant le jugement du tribunal de commerce de Grenoble du 7 décembre 2007 et, en conséquence, les condamnations qu'il avait prononcées, la cour d'appel, saisie de la seule décision du juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Grenoble, a excédé ses pouvoirs, en violation de l'article L 213-6 du code de l'organisation judiciaire, ensemble l'article 12 du code de procédure civile ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE dans leurs conclusions, les sociétés Micronas Gmbh et Haftplichtverband der deutschen Industrie Versicherungsverein auf Gegenseitigkeit ont demandé à la cour d'appel, non pas de prononcer la nullité du jugement du tribunal de commerce de Grenoble en date du 7 décembre 2007, mais, « sur le fondement de l'article 478 du code de procédure civile », de « dire que le jugement du tribunal de commerce de Grenoble du 7 décembre 2007 et donc les condamnations qu'il a prononcées, est caduc, car il n'a pas été signifié dans les six mois de son prononcé » ; qu'en annulant cependant ledit jugement et, en conséquence, les condamnations qu'il avait prononcées, la cour d'appel a statué sur une demande qui ne lui était pas soumise, en violation de l'article 5 du code de procédure civile ;
ALORS, DE TROISIEME PART, QUE le juge ne peut fonder sa décision sur les moyens de droit qu'il a soulevé d'office sans avoir préalablement invité les parties à présenter leurs observations ; qu'en se fondant, pour annuler le jugement du tribunal de commerce de Grenoble du 7 décembre 2007 et, en conséquence, les condamnations qu'il avait prononcées, sur le moyen relevé d'office de ce que l'absence de convocation valable du défendeur avait pour conséquence l'absence de validité de la saisine judiciaire et du jugement qui en résultait, la cour d'appel a, en tout état de cause, violé l'article 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l'homme, ensemble l'article 16 du code de procédure civile ;