Vu la requête enregistrée le 15 avril 2011, présentée pour la compagnie Maaf assurances, dont le siège est à Niort (79081) Cedex 9, et la sarl mce Perchalec, dont le siège est 5 rue Laplace, ZI du Phare à Mérignac (33700), par Me Bayle, avocat ;
La compagnie Maaf assurances et la sarl mce Perchalec demandent à la cour :
1°) de réformer partiellement le jugement n° 0600377 du 10 février 2011 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a condamné la sarl mce Perchalec à réparer les conséquences des dégâts des eaux à hauteur de 253 195, 84 euros, et à garantir l'agence Quintanilla-Turcey et M. X à hauteur de 45% des condamnations prononcées à leur encontre ;
2°) de débouter la commune de Bordeaux de sa demande de condamnation solidaire de l'ensemble des intervenants à l'acte de construire, de dire que sa responsabilité ne peut excéder 5%, telle que chiffrée par l'expert judiciaire ;
3°) de condamner les succombants à lui verser la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code civil ;
Vu le code des marchés publics ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 30 octobre 2012 :
- le rapport de M. Jean-Emmanuel Richard, premier conseiller ;
- les conclusions de M. Pierre Bentolila, rapporteur public ;
- les observations de Me Parrot, avocat de la compagnie Maaf assurances et de la societe Mce Perchalec, de Me Cazcarra, avocat de la commune de Bordeaux, de Me Rooryck, avocat de l'agence Quintanilla Turcey et de M. Jacques X, de Me Eyquem-Barrière, avocat de la société aie Thermique, de la société Coskun et de la compagnie Axa France iard, de Me Coronat, avocat de la selearl Malmezat Pra et de la société Castel et Fromaget, et de Me Venin, avocat de la société Scop Sopcz..
Vu, enregistrée le 9 novembre 2012, la note en délibéré présentée pour la société Castel et Fromaget ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
1- Considérant qu'il résulte de l'instruction que le jugement attaqué est entaché d'une contradiction entre ses motifs et son dispositif, dès lors qu'en ce qui concerne les désordres afférents aux infiltrations, les motifs du jugement retiennent que les architectes et la selarl Malmezat Prat, liquidateur des établissements Laffitte sont condamnés à garantir la société Percharmec à hauteur de 95 %, sans que cette proportion soit reprise dans le dispositif, qui dans son article 7 dispose seulement que " La selearl Malmezat-Prat, prise en qualité de liquidateur des établissements JP Lafitte, et la sarl mce Perchalec garantiront l'agence Quintanilla-Turcey et M. X à hauteur de 45 % de la condamnation " ; que, dans ces conditions, il y a lieu d'annuler partiellement ledit jugement, en tant qu'il a statué sur les désordres affectant les salles d'eau, et d'évoquer dans cette mesure les conclusions présentées par la commune de Bordeaux devant le tribunal administratif ;
Au fond :
En ce qui concerne les salles d'eau :
S'agissant de la responsabilité des constructeurs :
2- Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport de l'expert, que les infiltrations constatées dans les salles d'eau du bâtiment sont liées à des défauts d'étanchéité aux points sensibles, au niveau des seuils et des raccords aux vidanges ; que les douches sont utilisées portes ouvertes du fait de l'absence d'éclairage ; que ces désordres révèlent à la fois un vice de conception, le procédé choisi étant inadapté à la destination des lieux, et un vice de construction et de suivi d'exécution, du fait de l'insuffisance des soins apportés pour réduire les infiltrations au niveau des seuils, des protections sur relevés de plinthes, des jonctions d'angles de murs au droit des relevés de plinthes et du fait de l'existence de contre-pentes ; que, dès lors, la commune de Bordeaux est fondée à demander la condamnation solidaire de l'agence Quintanilla-Turcey et de M. X, architectes, ainsi que de la sarl Mce Perchalec et des établissements Lafitte, respectivement titulaires des lots numéros 6 " menuiseries intérieures bois " et 9 " revêtements de sols " ; qu'en revanche, il n'y a pas lieu de retenir la responsabilité du cabinet Piquet, dont la mission d'ordonnancement pilotage coordination est purement administrative ; qu'il résulte également de l'instruction que le maître de l'ouvrage n'a pas appelé l'exploitant à mettre un terme à l'utilisation impropre des locaux, qui a entraîné des phénomènes aggravants des désordres, tels que, notamment, l'obstruction de grilles de ventilation ou la condamnation de certaines fenêtres ; que l'absence de ventilation et de renouvellement d'air dans les chambres, lié au fonctionnement défectueux du système de ventilation mécanique contrôlée (VMC), auquel il n'a été remédié que le 16 décembre 2006, a eu pour conséquence une saturation des chambres en humidité ; que les constructeurs dont la condamnation est demandée par la commune de Bordeaux doivent voir leur responsabilité atténuée par les circonstances susmentionnées, dont il sera fait une juste évaluation en laissant à la charge de la commune de Bordeaux une part de responsabilité, égale à 10 % du coût des réparations, dans la survenance des désordres susmentionnés ;
S'agissant de la réparation des préjudices :
3- Considérant, en premier lieu, que le montant du préjudice dont le maître d'ouvrage est fondé à demander la réparation aux constructeurs à raison des désordres affectant l'immeuble qu' ils ont réalisé, correspond aux frais qu'il doit engager pour les travaux de réfection ; que ces frais comprennent, en règle générale, la taxe sur la valeur ajoutée (TVA), élément indissociable du coût des travaux, à moins que le maître d'ouvrage ne relève d'un régime fiscal lui permettant normalement de déduire tout ou partie de cette taxe de celle qu'il a perçue à raison de ses propres opérations ; qu'en l'espèce, il n'est ni établi ni même allégué que le maître d'ouvrage relèverait d'un régime fiscal spécifique ; qu'aux sommes dont la commune de Bordeaux est fondée à demander réparation aux constructeurs, doit s'ajouter une TVA au taux normal de 19,6 % ;
4- Considérant, en second lieu, qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport de l'expert, que le coût des travaux de réfection des 28 chambres endommagées par les dégâts des eaux susmentionnés s'élève à la somme de 212 338,43 euros toutes taxes comprises ; qu'à cette somme doit s'ajouter celle liée à la remise en état des circulations et des sanitaires, pour un montant de 28 113,47 euros ttc ; qu'en ajoutant 5 % de ces montants au titre des aléas et 12 % au titre de la maîtrise d'oeuvre et des bureaux de contrôle, le montant total de la réparation s'élève, pour ce chef de préjudice, à la somme totale de 281 328,72 euros ttc ; que 10 % de cette somme devant, ainsi qu'il a été dit, être laissé à la charge de la commune de Bordeaux, cette collectivité est fondée à demander la condamnation solidaire de l'agence Quintanilla-Turcey et de M. X, architectes, de la selearl Malmezat-Prat, ès-qualités de liquidateur des établissements JP Lafitte, et de la sarl mce Perchalec à lui verser 90 % du montant des réparations, soit 253 195,84 euros ttc ; que la commune de Bordeaux a droit aux intérêts sur la somme de 253 195,84 euros ttc qui lui est due, à compter du 1er février 2006, date d'enregistrement de sa requête devant le tribunal ; que les intérêts versés seront capitalisés au 1er février 2007 et à chaque date anniversaire pour porter eux-mêmes intérêts ;
5- Considérant que l'entreprise de carrelage Laffitte est la principale responsable de l'absence d'un certain nombre de seuils dans les salles d'eau, des défauts de pente des margelles, des défauts dans les raccords d'étanchéité entre les bacs à douche et les faïences murales et de la pose incorrecte des revêtements, dès lors que ces carences concernent l'exécution des travaux et non la conception de l'ouvrage ; qu'en revanche, l'absence de lumière dans les douches renvoie à un défaut de conception de nature à engager la responsabilité des architectes ; qu'enfin, la société Perchalec ne conteste pas une insuffisance des soins apportés pour réduire les infiltrations, lors de la pose des seuils et des protections sur relevés de plinthes ;
6- Considérant que, dans ces conditions, il y a lieu de fixer les parts de responsabilité des architectes agence Quintanilla-Turcey et M. X, et des entreprises Laffite et Perchalec, comme suit : 60 % à la charge de la selearl Malmezat-Prat, ès-qualités de liquidateur des établissements Laffitte, 35 % à la charge des architectes, l'agence Quintanilla Turcey et M. X et 5 % à la charge de la société Mce Perchalec, et de condamner les entreprises et architectes à se garantir entre eux de cette condamnation, dans cette proportion ;
En ce qui concerne les menuiseries métalliques extérieures :
7- Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport de l'expert, que les désordres constatés sur les menuiseries extérieures du bâtiment sont liés à la fragilité des chassis oscillo-battants qui, autorisant à la fois une ouverture à la française et une ouverture à soufflet, sont sensibles à la manipulation du fait de la complexité de leurs articulations ; que l'inadaptation de ces menuiseries à un usage collectif de type hôtelier révèle un problème de conception de l'ouvrage et que les architectes ne sauraient totalement s'exonérer de leur responsabilité en invoquant une mauvaise utilisation des fenêtres par les usagers ; que la sa Socotec assure une mission de type L, relative à la solidité des ouvrages et des éléments d'équipement indissociables du bâtiment, notamment les fenêtres ; que sa mission, telle qu'elle résulte des dispositions de l'article L. 111-23 du code de la construction et de l'habitation, comprend, notamment, la prévention des différents aléas techniques susceptibles d'être rencontrés dans la réalisation des ouvrages ; que cette société n'a pas relevé les risques de dégradation des vantaux liés au choix de menuiseries extérieures inadaptées ; qu'il suit de là que la responsabilité de l'agence Quintanilla-Turcey et de M. X, architectes, d'une part, et celle de la sa Socotec, d'autre part, sont, ainsi que l'ont à bon droit apprécié les premiers juges, solidairement engagées ; que les architectes ne justifient pas que le maître d'ouvrage aurait été, au moins partiellement, responsable du choix du type d'équipement défaillant et de l'usage qui en aurait été fait par les occupants ; qu'ils ne sont donc pas fondés à soutenir que le maître d'ouvrage devrait garder à sa charge une part des travaux de réparation des menuiseries extérieures ;
8- Considérant qu'il résulte de l'instruction que la responsabilité principale dans la survenance des désordres incombe aux architectes, du fait d'un défaut de conception de l'ouvrage ; qu'une part de responsabilité doit également être retenue à l'encontre de la sa Socotec, qui avait en charge une mission de contrôle technique de la solidité des ouvrages pendant la phase d'exécution du projet ; que, dans ces conditions, il sera fait une juste appréciation des fautes commises par les architectes et le contrôleur technique en condamnant l'agence Quintanilla-Turcey et M. X à garantir la sa Socotec à hauteur de 80 % des condamnations prononcées contre elle et de condamner la sa socotec à garantir l'agence Quintanilla-Turcey et M. X à hauteur de 20 % des condamnations prononcées à leur encontre en raison des désordres affectant les menuiseries extérieures ;
Sur la TVA :
9- Considérant que le montant du préjudice dont le maître d'ouvrage est fondé à demander la réparation aux constructeurs à raison des désordres affectant l'immeuble qu'ils ont réalisé correspond aux frais qu'il doit engager pour les travaux de réfection ; que ces frais comprennent, en règle générale, la taxe sur la valeur ajoutée, élément indissociable du coût des travaux, à moins que le maître d'ouvrage ne relève d'un régime fiscal lui permettant normalement de déduire tout ou partie de celle dont il est redevable à raison de ses propres opérations ; qu'en vertu du premier alinéa de l'article 256 B du code général des impôts, les personnes morales de droit public ne sont pas assujetties à la taxe sur la valeur ajoutée pour l'activité de leurs services administratifs, sociaux, éducatifs, culturels et sportifs lorsque leur non-assujettissement n'entraîne pas de distorsion dans les conditions de la concurrence ; qu'il suit de là qu'une commune ne peut déduire la taxe ayant grevé les travaux de réfection de l'auberge de jeunesse réalisés pour son compte par des constructeurs et que, par suite, le montant de cette taxe doit être inclus dans le montant du préjudice indemnisable subi par ladite collectivité du fait de ces constructeurs sans qu'il y ait lieu de rechercher si la commune justifiait n'être pas susceptible de déduire cette taxe ; que les premiers juges ont, dès lors, à bon droit inclus la taxe sur la valeur ajoutée dans le montant des travaux de réfection susmentionnés afférents aux désordres affectant l'auberge de jeunesse ;
Sur les conclusions de la société Sopcz, de la société Castel et Fromaget aluminium, de l'entreprise Coskun, de la société Aie Thermique, de la compagnie Axa France iard, du cabinet Piquet :
10- Considérant que la société Sopcz, de la société Castel et Fromaget aluminium, de l'entreprise Coskun, de la société Aie Thermique, de la compagnie Axa France iard, du cabinet Piquet sont fondés, ainsi que l'ont apprécié les premiers juges, à demander leur mise hors de cause ;
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
11- Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de rejeter l'ensemble des demandes des parties présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DECIDE
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 10 février 2011 est annulé en tant qu'il statue sur les désordres afférents aux infiltrations d'eau.
Article 2 : L'agence Quintanilla-Turcey et M. X, architectes, la selearl Malmezat-Prat, ès-qualités de liquidateur des établissements JP Lafitte, et la sarl Mce Perchalec sont solidairement condamnés à verser à la commune de Bordeaux une indemnité de 253 195,84 euros TTC en réparation des conséquences des dégâts des eaux affectant le complexe Barbey. Cette somme portera intérêts au taux légal à compter du 1er février 2006 et les intérêts versés seront capitalisés au 1er février 2007 et à chaque date anniversaire pour porter eux-mêmes intérêts.
Article 3 : Les parts de responsabilité des architectes agence Quintanilla-Turcey et M. X, et des entreprises Laffite et Perchalec, sont, pour les désordres relatifs aux infiltrations d'eau, fixées comme suit : 60 % à la charge de Laffitte, 35 % à la charge des architectes, l'agence Quintanilla Turcey et M. X et 5 % à la charge de la sarl Mce Perchalec.
Article 4 : La selearl Malmezat-Prat, ès-qualités de liquidateur des établissements entreprise Laffite garantira l'agence Quintanilla-Turcey et M. X, et l'entreprise Mce Perchalec à hauteur de 60 % de la condamnation qui résulte des articles 2 et 3 du présent arrêt. L'agence Quintanilla-Turcey et M. X garantiront la selearl Malmezat-Prat, ès-qualités de liquidateur des établissements entreprise Lafitte et l'entreprise mce Perchalec à hauteur de 35 % de la même condamnation. L'entreprise Mce Perchalec garantira l'agence Quintanilla-Turcey et M. X, et la selearl Malmezat-Prat, ès-qualités de liquidateur des établissements entreprise Laffite à hauteur de 5% de la même condamnation.
Article 5 : L'agence Quintanilla Turcey et M. X garantiront la société Socotec à hauteur de 80% de leur condamnation à réparer les désordres affectant les menuiseries extérieures du complexe Barbey à Bordeaux. La société Socotec garantira l'agence Quintanilla Turcey et M. X à hauteur de 20% de la même condamnation.
Article 6 : Le jugement du 10 février 2011 du tribunal administratif de Bordeaux est réformé en ce qu'il a de contraire à l'article 5 du présent arrêt.
Article 7 : La société Sopcz, la société Castel et Fromaget aluminium, l'entreprise Coskun, la société Aie thermique, la compagnie Axa France iard, le cabinet Piquet demeurent mis hors de cause.
Article 8 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
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No 11BX00936