Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 19 février 1996 et 19 juin 1996 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés par la COMMUNE DE VOLVIC représentée par son maire en exercice ; la COMMUNE DE VOLVIC demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule l'arrêt du 19 décembre 1995 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a, à la demande de MM. Valentin et X..., d'une part, annulé le jugement du 15 octobre 1992 du tribunal administratif de Clermont-Ferrand, d'autre part, annulé l'arrêté du 1er mars 1991 du préfet du Puy-de-Dôme déclarant cessibles les terrains nécessaires à l'extension de la zone artisanale du Chancet à Volvic ;
2°) rejette la requête de MM. Valentin et X... présentée devant la cour administrative d'appel de Lyon ;
3°) condamne MM. Valentin et X... à lui verser la somme de 15 000 F au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;
Vu la loi n° 91-947 du 10 juillet 1991 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mme Jodeau-Grymberg, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Boré, Xavier, avocat de la COMMUNE DE VOLVIC et de Me Thouin-Palat, avocat de Y... Pierre Valentin et Louis X...,
- les conclusions de M. Martin Laprade, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que par arrêté du 19 juin 1990 le préfet du Puy-de-Dôme a déclaré d'utilité publique l'extension de la zone artisanale du Chancet à Volvic ; que, pour annuler l'arrêté du 1er mars 1991 du même préfet déclarant cessibles les terrains nécessaires à cette opération, la cour administrative d'appel de Lyon s'est fondée sur le motif que l'expropriation ne présentait pas un caractère d'utilité publique ; que la COMMUNE DE VOLVIC demande l'annulation de cet arrêt ;
Considérant que la cour a relevé que l'opération avait essentiellement pour but de répondre aux besoins d'extension de la Société des eaux de Volvic, laquelle possédait à proximité 10 ha de terrains dont il n'était pas allégué qu'ils auraient été impropres à recevoir une extension de ses installations à concurrence des 6 ha prévus, et que l'autre entreprise intéressée aurait pu trouver à proximité immédiate de son installation existante les 2 ha nécessaires à l'extension de son aire de stockage de matériaux ; qu'elle en a déduit que les besoins de l'économie locale pouvaient être satisfaits, sans recourir à l'expropriation, dans des conditions équivalentes ;
Considérant qu'eu égard aux caractéristiques susmentionnées de l'opération projetée, la cour n'a pas commis d'erreur de droit en recherchant si les besoins des deux entreprises principalement intéressées par l'extension de la zone artisanale ne pouvaient pas être satisfaits par l'utilisation de terrains dont elles étaient déjà propriétaires ou qu'elles auraient pu acquérir sans qu'il soit nécessaire de recourir à l'expropriation ; qu'elle n'a pu cependant déduire l'absence d'utilité publique de l'opération de la seule existence de tels terrains sans avoir recherché si ceux-ci, notamment par leur localisation sur le territoire de la commune ou en dehors, permettaient de réaliser l'opération dans des conditions équivalentes au regard des intérêts mis en avant par la commune ; que l'arrêt n'étant pas sur ce point légalement fondé, la COMMUNE DE VOLVIC est fondée à en demander l'annulation ;
Considérant qu'aux termes de l'article 11 de la loi susvisée du 31 décembre 1987, le Conseil d'Etat s'il prononce l'annulation d'une décision d'une juridiction administrative statuant en dernier ressort, peut "régler l'affaire au fond si l'intérêt d'une bonne administration de la justice le justifie" ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de régler l'affaire au fond ;
Considérant, d'une part, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que les terrains dont les deux entreprises principalement intéressées par l'extension de la zone artisanale sont déjà propriétaires ou qu'elles pourraient acquérir soient tous situés sur le territoire de la COMMUNE DE VOLVIC au profit de laquelle la déclaration d'utilité publique a été prononcée ; que, dès lors, la circonstance que la Société des eaux de Volvic possède 10 ha de terrains et que l'entreprisede travaux publics Billet aurait pu en acquérir 2 à l'amiable, n'est pas de nature à faire regarder l'opération comme dépourvue d'utilité publique ;
Considérant, d'autre part, qu'eu égard au rôle prépondérant de la Société des eaux de Volvic dans l'économie locale, la circonstance que l'extension de la zone artisanale décidée par la COMMUNE DE VOLVIC aurait pour objet principal de répondre aux besoins de cette société n'est pas de nature à établir que la déclaration d'utilité publique de cette opération est entachée de détournement de pouvoir ; qu'ainsi MM. Valentin et X... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de ClermontFerrand a rejeté leur demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 et de condamner M. Valentin et M. X... à verser à la COMMUNE DE VOLVIC la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Lyon en date du 19 décembre 1995 est annulé.
Article 2 : Les conclusions de la requête présentée par M. Valentin et M. X... devant la cour administrative d'appel de Lyon sont rejetées.
Article 3 : Les conclusions de la COMMUNE DE VOLVIC tendant à l'application de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à la COMMUNE DE VOLVIC, à M. Pierre Valentin, à M. Louis X... et au ministre de l'intérieur.