LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 20 mars 2014), que, par testament olographe daté du 26 novembre 1985, Edouard X... a légué tous ses biens meubles et immeubles à la Fondation pour la recherche médicale (la Fondation) ; que, par trois actes du 25 mars 1996, il a cédé, avec son épouse, aux époux Y..., la nue-propriété de divers immeubles leur appartenant ; que les époux X... ont été placés sous tutelle le 15 décembre 1998 ; qu'après leur décès, respectivement le 14 novembre 2003 et le 27 septembre 2007, la Fondation a fait citer les époux Y... devant un tribunal en nullité des actes de vente pour insanité d'esprit ;
Sur le premier moyen, pris en ses première, deuxième et quatrième branches, ci-après annexé :
Attendu que ces griefs ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Sur le premier moyen, pris en sa troisième branche :
Attendu que M. et Mme Y... font grief à l'arrêt d'annuler les ventes litigieuses, de leur ordonner de restituer à la Fondation les immeubles objets des ventes et d'ordonner à la Fondation de leur restituer le prix de vente de chacun des immeubles alors, selon le moyen, que les actes réalisés par le de cujus, autres que la donation entre vifs et le testament ne peuvent être attaqués en nullité pour insanité d'esprit que par ses héritiers ; que la qualité d'héritier procède des seules dispositions des articles 734 et suivants du code civil ; qu'en considérant néanmoins que la Fondation, qui était seulement légataire et non héritière de M. X..., avait qualité pour agir en nullité des cessions litigieuses sur le fondement de l'article 414-2 du code civil, la cour d'appel a violé ces dispositions ;
Mais attendu que le légataire universel a qualité pour agir en nullité d'un acte à titre onéreux sur le fondement de l'article 489-1 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2007-308 du 5 mars 2007, applicable en la cause ; qu'ayant constaté que la Fondation avait été instituée légataire universelle par Edouard X..., la cour d'appel en a exactement déduit qu'elle avait qualité pour agir en nullité des actes de vente pour insanité d'esprit de ce dernier ; que le moyen n'est pas fondé ;
Et sur le second moyen, ci-après annexé :
Attendu que les époux Y... font grief à l'arrêt de dire qu'ils ont engagé leur responsabilité délictuelle envers la Fondation et de les condamner in solidum à lui payer la somme de 50 000 euros à titre de dommages-intérêts ;
Attendu que, le premier moyen étant rejeté, ce moyen, qui invoque la cassation par voie de conséquence, est devenu inopérant ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. et Mme Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette leur demande et les condamne à payer à la Fondation pour la recherche médicale la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du huit juillet deux mille quinze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Spinosi et Sureau, avocat aux Conseils, pour M. et Mme Y....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit que la FONDATION a qualité pour agir en nullité des ventes, d'avoir dit que l'action en nullité des ventes fondée sur l'ancien article 489-1 du Code civil n'est pas prescrite, d'avoir dit qu'au jour des ventes consenties le 25 mars 1996, Edouard X... était atteint d'un trouble mental, d'avoir annulé en conséquence les ventes signées entre Edouard X... d'une part les époux Y... d'autre part, en présence de Marguerite X..., reçues par Maître Dominique E..., notaire à Montbazens le 25 mars 1996 et portant sur la nue-propriété des divers lots, d'avoir ordonné aux époux Y... de restituer à la FONDATION prise en sa qualité de légataire universel d'Edouard X... les immeubles précités et à la FONDATION de restituer aux époux Y... le prix de vente de chacun de ces immeubles (soit 56. 756, 77 ¿ au total), d'avoir dit que les époux Y... ont engagé leur responsabilité délictuelle envers la FONDATION, d'avoir condamné les époux Y... in solidum à payer à la FONDATION la somme de 50. 000 ¿ à titre de dommages-intérêts et d'avoir ordonné la compensation, à due concurrence, entre le montant des dommages-intérêts dus par les époux Y... et le montant des restitutions de prix dues par la FONDATION ;
Aux motifs que « I) Sur les fins de non-recevoir Les époux Y... concluent à l'irrecevabilité de l'action entreprise par la Fondation en raison de son défaut de qualité à agir (1) et de la non applicabilité de l'ancien article 489-1 du code civil (2). Ils sollicitent la confirmation du jugement en ce qu'il a retenu la prescription de l'action en nullité des ventes mais son infirmation en ce qu'il déclaré non prescrite l'action en responsabilité civile délictuelle (3).
(1) Sur le défaut de qualité à agir :
Les époux Y... contestent la qualité de légataire de la Fondation en faisant valoir qu'elle l'aurait perdue par l'effet de la cession en 1996 des biens légués en application de l'article 1038 du code civil.
Selon l'article 1038 du code civil « toute aliénation, celle même par vente avec faculté de rachat par échange, que fera le testateur de tout ou partie de la chose léguée emportera révocation du legs pour tout ce qui a été aliéné, encore que l'aliénation postérieure soit nulle, et que l'objet soit rentré dans la main du testateur. ».
Mais les époux Y... ne sont pas fondés à opposer comme fin de non-recevoir une révocation du legs alors que par la présente action, la Fondation entend précisément contester la validité des aliénations intervenues à leur bénéfice le 25 mars 1996 sur le fondement de l'ancien article 489-1 du code civil.
Les appelants soutiennent que la Fondation n'a pas la qualité d'ayant droit et ne peut agir sur le fondement des dispositions de l'article 489-1 du code civil.
L'ancien article 489-1, 1° et 3° du code civil (devenu l'article 414-2 nouveau) dispose que « l'action en nullité pour insanité d'esprit n'appartient de son vivant qu'à l'intéressé, après sa mort, les actes faits par lui autres que les donations entre vif et le testament ne peuvent être attaqués que par ses héritiers pour insanité d'esprit et dans les cas suivants :
si l'acte porte en lui-même la preuve d'un trouble mental, si une action a été introduite avant son décès aux fins d'ouverture d'une curatelle ou d'une tutelle. ».
En vertu du principe de la continuation de la personne du défunt, les actions en nullité dont disposait leur auteur, sont transmises aux successibles.
L'action en nullité pour insanité d'esprit est donc transmise aux héritiers ab intestat ainsi qu'aux légataires universels et à titre universel.
La Fondation a été instituée par Edouard X... légataire universel puisqu'il lui a légué tous les biens meubles et immeubles composant son patrimoine.
Les époux Y..., pour contester le droit d'agir de la Fondation, opposent la péremption de l'instance en nullité des ventes qui avait été initiée par le tuteur d'Edouard X... de son vivant.
Edouard X... a intenté de son vivant, par le biais de son représentant légal l'ATAL, une action en nullité des ventes consenties le 25 mars 1996 puisqu'une assignation en ce sens a été délivrée aux époux Y... le 2 mai 2000.
Il n'est pas discuté que cette assignation n'a jamais débouché sur un jugement au fond.
Si la péremption éteint l'instance en cours, elle ne prive pas le demandeur ou ses successibles de la possibilité d'introduire une nouvelle instance si l'action n'est pas éteinte par ailleurs.
Il s'ensuit que le moyen tiré de la péremption de l'instance est inopérant.
Les époux Y... font valoir que le désistement d'action d'Edouard X... et de son tuteur, constaté par arrêt de cette cour du 12 octobre 2006 rectifié le 21 juin 2010, a entraîné l'abandon du droit d'agir en nullité des ventes.
Mais ce désistement d'action n'a pu produire d'effets qu'à l'égard du droit qui était l'objet du litige au cours duquel il est intervenu.
En l'occurrence ce désistement s'est produit en cause d'appel d'une décision rendue par le juge de l'exécution en 2004 ayant autorisé le tuteur d'Edouard X... à pratiquer une saisie conservatoire sur les biens des époux Y... après avoir constaté une créance paraissant fondée en son principe et née de la procédure pénale en cours pour abus de faiblesse.
Par ce désistement d'action devant le juge de l'exécution Edouard X..., représenté par son tuteur, n'a pas entendu renoncer au droit d'agir en nullité des ventes pour insanité d'esprit.
Il ne prive donc pas la Fondation, prise en sa qualité de légataire universel, du droit d'agir en nullité de ces ventes.
En conséquence, et sous réserve d'une éventuelle prescription de l'action qui sera examinée ci-après, la Fondation qui a été désignée par le défunt légataire universel de tous ses biens meubles et immeubles, a qualité pour agir en nullité des cessions litigieuses sur le fondement de l'article 489-1 précité.
(2) Sur l'applicabilité de l'ancien article 489-1 :
Conformément aux termes de l'ancien article 489-1, les actes dont il est sollicité la nullité pour insanité d'esprit ne sont ni des donations entre vifs ni un testament.
En outre, Edouard X... et son épouse ont été, tous les deux, placés sous tutelle par jugement du 15 décembre 1998.
Contrairement à ce que soutiennent les époux Y..., ce texte n'exige pas que la mesure de protection ait été sollicitée ou ordonnée avant l'acte litigieux.
Les conditions d'ouverture de l'action sont donc réunies.
(3) Sur la prescription :
Formant appel incident, la Fondation demande à la cour d'infirmer le jugement en ce qu'il a déclaré prescrite son action en nullité.
La prescription de l'action en nullité de l'ancien article 489-1 du code civil est régie par les dispositions de l'article 1304 du même code qui prévoit une prescription quinquennale courant, contre les héritiers d'une personne protégée, « que du jour du décès, si elle n'a commencé à courir auparavant. ».
Le délai a commencé à courir à l'égard d'Edouard X..., qui n'était pas sous protection au jour des ventes litigieuses, à compter de la date des actes soit le 25 mars 1996.
Ce délai a été suspendu 32 mois et 20 jours plus tard, le 15 décembre 1998 en raison du placement d'Edouard X... sous tutelle par application des dispositions de l'ancien article 2252 du code civil (aujourd'hui devenu l'article 2235).
Il n'est pas discuté par les parties qu'Edouard X... est resté placé sous tutelle jusqu'à son décès.
Le délai de prescription n'a donc recommencé à courir contre la Fondation prise en sa qualité de légataire universel qu'à compter du 27 septembre 2007 pour une durée restant à courir de 27 mois et 10 jours devant expirer le 6 janvier 2010.
L'assignation ayant été délivrée le 12 février 2009, l'action en nullité des ventes n'est pas prescrite et le jugement sera infirmé sur ce point.
Indépendamment de cette action en nullité, la Fondation agit cumulativement en indemnisation de ses préjudices sur le fondement de la responsabilité délictuelle.
Les époux Y... concluent à la prescription de cette action en responsabilité depuis le 26 mars 2006.
L'ancien article 2270-1 du code civil, applicable au présent litige, prévoit pour les actions en responsabilité extra contractuelle un délai de prescription décennal à compter de « la manifestation du dommage ».
En l'espèce, la Fondation agit en indemnisation de son préjudice propre et non de celui du défunt puisqu'en page 20 de ses écritures, elle écrit qu'en l'absence de faute des époux Y..., elle n'aurait pas été privée de son legs.
La manifestation du dommage, à savoir la disparition du patrimoine immobilier qui constituait le legs de 1985, est survenue pour la Fondation lors de la prise de connaissance des dispositions testamentaires d'Edouard X....
Le délai de prescription de l'action en responsabilité n'a donc commencé à courir, au plus tôt, qu'à compter du 27 septembre 2007, date du décès.
La loi du 17 juin 2008, entrée en vigueur le 19 juin 2008, a réduit à cinq ans ce délai de prescription.
Ces dispositions nouvelles sont applicables en l'espèce puisque le litige a été introduit postérieurement à l'entrée en vigueur de la loi.
Le délai pour agir expirait par conséquent le 19 juin 2013.
L'assignation ayant été délivrée le 12 février 2009, l'action en responsabilité délictuelle n'est pas prescrite et le jugement sera confirmé de ce chef par ces motifs substitués.
II) Sur le fond :
1) Sur la nullité des ventes :
L'expertise médicale confiée au docteur Z... sur le fondement de l'article 145 du code de procédure civile par ordonnance sur requête du président du tribunal de grande instance de Rodez en date du 14 septembre 1999 n'a pas été réalisée au contradictoire des époux Y... ainsi que le soutiennent justement ces derniers pour conclure à son irrégularité à leur égard.
Sa communication en cours d'instance ne permet pas d'assurer le respect du contradictoire dès lors que les époux Y... ont été privés de toute possibilité d'adresser des dires et des pièces à l'expert.
Ce rapport d'expertise doit donc leur être déclaré inopposable.
Le médecin traitant d'Edouard X..., le docteur A..., adressait le 30 octobre 1994 à l'assurance maladie un protocole d'examen médical en application de l'article L. 324-1 du code de la sécurité sociale. Il y faisait état d'un probable début de démence requérant des soins continus pendant plus de 6 mois et sollicitait de l'organisme social la prise en charge de certains frais ainsi que l'exonération du ticket modérateur.
Ce médecin évoquait une affection de longue durée et décrivait des « troubles graves de la personnalité outre une affection oculaire grave avec glaucome ».
Il décrivait les symptômes ainsi : « se perd, s'imagine, oublie. Aussitôt après avoir vu l'oculiste, effrayé par le glaucome, n'avait pas encore mis les gouttes dans les yeux. A l'air de commencer une démence mais il est difficile de l'obliger â faire quelque chose. A toujours commandé. » Il préconisait un examen complémentaire chez le neurologue.
C'est dans ce contexte que, par courrier adressé le 29 mars 1995, le docteur Michel B..., spécialiste du système nerveux au sein du Centre médical du Languedoc de Villefranche de Rouergue, écrivait au médecin traitant d'Edouard X... que « le problème d'Edouard X... est différent de celui de son épouse et pose des problèmes mnésiques plus importants (avec) des périodes de confusion entre le présent et le passé ».
L'électroencéphalogramme montrait, selon ce spécialiste, une « atrophie cortico-sous-corticale » dont le degré d'évolution devait être mesuré précisément au moyen d'un scanner, Le docteur B... mentionnait « un état involutif » et concluait à la nécessité, « un jour ou l'autre, de mettre Monsieur X... sous tutelle s'il pose des problèmes sur le plan financier ».
Il préconisait une thérapeutique lourde à base de Cervoxan injectable en cure en alternance avec une gélule matin et soir.
Ce courrier révèle sans contestation possible l'existence en mars 1995 d'une atrophie cortico-sous-corticale involutive chez Edouard X..., âgé à l'époque de 83 ans, qui se manifestait par des troubles mnésiques importants et des désorientations spatio-temporelles signalés médicalement depuis octobre 1994.
C'est l'évolution de cet état de santé et l'aggravation de son état confus qui a conduit Edouard X... à être hospitalisé courant 1997 avec une admission en moyen séjour en décembre 1997 puis un placement définitif en maison de retraite.
C'est à l'occasion de ce placement en maison de retraite que la demande de protection sera adressée au juge des tutelles.
Edouard X... a consenti les ventes litigieuses aux époux Y... en mars 1996, à une époque où il souffrait de troubles mnésiques très importants et d'états confus diagnostiqués depuis plus d'un an par un neurologue qui, en mars 1995, préconisait déjà une mise sous tutelle « un jour ou l'autre s'il pose des problèmes financiers ».
Dans ces conditions, l'unique attestation contraire rédigée à une date illisible par Paul-Hippolyte C... ne peut valablement contredire les éléments de détérioration mentale objectivés par le médecin traitant généraliste et confirmés par le médecin spécialiste du système nerveux.
C'est dans ce contexte neurologique très dégradé que les époux Y... ont acquis la nue-propriété de l'entier patrimoine d'Edouard X... étant rappelé qu'André Y... travaillait à la Caisse d'Epargne de Montbazens où Edouard X... détenait divers comptes de longue date et qu'il établissait les déclarations d'impôts du couple.
La cour dispose des éléments médicaux suffisants pour dire qu'au jour des trois ventes le 25 mars 1996, Edouard X... était atteint depuis plus d'un an d'une affection neurologique involutive se manifestant par des troubles mnésiques importants associés à un état confus. Cet état, caractéristique d'une insanité d'esprit, l'a privé du discernement nécessaire pour apprécier la portée et les conséquences de ses actes.
Un an après les ventes Edouard X... était hospitalisé en raison de l'aggravation soudaine de son affection neurologique (épisodes délirants) et cette hospitalisation devait conduire à son admission en moyen séjour dès la fin de l'année 1997 puis à son placement définitif en maison de retraite et sa mise sous tutelle.
Louise Marguerite X..., décédée en 2003, était décrite comme effacée, dépressive et sous le joug de son époux autoritaire lequel a « toujours commandé » selon le médecin traitant. Son état de santé a conduit à une demande de mise sous tutelle introduite quelques mois après les ventes litigieuses.
Au jour des actes du 25 mars 1996, Edouard X... était insane d'esprit et les ventes signées par lui et portant sur des biens propres ou communs doivent par conséquent être annulées et les parties remises dans l'état où elles se trouvaient avant les ventes.
Le jugement sera complété sur ce point.
2) Sur la responsabilité civile délictuelle :
Les époux Y... concluent à l'infirmation du jugement en ce qu'il a retenu leur responsabilité délictuelle et les a condamnés à payer à la Fondation la somme de 115. 587 € à titre de dommages-intérêts. Subsidiairement, ils demandent à la cour, au cas où celle-ci entrerait en voie de condamnation, de procéder par compensation entre le prix de vente et les dommages-intérêts afin de ne les condamner au versement d'aucune somme d'argent.
La Fondation, formant appel incident, réclame leur condamnation à lui payer la somme de 202. 757, 20 € (1. 330. 000 francs) à titre de dommages-intérêts.
Les trois actes de ventes litigieux ont été consentis aux époux Y... pour un prix total de 372. 300 francs alors que, selon les estimations les plus basses et non utilement contestées de l'expert amiable Jean-François D... en date du 13 avril 1999, la valeur cumulée de la nuepropriété de ces trois immeubles ne pouvait être inférieure à 1. 064. 000 francs en retenant une valeur de la nue-propriété à 80 % du prix de vente (compte tenu de l'âge du vendeur et de son épouse qui s'étaient réservé l'usufruit).
Ce prix de vente n'a fait que transiter rapidement par le compte bancaire des époux X... puisque la somme de 372. 300 francs, encaissée le l'avril 1996, a été retirée intégralement en espèces au guichet du Crédit Agricole le 3 avril 1996 sans qu'il soit possible cependant de déterminer le destinataire de ces fonds.
La Fondation n'est donc fondée à soutenir que les époux Y... auraient récupéré le prix de vente.
André Y... connaissait Edouard X... de longue date au jour des ventes du 25 mars 1996 puisqu'il gérait ses comptes de la Caisse d'Epargne où il travaillait et remplissait les déclarations d'impôts du couple.
Par ces contacts réguliers, André Y... n'a pu manquer de s'apercevoir dès 1994 que l'état de santé mentale d'Edouard X... accusait des défaillances qui allaient en s'aggravant puisque le médecin traitant repérait lui-même, dès octobre 1994, des troubles mnésiques importants et des états confus (" se perd, s'imagine, oublie ") qui allaient conduire à son hospitalisation courant 1997, à son placement définitif en maison de retraite et à sa mise sous tutelle en 1998.
C'est donc en toute connaissance de cette détérioration de l'état de santé mentale d'Edouard X... qu'André Y... a acquis la nue-propriété de l'entier patrimoine de son client de la Caisse d'Epargne et de son épouse à un prix trois fois inférieur au prix du marché.
En agissant ainsi, André Y... et son épouse ont commis une faute.
Cette faute a entraîné un préjudice pour la Fondation, non pas en la privant définitivement de son legs qu'elle vient de récupérer par la présente procédure, mais en l'empêchant de jouir du legs pendant plusieurs années, ce qui a entraîné la détérioration des immeubles non entretenus et en l'obligeant à diligenter une action en justice longue et coûteuse pour voir annuler les ventes en raison d'un trouble mental d'Edouard X... connu des époux Y... et qui auraient dû conduire ces derniers à s'abstenir de contracter dans ces conditions.
Les époux Y... seront condamnés in solidum à lui payer la somme de 50, 000 ¿ à titre de dommages-intérêts compte tenu du montant du legs et de la durée de la procédure pendant laquelle la fondation en a été privée et le jugement sera infirmé sur le quantum de la réparation.
La compensation sera ordonnée à due concurrence entre le montant des dommages-intérêts dus par les époux Y... et le montant des restitutions dues par la Fondation » ;
Alors, d'une part, que toute aliénation que fera le testateur de tout de de partie de la chose léguée, emportera la révocation du legs pour tout ce qui a été aliéné, encore que l'aliénation postérieure soit nulle ; qu'en conséquence le légataire est sans qualité pour agir en annulation d'une vente conclue entre le testateur et un tiers dès lors que cette vente a entraîné la révocation du legs, fût-elle atteinte d'une cause de nullité ; qu'en jugeant néanmoins l'inverse et en considérant que la FONDATION avait qualité pour agir en nullité des ventes passées entre Monsieur X... et les époux Y..., la Cour d'appel a violé l'article 1038 du Code civil ;
Alors, d'autre part, que la loi ne dispose que pour l'avenir, elle n'a point d'effet rétroactif ; que la loi du 5 mars 2007 portant réforme de la protection juridique des majeurs a rendu applicable au 1er janvier 2009 les nouvelles dispositions de l'article 414-2 du Code civil qui limitent désormais, après la mort de l'intéressé, à ses seuls héritiers la faculté d'agir en nullité d'actes pour insanité d'esprit ; qu'en estimant néanmoins que l'action en nullité pour insanité d'esprit des actes litigieux était régie par les anciennes dispositions des articles 489 et 489-1 du Code civil, quand la loi du 5 mars 2007 relativement à la question des titulaires du droit d'action en nullité d'un acte pour insanité d'esprit s'analyse en une loi de procédure immédiatement applicable au 1er janvier 2009 et quand elle constatait que la FONDATION avait fait assigner les exposants le 12 février 2009, la Cour d'appel, qui n'a pas déduit les conséquences de ses propres constatations, a violé l'article 2 du Code civil ;
Alors, en outre, que les actes réalisés par le de cujus, autres que la donation entre vifs et le testament ne peuvent être attaqués en nullité pour insanité d'esprit que par ses héritiers ; que la qualité d'héritier procède des seules dispositions des articles 734 et suivants du Code civil ; qu'en considérant néanmoins que la FONDATION, qui était seulement légataire et non héritière de Monsieur X..., avait qualité pour agir en nullité des cessions litigieuses sur le fondement de l'article 414-2 du Code civil, la Cour d'appel a violé ces dispositions ;
Alors, enfin, que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en relevant d'office le moyen tiré de l'article 2252 du Code civil et de la suspension de la prescription de l'action de la FONDATION en raison du placement de Monsieur X... sous tutelle, sans inviter les parties à présenter préalablement leurs observations sur ce moyen, la Cour d'appel a violé l'article 16 du Code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit que les époux Y... ont engagé leur responsabilité délictuelle envers la FONDATION et d'avoir condamné les époux Y... in solidum à payer à la FONDATION la somme de 50. 000 € à titre de dommages-intérêts ;
Aux motifs que « I) Sur les fins de non-recevoir Les époux Y... concluent à l'irrecevabilité de l'action entreprise par la Fondation en raison de son défaut de qualité à agir (1) et de la non applicabilité de l'ancien article 489-1 du code civil (2). Ils sollicitent la confirmation du jugement en ce qu'il a retenu la prescription de l'action en nullité des ventes mais son infirmation en ce qu'il déclaré non prescrite l'action en responsabilité civile délictuelle (3).
(1) Sur le défaut de qualité à agir :
Les époux Y... contestent la qualité de légataire de la Fondation en faisant valoir qu'elle l'aurait perdue par l'effet de la cession en 1996 des biens légués en application de l'article 1038 du code civil.
Selon l'article 1038 du code civil « toute aliénation, celle même par vente avec faculté de rachat par échange, que fera le testateur de tout ou partie de la chose léguée emportera révocation du legs pour tout ce qui a été aliéné, encore que l'aliénation postérieure soit nulle, et que l'objet soit rentré dans la main du testateur. ».
Mais les époux Y... ne sont pas fondés à opposer comme fin de nonrecevoir une révocation du legs alors que par la présente action, la Fondation entend précisément contester la validité des aliénations intervenues à leur bénéfice le 25 mars 1996 sur le fondement de l'ancien article 489-1 du code civil.
Les appelants soutiennent que la Fondation n'a pas la qualité d'ayant droit et ne peut agir sur le fondement des dispositions de l'article 489-1 du code civil.
L'ancien article 489-1, 1° et 3° du code civil (devenu l'article 414-2 nouveau) dispose que « l'action en nullité pour insanité d'esprit n'appartient de son vivant qu'à l'intéressé, après sa mort, les actes faits par lui autres que les donations entre vif et le testament ne peuvent être attaqués que par ses héritiers pour insanité d'esprit et dans les cas suivants :
si l'acte porte en lui-même la preuve d'un trouble mental, si une action a été introduite avant son décès aux fins d'ouverture d'une curatelle ou d'une tutelle. ».
En vertu du principe de la continuation de la personne du défunt, les actions en nullité dont disposait leur auteur, sont transmises aux successibles.
L'action en nullité pour insanité d'esprit est donc transmise aux héritiers ab intestat ainsi qu'aux légataires universels et à titre universel.
La Fondation a été instituée par Edouard X... légataire universel puisqu'il lui a légué tous les biens meubles et immeubles composant son patrimoine.
Les époux Y..., pour contester le droit d'agir de la Fondation, opposent la péremption de l'instance en nullité des ventes qui avait été initiée par le tuteur d'Edouard X... de son vivant.
Edouard X... a intenté de son vivant, par le biais de son représentant légal l'ATAL, une action en nullité des ventes consenties le 25 mars 1996 puisqu'une assignation en ce sens a été délivrée aux époux Y... le 2 mai 2000.
Il n'est pas discuté que cette assignation n'a jamais débouché sur un jugement au fond.
Si la péremption éteint l'instance en cours, elle ne prive pas le demandeur ou ses successibles de la possibilité d'introduire une nouvelle instance si l'action n'est pas éteinte par ailleurs.
Il s'ensuit que le moyen tiré de la péremption de l'instance est inopérant.
Les époux Y... font valoir que le désistement d'action d'Edouard X... et de son tuteur, constaté par arrêt de cette cour du 12 octobre 2006 rectifié le 21 juin 2010, a entraîné l'abandon du droit d'agir en nullité des ventes.
Mais ce désistement d'action n'a pu produire d'effets qu'à l'égard du droit qui était l'objet du litige au cours duquel il est intervenu.
En l'occurrence ce désistement s'est produit en cause d'appel d'une décision rendue par le juge de l'exécution en 2004 ayant autorisé le tuteur d'Edouard X... à pratiquer une saisie conservatoire sur les biens des époux Y... après avoir constaté une créance paraissant fondée en son principe et née de la procédure pénale en cours pour abus de faiblesse.
Par ce désistement d'action devant le juge de l'exécution Edouard X..., représenté par son tuteur, n'a pas entendu renoncer au droit d'agir en nullité des ventes pour insanité d'esprit.
Il ne prive donc pas la Fondation, prise en sa qualité de légataire universel, du droit d'agir en nullité de ces ventes.
En conséquence, et sous réserve d'une éventuelle prescription de l'action qui sera examinée ci-après, la Fondation qui a été désignée par le défunt légataire universel de tous ses biens meubles et immeubles, a qualité pour agir en nullité des cessions litigieuses sur le fondement de l'article 489-1 précité.
(2) Sur l'applicabilité de l'ancien article 489-1 :
Conformément aux termes de l'ancien article 489-1, les actes dont il est sollicité la nullité pour insanité d'esprit ne sont ni des donations entre vifs ni un testament.
En outre, Edouard X... et son épouse ont été, tous les deux, placés sous tutelle par jugement du 15 décembre 1998.
Contrairement à ce que soutiennent les époux Y..., ce texte n'exige pas que la mesure de protection ait été sollicitée ou ordonnée avant l'acte litigieux.
Les conditions d'ouverture de l'action sont donc réunies.
(3) Sur la prescription :
Formant appel incident, la Fondation demande à la cour d'infirmer le jugement en ce qu'il a déclaré prescrite son action en nullité.
La prescription de l'action en nullité de l'ancien article 489-1 du code civil est régie par les dispositions de l'article 1304 du même code qui prévoit une prescription quinquennale courant, contre les héritiers d'une personne protégée, « que du jour du décès, si elle n'a commencé à courir auparavant. ».
Le délai a commencé à courir à l'égard d'Edouard X..., qui n'était pas sous protection au jour des ventes litigieuses, à compter de la date des actes soit le 25 mars 1996.
Ce délai a été suspendu 32 mois et 20 jours plus tard, le 15 décembre 1998 en raison du placement d'Edouard X... sous tutelle par application des dispositions de l'ancien article 2252 du code civil (aujourd'hui devenu l'article 2235).
Il n'est pas discuté par les parties qu'Edouard X... est resté placé sous tutelle jusqu'à son décès.
Le délai de prescription n'a donc recommencé à courir contre la Fondation prise en sa qualité de légataire universel qu'à compter du 27 septembre 2007 pour une durée restant à courir de 27 mois et 10 jours devant expirer le 6 janvier 2010.
L'assignation ayant été délivrée le 12 février 2009, l'action en nullité des ventes n'est pas prescrite et le jugement sera infirmé sur ce point.
Indépendamment de cette action en nullité, la Fondation agit cumulativement en indemnisation de ses préjudices sur le fondement de la responsabilité délictuelle.
Les époux Y... concluent à la prescription de cette action en responsabilité depuis le 26 mars 2006.
L'ancien article 2270-1 du code civil, applicable au présent litige, prévoit pour les actions en responsabilité extra contractuelle un délai de prescription décennal à compter de « la manifestation du dommage ».
En l'espèce, la Fondation agit en indemnisation de son préjudice propre et non de celui du défunt puisqu'en page 20 de ses écritures, elle écrit qu'en l'absence de faute des époux Y..., elle n'aurait pas été privée de son legs.
La manifestation du dommage, à savoir la disparition du patrimoine immobilier qui constituait le legs de 1985, est survenue pour la Fondation lors de la prise de connaissance des dispositions testamentaires d'Edouard X....
Le délai de prescription de l'action en responsabilité n'a donc commencé à courir, au plus tôt, qu'à compter du 27 septembre 2007, date du décès.
La loi du 17 juin 2008, entrée en vigueur le 19 juin 2008, a réduit à cinq ans ce délai de prescription.
Ces dispositions nouvelles sont applicables en l'espèce puisque le litige a été introduit postérieurement à l'entrée en vigueur de la loi.
Le délai pour agir expirait par conséquent le 19 juin 2013.
L'assignation ayant été délivrée le 12 février 2009, l'action en responsabilité délictuelle n'est pas prescrite et le jugement sera confirmé de ce chef par ces motifs substitués.
II) Sur le fond :
1) Sur la nullité des ventes :
L'expertise médicale confiée au docteur Z... sur le fondement de l'article 145 du code de procédure civile par ordonnance sur requête du président du tribunal de grande instance de Rodez en date du 14 septembre 1999 n'a pas été réalisée au contradictoire des époux Y... ainsi que le soutiennent justement ces derniers pour conclure à son irrégularité à leur égard.
Sa communication en cours d'instance ne permet pas d'assurer le respect du contradictoire dès lors que les époux Y... ont été privés de toute possibilité d'adresser des dires et des pièces à l'expert.
Ce rapport d'expertise doit donc leur être déclaré inopposable.
Le médecin traitant d'Edouard X..., le docteur A..., adressait le 30 octobre 1994 à l'assurance maladie un protocole d'examen médical en application de l'article L. 324-1 du code de la sécurité sociale. Il y faisait état d'un probable début de démence requérant des soins continus pendant plus de 6 mois et sollicitait de l'organisme social la prise en charge de certains frais ainsi que l'exonération du ticket modérateur.
Ce médecin évoquait une affection de longue durée et décrivait des « troubles graves de la personnalité outre une affection oculaire grave avec glaucome ».
Il décrivait les symptômes ainsi : « se perd, s'imagine, oublie. Aussitôt après avoir vu l'oculiste, effrayé par le glaucome, n'avait pas encore mis les gouttes dans les yeux. A l'air de commencer une démence mais il est difficile de l'obliger â faire quelque chose. A toujours commandé. » Il préconisait un examen complémentaire chez le neurologue.
C'est dans ce contexte que, par courrier adressé le 29 mars 1995, le docteur Michel B..., spécialiste du système nerveux au sein du Centre médical du Languedoc de Villefranche de Rouergue, écrivait au médecin traitant d'Edouard X... que « le problème d'Edouard X... est différent de celui de son épouse et pose des problèmes mnésiques plus importants (avec) des périodes de confusion entre le présent et le passé ».
L'électroencéphalogramme montrait, selon ce spécialiste, une « atrophie cortico-sous-corticale » dont le degré d'évolution devait être mesuré précisément au moyen d'un scanner, Le docteur B... mentionnait « un état involutif » et concluait à la nécessité, « un jour ou l'autre, de mettre Monsieur X... sous tutelle s'il pose des problèmes sur le plan financier ».
Il préconisait une thérapeutique lourde à base de Cervoxan injectable en cure en alternance avec une gélule matin et soir.
Ce courrier révèle sans contestation possible l'existence en mars 1995 d'une atrophie cortico-sous-corticale involutive chez Edouard X..., âgé à l'époque de 83 ans, qui se manifestait par des troubles mnésiques importants et des désorientations spatio-temporelles signalés médicalement depuis octobre 1994.
C'est l'évolution de cet état de santé et l'aggravation de son état confus qui a conduit Edouard X... à être hospitalisé courant 1997 avec une admission en moyen séjour en décembre 1997 puis un placement définitif en maison de retraite.
C'est à l'occasion de ce placement en maison de retraite que la demande de protection sera adressée au juge des tutelles.
Edouard X... a consenti les ventes litigieuses aux époux Y... en mars 1996, à une époque où il souffrait de troubles mnésiques très importants et d'états confus diagnostiqués depuis plus d'un an par un neurologue qui, en mars 1995, préconisait déjà une mise sous tutelle « un jour ou l'autre s'il pose des problèmes financiers ».
Dans ces conditions, l'unique attestation contraire rédigée à une date illisible par Paul-Hippolyte C... ne peut valablement contredire les éléments de détérioration mentale objectivés par le médecin traitant généraliste et confirmés par le médecin spécialiste du système nerveux.
C'est dans ce contexte neurologique très dégradé que les époux Y... ont acquis la nue-propriété de l'entier patrimoine d'Edouard X... étant rappelé qu'André Y... travaillait à la Caisse d'Epargne de Montbazens où Edouard X... détenait divers comptes de longue date et qu'il établissait les déclarations d'impôts du couple.
La cour dispose des éléments médicaux suffisants pour dire qu'au jour des trois ventes le 25 mars 1996, Edouard X... était atteint depuis plus d'un an d'une affection neurologique involutive se manifestant par des troubles mnésiques importants associés à un état confus. Cet état, caractéristique d'une insanité d'esprit, l'a privé du discernement nécessaire pour apprécier la portée et les conséquences de ses actes.
Un an après les ventes Edouard X... était hospitalisé en raison de l'aggravation soudaine de son affection neurologique (épisodes délirants) et cette hospitalisation devait conduire à son admission en moyen séjour dès la fin de l'année 1997 puis à son placement définitif en maison de retraite et sa mise sous tutelle.
Louise Marguerite X..., décédée en 2003, était décrite comme effacée, dépressive et sous le joug de son époux autoritaire lequel a « toujours commandé » selon le médecin traitant. Son état de santé a conduit à une demande de mise sous tutelle introduite quelques mois après les ventes litigieuses.
Au jour des actes du 25 mars 1996, Edouard X... était insane d'esprit et les ventes signées par lui et portant sur des biens propres ou communs doivent par conséquent être annulées et les parties remises dans l'état où elles se trouvaient avant les ventes.
Le jugement sera complété sur ce point.
2) Sur la responsabilité civile délictuelle :
Les époux Y... concluent à l'infirmation du jugement en ce qu'il a retenu leur responsabilité délictuelle et les a condamnés à payer à la Fondation la somme de 115. 587 € à titre de dommages-intérêts.
Subsidiairement, ils demandent à la cour, au cas où celle-ci entrerait en voie de condamnation, de procéder par compensation entre le prix de vente et les dommages-intérêts afin de ne les condamner au versement d'aucune somme d'argent.
La Fondation, formant appel incident, réclame leur condamnation à lui payer la somme de 202. 757, 20 € (1. 330. 000 francs) à titre de dommages-intérêts.
Les trois actes de ventes litigieux ont été consentis aux époux Y... pour un prix total de 372. 300 francs alors que, selon les estimations les plus basses et non utilement contestées de l'expert amiable Jean-François D... en date du 13 avril 1999, la valeur cumulée de la nuepropriété de ces trois immeubles ne pouvait être inférieure à 1. 064. 000 francs en retenant une valeur de la nue-propriété à 80 % du prix de vente (compte tenu de l'âge du vendeur et de son épouse qui s'étaient réservé l'usufruit).
Ce prix de vente n'a fait que transiter rapidement par le compte bancaire des époux X... puisque la somme de 372. 300 francs, encaissée le l'avril 1996, a été retirée intégralement en espèces au guichet du Crédit Agricole le 3 avril 1996 sans qu'il soit possible cependant de déterminer le destinataire de ces fonds.
La Fondation n'est donc fondée à soutenir que les époux Y... auraient récupéré le prix de vente.
André Y... connaissait Edouard X... de longue date au jour des ventes du 25 mars 1996 puisqu'il gérait ses comptes de la Caisse d'Epargne où il travaillait et remplissait les déclarations d'impôts du couple.
Par ces contacts réguliers, André Y... n'a pu manquer de s'apercevoir dès 1994 que l'état de santé mentale d'Edouard X... accusait des défaillances qui allaient en s'aggravant puisque le médecin traitant repérait lui-même, dès octobre 1994, des troubles mnésiques importants et des états confus (" se perd, s'imagine, oublie ") qui allaient conduire à son hospitalisation courant 1997, à son placement définitif en maison de retraite et à sa mise sous tutelle en 1998.
C'est donc en toute connaissance de cette détérioration de l'état de santé mentale d'Edouard X... qu'André Y... a acquis la nuepropriété de l'entier patrimoine de son client de la Caisse d'Epargne et de son épouse à un prix trois fois inférieur au prix du marché.
En agissant ainsi, André Y... et son épouse ont commis une faute.
Cette faute a entraîné un préjudice pour la Fondation, non pas en la privant définitivement de son legs qu'elle vient de récupérer par la présente procédure, mais en l'empêchant de jouir du legs pendant plusieurs années, ce qui a entraîné la détérioration des immeubles non entretenus et en l'obligeant à diligenter une action en justice longue et coûteuse pour voir annuler les ventes en raison d'un trouble mental d'Edouard X... connu des époux Y... et qui auraient dû conduire ces derniers à s'abstenir de contracter dans ces conditions.
Les époux Y... seront condamnés in solidum à lui payer la somme de 50, 000 € à titre de dommages-intérêts compte tenu du montant du legs et de la durée de la procédure pendant laquelle la fondation en a été privée et le jugement sera infirmé sur le quantum de la réparation.
La compensation sera ordonnée à due concurrence entre le montant des dommages-intérêts dus par les époux Y... et le montant des restitutions dues par la Fondation » ;
Alors que l'existence du préjudice découlant de la privation de jouissance de biens légués et de leur détérioration faute d'entretien pendant plusieurs années est conditionnée à la reconnaissance des droits du légataire sur ces biens ; que l'annulation à intervenir sur le premier moyen de cassation concernant le défaut de qualité à agir de la FONDATION pour demander la nullité des ventes litigieuses et concernant donc l'existence même du legs revendiqué, entraînera, dès lors, par voie de conséquence et en application de l'article 624 du Code de procédure civile, la cassation de l'arrêt du chef de la condamnation des époux Y... à payer à la FONDATION des dommages et intérêts pour privation de jouissance et défaut d'entretien des biens litigieux.